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La kinase Cdk5 régule STAT3 pour empêcher les dommages de l’ADN induits par une inhibition des topoisomérases I

Dans un premier temps, nous avons vu que l’inhibition des topoisomérases de type I induisait uniquement la phosphorylation du résidu sérine 727 de STAT3. Nous n’avons pas été capables de détecter une phosphorylation du résidu 705 de STAT3 dans ces conditions. Puis nous avons montré que cette phosphorylation était due à l’activation de Cdk5, recruté par son coactivateur p35, en réponse au sn38. En effet la kinase se fixe sur le domaine C-terminal du facteur de transcription pour induire sa phosphorylation. Cette voie Cdk5-STAT3, à la suite d’une inhibition des topoisomérases de type I permet la diminution de l’expression de gènes impliqués dans la progression de la phase G1 du cycle cellulaire comme la Cycline D1 et c-Myc afin de favoriser l’expression des gènes de réparation tel que Eme1.

I. Aucune phosphorylation du résidu tyrosine 705 n’a été détectée

Il est connu que STAT3 est activé durant la transition G0-G1 du cycle cellulaire en réponse à une stimulation de cytokines ou de facteurs de croissance. Cette activation se traduit par la phosphorylation du facteur de transcription sur son résidu tyrosine 705, sa dimérisation et sa translocation nucléaire, puis par l’induction de l’expression de ses gènes cibles comme c-Myc, cycline D1, c-Fos ou Cdc25a. La seconde phosphorylation de STAT3 sur son résidu sérine 727 permettrait le contact du dimère de STAT3, phosphorylé sur la tyrosine 705, avec ses coactivateurs transcriptionnels.

Dans la lignée cellulaire colorectale HT29, nous avons détecté l’expression de la phosphotyrosine de STAT3 par western blot ou par immunoprécipitation de chromatine sur les gènes de c-Myc et de la cycline D1, lorsque les cellules étaient stimulées à l’IL-6. Nous n’avons pas été capables de détecter de phosphorylation sur le résidu tyrosine 705 dans les cellules HT29 en croissance par western blot. Cependant, nous avons obtenu des résultats contradictoires en réalisant un ChIP de STAT3 sur les gènes c-Myc et de la cycline D1 dans les mêmes conditions. La phosphorylation de la tyrosine 705 de STAT3 est un événement cytoplasmique furtif, il avait été montré que la demi-vie de phosphorylation de STAT1 était de 15 minutes (Haspel, Salditt-Georgieff et al. 1996). Nous pouvons émettre l’hypothèse que STAT3 est phosphorylé sur son résidu tyrosine 705 dans les cellules en croissance mais est rapidement inactivé par différentes phosphatases telles que TC45, SHP1 et SHP2 (Kim et al. 2010). Par conséquent, une analyse de son

expression par western blot ne nous permet pas de détecter cette modification. En revanche, lorsque STAT3 est présent sur l’ADN, il forme un homodimère plus stable. Ceci pourrait expliquer pourquoi nous avons détecté la forme phosphorylée de la tyrosine de STAT3 uniquement en utilisant la technique de ChIP.

Néanmoins, d’autres études montrent que la phosphorylation du résidu 705 de STAT3 n’est pas nécessaire à son activité transcriptionnelle. L’équipe de G. Stark a montré que la mutation de la tyrosine 705 de STAT3 ne bloque pas son activité transcriptionnelle, mais au contraire conduit à une seconde vague d’expression de gènes comme RANTES, IL-6, IL-8, MET et MRAS qui ne répondent pas normalement directement à STAT3 lorsqu’il est phosphorylé sur son site 705. De plus, la plupart de ces gènes, répondant à la forme non phosphorylée de STAT3, présentent des éléments ĸB qui sont activés par un complexe formé de STAT3 et NF-ĸB, tous deux sous une forme non phosphorylée (U-STAT3/U-NF-ĸB). Le complexe U-STAT3/U-NF-ĸB s’accumule dans le noyau grâce au signal de localisation nucléaire de STAT3 puis se fixe et active un groupe de gènes dépendant des éléments ĸB. Ces travaux suggèrent que les cibles du facteur de transcription STAT3 dépendent de ses modifications post-traductionnelles. Etant donné que nous n’avons pas observé de phosphorylation de STAT3 sur son résidu tyrosine 705 dans les cellules HT29 après une inhibition des topoisomérases de type I, il serait intéressant de savoir si STAT3, sous une forme non phosphorylée, forme un complexe avec d’autres cofacteurs pour activer un nouveau groupe de gènes impliqués dans la réparation.

II. La kinase Cdk5 est-elle la seule kinase qui phosphoryle STAT3 sur son résidu

sérine 727 en réponse aux dommages de l’ADN ?

Nous avons remarqué que l’absence de la kinase Cdk5 ne supprime pas la totalité de la phosphorylation du résidu sérine 727. Cette observation nous fait penser que Cdk5 n’est pas la seule kinase responsable de la phosphorylation de STAT3 sur son site 727 à la suite d’une inhibition des topoisomérases de type I. Il serait intéressant de déterminer si d’autres voies de signalisation sont capables d’activer STAT3 en réponse à des dommages de l’ADN.

