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Chapitre I : Etude bibliographique

I.2 Procédés d’élimination de l’azote

I.2.5 L’azote en environnements confinés et/ou extrêmes

Dans les environnements confinés, il est impossible de construire des structures de la taille d’une station d’épuration. Certes, la concentration en azote est plus faible car le nombre de personnes à « gérer » est plus faible, mais la surface mise à disposition pour ces équipements l’est aussi. Le dimensionnement des structures dépend alors de la quantité de déchets azotés impliquée et de la durée de fonctionnement des installations. De plus, l’utilisation de microorganismes n’est pas encore appliquée pour ces environnements spécifiques. Dans les exemples suivants, les durées de fonctionnement des installations ne sont pas les mêmes et ainsi, les stratégies de traitement physico-chimiques des déchets azotés diffèrent également.

I.2.5.1 Les sous-marins

Un équipage de sous-marin comporte au minimum 75 personnes et les missions durent entre 5 et 8 semaines. L’urine et les fèces sont traitées à bord du sous-marin afin de produire de l’eau utilisable par l’équipage. L’urine est distillée à basse pression et l’eau obtenue est mélangée aux eaux grises (de lavage par exemple) afin d’être traitée dans le « Water

27 Processor ». La distillation permet de concentrer les sels composant l’urine, notamment l’urée, et de les éliminer du circuit par filtration (Ek et al., 2006; Tabb and Carter, 2015). Ces « déchets » sont stockés afin d’être évacués : ce sont des résidus finaux du traitement de l’urine. La qualité de l’eau traitée est contrôlée par la conductivité. L’eau est renvoyée dans le circuit des eaux grises si la conductivité est trop élevée.

I.2.5.2 La base antarctique Concordia

Fruit d’une collaboration franco-italienne entre l’Institut Paul Emile Victor (IPEV) et l’Agence Nationale Italienne pour les Nouvelles Technologies, l'Energie et le Développement Durable (ENEA), la station Concordia voit le jour en 2004. Située sur le plateau Antarctique, elle est composée de deux zones : le bâtiment d’été pouvant héberger une quarantaine de personnes et les bâtiments d’hiver pour une quinzaine de personnes (Tafforin, 2009). La station permet la réalisation d’études climatiques, astronomiques mais aussi comportementales. Un système de traitement des eaux, développé par l’Agence Spatiale Européenne (ESA), permet l’autonomie de la station pendant les durées d’hivernage (Mekarnia and Frenot, 2012). Les eaux grises sont collectées et traités par plusieurs étapes de filtration sur membrane, ultrafiltration et nanofiltration combinées à deux étapes d’osmose inverse (Gröndahl et al., 2009). Les eaux noires sont traitées par digestion aérobie et anaérobique, et par nitrification (Gröndahl et al., 2009). Les déchets solides issus du traitement sont filtrés et stockés afin d’être évacués à la fin de la période d’hivernage (Wieland, 1998).

I.2.5.3 L’exploration spatiale

Depuis le début de l’exploration spatiale, les stratégies de gestion du « problème » déchets azotés ont évolué. Durant les premières missions spatiales, les eaux usées (urine et fèces) étaient stockées à bord ou évacuées. Il n’y avait pas de traitement prévu pour ces eaux. A bord de la Station Spatiale Internationale (ISS), lancée en 1998, les déchets étaient d’abord stockés comme sur les missions précédentes. Les technologies ayant évolué et depuis le 14 Novembre 2008, l’ISS dispose d’un système de traitement physico-chimique des eaux (Carter et al., 2015). Il est appelé le « Water Recovery System » (WRS) et est composé de deux parties : l’ « Urine Processor Assembly » (UPA) et le « Water Processor Assembly » (WPA), Figure I-11.

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Figure I-11 : Schéma du circuit des eaux usées et du traitement de l’eau à bord de l'ISS (Tabb and Carter, 2015).

