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Magseph Assetat

3. Les premiers temps de sa carrière d’orientaliste : le Portugal et les jésuites aux XVIe et XVIIe siècle (1886-1900)

3.1 l’Historia de Minas

3. Les premiers temps de sa carrière d’orientaliste : le

Portugal et les jésuites aux XVIe et XVIIe siècle (1886-1900)

Il s’agit pour F. M. Esteves Pereira du moment d’une intense activité de recherches de documentation auprès des archives, de traductions, d’éditions et également de rééditions de textes, entre autres portugais. Elles furent essentiellement articulées autour d’une période historique relativement circonscrite, celle où la couronne portugaise se lia avec le royaume chrétien éthiopien dans la première moitié du XVIe siècle et dans ce sillage l’arrivée des missionnaires jésuites (au milieu du XVIe siècle) jusqu’à leur expulsion à partir de 1633.

Il a déjà été question du « premier » travail auquel se livra F. M. Esteves Pereira, « la notice sur le Magseph Assetat » qui fut pour lui, et, à mon avis, son « galop d’essai » afin de pouvoir être reconnu par ses pairs. Les années qui suivirent de 1887 à 1900 (c’est l’année d’édition qui est retenue mais qui ne correspond pas au temps de travail en amont) furent la période d’une activité débordante. Elle fut liée au contexte du 400ème anniversaire des découvertes portugaises en Orient, une occasion de manne financière pour des publications ce dont profita Esteves Pereira.

3.1 l’Historia de Minas

À propos de cette Historia de Minas dont il a été souligné la collaboration avec R. Basset, F. M. Esteves Pereira se livra à un exercice d’édition et de traduction doublement intéressant du point de vue de l’inédit. D’une part, il publiait le texte guèze et traduisait en portugais le troisième chapitre d’introduction à l’histoire du roi Sarsa Dengel (1563-1597), et, d’autre part, il publiait la version abrégée

portugaise de l’histoire de Minas faite par Manuel de Almeida dans son manuscrit (écrit entre 1626 et 1646), un événement qui passait pratiquement inaperçu.

Alors deux éléments sont à souligner : tout d’abord, l’intérêt manifeste de F. M. Esteves Pereira pour l’éthiopien classique mais on remarque aussi son choix des objets textuels à partir du moment où cela pouvait avoir un lien historique avec le Portugal et les jésuites (peut-être faudrait-il ajouter « portugais » dans son esprit). Ensuite, alors que R. Basset dans son introduction de Études sur l’histoire d’Éthiopie, publiée en 1881 indiquait « C’est à l’un de ses missionnaires, le P. Manoel d’Almeyda, qu’on doit la première histoire complète de l’Éthiopie, d’après les annales indigènes. Cet ouvrage, aujourd’hui perdu et qui ne fut jamais imprimé, ne nous est connu que par l’abrégé qu’en fit le P. Tellez »137. Quelques années plus tard, soit en 1886, quand F. M. Esteves Pereira édita sa « notice sur le Magseph Assetat » se contentait de signaler et de répéter : « Le P. Manuel d’Almeida et après lui le P. Balthasar Telles… »138. Ce qui semblerait signifier que ce fut entre 1886 et 1887 qu’il fit la « découverte » du manuscrit de M. de Almeida abrité par le British Museum. Son introduction de l’Historia de Minas, le mentionnait ainsi : « Cette œuvre [Historia de

Ethiopia a alta], qui encore n’a pas été publiée, et qui avait été jugée perdue, existe

manuscrite au British Museum »139. Deux références étaient citées à la suite, le

Catalogo dos manuscritos portuguezes existentes no Museu Britannico, de F. F. de la

Figanière, de 1853140 et la « Notice sur le père Pedro Paez, suivie d’extraits du manuscrit d’Almeida intitulé Historia de Ethiopia a alta » de M. W. Desborough Cooley, de 1872141. Ces deux citations (moyennement anciennes et accessibles) viennent confirmer que ce fut lors du travail que mena F. M. Esteves Pereira sur

137 Basset, R., « Études sur l’histoire d’Éthiopie », 3-1881, p. 316. 138 Pereira, F. M. E., « Notice sur le Magseph Assetat du P. A. Fernandes », 1886, p. 6, note 2. 139 Pereira, F. M. E. (éd.), « Zena Minas. Historia de Minas, Ademas Sagad, rei de Ethiopia », 1888, p. 7. 140 Figanière, F., F., de la, Catalogo dos manuscritos portuguezes existentes no Museu Britannico, 1853, p. 266, Ms addic. n° 9861. 141 Desborough Cooley, M. W., « Notice sur le Père Pedro Paez, suivie d’extraits du manuscrit d’Almeida intitulé Historia de Ethiopia a alta », janv-juin 1872, pp. 532-553.

l’Historia de Minas, qu’il découvrit lui-même l’existence du manuscrit de M. de Almeida, et confirment également que le travail précédent fut aussi « un galop d’essai ». Cette édition complète d’un texte, sa traduction le conduisit à élargir davantage son champ d’investigation, à nourrir ses travaux avec une plus grande érudition et expérience.

