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2. LA THÉORIE FONCTIONNELLE DE LA COGNITION DE NORMAN ANDERSON

2.2. LA THÉORIE FONCTIONNELLE DE LA COGNITION

2.2.2. L’éclairage de la Théorie d’Intégration de l’Information

Dans le diagramme de l’intégration de l’information, les processus de valuation, d’intégration et de réponse ne peuvent pas être observés. Seuls les stimuli « Si » et la réponse exprimée « R » sont observables. La réponse exprimée « R » témoigne de l’en- semble des processus et est accessible à la conscience à la différence de la réponse interne qui, même si elle est conscientisable, reste non exprimée. C’est ce qu’Anderson (1981) décrit comme « erreur relative à la mesure de réponse ». Afin d’éviter cette erreur (relative à la mesure de la réponse), « l’algèbre cognitive » (Anderson, 1981, 1982, 1996) propose des solutions à la mesure en fonction de l’ordre sous-jacent des variables.

Pour mieux comprendre le processus d’intégration de l’information, nous pro- posons deux exemples, l’un issu de la vie quotidienne et l’autre issu de notre première étude. Nous appellerons le premier exemple, « le repas paella ».

2.2.2.2. Le repas paella

Supposons par exemple que Madame Untel, souhaite inviter ses amies à un repas paella. Elle tient compte des informations de ses invités (goûts, allergies alimen- taires…) avant de préparer le repas. Maintenant, regardons la situation à l’aide du diagramme de l’intégration de l’information. Considérons que Madame Untel est dans un état plutôt détendu.

Mme Untel décide de préparer la paella. Elle est donc exposée aux différents stimuli externes inhérents à la situation (cuisiner une paella), comme la variété du riz « S1 », le choix des ingrédients « S2 », le prix des ingrédients « S3 » et les offres du jour « S4 », qui sont bien des valeurs physiques. Avec ces informations, Madame Untel décide, avant de cuisiner la paella, de faire ses courses et de regarder les différents flyers publicitaires.

Selon l’IIT, dans le processus de valuation, ces différents stimuli vont être inté- grés par Madame Untel, qui va les transformer en contre-valeurs psychologiques afin d’établir une représentation mentale de la paella qu’elle va cuisiner. Elle associera les différentes informations afin de déterminer quel type de paella lui convient le mieux. Ensuite, Madame Untel, combine ces informations présentes sur le marché, la variété du riz, le choix des ingrédients, le prix des ingrédients et les offres du jour afin de décider du type de paella à cuisiner (seulement fruits de mer, seulement viande ou mixte). Cette opération correspond au processus d’intégration.

Gardant en tête son objectif initial, ayant pesé le pour et le contre, donc en attri- buant un poids à chacun des facteurs en considération, Madame Untel conclut qu’elle va préparer une paella aux fruits de mer et elle va se laisser tenter par de nouveaux ingrédients, des haricots verts et des poivrons jaunes et rouges. Elle a donc formulé sa réponse interne.

Enfin, suite au processus de réponse ou d’action, Madame Untel va maintenant pouvoir exprimer sa réponse et transformer sa décision en action. Elle part acheter les ingrédients (crustacés en promotion, haricots verts, riz long, poivrons jaunes et rouges, safran…). Ainsi, elle s’approche de l’état qui lui a paru le plus attractif.

2.2.2.3. Le soulagement de la douleur par un traitement

médicamenteux

Pour l’expliquer, prenons la vignette de la Figure 2-2 :

Figure 2-2. Exemple de scénario

Maintenant, examinons la situation à l’aide du diagramme de l’intégration de l’in- formation. Pour cela, imaginons que Madame Blandet, est dans un état initial plutôt désagréable. En effet, la douleur aiguë après chirurgie témoigne d’une souffrance im- portante (6/10) pour le patient ce qui se traduit par le fait d’appeler l’infirmière 5 fois. La situation provoquant chez elle un important conflit de valeurs (soulagement de la douleur vs risque encouru par le patient), elle décide de ne pas soulager Monsieur Pagotto dans l’immédiat.

Madame Blandet se trouve confrontée à divers stimuli externes inhérents à la situation. Parmi ces stimuli correspondant à des valeurs physiques, nous soulignons : • le degré de douleur évalué par l’infirmière sur une échelle de 0 à 10 : 6 sur 10 ; • la demande du patient à être soulagé : le patient a appelé 5 fois ;

• son âge : 80 ans ;

• et enfin, la gravité du risque encouru, lié au médicament opiacé : un gros risque. Tout d’abord, suite aux processus de valuation, ces différents stimuli vont être intégrés par l’infirmière, qui va les transformer en contre-valeurs psychologiques. Ceci

Madame Blandet, infirmière au service de chirurgie digestive à l’hôpital Lopo, prend soin de Monsieur Pagotto, de 79 ans,

qui a été récemment opéré d’un cancer avec succès.

En postopératoire, Monsieur Pagotto a eu une pompe à morphine, un opiacé, afin de soulager sa douleur aiguë liée à l’intervention chirurgicale.

Le médecin décide d’ôter la pompe à morphine et, pour continuer à soulager la douleur, il protocolise la prescription des opiacés, ce qui laisse

une marge de manœuvre à l’infirmière, Madame Blandet.

Monsieur Pagotto souffre beaucoup (6/10) et il demande un antidouleur.

Il a déjà appelé cinq fois.

Madame Blandet décide de ne pas administrer un antidouleur immédiatement,

car elle tient compte que Monsieur Pagotto a reçu une dose d’opiacés

il y a seulement deux heures.

Elle considère que ce serait prendre un gros risque

lui permettra d’établir une représentation mentale de différents risques encourus par le patient. Ensuite, elle rassemble, transforme et combine les différentes informations (âge du patient, degré de douleur, effet du médicament…) afin de déterminer le degré de risque de l’application de la prescription médicale. Cette opération correspond au processus d’intégration.

Gardant en tête son objectif initial, c’est-à-dire, éviter le risque de complications dans le soulagement de la douleur de ses patients, ayant pesé le pour et le contre de l’administration d’un opiacé, et donc en attribuant un poids à chacune des informa- tions évaluées, l’infirmière conclut que soulager la douleur de Monsieur Pagotto dans l’immédiat peut entraîner un risque important sur sa santé. Elle a donc formulé une réponse interne.

Enfin, suite au processus de réponse ou d’action, Madame Blandet va mainte- nant pouvoir donner sa réponse exprimée : « ne pas soulager le patient dans l’immé- diat étant donné le risque encouru ». En effet, pour l’infirmière, le fait de ne pas sou- lager la douleur de Monsieur P. dans l’immédiat, lui semble répondre au mieux à son objectif initial d’éviter le risque de complications pour le patient dont elle prend soin. Cet exemple met en évidence la présence d’éléments qui peuvent ou non être observables. En effet, les questions que se pose Madame Blandet, l’infirmière, peu- vent être des questionnements sous-jacents, qu’elle ne formule pas de manière réflé- chie et consciente. Quelques exemples :

• « Quels sont les facteurs susceptibles d’intervenir dans l’état de santé de Mon- sieur Pagotto ? »

• « Quelle est la responsabilité qu’elle engage à travers sa décision d’appliquer ou pas la prescription médicale ? »

• « La décision est-elle prise en fonction de l’efficacité du traitement ? » • « Quels sont les risques encourus par le patient ? » …

L’objectif principal est alors de préciser la nature des opérations d’algèbre cogni- tive (sommations, soustractions, moyennes, multiplications ou divisions) que les indi- vidus effectuent pour traiter l’information lors de leur cheminement cognitif dans différentes situations.