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L’histoire du tourisme dans les Outre-mer basée sur la recherche permanente de la massification

I - ÉTAT DES LIEUX DU TOURISME DANS LES OUTRE-MER

1. L’histoire du tourisme dans les Outre-mer basée sur la recherche permanente de la massification

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES

I - ÉTAT DES LIEUX DU TOURISME

Rapport

naturels favorables au tourisme de santé. Les établissements ont disparu en Martinique12, mais quelques équipements sanitaires intéressants à La Réunion (les thermes de Cilaos) et en Guadeloupe (Saint-Claude Matouba-Papaye) pourraient être davantage valorisés dans le cadre d’une offre touristique spécifique. La délégation à l’Outre-mer du CESE suggère comme piste d’action que le tourisme de santé soit soutenu dans les Outre-mer.

Une fréquentation touristique confidentielle jusque dans les années 1950

Comme l’explique Jean-Christophe Gay, dès « la fin du XIXe siècle, les Antilles françaises voient arriver les premiers Étasuniens qui voyagent sur des courriers mixtes et qui débarquent notamment pendant la période du carnaval. La catastrophe de la montagne Pelée (1902) n’est pas étrangère au développement de l’escale martiniquaise avec la visite de Saint-Pierre, considérée comme la ‘Pompéi de la Caraïbe’ ». Au cours de la première moitié du XXe siècle, les flux de croisiéristes sont estimés entre 5 000 personnes en 1926 et 11 000 en 1937. Dès 1936, le Comité du tourisme martiniquais est créé. Dans le Pacifique, l’histoire de l’imaginaire touristique prend naissance avec les œuvres de Gauguin : son premier voyage en 1891, puis son retour en 1895, sa quête d’une « vie primitive préservée », et ses représentations des Tahitiennes sur la plage. Tahiti devient alors l’objet de l’exotisme absolu dans l’imaginaire des Européen.ne.s, des représentations picturales enracinées et entretenues, des clichés simplificateurs… Les balbutiements du tourisme s’annoncent dans les années 1920 en Océanie, en Nouvelle-Calédonie «  de 1928 à 1937, 7 000 à 8 000 croisiéristes, en majorité des Australiens, visitent Nouméa, grâce aux navires des Messageries maritimes et de l’Orient Line (Chevalier L. 200513) ». La présence sur l’île de Bora-Bora, entre 1942 et 1946, des troupes étasuniennes, qui en font leur base de ravitaillement dans le Pacifique Sud, a joué un rôle déterminant dans l’essor de cette île en tant que destination touristique. La piste d’aéroport construite par les États-Unis permet l’ouverture d’une liaison Paris-Bora-Bora dès 1958.

En 1961, le premier hôtel est ouvert au sud de l’île  : il compte 18 bungalows de luxe et accueille régulièrement des stars hollywoodiennes qui contribuent à établir l’image de la destination14.

Un développement touristique à partir des années 1950 qui s’accélère dans les années 1970

Au début des années 1950, la fréquentation touristique dans les Outre-mer est réservée à quelques élites. Le tourisme va se développer à partir de ces années sous l’action de l’État et grâce aux progrès des transports aériens. La construction de véritables infrastructures aéroportuaires rapproche ces territoires de la France hexagonale et les ouvre sur le monde.

Jusqu’aux années 1960, le tourisme ne figurait ni dans les priorités de la politique sociale de l’État, ni dans celles de la planification économique. Le IVe Plan (1962-1965) marque une rupture avec cette absence d’intérêt, le tourisme devient un axe important de la politique d’aménagement y compris dans les territoires ultramarins. L’État impulse cette politique d’aménagement avec la Mission interministérielle pour le développement du tourisme des

12 http://www.martinique.franceantilles.fr/actualite/societe/une-ville-malade-de-son-thermalisme-238629.php.

13 Jean-Christophe Gay, Les cocotiers de la France, tourisme en Outre-mer, Éditions Belin, 2009, p. 16.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES départements et territoires d’Outre-mer. L’objectif est de doter les Outre-mer d’une véritable

offre hôtelière et d’entreprendre les aménagements touristiques indispensables. Le tourisme vient à la rescousse de l’économie de plantation en difficulté, notamment dans le secteur de la canne à sucre. Les territoires des Antilles connaissent des tensions sociales, sur fond de chômage, de sous-emploi d’une jeunesse qui n’a d’autres perspectives que l’émigration.

« Le tourisme s’impose progressivement comme la meilleure voie de développement. […] C’est principalement dans le cadre du VIe Plan (1971-1975) que la Martinique et la Guadeloupe se dotent d’une infrastructure hôtelière de standard international 15».

Ces premières décennies de développement du tourisme dans les territoires ultramarins furent portées par les pouvoirs publics, sur la base d’un modèle touristique uniforme : une offre balnéaire, classique, centrée sur la plage, les cocotiers, mais dans un contexte où l’offre internationale était relativement limitée. Mais ce modèle touristique a vieilli et s’est heurté à la concurrence internationale dès la fin des années 1990. De nouvelles destinations s’imposent sur la scène internationale, telles Cuba et la République dominicaine.

Un secteur touristique en crise depuis le début des années 2000

L’expansion du secteur touristique dans les Outre-mer se poursuit pendant les années 1980 et 1990, soutenue notamment à partir de 1986 par la Loi de finances rectificative du 11 juillet 1986 (dite « loi Pons ») qui a pour intention de favoriser, via la défiscalisation, les investissements dans des secteurs considérés comme prioritaires pour les Outre-mer dont le tourisme en contrepartie d’une réduction ou d’une exonération d’impôt. Cette expansion subit un coup d’arrêt au début des années 2000. Le secteur touristique est depuis en difficulté, notamment après la crise économique et financière de 2008 même si des signes encourageants sont visibles depuis quelques années.

Les difficultés touristiques relèvent à la fois d’aspects structurels et conjoncturels.

Les hôtels qui ont fait la réputation de ces destinations dans les années 1970-1980 apparaissent vétustes. Ils sont souvent cernés par une urbanisation mal contrôlée, synonyme d’embouteillage et autres nuisances urbaines, qui précipitent leur déclin. Ce sont, par exemple, les urbanisations le long du littoral méridional de la Guadeloupe ou de la Martinique. Le modèle est usé. Il en résulte une dépréciation indéniable de ces destinations qui ne sont pas en mesure de répondre à la concurrence internationale qui s’impose redoutablement à partir des nouvelles destinations émergentes. À la perte de compétitivité de ces destinations d’Outre-mer, s’ajoutent des phénomènes sociaux, ponctuels, comme ce fut le cas lors des grèves de 2009. La chute de la fréquentation touristique fut de 16 % en Guadeloupe lors de ces évènements. Vieillissement des structures, perte de compétitivité, faible participation des populations locales, dans un contexte de concurrence internationale, ces destinations sont alors confrontées à ce qu’il est convenu d’appeler une crise touristique.

La Guadeloupe ne comptait plus que 3  000  chambres dans 65 établissements hôteliers classés en 2012 contre 4 500 chambres et 129 établissements en 2000.

Rapport

Le modèle d’un tourisme essentiellement tourné vers l’extérieur, y compris sa gouvernance, construit à partir des années 1970, est usé. Il a contribué au développement et à la modernisation des territoires ultramarins, mais il faut désormais envisager un autre tourisme, réellement inscrit dans ces territoires, autour de centres d’intérêt diversifiés (ne se confinant plus à la plage), en impliquant pleinement les populations locales. Il faut repenser les pratiques touristiques dans les Outre-mer dans une perspective durable, avec l’implication des ultramarin.e.s.

2. La dimension économique de l’activité touristique