Ce fut avec peu de conviction et avec une certaine lucidité qu’il proposait d’éditer à la suite du texte guèze et de la traduction portugaise de l’Historia de Minas, le résumé de cette histoire par M. de Almeida dans son Historia de Ethiopia a alta, (livre IV au chapitre 10) en ces termes : « Vida e morte do Emperador Adamas Sagued [Minas], assim como a conta o seu livro, ou chronica ethiopica. En comparant cette recension avec le texte que nous publions, on ne peut renoncer de reconnaître, que la traduction de l’Historia de Minas [de Almeida], a supprimé tout ce qui était étranger à l’histoire proprement dite ; un processus employé fréquemment par les écrivains portugais des XVIe et XVIIe siècles, quand ils faisaient des extraits des œuvres des écrivains orientaux. Bien que ce soit un résumé, la recension du père Almeida est d’une certaine valeur, parce qu’il prouve de quelque manière, que l’histoire originelle ne souffre pas des altérations essentielles dans les faits qu’elle rapporte. Pour cela nous la publions ci-après »142. À partir de cette date et de cette mise au jour du manuscrit de M. de Almeida, des extraits de l’Historia de Ethiopia a alta, furent édités les années suivantes, comme les « Victorias de Amda Sion rei de Ethiopia » (traduction abrégée par Manuel de Almeida avec une version française de Jules Perruchon) présentées par F. M. Esteves Pereira, en 1891143. En 1893, J. 142 Pereira, F. M. E. (éd.), « Zena Minas. Historia de Minas, Ademas Sagad, rei de Ethiopia », 1888, p. 7. Ce qu’ignorait F. M. Esteves Pereira au moment de cette édition c’est que M. de Almeida s’était appuyé et avait repris intégralement la traduction portugaise de Pedro Paez proposée dans son Historia de Ethiopia, et pour cause, le manuscrit Goa 42 des Archives romaines de la Compagnie de Jésus fut publié en 1905-06 par C. Beccari, mais « découvert » quelques années auparavant (voir chapitre 2). 143 Pereira, F. M. E., (éd.), « Victorias de Amda Sion rei de Ethiopia » (traducção abreviada pelo Manuel de Almeida com uma versão franceza por Jules Perruchon) ; memoria apresentada por F.M. Esteves Pereira, Boletim da Sociedade de geographia de Lisboa, n. 10 e 11, 9ª serie, 1891, 40 p.

Perruchon faisait paraître Les Chroniques de Zar’a Yaeqob et de Ba’eda Maryam. Rois

d’Éthiopie de 1434 à 1478144. En appendice, il faisait figurer l’extrait du manuscrit de

Almeida à propos du roi Zara Yaeqob (1434-1468) dans sa version portugaise et avec une traduction française. F. M. Esteves Pereira était remercié pour avoir vérifié et rectifié le texte portugais145.

Le manuscrit de M. de Almeida monta en puissance et devint celui qui commença à « supplanter » le texte de B. Teles dans les citations des savants. Cependant, l’histoire du manuscrit que F. M. Esteves Pereira a encore besoin d’être élucidé. Ce que je propose aussi à présent outre le fait de suivre et de rendre compte des travaux de l’érudit portugais, c’est de tenter de saisir pour les années qui suivent le manuscrit de Almeida sur lequel Esteves Pereira s’appuya. C’est à un jeu de pistes dans les notes à laquelle je tente de me livrer.

