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a. Contribution à l’odeur de la viande de verrat

L’androsténone fait partie de la famille des stéroïdes 16-insaturés (Patterson, 1968 ; Gower, 1972) (Figure 3). Ce stéroïde est responsable des odeurs dites d’urine (Amoore, 1977) ou de transpiration qui émanent de la viande des porcs mâles entiers (Bonneau et al., 1992). L’androsténone explique une partie des problèmes d’odeurs de la carcasse puisqu’il a été mis en évidence une corrélation comprise entre 0,1 et 0,7 entre l’intensité de l’odeur, perçue par un jury entraîné, et la concentration en androsténone du gras dorsal de l’animal (Malmfors et al., 1978 ; Bonneau, 1982 ; Judge et al., 1990 ; Annor-Frempong et al., 1997a). La relation entre ces deux facteurs serait linéaire (Hansson et al., 1980). La détection des odeurs sexuelles par la technique du nez humain aboutit à une corrélation comprise entre 0,22 et 0,52 entre la teneur en androsténone du gras et l’intensité des odeurs sexuelles (Mathur et al., 2013).

Sink (1967) a été le premier à proposer que les stéroïdes synthétisés par les mâles entiers joueraient un rôle de phéromone sexuelle. Quelques années après, l’androsténone a été reconnue comme une phéromone sexuelle impliquée dans le comportement sexuel du porc (Signoret, 1970 ; Baum et Bakker, 2013). Elle participe à l’attraction entre les partenaires sexuels, accroît la réceptivité de la truie (Perry et al., 1980) et initie la posture d’accouplement en période d’œstrus (Melrose et al., 1971 ; Reed et al., 1974). Diffusée au moment du regroupement des porcs, l’androsténone permettrait également de réduire les comportements agressifs (McGlone et al., 1981 ; McGlone et Morrow, 1988).

b. Variabilité de la concentration dans le plasma et dans le tissu gras

La mesure de la concentration en androsténone dans le gras dorsal renseigne sur l’accumulation de l’androsténone et sur les problèmes d’odeurs de la carcasse qui en découlent tandis que la mesure dans le plasma sanguin permet d’étudier la variation de la production d’androsténone par les testicules.

La concentration en androsténone dans le plasma chez le mâle entier est très variable d’un individu à l’autre (Bonneau et al., 1982). Par exemple, elle évolue entre 0,30 et 54,1 ng/ml, avec une moyenne de 18,3 ±15,9 ng/ml pour des animaux dont le poids vif est compris entre 110 et 130 kg (Andresen, 1975 ; Zamaratskaia et al., 2004 ; Merks et al., 2009). Chez des mâles castrés et chez des femelles pesant environ 100 kg, la teneur plasmatique moyenne en androsténone est de l’ordre de 10 fois inférieure à celle de mâles entiers de poids similaires (Andresen, 1975). De plus, il existe de fortes variations de la concentration plasmatique en androsténone au cours de la journée. Lundström et al. (1978) ont mis en évidence une variation de la concentration de 69% en fonction du moment de mesure de l’androsténone plasmatique, pour une concentration moyenne de 3,45 ng/ml (± 2,35) à 113 kg. Les pics de concentration plasmatique en androsténone se situeraient dans l’après-midi et vers minuit (Claus et Gimenez, 1977). Dans le tissu gras, pour des animaux dont le poids vif est compris entre 100 et 130 kg, la concentration en androsténone varie de 0.1 µg/g à 13.5 µg/g (Patterson, 1982 ; Judge et al., 1990 ; Willeke et al., 1993 ; Moe et al., 2007 ; Baes et al., 2013). Dans ces études, le site de prélèvement n’est pas précisé mais il s’agit probablement de gras dorsal. Dans le gras dorsal, la concentration en androsténone évolue lentement, au fur et à mesure du développement sexuel de l’individu (Bonneau et al., 1987).

Chez des mâles entiers, les concentrations plasmatiques en androsténone à 30 kg de poids vif et celle du tissu gras à 85 kg de poids vif ne sont pas corrélées entre elles (Lundström et al., 1978). Il ne semble donc pas possible de prédire de façon précoce les odeurs sexuelles d’une carcasse par prise de sang. En revanche, la concentration plasmatique en androsténone est très corrélée à celle mesurée dans le gras de l’animal lorsque les deux mesures sont réalisées à 20 semaines d’âge (r = 0,69) (Zamaratskaia et al., 2004).

c. Synthèse, dégradation et régulation

La pregnenolone, dérivée du cholestérol, correspond au précurseur de tous les stéroïdes testiculaires dont l’androsténone (Ahmad et Gower, 1968 ; Katkov et Gower, 1970 ; Brooks et Pearson, 1986 ; Raeside et al., 2006 ; Robic et al., 2008) (Figure 4). Les étapes suivantes passent par l’androstadienol (voie majoritaire) ou la progestérone (voie minoritaire) (Raeside et al., 2006). L’androsténone est principalement synthétisée par les testicules (Gower, 1972 ; Mathur et al., 2013 ; Robic et al., 2014).

