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L’immunité adaptative et la SEP

GÉNÉRALITÉS SUR LA SCLÉROSE EN PLAQUES

5.1. Le dysfonctionnement de l’immunité cellulaire et humorale

5.1.3. L’immunité adaptative et la SEP

La réponse immune adaptative est spécifique et douée de mémoire. Elle fait intervenir les LB, responsables de la production d’anticorps et dont la différenciation se fait dans la moelle osseuse (MO) et les LT produits dans le thymus et capables de reconnaître spécifiquement un antigène donné (67).

5.1.3.1.

Les lymphocytes T

Parmi les premières constatations qui indiquent que le système immunitaire d’un individu pourrait inciter l’apparition de la SEP on trouve les modèles animaux EAE. En effet, l’EAE est induite soit en injectant des peptides myéliniques, soit en transférant des LT réactifs contre ces protéines de la myéline. L’implication des LT dans la pathogenèse de la SEP a été confirmée lors de la découverte de leur présence au sein des lésions de SEP, avec une répartition oligoclonale évoquant une sélection antigène-dépendante. C’est ainsi que certaines études ont montré une augmentation de la fréquence des LT autoréactifs contre des antigènes dérivés de la myéline dans le sang des patients par rapport à celui des témoins sains, mais d’autres n’ont pas mis en évidence de différence (68) (69) (70).

- Lymphocytes T CD4+

Depuis plus de 50 ans, le LT CD4+ est considéré comme la cellule autoréactive, c’est-à-dire la cellule qui attaque le SNC. Grâce à des études menées sur le modèle animal EAE, on a pu montrer que les LT CD4+ pouvaient contrôler le développement de la SEP. Les arguments sont multiples, à la fois les données venant de l’étude anatomopathologique des plaques chez des patients atteints de SEP, mais aussi l’analyse du LCR qui montre que des cellules sont à plus de 90% de LT activés récemment. Il est possible de transférer l’EAE d’une souris atteinte, à une souris saine, juste en injectant à la souris saine les LT CD4.

Les LT CD4+ naïfs se différencient en différentes sous-populations helper sous l’action de cytokines et de facteurs de transcription particuliers. Ils sécrètent ensuite des cytokines effectrices propres à chaque sous-population. Dans la SEP, les LT CD4+ Th1 et Th17 sont les acteurs les plus décrits (68) (71) (Figure 11).

Figure 11: La différenciation des lymphocytes CD4+ naïfs en lymphocytes T helper (68) - Lymphocytes Th1

Une sous population particulière de LT CD4+, les Th1, a été la première impliquée dans la physiopathologie de la maladie. La réponse Th1 est initiée grâce à la sécrétion d’IL-12 qui agit à la fois sur les cellules NK et sur les LT CD4+. Les cellules NK activées vont ainsi produire l’IFNγ ce qui va engendrer, avec l’IL-12, la différentiation des lymphocytes CD4+ vers la voie Th1 et permettre la transcription des facteurs de transcription T-bet et Stat 4. Ces cellules de type Th1 activées, vont alors sécréter d’importante quantité d’interféron gamma (IFNγ), d’IL-2 et TNFα, cytokines pro- inflammatoires. Les LTh1 sont mobilisés préférentiellement pour éliminer les agents pathogènes intracellulaires.

Dans l’EAE, l’immunisation par des épitopes de la myéline montre la présence d’IFN γ dans les lésions, témoignant ainsi l’implication des LT CD4+ Th1. D’autre part, une augmentation de l’activité de la maladie corrélée à une augmentation d’IFNγ et d’IL-12 dans le LCR des patients SEP fut démontrée. Il a également été montré que l’administration d’IFNγ exacerbe la maladie.

Mais des études menées sur les cytokines IFNγ et IL-12 ont montré que les LTh1 n’étaient pas la seule population de LT CD4 impliquée dans la SEP puisque l’on a constaté que des souris déficientes en IFNγ ou en IL-12 n’étaient pas protégées contre l’induction de l’EAE. En revanche, celles déficientes en sous unité p40, qui appartient à la fois à l’IL-12 et l’IL-23, étaient résistantes au développement de l’EAE. Ceci prouve donc l’implication d’une autre sous-population de LT CD4, les LTh 17(68) (72) (73) (74).

- Lymphocytes Th17

La présence d’IL-6 produite par les cellules de l’immunité innée, associée au TGFβ, permet l’orientation vers la voie Th17. Les LTh17 produisent ainsi l’IL-17, 21 et 22. Lors d’une étude sur l’EAE, il a été constaté que les souris déficientes en IL-17 étaient résistantes à l’induction de l’EAE. De plus, une augmentation du nombre de LT produisant l’IL-17 a été observée au niveau des lésions actives par rapport aux lésions inactives, lors de l’étude de tissus de cerveaux de patients SEP décédés, montrant ainsi le rôle de l’IL-17 dans le processus inflammatoire de la maladie. Une équipe a également démontré une expression des récepteurs à l’IL-17 et l’IL-22 sur les cellules endothéliales de la BHE et ont montré que l’IL-17 et 22 étaient capables de déstabiliser les 56 jonctions serrées entre les cellules endothéliales de la BHE, in vitro et in vivo. Les Th17 jouent donc un rôle important dans la maladie (73) (75) (76).