3. 2. Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia (1607-1632)

Il s’agit de l’œuvre majeure de F. M. Esteves Pereira qui lui demanda un travail sur le long terme et se fit en deux temps. En 1892, il éditait le manuscrit unique, aujourd’hui connu, de l’histoire du roi éthiopien Susneyos (1607-1632) à partir des 75 premiers folios du manuscrit Oxford 30146. En tant qu’excellent philologue en guèze et en amharique, F. M. Esteves Pereira notait qu’à partir du chapitre 79 les « amharismes » devenaient plus nombreux147. Il livra ce travail pour la 10ème session

144 Jules Perruchon (trad.), Les Chroniques de Zar’a Yaeqob et de Ba’eda Maryam. Rois d’Éthiopie de 1434 à 1478, 1893. 145 Jules Perruchon (trad.), Les Chroniques de Zar’a Yaeqob et de Ba’eda Maryam. Rois d’Éthiopie de 1434 à 1478, Appendice, « Do Emperador Zara Jacob », suivie de la traduction « De l’empereur Zara Jacob », 1893, pp. 199-201 ; 202-05. 146 Dillmann, A., Catalogus codicum..., 1848, pp. 80-81. 147 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXV.

du Congrès international des orientalistes qui représentait une « pièce » essentielle dans cette constitution des savoirs annoncée par R. Basset148.

La « découverte » faite quelques années auparavant du texte manuscrit de l’Historia de Ethiopia a alta de Manuel de Almeida était de nouveau mise en avant et la côte (Mss. Add. 9861) du British Museum citée149. Un commentaire de F. M. Esteves Pereira particulièrement intéressant pointait d’une part, la contemporanéité de la Chronica de Susenyos et de l’Historia de Ethiopia e alta, et, d’autre part, les différences de points de vue de cette manière : « Ce que le père Manuel de Almeida avait principalement en vue, était de décrire les travaux de cette mission, les principaux événements civils et politiques de la nation sont aussi racontés avec un certain développement. Pour cela pour la période couverte depuis le début du XVIe siècle jusqu’à la moitié du XVIIe siècle, cette œuvre est sans doute un document historique précieux ; et ce qui augmente encore plus sa valeur est que leurs notices jusqu’à la fin du XVIe siècle sont quasiment tirées des chroniques éthiopiennes, desquelles nous laissèrent une traduction de quelques extraits et d’abréviations. La Chronica de Susenyos qui fut écrite en même temps que l’Historia

de Ethiopia e alta, est aussi citée dans cette dernière quelques fois. Mais d’autres fois,

les deux narrations sont verbalement identiques sans toutefois la citer ; ce qui montre bien que le père Manuel de Almeida eut connaissance de la Chronica de

Susenyos »150. Il y a quelque chose d’indéfini dans le commentaire de Esteves Pereira

qui ne fait que supposer certaines choses. Alors que, s’il eut de par devers lui le manuscrit de M. de Almeida (Ms. Add. 9861 du British Museum) il eut été difficile de ne pas avoir lu ce qu’écrivait l’auteur Almeida : « Dans ce livre VI, il y aura deux parties : dans la première je montrerai ce qu’était l’Éthiopie, celle que les pères de notre Compagnie trouvèrent, pour que se voit les nombreuses épines de l’erreur et 148 46 pages d’introduction et 335 pages de texte éthiopien. Un premier compte rendu paraissait dans le Journal Asiatique, mars-avril 1893, pp. 352-56 par E. Drouin. 149 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXXI, n°1, « manuscrit qui fut offert par William Marsden en 1835 ». 150 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXXI.

les hérésies qu’ils avaient « débroussaillé ». Dans la deuxième je placerai l’histoire de la chronique de l’empereur Seltan Çagued [Susneyos], comme le chroniqueur l’écrivit, l’insigne martyr Azage Tino jusqu’à l’année 1619 […]. Et placer ici cette chronique, parce qu’elle sert de base est une esquisse à ce que nous dirons ; car son écrivain, comme cela est la coutume de sa terre, écrivit seulement sur les guerres et ne traita jamais des contenus qu’il y eut sur les matériaux de la foi, ni comment elle fut rencontrée par les uns, et par les autres approuvée et reçue ; ce qui est la principale intention de notre histoire, laquelle est plus ecclésiastique que politique, conforme à notre profession »151.

De manière extrêmement claire, M. de Almeida connaissait l’existence de la chronique royale et même le chroniqueur et annonçait en rendre compte dans ce qu’il appelait la deuxième partie de son livre VI. Le manque de clarté de Esteves Pereira à cette date laisse envisager le fait qu’il n’avait pas le manuscrit dans son entier, mais seulement certains passages… L’autre point qu’il semble important de souligner fut son estimation de la chronique éthiopienne dans les domaines « historique, géographique et militaire » (partie VI de son introduction critique). Dans l’ensemble, « la Chronica de Susenyos est un monument historique de très grande valeur, non seulement par son extension et son développement, mais aussi par sa véracité »152 et Esteves Pereira de poursuivre : « Si on fait exception des éloges au roi Susenyos, et de quelques exagérations, qui ont pour but d’exalter l’effort et la prudence du même roi, la narration peut en général être considérée comme véridique. Et les documents portugais de la même époque ne firent rien sinon la confirmer »153. Ce jugement valeur quant à la véracité des sources endogènes n’est absolument pas surprenant pour l’époque et même fait partie intrinsèque des conceptions orientalistes à faire de l’histoire. Plus les récits locaux 151 Beccari, C., (éd.), RAESOI 6, 1907, p. 115. Je m’appuie sur le manuscrit du British Museum (Ms. Add. 9861) qui servit à C. Beccari pour l’édition intégrale de M. de Almeida (ici le fol. 214v) et que Esteves Pereira signala fréquemment. 152 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXXII. 153 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXXIII.

