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Substrat du NTU

IV. L’excision de la méthionine N-terminale chez les mammifères, cycle cellulaire et glutathion

1. L’homéostasie rédox et le cycle cellulaire

Les données obtenues questionnent directement sur les voies reliant glutathion, cycle cellulaire et NME. La division cellulaire a besoin d’un assemblage de cyclines et de kinases dépendantes de cyclines (CdK) pour permettre au cycle cellulaire de progresser à travers les phases S et M. Parmi les régulateurs du cycle cellulaire, il y a les inhibiteurs des CdKs ou CdKis. La protéine p21 est un CdKi qui est surexprimé lorsque les cellules sont endommagées évitant une prolifération cellulaire anormale [341, 342]. En plus de son rôle de contrôle du cycle cellulaire, p21 participe également à la réparation de l’ADN ainsi que dans les processus apoptotiques [343]. Par conséquent, p21 est un régulateur cellulaire central. Dans la cellule, p21 est contrôlé par p53 qui est un produit de gène suppresseur de tumeurs. Il s’agit donc aussi d’un régulateur important (pour revues voir [164, 344]). Parmi les fonctions de p53, celle d’activateur transcriptionnel de p21 permet à ce dernier de bloquer la prolifération cellulaire. Néanmoins, p21 est capable d’être activé de façon indépendante de p53 [345]. En outre, l’importance du glutathion nucléaire et de son statut oxydoréductif a été démontrée

dans le contrôle de la prolifération cellulaire de lignées de mammifères et qu’un environnement réduit dans le noyau est nécessaire à la progression du cycle cellulaire [346].

Aujourd’hui, de plus en plus d’études rapportent que le cycle cellulaire et l’apoptose dans les cas extrêmes peuvent être régulés par l’état redox cellulaire. En effet, des études ont indiqué que p21 peut jouer un rôle important dans l’arrêt de la croissance des cellules en conditions hyperoxiques ou traitées avec du péroxyde d’hydrogène notamment à travers l’accumulation de p21 [347, 348, 349, 350, 351]. De manière intéressante, il a été précédemment suggéré que le blocage en G0/G1 chez les cellules endothéliales lors de l’inhibition de l’activité METAP2 peut faire intervenir la voie p53-p21. En effet, une accumulation de p21 et dans une moindre mesure de p53 a été constatée [162, 163]. La séquence N-terminale de p21 est prédite (TermiNator

http://www.isv.cnrs-gif.fr/terminator3/index.html) pour subir la NME ainsi que l’acétylation de la sérine en

position P1’. Par conséquent, il s’agit d’un substrat des METAPs. Ainsi, il est possible que si la NME est diminuée, la methionine ne soit pas excisée. Néanmoins, l’inhibition de la METAP2 ne suffit probablement pas à inhiber le clivage de cette méthionine initiatrice puisque la METAP1 est toujours fonctionnelle et une sérine en position P1’ permet le clivage par les deux types de METAPs [275, 325]. La protéine p53 possède en position P1’ un résidu Glu l’excluant catégoriquement des substrats de la NME. Par conséquent, ces deux protéines ne sont pas directement régulées par l’action de la NME ce qui suggère la présence d’un ou plusieurs effecteurs en amont de ces protéines dans la cascade d’évènements engendrée lors de l’inhibition de la NME cytoplasmique.

L’oxydation de p53 in vitro altère sa conformation et inhibe sa liaison à l’ADN [352]. Néanmoins, la forme oxydée de p53 peut être réduite par le facteur redox (Ref-1) qui réduit également les formes oxydées de la protéine activatrice 1 (AP-1) [353]. La surexpression de Ref-1 augmente l’activité de p53 sur le promoteur de p21 tandis que des ARN antisens de Ref-1 inhibent l’activité de p53 [354]. L’activité de Ref-1 sur la voie p53-p21 peut être augmentée par une thiorédoxine, enzyme qui réduit les dithiols pour laquelle l’expression augmente en condition oxydante [355] [356]. Cependant, il existe aussi des voies d’activation de p21 indépendantes de p53 en cas d’oxydation irréversible de cette dernière. Ces voies indépendantes de p53, passent notamment par TGF-β (transforming growth factor β) et qui est lui-même régulé par des oxydants. L’oxydation est un des mécanismes d’activation de TGF-β permettant l’induction de la transcription de p21 [357, 358]. Ainsi, une perturbation de

