• Aucun résultat trouvé

Cas de la mucoviscidose : perte de la barrière jonctionnelle bronchique

Chapitre II : La barrière épithéliale bronchique

IV. Cas de la mucoviscidose : perte de la barrière jonctionnelle bronchique

IV.1.Augmentation de la viscosité du mucus, encombrement et perte de la clairance mucociliaire

L’augmentation de la viscosité du mucus entraînée par un défaut de sécrétion de chlore et une réabsorption importante de sodium et d’eau n’est pas une cause directe de la perte des jonctions bronchiques. En effet, les propriétés rhéologiques du mucus n’affectent pas

63

est un liquide de surface circulant, qui constitue la première barrière protectrice des poumons (203). Ce liquide de surface des voies respiratoires se compose de deux phases liquides. La première, nommée couche périciliaire, est adjacente aux cellules épithéliales et entoure les cils. C’est la phase directement en contact avec le pôle apical des cellules. Le mucus est la seconde phase au-dessus de la couche périciliaire qui subit le battement des cils et les forces de cisaillement. Ce mucus capte les différentes particules et pathogènes présents dans l’air inhalé afin de les évacuer du système respiratoire via la toux ou les éternuements.

Lorsque le mucus est visqueux et épais, il va progressivement obstruer les bronches. En effet, en raison de la réabsorption massive d’eau hors de la lumière des voies respiratoires, le niveau de liquide périciliaire devient critique et le mucus entre en contact avec les cellules épithéliales. Ainsi, des adhérences se développent entre les mucines de la couche de mucus et les mucines à ancrage cellulaire. À mesure que ces liens adhésifs s’établissent, le mucus devient plus résistant aux thérapies mucolytiques (204). Cependant, il va continuer à piéger les pathogènes mais ne sera plus capable de les expulser. Ainsi les bactéries piégées se retrouvent dans un environnement visqueux, contenant des niches hypoxiques, à température optimale de croissance et peuvent proliférer aisément. La prolifération bactérienne entraîne par la suite la sécrétion de facteurs de pathogénicité qui activent la réponse inflammatoire de l’hôte. A long terme, la réponse inflammatoire du patient qui est systématiquement activée devient exacerbée, détruit le tissu bronchique et finit par entraîner des insuffisances pulmonaires sévères. Ce phénomène est d’autant plus amplifié car les cils présents à la surface apicale des cellules n’exercent plus leurs battements mécaniques (Figure 16).

IV.2.Expression et activité des protéines jonctionnelles

Différentes études se sont intéressées à l’expression des protéines de la famille des claudines dans la mucoviscidose puisqu’elles représentent un élément important des jonctions serrées.

Les claudines sont le principal déterminant de la perméabilité aux électrolytes par la voie paracellulaire (205). Une étude transcriptomique a montré une diminution de l’expression du gène codant pour la claudine 8 dans l’épithélium bronchique mucoviscidosique, tandis qu’une augmentation de l’expression du gène codant pour la claudine 7 a été observée dans l’épithélium nasal de ces patients (206). Aussi, il a été montré qu’une réorganisation néfaste

des claudines depuis la membrane latérale vers le cytoplasme existe au sein de l’épithélium des villosités intestinales dans un modèle murin de mucoviscidose (207).

Ces changements de localisation pourraient expliquer l’augmentation de la perméabilité aux macromolécules dans l’intestin grêle et la présence chronique du TNF-α dans la lumière pourrait en être la cause. De manière intéressante, il a été montré qu’un prétraitement de l'épithélium bronchique avec l'azithromycine, un antibiotique, atténue les effets de PA sur les cellules épithéliales des voies aériennes et facilite la récupération de l’activité antimicrobienne de l'épithélium (208). Le traitement à l’azithromycine aurait une action protectrice sur les jonctions serrées puisqu’il augmente l'intégrité de la barrière jonctionnelle et favorise l’assemblage des claudines 1 et 4, de l’occludine et de JAM-A.

Enfin, plusieurs groupes ont montré que l’inflammation chronique des bronches perturbe

Figure 16 : Schéma de la barrière jonctionnelle bronchique dans le cas de la mucoviscidose. PNN : Polynucléaire Neutrophile, ROS : Reactive Oxygen Species.

65

les conditions de la mucoviscidose, sur des cultures primaires bronchiques perturbe profondément la RTE et la perméabilité apparente des cellules probablement via la protéine kinase C (211). Ces médiateurs pro-inflammatoires ont conduit à des modifications de l’expression des protéines JAM, ZO-1 ainsi que de la protéine ICAM-1, ce qui expliquerait l’augmentation importante de la trans-migration des neutrophiles dans les bronches.

Outre les infections bactériennes à répétition qui activent le processus inflammatoire dans les bronches, le lien entre l’activité de CFTR et l’inflammation est un sujet très controversé (212),(213). En effet, certains patients présentent une réponse inflammatoire très importante en dehors des pics infectieux et conduisent à de nombreuses divergences dans la communauté scientifique.

Cependant, l’inflammation pulmonaire chronique est une caractéristique physiopathologique inévitable pour les patients atteints de mucoviscidose.

Dans un contexte sain, la réponse inflammatoire se compose d’un élément déclencheur, d’un pic d’exacerbation et d’un retour à la normale. Dans le cas de la mucoviscidose, ce schéma n’est plus respecté. La réponse inflammatoire ne retrouve pas un état initial et les concentrations en cytokines pro-inflammatoires ne diminuent pas (214). Cependant les mécanismes sous-jacents à cette hyper-activation restent inconnus.

Récemment, notre groupe a montré que la protéine prion cellulaire (PrPC) est localisée au niveau des jonctions cellulaires et a caractérisé son expression au sein des cellules épithéliales bronchiques humaines (215). Cette protéine est connue pour son implication dans l’inflammation cérébrale dans le contexte pathologique des maladies à prion et dans l’inflammation intestinale dans la maladie de Bowel. Ainsi PrPC pourrait également être impliquée dans une maladie génétique inflammatoire telle que la mucoviscidose.

67

Chapitre III : La protéine Prion