obtiendront des « garants » européens, plus l’histoire sera véridique… F. M. Esteves Pereira n’échappa pas à son temps. En guise de 8ème partie à cette introduction, il fournissait au lecteur une bibliographie « des principaux écrits des pères de la Compagnie, autour de la mission catholique en Éthiopie, à partir de 1600 »154, parmi laquelle figurait la référence au manuscrit (BM, Ms. Add. 9861) de l’Historia de

Ethiopia a alta de Manuel de Almeida et de nombreux autres textes édités ou inédits.

3. 3 L’apparition de références plus précises dans les écrits de F. M.

Esteves Pereira

Avant d’en venir à la traduction portugaise de la Chronica de Susenyos (publiée en 1900), il faut s’arrêter sur un point : l’apparition de références plus précises au texte de Almeida (les numéros de folio) dans les écrits de F. M. Esteves Pereira à partir de 1897. À l’occasion du Quarto Centenario do descobrimento da India, il rééditait l’Historia das cousas que o mui esforçado capitão Dom Christovão da Gama

fez nos reinos do Preste João… de Miguel de Castanhoso sous le titre Dos Feitos de D. Christovam da Gama em Ethiopia155. Il s’agit du récit à la gloire du capitaine

Christovão da Gama débarqué en 1541 avec quatre cents militaires afin de prêter main-forte au souverain éthiopien Galawdéwos (1540-1559) afin de lutter contre ses ennemis musulmans conduits par l’imam Grañ. F. M. Esteves Pereira réédita le texte avec une introduction substantielle qu’il acheva d’écrire le 28 août 1897. Deux éléments sont à souligner dans cette introduction, d’une part, la valeur historique qu’il accordait à ce texte, en raison de sa narration « contemporaine, circonstanciée et la plus authentique, des faits de D. Christovão da Gama […] est la source

154 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, 1892, p. XXXIX-XLVI. E. Drouin, en 1893, qui rédigeait un compte rendu des travaux de Esteves Pereira en soulignait la particularité de cette introduction à la Chronica de Susenyos, mars-avril 1893, p. 355.

155 Castanhoso, M., de, Historia das cousas que o mui esforçado capitão Dom Christovão da Gama 1564 ; réimprimé dans la Colecção de opúsculos relativos à história das navegações, viagens e conquistas dos Portugueses, 1, n°2, 1855 ; publié à nouveau sous le titre Dos Feitos de D. Christovam da Gama em Ethiopia, F. M. Esteves Pereira (éd.), 1898.

primordiale d’où dérivent tous les autres relations. Se trouve être un épisode extrêmement intéressant de l’histoire des conquêtes des Portugais en Orient, et une contribution de valeur pour l’histoire du royaume d’Éthiopie à une des époques les plus angoissantes et critiques de son existence »156, et, d’autre part, il s’agit de la première fois, d’après mon enquête, où F. M. Esteves Pereira fournit une référence précise : « P. Manuel de Almeida, Historia de Ethiopia a alta, tomo II, fol. 63v e 64 »157. Jusque là la mention du manuscrit conservé par le British Museum (Ms Add. 9861) avait été la règle. D’aucuns diront, où est le problème ? Camillo Beccari qui édita l’intégralité du manuscrit Ms Add. 9861, en 1907-08158 ne signala à aucun moment plusieurs tomes, où le foliotage aurait repris à chaque début de volume. Le Ms Add. 9861 contient 620 folios en un seul volume. À titre de vérification pour cette « première » référence faite par Esteves Pereira au tome II, fol. 63v et 64, elle correspond au folios 385v et 386 du Ms Add. 9861159. Sur quel manuscrit F. M. Esteves Pereira s’appuya-t-il pour donner au lecteur des références qui devinrent de plus en plus précises, comme nous aurons l’occasion de le voir ? Esteves Pereira dans l’introduction de la Vida de Takla Haymanot pelo P. Manoel de Almeida da

Companhia de Jesus apportait un premier élément de réponse, mais qui en fait

contribue à brouiller les pistes.

