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L’émergence accrue de la concurrence dans chaque bassin régional

I - ÉTAT DES LIEUX DU TOURISME DANS LES OUTRE-MER

4. L’émergence accrue de la concurrence dans chaque bassin régional

Selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), 1,2 milliards de touristes ont voyagé dans le monde en 2015, soit près de deux tiers de touristes supplémentaires par rapport à 2000.

La demande touristique devrait continuer à augmenter. En effet, les prévisions de l’OMT sont optimistes : le cap du 1,4 milliard d’arrivées de touristes dans le monde devrait être franchi au plus tard en 2020 et celui du 1,8 milliard d’arrivées en 2030. Une part importante de ces arrivées supplémentaires serait toutefois orientée vers les pays émergents, et, pour la France comme pour l’Europe en général, cette augmentation ne sera donc pas au prorata. Les nouveaux touristes venant des pays émergents, et notamment de la zone Asie-Pacifique, se dirigeront de ce fait principalement vers des pays de cette zone. Des territoires comme la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna seraient donc particulièrement concernés. Toutefois,

« face au discours global de l’omnipuissance du tourisme international, il est bon de rappeler que la pratique touristique concerne majoritairement des personnes qui voyagent au sein de leurs pays : sans doute trois à quatre milliards pour celle-ci contre un milliard pour les voyageurs internationaux.71 »

68 Organisation mondiale du tourisme (OMT), 2007.

69 Stratégie de développement touristique de la Polynésie française 2015-2020, p. 68.

70 IEOM, Nouvelle-Calédonie 2015, édition 2016, p. 113.

71 Philippe Duhamel, professeur de géographie à l’université d’Angers, « L’avènement des pratiques touristiques

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Ce sont donc les voyageur.euse.s internationaux.ales, mais aussi les habitant.e.s de l’hexagone que les Outre-mer essaient d’attirer et de fidéliser tout en étant en butte à la vive concurrence des pays et territoires appartenant à leur bassin régional. Ils bénéficient actuellement d’une conjoncture touristique plus favorable étant donné le climat d’insécurité qui s’est installé sur une partie de l’Europe marqué par des attentats, l’image ternie de nombreuses destinations méditerranéennes concurrentes, etc.

Le tourisme, outil de développement des pays en voie de développement proches des Outre-mer

Le tourisme est perçu par nombre de pays en voie de développement (PVD) et d’institutions internationales comme un outil de développement. Pour cette raison, son développement est particulièrement soutenu et la concurrence en est d’autant plus vive. Parmi ces pays en voie de développement figurent la plupart des pays et territoires concurrents des Outre-mer français.

Comme le souligne Jean-Jacques Nowak et Mondher Sahli72, « Pour la majorité des PVD pris isolément, le tourisme représente l’une des trois principales sources d’exportation et il est en tête des exportations dans au moins 11 des 48 pays les moins avancés (PMA - Comores, Vanuatu, Gambie, Tanzanie - OMT 2013) ». Pour les PVD, le tourisme présente de multiples avantages : une source de croissance économique, un fort potentiel de créations d’activités directes et indirectes en amont et en aval du secteur du tourisme, mais aussi de micro, petites et moyennes entreprises, la création d’infrastructures nécessaires au tourisme (transport, télécommunications, fourniture d’eau et d’électricité, système d’assainissement, etc.) qui peuvent aussi bénéficier aux autres secteurs productifs et aux populations locales, la création de nombreux emplois, car le tourisme est une activité intensive en travail, un encouragement à la préservation des actifs naturels et culturels, etc. Néanmoins ces avantages peuvent être sérieusement amoindris par l’existence d’une série de facteurs, comme les fuites internes et externes de devises et de revenus, capables d’en annuler les effets bénéfiques. D’autres désavantages peuvent exister : l’essor du tourisme peut nuire aux autres secteurs de l’économie, des conflits d’usage entre acteur.rice.s du tourisme et populations locales peuvent apparaître, la dégradation des milieux naturels et l’aggravation de la pollution résultant d’une activité touristique mal conçue et maîtrisée peuvent être observées.

Le tourisme international présente indéniablement des atouts pour les pays en voie de développement. C’est pourquoi la concurrence est si vive entre les territoires ultramarins et les pays et territoires appartenant à leur environnement régional que ce soit dans le bassin caribéen, sur le plateau des Guyanes, dans le Nord-Ouest atlantique, dans l’océan Indien et dans le Pacifique.

72 Jean-Jacques Nowak, Maître de Conférences en sciences économiques, Université de Lille - Rime-Lab, et International Association for Tourism Economics  ; Mondher Sahli, Associate Professor, Victoria University of Wellington, Nouvelle-Zélande, et International Association for Tourism Economics, « Le tourisme, un atout pour les pays en voie de développement ? », in Cahiers français, « L’industrie du tourisme », n° 393, juillet-août 2016,

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES Le tourisme dans le bassin caribéen

Carte n° 2  Les territoires d’Outre-mer dans la Caraïbe

Source : droits réservés.

Les Caraïbes ont reçu près de 24 millions de touristes internationaux.ales en 2015. À titre de comparaison, l’Amérique du Sud, pourtant dix fois plus peuplée, n’en a reçu que 30 millions. La première destination des Caraïbes est la République dominicaine (5 millions de touristes en 2015), suivie de Cuba et de la Jamaïque (3,5 millions chacune). Hormis leur climat et leurs paysages, plusieurs facteurs peuvent expliquer le succès touristique des Caraïbes : la proximité avec les États-Unis, l’abondance de la desserte aérienne, la qualité de l’offre touristique, etc.

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Carte n° 3  Le difficile positionnement des territoires d’Outre-mer dans la Caraïbe

Source : droits réservés.