- Lymphocytes T CD8+

Chez les patients atteints de la SEP, on retrouve les LT CD8+ au sein des lésions chroniques en plus grande partie par rapport aux LT CD4+ qui prédominent dans les lésions aigües. De part leur effet cytotoxique, les LT CD8+ peuvent induire directement des lésions au sein du SNC, notamment des lésions axonales. Afin d’exercer leur effet cytolytique, les LT CD8+ doivent reconnaître les peptides antigéniques associés au CMH de classe I, qui sont présentés à la surface des CPA.

Au tout début de la maladie, le LCR est enrichi en cellules hautement différenciées qui sont CD8+ et non CD4+, suggérant un rôle dans le développement de la maladie.

En période d’inflammation, les cellules du SNC (astrocytes, oligodendrocytes) expriment le CMH-I, ce qui en fait des cibles potentielles pour la lyse par les LT CD8+. Les LT CD8+ s’activent donc par l’interaction entre le TCR et le complexe CMH de classe I / antigène porté par la CPA (68) (77) (78) (79) (80).

- Lymphocytes T régulateurs

Les lymphocytes T régulateurs (LTreg) sont des cellules suppressives, pouvant jouer un rôle dans le développement ou non de la maladie. Ces LT CD4+, formés dans le thymus (nTreg), sont caractérisés par l’expression du marqueur extracellulaire CD25 et du facteur de transcription FoxP3. Dans le modèle animal EAE, des études ont montré que ces cellules pouvaient contrôler le développement de l’EAE. Il a également été montré que l’action suppressive des LTreg était en partie médiée par l’IL-10, cytokine anti-inflammatoire. Des chercheurs ont remarqué qu’un défaut fonctionnel de cette fonction régulatrice des LTreg était présent chez des patients atteints de SEP (71) (81) (82).

- MCAM : Molécule d’adhésion impliquée dans la pénétration des lymphocytes dans le SNC au cours de la SEP

La MCAM (Melanoma Cell Adhesion Molecules) également nommée CD146, est une molécule d’adhésion récemment découverte qui est exprimée à la fois par les cellules endothéliales et par les LT. Cette molécule joue un rôle crucial dans le déréglement du système immunitaire observé lors des phases de poussées au cours d’une SEP. En effet, une activité importante des MCAM semble être associée à une augmentation des taux d’IL-17, d’IFNγ, de macrophages et d’autres molécules impliquées dans les processus inflammatoires nerveux. Or, une équipe du Centre hospitalier de l'Universite de Montréal a réussi à réaliser un blocage de MCAM (in vitro pour l’Homme et in vivo chez la souris) entraînant ainsi un retardement de l’apparition de la pathologie et un ralentissement de la progression de cette dernière. Grâce à ces recherches, une nouvelle thérapie prometteuse vise la MCAM comme le prochain traitement de la maladie (83).

5.1.3.2.

Les lymphocytes B

Les cellules B sont formées dans la MO. En quittant la MO, celles-ci étant matures naïves se dirigent vers les organes lymphoïdes secondaires pour y subir les dernières étapes de maturation. Elles y rencontrent l’antigène (ex. MBP, MOG) présenté par le LT, qui entraînera l’hypermutation somatique (mutations des régions variables du récepteur des cellules B : BcR) et la commutation de classe (changement d’isotype). Le but de ce processus est de permettre une sélection des LB qui auront une meilleure affinité pour l’antigène, afin d’obtenir des anticorps plus efficaces et des cellules mémoires plus spécifiques si une deuxième infection se révélait. Après activation par l’antigène, les cellules B peuvent soit se différencier en plasmocytes sécrétant des anticorps, soit se différencier en cellules B mémoires. Les cellules B mémoires ont la faculté de répondre très rapidement à des pathogènes. En effet, elles peuvent présenter rapidement et efficacement l’antigène aux LT lors d’une réponse secondaire et se différencier en plasmocytes. Les LB activent ainsi les LT auto-réactifs qui pénètrent ensuite dans le SNC. On retrouve des infiltrats périvasculaires de LT (CD4+ et CD8+) et LB dans le SNC ainsi que des structures « lymphoïde-like » au niveau des méninges. Dans le LCR, on observe une augmentation des LB et plasmocytes, synthétisant localement des IgG avec une distribution oligoclonale.

Ainsi, la présence des LB dans les lésions aigües et chroniques actives ainsi que dans les follicules lymphoïdes, rend compte de la composante immunitaire humorale existant dans tous les stades de la maladie, expliquant ainsi l’intérêt des anticorps anti-CD20, comme le rituximab et l’ocrelizumab, dans le traitement de la SEP (84) (85) (86).

Figure 12: L’implication des lymphocytes B dans la SEP (84)

La figure 12 résume les connaissances actuelles du développement, de la migration et du rôle des LB dans la SEP.

5.1.4. La traversée de la barrière hémato-encéphalique et mécanismes