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Chapitre II : La barrière épithéliale bronchique

III. Rôle de barrière protectrice

III.2. Jonctions cellulaires

Les jonctions cellulaires sont des protéines transmembranaires et cytosoliques organisées spécifiquement au sein des épithéliums afin de maintenir les cellules épithéliales entres- elles.

Les jonctions serrées sont organisées en couronne au pôle apical des cellules tandis que les jonctions adhérentes et desmosomes ont une localisation basolatérale permettant l’adhérence intercellulaire (Figure 11). Il existe également les jonctions hémi-desmosomes qui assurent l’ancrage des cellules épithéliales à la lame basale et les jonctions communicantes ou jonctions GAP qui ne participent pas au maintien physique de l’épithélium mais qui permettent la communication intercellulaire, la transmission de signaux cellulaires, la synchronisation cellulaire et le maintien de l’homéostasie tissulaire.

Les jonctions serrées

Les jonctions serrées représentent les protéines responsables de la perméabilité et de la sélectivité de l’épithélium vis-à-vis des ions et de certaines molécules. Les jonctions serrées régulent ainsi le passage paracellulaire de solutés et permettent également d’assurer

Figure 12 : Schéma de l’organisation des jonctions cellulaires entre deux cellules épithéliales.

l’étanchéité tissulaire entre les différents compartiments (182). Ces protéines sont également responsables de la frontière entre le pôle apical et le pôle basal des cellules et maintiennent les cellules polarisées. Les protéines appartenant aux jonctions serrées se divisent en trois grandes familles : Les claudines, les occludines et les JAM (Junctional Adhesion Molecule) qui vont chacune s’associer à des protéines adaptatrices intracellulaires de la membrane périphérique. Les protéines ZO interagissent directement avec le cytosquelette d’actine (Figure 13).

L’occludine est une protéine constituée de quatre domaines transmembranaires et de deux boucles extracellulaires. Cette protéine participe au maintien de la RTE et à la régulation du flux paracellulaire. Néanmoins, cette protéine ne semble pas essentielle à l’établissement des jonctions serrées puisque des cellules souches invalidées pour le gène de l’occludine forment des jonctions serrées fonctionnelles (183). L’occludine établit des jonctions dans une forme hyperphosphorylée en s’associant à la protéine ZO-1. Certains facteurs peuvent perturber ces interactions et rompre l’intégrité épithéliale. C’est le cas de la cystéine

Figure 13 : Représentation schématique des jonctions serrées dans une cellule épithéliale. D’après "Temporal and regional intestinal changes in permeability,

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protéase de l’allergène Der p1 qui clive la liaison occludine-ZO-1 et entraîne une augmentation de la perméabilité paracellulaire (184).

La famille des protéines claudines dénombre 24 claudines chez l’Homme qui sont capables d’interagir entres elles via des liaisons homo- ou hétérophiliques. Tout comme l’occludine, les claudines comportent quatre domaines transmembranaires et deux boucles extracellulaires cytoplasmiques capables d’interagir avec ZO-1 mais également ZO-2 et ZO-3. Au sein de l’épithélium bronchique, les claudines 1, 2, 3, 4, 5 et 7 sont exprimées (185),(186).

Il existe trois types de protéines JAM : A, B et C (187). Ce sont des glycoprotéines appartenant à la famille des immunoglobulines (Ig) car elles possèdent un domaine extracellulaire de type Ig et elles comportent également un motif de liaison à ZO-1 dans leur partie C-terminale. En plus de participer à la régulation de la perméabilité paracellulaire de l’épithélium, les protéines JAM sont capables d’interagir avec les leucocytes en s’associant aux intégrines. Cette association facilite alors l’adhésion et la migration trans-endothéliale des leucocytes (188).

Enfin, les protéines de la famille ZO sont considérées comme des jonctions serrées mais leur localisation cellulaire ainsi que leur structure sont différentes de celles des claudines, occludine et JAM. La protéine ZO ou Tight Junction Protein-1 (TJP-1), qui appartient à la famille des protéines MAGUK (Membrane-Associated Guanylate Kinase), comporte un domaine PDZ, un domaine SH3 (Src homology 3) et un domaine GK (Guanylate Kinase) (189). Les domaines PDZ reconnaissent un court motif peptidique sur leurs cibles protéiques et permettent la liaison de ZO aux autres protéines. Les domaines SH3 sont retrouvés dans de nombreuses protéines de signalisation et du cytosquelette où ils participent aux liaisons directes protéine-protéine, à la localisation subcellulaire et à la formation de complexes multiprotéiques. Cependant, les ligands des domaines SH3 n’ont pas été caractérisés. Le domaine GK est homologue à l’enzyme guanylate kinase qui catalyse la conversion du GMP (Guanosine Mono-Phosphate) en GDP (Guanosine Di- Phosphate) en présence d’ATP. Cependant, cette activité enzymatique n’a jamais été décrite pour le domaine GK d’une protéine MAGUK (190). Les protéines ZO sont souvent appelées protéines adaptatrices de par leur localisation à la face cytoplasmique de la membrane plasmique. Elles lient les protéines des jonctions serrées par leur extrémité N- terminale et les filaments d’actine par leur extrémité C-terminale afin de ceinturer la