Les destinations d’Outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Martin, Saint-Barthélemy) évoluent dans un contexte régional très favorable au tourisme. Mais la concurrence est intense entre les grandes destinations, des rivages de la Caraïbe (comme Cancún et la riviera Maya), et les grandes îles des Antilles (Cuba, la Jamaïque, la République dominicaine, Porto Rico) qui sont en pleine expansion. Elles peuvent accueillir des flux massifs, proposer des offres de services attractives et elles disposent d’espaces pour développer des infrastructures sur le littoral. Elles captent l’essentiel des marchés nord-américain et européen.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES La Martinique et la Guadeloupe restent dominées par des clientèles françaises. Ces

destinations sont mal positionnées par rapport aux marchés régionaux (notamment les États-Unis et le Canada). Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont des destinations plus internationales.

Dans ce contexte, la situation est difficile pour les territoires français qui ne sont pas en mesure de soutenir cette concurrence. Ils doivent développer les modèles touristiques originaux, privilégiant des niches touristiques, en adéquation avec leurs ressources territoriales. À cet égard, la stratégie touristique de l’île de la Dominique, centrée sur l’écotourisme, s’est avérée très efficace.

La Guyane, entre plateau des Guyanes et bassin caribéen

Carte n° 4 La Guyane, un territoire d’Outre-mer en Amérique du Sud

Source : droits réservés.

Le tourisme guyanais n’en est qu’à ses balbutiements  mais ses ressources sont considérables. La Guyane est souvent abordée dans le prolongement de la Caraïbe, or son littoral n’est pas caribéen (pas de récif corallien à l’horizon). La Guyane appartient au plateau des Guyanes, au voisinage du Brésil et du Suriname. L’atout de la Guyane pourrait être de devenir une porte d’entrée sur les mondes amazoniens, en collaboration avec ses voisins.

Le positionnement stratégique de la Guyane repose sur son ancrage régional et ses réalités territoriales.

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Carte n° 5  La Guyane : un positionnement régional à développer

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Saint-Pierre et Miquelon et le Nord-Ouest atlantique

L’activité touristique peut sembler très négligeable sur le plan quantitatif avec moins de 12 000 visiteur.euse.s en 2015 (séjours et croisière), mais l’impact peut être très intéressant pour le développement économique de Saint-Pierre et Miquelon. Le territoire souffre d’un manque d’infrastructures (parc hôtelier insuffisant), mais il dispose d’une carte originale : l’identité française au voisinage immédiat des côtes nord-américaines. Ce territoire constitue une escale originale lors des circuits touristiques de l’Atlantique Nord-Est, pour des croisiéristes ou des plaisancier.ère.s. La construction d’une solide stratégie touristique s’inscrit nécessairement dans le renforcement des partenariats avec les provinces atlantiques canadiennes.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES Carte n° 6  Saint-Pierre et Miquelon et son bassin touristique régional

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Le tourisme dans l’océan Indien

Entre l’île Maurice et l’archipel des Maldives, La Réunion a connu une transition touristique difficile. Il est très compliqué de concurrencer les destinations du tourisme balnéaire par excellence que sont devenues Maurice et les Maldives en l’espace de deux décennies.

Carte n° 7 Le bassin touristique régional de La Réunion et de Mayotte

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La Réunion se démarque des destinations concurrentes voisines en privilégiant ses atouts naturels (volcans, cirques, parc naturel) propices au tourisme de nature et à toutes les nouvelles pratiques sportives. L’île est également une destination appréciée pour sa sûreté et sa sécurité.

Le tourisme dans le Pacifique

Carte n° 8 Les territoires d’Outre-mer du Pacifique

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Le tourisme est en plein essor dans la région Asie-Pacifique, où le nombre de touristes a plus que doublé entre 2000 et 2014. La Chine est ainsi devenue le premier marché émetteur de tourisme dans le monde. D’après les estimations de l’OMT, le nombre total de voyages effectués depuis la Chine vers l’étranger aurait atteint 109 millions en 2014.

En Océanie, 13,2 millions de visiteur.euse.s se sont déplacé.e.s en 2014. Dans cette région, coexistent les destinations dites des «  grandes terres  » (l’Australie avec 52  % des touristes de la zone et la Nouvelle-Zélande) et des « archipels paradisiaques ». Dans cette seconde catégorie, Hawaii domine le marché, avec 8,6 millions de touristes en 2015. Parmi les territoires et petits États insulaires du Pacifique, Guam est la destination la plus fréquentée : l’île a accueilli 1,4 million de touristes en 2015, contre 755 000 visiteur.euse.s aux îles Fidji. La Polynésie française reste en retrait. Elle n’a bénéficié ni de la croissance du tourisme mondial, ni de la dynamique porteuse de la zone Pacifique. Nettement distancée par ses concurrents historiques, la Polynésie française (183 830 touristes en 2015) est peu à peu rattrapée par de nouvelles destinations, comme les îles Cook (125 130) ou les îles Samoa (131 175), qui accueillaient pourtant trois à quatre fois moins de touristes qu’elle en 1990. La position géographique des concurrents de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie et

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES de Wallis-et-Futuna a certainement contribué à augmenter le nombre de visiteur.euse.s

issu.e.s des marchés émetteurs clefs. Toutefois « le tourisme qualifié de ‘ tourisme de masse ’ qui s’y est développé génère des impacts environnementaux forts. L’absence de régulation du marché touristique et la surexploitation des ressources naturelles mettent la biodiversité de ces acteurs en danger.73 »

Carte n° 9 Les territoires d’Outre-mer dans le bassin touristique du Pacifique

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C - Un modèle qui a fait ses preuves mais n’est plus

suffisamment compétitif