l’homéostasie redox cellulaire peut induire l’expression de p21 de manière indépendante de p53 à travers TGF-β [347]. L’ensemble de ces données montre que l’homéostasie redox cellulaire contrôle le cycle cellulaire à travers le niveau d’expression de p21 et par différentes voies.

Comme l’hyperoxie, l’eau oxygénée stimule également p21 de manière dépendante ou non de p53. Des cellules déficientes en p53 sont toujours capables de réguler p21 à travers l’homéostasie rédox [359]. Les protéines ERKs (kinases impliquées dans les voies de signalisations de la prolifération cellulaire [360]) sont des effecteurs de cette régulation. ERK stimule l’expression de p21 lors d’une altération du statut du glutathion en étant elle-même activée par une phosphorylation [345] [361]. Ainsi, de nombreux de signaux de transductions activés par une perturbation de l’homéostasie rédox convergent à une augmentation du niveau de p21 et conséquemment au blocage du cycle cellulaire en G0/G1.

Les données obtenues durant ma thèse indiquent que l’ajout de N-acétyl-cystéine sur les HUVECs dont l’activité des METAP2s est abolie permet de diminuer le nombre de cellules bloquées en phase G1/G0. Ce précurseur de la cystéine est converti en glutathion réduit à travers la cystéine et la γ-glutamylcystéine. Il en résulte que le pool de glutathion cellulaire est impliqué dans la cascade mécanistique reliant l’inhibition de l’activité METAP2 au blocage du cycle cellulaire. Compte tenu que p21 et p53 sont impliquées dans cette voie et que de multiples études indiquent que l’accumulation de p21 est fortement dépendante de l’homéostasie rédox cellulaire, il est probable que la perturbation de l’homéostasie du glutathion cellulaire agisse directement en amont de p53 et p21. Ainsi, j’ai pu identifier une nouvelle étape dans la cascade d’évènements déclenchée par l’inhibition de la NME cytoplasmique située entre le maintien de la méthionine N-terminale et p21/p53. La voie p21/p53 peut constituer le senseur du statut du glutathion cellulaire et induire la réponse antiproliférative (Fig. 55).

En 2010, il a été montré que l’addition de guanine et de nucléosides contenant une guanine reverse complètement l’effet cytostatique de l’inhibition de la METAP dans deux lignées cellulaires endothéliales. Cette complémentation reverse également l’induction de l’accumulation de p21. Il semble que cette complémentation se réalise à travers la voie de récupération/biosynthèse de nucléotides car son inhibition empêche la complémentation. Néanmoins, les auteurs rapportent que cette complémentation implique l’augmentation de la quantité de guanosine triphosphate cellulaire au dessus de son niveau physiologique plutôt

qu’une restauration de sa quantité sauvage [362]. Cette découverte récente souligne que différents facteurs interviennent au niveau du CdKi p21 puisqu’il s’agit d’un régulateur central cellulaire.

La connexion entre NME, glutathion et cycle cellulaire a donc été réalisée (Fig. 55). La diminution de la NME cytoplasmique à travers l’abolition de l’activité METAP2 induit une perturbation de l’homéostasie redox cellulaire suggérant un effet général de la diminution de la NME plutôt qu’un effet sur une cible spécifique. Néanmoins, à l’heure actuelle je n’ai pas investigué la dégradation des protéines dans ces échantillons, et il m’est donc impossible d’affirmer que l’augmentation et la perturbation du pool de glutathion cellulaire a pour origine une augmentation de la protéolyse cellulaire.