Les deux unités assurent un traitement de la totalité des eaux présentes dans la station. Une réserve d’eau potable d’environ 700 L est maintenue à bord. L’eau recyclée peut alors être utilisée par l’équipage, pour alimenter le système de régénération de l’oxygène, la chasse d’eau mais aussi pour la consommation.

I.2.5.3.1 L’ « Urine Processor Assembly » UPA

L’urine de l’équipage est collectée dans le « Waste and Hygiene compartment » où elle est traitée chimiquement afin d’assurer sa stabilité. Ce traitement combine de l’Oxone®, un biocide limitant le développement bactérien, et de l’acide sulfurique afin de diminuer le pH de l’urine pour limiter aussi le développement bactérien et la volatilisation d’ammoniac (Akse et al., 2011). L’urine prétraitée contenue dans ce tank est composée de l’urine des astronautes, de l’eau de la chasse d’eau et d’un traitement chimique à base d’acide sulfurique et de trioxyde de chrome. Quand le volume du container est suffisant, le processus de traitement se met en marche. L’effluent est transféré dans le « Distillation Assembly » (DA) où le mélange est distillé (Tabb and Carter, 2015). Le distillat d’urine est envoyé dans le WPA pour être traité. Cette unité permet ainsi, de récupérer jusqu’à 85% de l’eau contenue dans l’urine prétraitée et est capable de gérer jusqu’à 9 kg urine/jour ce qui correspond à la quantité produite par 6 astronautes (Tabb and Carter, 2015).

29 I.2.5.3.2 Le « Water Processor Assembly » WPA

Le WPA recueille les eaux provenant de la condensation, le distillat d’urine produit par l’UPA et l’eau produite par le module de Sabatier (assurant l’élimination du CO2 dans l’air). Les eaux sont stockées dans le « Waste Water Tank » où les gaz et les contaminants odorants sont traités par un filtre séparateur. L’air est alors rejeté dans la cabine de l’ISS. Les effluents stockés sont pompés et filtrés par deux « Multifiltration Beds » afin d’éliminer les contaminants inorganiques et organiques non-volatils. La filtration permet notamment d’éliminer le phosphore, le potassium et le soufre de l’urine (Ek et al., 2006). L’effluent entre ensuite dans le « Catalytic Reactor » où les molécules organiques restantes sont oxydées. L’eau ainsi traitée est contrôlée par mesure de la conductivité avant de passer par une « Ion Exchange Bed » qui fixe les produits de l’oxydation et permet notamment l’élimination de l’ammonium restant (Capodaglio et al., 2015; Carter et al., 2015; Jorgensen and Weatherley, 2003). Ce procédé utilise l’ajout d’iode dans l’eau afin d’assurer le contrôle microbiologique (Carter et al., 2015).

La combinaison des procédés présents dans l’UPA (distillation) et dans le WPA (filtration, oxydation et colonne échangeuse d’ions) assurent l’élimination de l’azote dans les effluents de la station spatiale internationale. Les déchets organiques sont éliminés par filtration et stockés, l’urée est concentrée par distillation et l’ammonium est éliminé dans le résidu de distillation. Les déchets résultant de ces traitements sont stockés et sont évacués avec les déchets de la station. Même si le WRS est efficace et permet actuellement de recycler une partie de l’eau utilisée par les astronautes, le bilan n’est pas complet : seulement 85% de l’eau est récupérée. Le ravitaillement en eau et consommables (nourriture, minéraux…) est donc encore nécessaire pour assurer les besoins des astronautes. Aussi, les agences spatiales travaillent-elles ainsi sur des projets de supports de vie biorégénératifs. Ces systèmes représentent l’avenir de l’exploration spatiale où une station pourrait fonctionner en totale autonomie. Depuis 25 ans, l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a développé son propre projet, et c’est dans ce cadre que ma thèse a été réalisée.

I.3 Les Systèmes de Support Vie et Contrôle Environnemental et le