La voie de réponse aux dommages de l’ADN contrôle les transitions du cycle cellulaire, la réplication de l’ADN et l’apoptose ou la sénescence. Les principaux régulateurs de la réponse aux dommages de l’ADN sont les protéines PIKKs (Phosphoinositol-3 Kinase-related protein Kinase), ATM (Ataxia-Telangiectasia Mutated) et ATR (ATM and RAD23-related). ATM et ATR ont des fonctions similaires comme l’implication dans l’arrêt du cycle cellulaire et la réparation de l’ADN. ATM est principalement activé à la suite de cassures doubles brins, tandis que ATR est activé et est essentiel lors de dommages des fourches de réplication sur un simple brin d’ADN durant la phase S

(Cimprich and Cortez 2008). La kinase ATM, avec des protéines adaptatrices spécifiques, joue un rôle central dans l’initiation de la voie de signalisation du point de contrôle en réponse à des cassures doubles brins, en phosphorylant et activant ses substrats tels que Chk2 et γH2AX (Kastan and Lim 2000). La kinase ATR, avec ses protéines adaptatrices spécifiques joue un rôle important dans la coordination de la réplication de l’ADN en réponse aux dommages et une fois activée, elle phosphoryle ses substrats spécifiques comme Chk1 (Cimprich and Cortez 2008). Les voies de réponses aux dommages de l’ADN activées par les couples ATM-Chk2 et ATR-Chk1 sont nombreuses. Il a été montré que le facteur de transcription STAT3 est requis pour une réparation efficace des dommages de l’ADN à la suite d’une irradiation aux UVB. Les cellules MEFs déficientes en STAT3 présentent un système de réparation des dommages moins efficace, suggérant que STAT3 est nécessaire pour une réparation optimale. De plus, une augmentation artificielle du taux de STAT3 est corrélée avec une augmentation de la capacité à réparer l’ADN et restaurer le phénotype défectueux dans les cellules knock-out (Barry et al. 2010).

Arnaud Vigneron avait montré, au laboratoire, qu’une inhibition des topoisomérases de type I induisait la phosphorylation de Chk1 sur son résidu sérine 345 dans les lignées cellulaires HCT116 et HT29 (Vigneron et al. 2008). Comme expliqué ci-dessus, l’activation de Chk1 est effectuée par la kinase ATR. Cependant, ATM est également capable de phosphoryler et activer Chk1 mais plus faiblement que ATR (Bartek and Lukas 2003). D’après ces travaux, nous pouvons penser qu’à la suite de dommages de l’ADN crées par une inhibition des topoisomérases de type I, la voie de réponse ATM-ATR/Chk1-Chk2 est activée. Etant donné que ces protéines sont des sérine-thréonine kinases, elles pourraient être impliquées dans la phosphorylation de STAT3 sur la sérine 727 à la suite de dommages de l’ADN.

Lors de la réalisation de ces travaux, Sandy Courapied a réalisé, en collaboration avec le Dr Catherine Guette, une immunoprécipitation de STAT3 dans les cellules HT29 traitées au sn38, puis a analysé l’immunoprécipitat par spectrométrie de masse. De cette manière, elle a mis en évidence de nombreux partenaires potentiels de STAT3 à la suite d’une inhibition des topoisomérases de type I. Parmi les différentes protéines trouvées, une protéine a semblé particulièrement intéressante par son rôle dans la réparation des dommages de l’ADN. Il s’agit de la sérine-thréonine kinase DNA-PK (DNA-protein kinase). Elle est composée des sous-unités Ku70/80 et d’une sous-unité catalytique DNA-PKCS et fait partie de la famille des PI-3-K, avec ATM et ATR. Elle a également été décrite comme appartenant au système de réparation NHEJ (NonHomologous Ends Junctions) (Collis et al. 2005). Ce système NHEJ est actif durant le cycle cellulaire et plus particulièrement durant les phases G0 et G1 et est considéré comme la principale voie de réparation des cassures

doubles brins de l’ADN dans les cellules humaines. Cette kinase est également impliquée dans le système de réparation HR. Lorsque la cellule présente des cassures doubles brins, elle a le choix entre ces deux systèmes de réparation NHEJ ou HR (Kong et al. 2011). Cependant, comment la cellule choisit entre ces deux modes de réparation est une question qui reste encore en suspend. Aucune étude n’a montré de lien direct entre DNA-PK et STAT3. De plus, une analyse bio-informatique des sérine-thréonine kinases capables de phosphoryler le résidu sérine 727 de STAT3 a montré que DNA-PK pourrait être un bon candidat (GPS 2.1). Il serait alors pertinent de déterminer si cette kinase phosphoryle STAT3 sur son résidu sérine 727 en réponse à une inhibition des topoisomérases de type I.

Ces premiers travaux nous ont permis de suggérer qu’en réponse à une inhibition des topoisomérases de type I, STAT3 est phosphorylé sur son résidu sérine 727 par la kinase Cdk5 et active l’expression de l’endonucléase de réparation Eme1. Cette protéine participe au système de recombinaison homologue afin de réparer les cassures doubles brins de l’ADN crées par le blocage des fourches de réplication.

Nous avons montré que différentes phosphorylations de STAT3 permettent d’activer différents gènes cibles : la phosphorylation du résidu tyrosine 705 est impliqué dans l’activation des gènes de prolifération en réponse à une stimulation de facteurs de croissance ou de cytokines. En revanche, la phosphorylation du résidu sérine 727 permet l’activation de gènes de réparation à la suite d’une inhibition de topoisomérases de type I.

Nous avons observé que ce traitement induit un arrêt du cycle cellulaire pendant la phase G2-M du cycle cellulaire. Nous nous sommes alors demandé si STAT3 était également phosphorylé sur son résidu lors de la phase G2-M du cycle cellulaire.

Chapitre 2

STAT3 est activé pendant la phase G2 du cycle cellulaire afin de réguler