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FNA N-HNO 2

I.4.4 Cultures en biofilm

Un biofilm est une communauté de microorganismes adhérant sur une surface. La formation d’un biofilm peut être induite par différents phénomènes (Jefferson, 2004):

63 − La réponse à un stress et la protection lors de l’exposition à des conditions

environnementales extrêmes.

− La colonisation d’une zone riche en substrat.

− la coopération bénéfique entre différents microorganismes.

− la formation de biofilm comme mode de croissance de base (l’état « en suspension » n’étant qu’un état passager ou contraint par le milieu environnemental).

Le passage des bactéries de l’état planctonique à l’état biofilm nécessite des changements physiques traduits au niveau métabolique. Les bactéries doivent sécréter des substances pour leur permettre d’adhérer entre elles (formation de « flocs ») et au support qu’elles colonisent.

I.4.4.1 Pourquoi former un biofilm ?

La formation du biofilm peut être induite par des phénomènes ayant un effet inhibiteur sur la croissance (toxicité d’un composés, stress environnemental) mais aussi par des environnements propices à la croissance (concentration importante en substrat, environnement stable).

L’un des principaux avantages à la formation d’un biofilm bactérien est la constitution d’une matrice extracellulaire. Elle permet une fixation irréversible du biofilm sur le support et joue un rôle de protection en le « recouvrant » (Davey and O’toole, 2000). Elle peut ainsi permettre l’entrée de composants dans le biofilm par des phénomènes de diffusion ou bloquer certains composants pathogènes pour les bactéries (Gilbert et al., 1997). La matrice extracellulaire permet de limiter voir bloquer les stress environnementaux tels que : l’exposition aux rayons UV, les changements de pH, les chocs osmotiques et la dessiccation (Flemming, 1993). Une bactérie qui a acquis la capacité de se fixer sur un support fixe possède donc un avantage sélectif par rapport à celles qui ont un développement essentiellement planctonique.

Dans l’environnement, la formation de biofilms permet notamment le transfert horizontal de gènes. Cette compétence génétique associée au rejet croissant d’antibiotiques dans les eaux usées est une des explications de l’apparition de bactéries multi-résistantes (Davies, 1994).

De par sa structure, le biofilm offre une résistance mécanique à la biomasse. Sur un support comme des billes de polystyrène utilisées dans le cadre du projet MELiSSA, le biofilm a une grande surface de colonisation. Par ailleurs l’épaisseur de la couche limite qui environne le microorganisme fixé est plus importante que si le microorganisme est libre. A la condition que cette couche limite ne freine pas excessivement les transferts de substrats et de

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produits entre le milieu et le microorganisme, la protection au cisaillement devient un avantage sélectif pour le microorganisme fixé. Le lit fixe formé sera alors plus résistant qu’une suspension de bactéries. De plus, le support permet de maintenir une concentration en biomasse élevée afin d’avoir une efficacité de nitrification au maximum.

I.4.4.2 Formation du biofilm

La formation du biofilm est induite par des signaux environnementaux captés par les bactéries. Comme décrit précédemment, ces signaux peuvent être liés à une zone favorable ou non à la croissance, ou à une coopération bénéfique entre microorganismes (Davies et al., 1998; Jefferson, 2004; O’Toole et al., 2000). La formation du biofilm est divisée en cinq étapes représentées par la Figure I-29.

Figure I-29 : Les différentes étapes de formation du biofilm (d'après Stoodley et al., 2002) 1. Attachement initial, 2. Attachement irréversible, 3. Formation primaire de la structure du biofilm, 4. Maturation du biofilm, 5. Détachement et retour à l’état planctonique.

L’attachement initial

Les bactéries se déplacent sur le support et s’y déposent. L’attachement des bactéries est pour l’instant encore réversible, aucune substance n’a été produite pour y remédier. Les flagelles et pili sont nécessaires à cette étape d’adhérence initiale (Davey and O’toole, 2000).

L’attachement irréversible

Les bactéries se multiplient et adhèrent de manière irréversible entre elles et au support grâce à la sécrétion de substances extracellulaires. Ces substances forment la matrice

65 extracellulaire constituée d’eau, d’exopolysaccharides (EPS), d’acides nucléiques et de protéines (O’Toole et al., 2000; Sutherland, 2001).

La maturation du biofilm

Représentée par les étapes 3 et 4 de la Figure I-29, la maturation du biofilm est définie comme la construction de l’architecture du biofilm. Des canaux et des pores sont mis en place pour faciliter les flux de substrats et de composés (Davies et al., 1998). Les bactéries se réorganisent sur le support afin de parfaire sa colonisation.

Détachement et retour à l’état planctonique

Cette étape de la vie du biofilm traduit un décrochement de biomasse sous forme de « floc ». Le détachement peut être induit par le biofilm mais ce cas de figure est le moins courant (Stoodley et al., 2001). La principale cause du détachement bactérien est la réduction de la concentration en EPS (Allison et al., 1998). Ceci peut être expliqué par une diminution de la quantité du substrat au sein du biofilm ou l’exposition trop forte à un stress chimique ou mécanique auquel le biofilm n’est pas ou plus capable de résister.

Même si la formation d’un biofilm est complexe et exige une modification morphologique de la population bactérienne, ce mode de croissance confère de nombreux avantages aux populations bactériennes.

I.4.4.3 Phénomènes de transfert au sein du biofilm

Un biofilm est principalement constitué d’eau. Pour comprendre la diffusion d’un composé au sein du biofilm, il faut déjà étudier sa diffusion dans l’eau (Stewart, 2003). Dans les biofilms de bactéries nitrifiantes, il a été mis en évidence que les AOB étaient présentes dans les couches supérieures du biofilm alors que les NOB se trouvaient dans les couches profondes (Okabe et al., 1999). Un gradient d’oxygène prend place au sein du biofilm créant ainsi des zones anoxiques dans les zones les plus profondes (Schramm et al., 1996). L’utilisation de billes comme support de biofilm permet de limiter ces zones anoxiques. En effet, le vide entre chaque bille permet un transfert de l’oxygène même au milieu du lit fixe. Des gradients de solutés peuvent aussi se créer entre les couches du biofilm. En revanche, des canaux d’eau permettent le transfert de solutés dans les couches profondes du biofilm afin de limiter les carences (Stewart, 2003). Au sein d’un biofilm de bactéries nitrifiantes, la concentration en ammonium est faible dans les couches profondes alors que celle en nitrate sera plus élevée (Li and Bishop, 2004) : ce phénomène est directement lié à la répartition de la biomasse comme ceci a été énoncé ci-dessus. La Figure I-30 schématise les concentrations des différents composés au sein du biofilm :

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Figure I-30: Evolution des concentrations en oxygène dissous, ammonium, nitrate, biomasse et du pH au sein du biofilm de bactéries nitrifiantes.

Un équilibre se crée entre la répartition des bactéries au sein du biofilm et des composés azotés associés à leur métabolisme. Il existe ainsi une répartition horizontale des AOB/NOB au sein du lit fixe mais aussi verticale comme décrite dans la partie I.4.3.2.

Dans le cadre du projet MELiSSA, l’utilisation d’un réacteur nitrifiant à lit fixe est la plus intéressante. Celui-ci permet d’obtenir une biomasse en forte concentration, résistante à de nombreux stress notamment les variations de pH et de concentrations en substrats et oxygène auxquelles elle risque d’être exposée. Les paramètres permettant de favoriser la formation du biofilm devront ainsi être identifiés et maîtrisés.