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Chapitre I : La mucoviscidose

IV. Mutation du gène CFTR

IV.1. Classification des mutations de CFTR

De nos jours, pas moins de 2000 mutations du gène CFTR ont été identifiées avec un degré de sévérité variable. Ces mutations ont été classées en fonction du comportement biologique de la protéique CFTR. La première classification des mutations de CFTR fut proposée en 1993 par Welsh et Smith. Cette classification a tout d’abord permis de grouper les mutations en quatre catégories selon le défaut de la protéine CFTR ; i) défauts de synthèse, ii) défauts de maturation et de repliement, iii) défauts de régulation de l’ouverture du canal CFTR et iv) défauts de conduction des ions Cl- (112).

La classification actuelle a été établie en se basant sur la première classification de Welsh et Smith mais dénombre aujourd’hui six groupes de mutations (Figure 4) :

Mutations de classe I

Ces mutations conduisent à une absence partielle ou totale d’expression de la protéine CFTR à la surface membranaire des cellules. Au niveau moléculaire, ces mutations sont dues à la substitution d’un ou plusieurs nucléotides introduisant ainsi un codon stop prématuré, des insertions ou des délétions. Ces mutations entraînent un décalage du cadre de lecture ou des anomalies d’épissage aboutissant soit au saut complet d’un exon, soit à une délétion importante du gène CFTR ou encore à un réarrangement génétique dans le gène CFTR qui modifie la séquence d’un exon (113). Ces mutations sont retrouvées chez 5 à 10% des patients atteints de mucoviscidose dans le monde avec notamment les mutations Trp1282X et Gly542X. Le X indique le codon stop qui remplace l’acide aminé.

Mutations de classe II

Figure 4 : Classification des mutations de CFTR. Schéma adapté de "Progress in therapies for cystic fibrosis. De Boeck K. et Amaral M.D. Lancet Respir. Med. 4-8. p 662-674. 2016" et " Classification of CFTR mutation classes. Lima Marson F.A. Lancet Respir. Med. 4. e37. 2016".

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dans n’importe quel domaine de la protéine CFTR, entraînent la séquestration et la dégradation rapide de la protéine dans le RE. En effet, la conformation anormale de CFTR est détectée par le système de contrôle qualité du RE (ERQC ; endoplasmic reticulum quality control) qui cible la protéine vers les voies de dégradation dépendante (114),(115) et indépendante (116) du système ubiquitine/protéasome. Selon les mutations de classe II, ces altérations de l’adressage intracellulaire de la protéine CFTR entraînent sa diminution voire son absence totale à la surface des cellules. La mutation la plus fréquente (environ 70% des mutations identifiées) correspond à la délétion de la phénylalanine en position 508 de la protéine CFTR (deltaF508). (117).

Mutations de classe III

Ces mutations perturbent la régulation de l’activité canal chlorure de la protéine CFTR. Ce sont souvent des mutations faux-sens (substitution nucléotidique) localisées au niveau des domaines de liaison de l’ATP ; NBD1 et NBD2. La synthèse de la protéine CFTR s’effectue normalement et celle-ci s’insère correctement dans la membrane. Les mutations des domaines NBDs sont responsables de la diminution de la probabilité d’ouverture de l’activité canal chlorure du CFTR car elles réduisent le niveau de phosphorylation de CFTR. En effet, il a été montré que dans le cas de la mutation Gly551Asp (G551D), la probabilité d’ouverture du canal CFTR est environ cent fois inférieure à celle du canal CFTR sauvage (118). Selon les registres de patients, environ 4% à 5% des patients atteints de mucoviscidose sont porteurs de la mutation (G551D) sur au moins un allèle (119).

Mutation de classe IV

Ces mutations altèrent la conductance du canal CFTR et sont principalement localisées dans les TMDs impliqués dans la formation du canal. Ces mutations faux-sens produisent une protéine correctement insérée dans la membrane, qui conserve une activité canal Cl- dépendante de l'AMPc, mais avec une conductance réduite. La mutation de classe IV la plus répandue est la mutation Arg117His (R117H), qui est retrouvée chez 2 à 4% des patients. (120)

Mutations de classe V

Ces mutations plus rares, approximativement 1%, déstabilisent les ARNm de CFTR. Le système d’épissage des ARNm est altéré, ce qui entraîne la génération d’ARNm épissés de manière aberrante et conduit à une diminution de la quantité de protéines CFTR à la membrane cellulaire. Néanmoins, les systèmes d’épissage affectés par ce genre de

mutations continuent de générer également un pool d’ARNm épissés correctement ce qui permet d’éviter une absence totale de protéine CFTR fonctionnelle à la membrane (121),(122).

Mutations de classe VI

Ces mutations sont souvent associées aux mutations de classe V puisqu’elles affectent également la stabilité de CFTR mais au niveau protéique. Ces mutations provoquent une troncation de l’extrémité C-terminale de la protéine CFTR, qui n’est cependant pas indispensable pour la biosynthèse et la fonction de canal chlorure de CFTR. En revanche, cette extrémité C-terminale semble jouer un rôle crucial dans la stabilité de la protéine CFTR mature (123). De plus, il a été montré que l’absence de l’extrémité C-terminale modifie les paramètres d’endocytose de CFTR qui de ce fait est dégradée prématurément. En effet, l’augmentation du taux d’endocytose entraîne la réduction d’environ 50% de la protéine CFTR dans la membrane plasmique (124).

De manière générale, les mutations de classe I, II et III sont associées à un phénotype sévère de la maladie tandis que les mutations de classe IV, V et VI sont accompagnées de symptômes moins sévères, avec un phénotype dit intermédiaire.

IV.2.Modèles animaux pour l’étude de l’impact des mutations de CFTR