En mentionnant dans son texte l’Historia de Ethiopia e alta de M. de Almeida, il ajoutait une note curieuse à biens des égards : « De cette œuvre [celle de Almeida], encore inédite, existe un au British Museum, le ms. Add. 16255. D’elle fut faite une copie déposée actuellement à la Bibliothèque nationale de Lisbonne »160. La référence au Ms add. 9861 a disparu et une nouvelle totalement inconnue est placée 156 Pereira F. M. E. (éd.), Dos Feitos de D. Christovam da Gama em Ethiopia, Lisboa, 1898, p. XLVI. 157 Pereira F. M. E. (éd.), Dos Feitos de D. Christovam da Gama em Ethiopia, Lisboa, 1898, p. XXXIII. 158 Beccari, C., (éd.), RAESOI 5-7, 1907-1908. 159 Beccari, C., (éd.), RAESOI 6, 1907, p. 501. 160 Pereira, F. M. E., (éd.), « Vida de Takla Haymanot pelo P. Manoel de Almeida da Companhia de Jesus », 1899, p. 6.

dans ce document où l’on apprend qu’une copie fut faite et déposée à la Bibliothèque nationale de Lisbonne, sans donner une côte qui permettrait de la retrouver.

C. Beccari à son tour confirmait dès 1903 dans le premier volume de sa collection (sur lequel nous reviendrons amplement) « Une copie du manuscrit de Londres, faite ces dernières années, se trouve maintenant à Lisbonne à la Bibliothèque nationale, mais elle est très défectueuse et incorrecte »161. Au final, ni l’un ni l’autre ne donnèrent une référence précise à propos de la copie faite et déposée à Lisbonne.

Cette digression me permet d’en arriver à la traduction portugaise de la

Chronica de Susenyos que F. M. Esteves Pereira fit paraître en 1900162. Mais elle donne également la possibilité de voir à partir de quel matériel Esteves Pereira travailla pour cette traduction et surtout pour les notes. La traduction occupe les 259 premières pages du volume tandis que les notes occupent plus de 350 pages (de la page 263 à la page 614). Le travail sur les notes est considérable, l’érudit mobilisa l’ensemble des ressources documentaires disponibles à l’époque : dictionnaires de guèze et d’amharique, histoires des rois éthiopiens éditées, textes européens depuis le XVIe siècle, et ce qui nous intéresse ici, la copie de l’Historia de Ethiopia e alta de M. de Almeida déposée à la Bibliothèque nationale de Lisbonne. Rares sont les pages de ces notes qui ne comporte pas une référence à Almeida (voir annexe ? : Références à l’Historia de Ethiopia a alta de Manuel d’Almeida). Esteves Pereira en cite de longs passages, qui à nouveau ne correspondent absolument pas au foliotage du manuscrit Ms add. 9861. Trois points sont à souligner. Tout d’abord, la mise en exergue du texte de M. de Almeida de manière quasi systématique et de façon prioritaire sur l’Historia geral de Ethiopia e alta de B. Teles, ce qui n’empêche pas l’érudit de continuer à citer Teles et les autres, ensuite, il en vint par cet arsenal de notes où la bibliographie d’auteurs 161 Beccari, C., (éd.), RAESOI 1, 1903, p. 5. 162 Pereira, F. M. E., (éd.), Chronica de Susenyos, rei de Ethiopia, (trad. portugaise), 2, 1900, 657 p.

européens est faramineuse à réaliser la critique qu’il faisait lors de l’édition du texte guèze, en 1882 : à pallier aux « manquements » du chroniqueur qui avait passé sous silence, en particulier, l’ensemble de ce que les jésuites firent au même moment des événements relatés dans la chronique royale de Susneyos. Les références à Almeida prenaient dans ce travail toute leur importance, devenaient les garantes de la « véracité » de la chronique, une démarche érudite qui en disait beaucoup sur l’européocentrisme de la constitution des savoirs en ce début de XXe siècle.

Enfin, il y a chez F. M. Esteves Pereira une « fascination » pour son objet d’étude qu’il revisite par l’actualité du début du XXe siècle. Par exemple, dans l’introduction (assez brève) qu’il fit au volume II de la Chronica de Susenyos (traduction), en 1900, il écrivait cette déclaration engagée (pour une fois) : « En vérité, les notices que l’on trouve dans cette chronique, relatives aux Portugais résidents en Éthiopie durant le règne de Susenyos, principalement à propos du patriarche catholique et des pères de la Compagnie de Jésus sont très rares ; mais