structure et maintenir l’adhésion intercellulaire (191),(192). Les protéines ZO-1 et ZO-2 sont également connues pour interagir avec certaines protéines des jonctions adhérentes lorsque les cellules ne synthétisent pas de jonctions serrées comme les fibroblastes (193) et participent à la communication intercellulaire via des liaisons avec les connexines des jonctions GAP (194). Enfin, les protéines ZO sont capables d’interagir aussi entre-elles via leur domaine PDZ.

Les jonctions adhérentes

Les jonctions adhérentes sont des complexes protéiques adhésifs composés principalement par des glycoprotéines transmembranaires de type cadhérine (comme la E-cadhérine) qui s’associent avec des protéines cytoplasmiques de la famille des caténines pour former des liaisons stables et solides entre les cellules épithéliales (195) (Figure 14). Outre l’initiation et la stabilisation de l’adhésion cellulaire, les jonctions adhérentes sont susceptibles de remplir d’autres fonctions. Elles participent à la régulation du cytosquelette d’actine, à la signalisation intracellulaire et peuvent avoir un rôle dans la régulation de la transcription (196).

Figure 14 : Représentation schématique des jonctions adhérentes. D’après

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Les protéines E-cadhérine interagissent entre-elles via des liaisons homophiliques dépendantes du calcium pour former des jonctions entre les cellules. Elles possèdent cinq domaines extracellulaires, un domaine transmembranaire et un domaine cytoplasmique qui lie les caténines, elles-mêmes liées au cytosquelette d’actine.

La famille des caténines inclue la β-caténine, α-caténine, γ-caténine et la caténine p120 mais seules la β-caténine et la γ-caténine (aussi appelée plakoglobine) sont en interaction directe avec l’extrémité cytoplasmique de la E-cadhérine (197). En effet, les caténines β et γ ont une structure très proche et se lient toutes deux à la E-cadhérine. En revanche la protéine α-caténine ne sert que d’intermédiaire entre les caténines β/γ et les filaments d’actine. La β-caténine possède également un rôle de régulation de la transcription. En effet, lorsqu’elle n’est pas liée à la E-cadhérine, notamment lors des cycles d’endocytose, la β-caténine peut se lier au facteur de transcription Tcf/Lef (Transcription Factor / Lymphoid enhancer-binding factor) et activer la transcription de gènes impliqués dans la prolifération cellulaire aboutissant à l’activation de la voie de signalisation Wnt (Wingless) notamment impliquée dans l’embryogénèse (198),(199).

Les desmosomes

Les desmosomes sont classiquement considérés comme des sites de forte adhésion intercellulaire qui confèrent une intégrité mécanique aux tissus par l’ancrage des filaments intermédiaires (FI) du cytosquelette sur la membrane plasmique (Figure 15). Ces structures hautement organisées sont difficiles à dissoudre et résistent aux pH extrêmes et à la plupart des détergents (200). D’un point de vue ultrastructural, les desmosomes se présentent sous la forme de disques denses aux électrons avec un diamètre d’environ 0,2 à 0,5 µm, qui s’assemblent symétriquement à l’interface entre deux cellules (201). Les FI s'étendent depuis la surface nucléaire et le cytoplasme vers la membrane plasmique, où ils se fixent aux desmosomes en s’insérant dans la plaque cytoplasmique du complexe. Les plaques desmosomales sont composées de différentes familles de protéines : les cadhérines desmosomales transmembranaires (desmogléines et desmocollines), les protéines à motif Armadillo ou ARM (plakoglobines et plakophilines) qui possèdent une structure constituée d'une quarantaine de résidus d'acides aminés organisés en une séquence répétitive (202) et les protéines plakiniques (desmoplakines) en contact direct avec le cytosquelette des cellules. Les cadhérines desmosomales se lient entre-elles via leur domaine extracellulaire et au sein du cytoplasme, leur extrémité C-terminale se lient aux protéines à motif ARM. Ces liaisons permettent l’interaction indirecte entre les FI et les cadhérines desmosomales

via les plaques de desmoplakines. Tout comme les cadhérines adhérentes, les liaisons entre les cadhérines desmosomales sont dépendantes du calcium. En revanche, les cadhérines desmosomales ont la particularité de pouvoir réaliser des liaisons hétérophiliques avec diverses cadhérines. La plakoglobine fait partie à la fois des jonctions adhérentes lorsqu’elle interagit avec la E-cadhérine, et des desmosomes puisqu’elle comporte un motif ARM spécifique et fait le lien entre les cadhérines desmosomales et la desmoplakine.

IV.

Cas de la mucoviscidose : perte de la barrière jonctionnelle