Figure 5 : Evolution avec l’âge de la concentration plasmatique en testostérone (nmol/l).

Figure 6 : Schéma de la régulation de la synthèse en androsténone par l’axe hypothalamo-hypophysaire.

Le développement sexuel du porc se manifeste par deux vagues successives de production intense de stéroïdes sexuels. Entre deux et quatre semaines d’âge, il existe un premier pic plasmatique d’androsténone, de testostérone et d’œstradiol, suivi d’une augmentation au moment de la puberté (Bonneau et al., 1982 ; Schwarzenberger et al., 1993 ; Sinclair et al., 2001). Cette seconde augmentation a lieu entre quatre et sept mois d’âge ; il existe une forte variabilité entre les individus (Andresen, 1976 ; Bonneau, 1982 ; Bonneau, 1984 ; Lervik et al., 2013) (Figure 5). Si l’on définit la puberté comme étant la capacité d’un porc à s’accoupler, les porcs mâles sont pubères vers 200 jours d’âge (Wiggins et al., 1951). En période post-pubertaire, la concentration en androsténone du tissu adipeux reste forte (Andresen, 1976). Elle est très fortement corrélée avec la concentration en œstrogènes dans ce même tissu (Zamaratskaia et al., 2004).

Les stéroïdes sexuels sont synthétisés dans les cellules de Leydig. Ces cellules sont sous le contrôle de l’hormone lutéinisante (LH) et de l’hormone folliculo-stimulante (FSH) (FlorCruz et Lapwood, 1978 ; Colenbrander et al., 1982) sécrétées par l’hypophyse, elle-même sous le contrôle de la gonadolibérine (GnRH) produite par l’hypothalamus (Claus et al., 1994 ; Zamaratskaia et Squires, 2009 ; Bilic-Šobot et al., 2014) (Figure 6). Andresen (1975) et Carlström et al. (1975) ont mimé l’action de la LH grâce à une injection d’hormone gonadotropine chorionique (HCG). Cette injection entraîne l’apparition de deux pics de concentrations plasmatiques de testostérone et d’androsténone, l’un dans les trois heures qui suivent l’injection et le second entre 18 et 30 heures après l’injection (Andresen, 1975 ; Carlström et al., 1975). Le premier pic provient d’une utilisation rapide du cholestérol présent dans les mitochondries pour la synthèse des stéroïdes, le second résulte d’une stimulation de la synthèse des enzymes impliquées dans la synthèse des stéroïdes (Koritz et Kumar, 1970). L’HCG stimule l’enzyme 20α-hydroxylase, responsable de la conversion du cholestérol en 20α-hydroxycholestérol (Andresen, 1975). Plus récemment, Oskam et al. retrouvent une augmentation parallèle des concentrations en testostérone et en androsténone suite à une injection de HCG. Ces concentrations diminuent ensuite et retrouvent le niveau de base en trois jours (Oskam et al., 2010).

Après synthèse, l’androsténone est sécrétée et véhiculée par le sang (Bonneau et Terqui, 1983). Trois alternatives sont alors possibles. Premièrement, l’androsténone peut être stockée dans le tissu adipeux en raison de ses propriétés lipophiles (Craig et al., 1962 ; Claus et al., 1971 ; Bonneau et Terqui, 1983). Deuxièmement, elle peut être catabolisée au niveau du foie et excrétée dans l’urine (Fish et al., 1980). Troisièmement, elle peut être

stockée dans les glandes salivaires qui l’excréteront dans la salive sous sa forme native ou métabolisée (Katkov et al., 1972). Au niveau du foie, l’androsténone subit une déshydrogénation et est transformée en alcools androst-16-en-3a-ol ou 5alpha-androst-16-en-3b-ol. Ces dérivés ont été mis en évidence la première fois par Prelog et Ruzicka (Prelog et Ruzicka, 1944 d'après Brooks et Pearson, 1986 ; Sinclair et Squires, 2005 ; Furman et al., 2014) (Figure 4). Ensuite, s’opère une phase de conjugaison, qui augmente les propriétés hydrophiles de ces dérivés et favorise leur élimination dans la salive et surtout dans l’urine (Gower et al., 1970 ; Moe et al., 2008). Au niveau des glandes salivaires, l’androsténone est liée à une protéine de liaison spécifique, la phéromaxéine, avant d’être excrétée dans la salive (Booth, 1984). Cette étape de liaison permet également d’augmenter la solubilité de la molécule.

La quantité d’androsténone stockée dans le tissu gras de l’animal résulte de la balance entre la synthèse par les testicules, très variable d’un individu à l’autre et fortement influencée par le stade de maturité de l’animal, les capacités de stockage dans le gras, l’intensité du catabolisme hépatique et de l’excrétion par les glandes salivaires (Bonneau et Desmoulin, 1982).