• Aucun résultat trouvé

le jeu de la concurrence apparaît faussé par la présence d’institutions publiques,

notamment les services municipaux, parties prenantes – directement ou non – du processus de sélection des offres. L’État doit alors offrir une capacité de résistance qu’il n’est pas toujours simple à opposer aux villes :

« On essaie de faire en sorte que ne soient pas seulement retenus des projets des villes et d’être mis devant le fait accompli ». (service de l’État, Eure-et-Loir)

« On évite d’être les contributeurs obligés de structures publiques, mais elles nous le reprochent ». (sous-préfecture d’arrondissement, Dreux)

« Un service municipal de Vernouillet s’est défendu pendant la réunion, mais il n’a pas eu gain de cause ». (sous-préfecture d’arrondissement, Dreux)

« À Argenteuil, la ville émet essentiellement des réserves sur les projets associatifs, beaucoup moins sur les projets municipaux. À Bezons, ce sont surtout des actions de la mairie. C’est délicat pour nous de les critiquer ». (préfecture, Val d'Oise)

Comme on l’a déjà relevé, ces conflits d’intérêt placent l’élu responsable en charge du Cucs dans une position délicate. Par exemple à Argenteuil : « Les autres élus déposent aussi des projets municipaux

financés sur la part État, et donnent leur avis sur les associations, explique un technicien. Ils disent oui, non, ça fait doublon, etc. L’élue chargée de la politique de la ville tranche. Un de ses collègues était très mécontent que son action n’ait pas été retenue ». L’élue responsable du Cucs confirme la difficulté, mais

déclare faire prévaloir des objectifs stratégiques : « Il y a un biais car on est nous-mêmes porteurs de

a une approche très transversale. Il ne faut pas qu’on soit juge et partie. Je ne me suis donc montrée aussi exigeante qu’avec les autres opérateurs, c'est-à-dire que les services municipaux doivent répondre à des objectifs définis par le contrat. Grâce aux thématiques définies en amont, on a essayé de partir des problématiques peu prises en compte par les associations ».

À Lormont, c’est la création, en 2001, d’une Direction générale de la politique de la ville qui semble avoir permis une clarification avec les services municipaux comme avec les associations, moins enclines par conséquent à suspecter un quelconque favoritisme : « Le fait qu’on soit une direction et pas un service est

important en termes d’affichage. C’est la même chose avec le fait qu’on ne soit pas nous-mêmes opérateur. On n’est pas juge et partie. On a le même regard sur les services municipaux et sur les associations. Si on était dans un service opérationnel, ça changerait la donne des relations. En pratique, on est plutôt juge de paix ».

La ville de Lormont se démarque aussi des deux autres villes en refusant de se convertir à la méthode de l’appel à projets. Elle signe en effet des conventions de mutualisation en début d’année, avec la préfecture, avant même que la programmation soit validée par cette dernière. Ce mécanisme permet à la mairie de mandater 50% de l’enveloppe prévisionnelle aux opérateurs en attendant que la préfecture délègue son enveloppe à la ville. Comme à Argenteuil, la logique lormontaise est celle d’une pluriannualité de fait puisqu’il y a validation annuelle de la programmation du Cucs. Chaque année, la DGPV adresse de nouvelles fiches-actions aux opérateurs de l’année précédente et uniquement à ceux- là, sauf si elle a été démarchée par une nouvelle structure. Mais ce cas de figure est très rare. Pour la programmation 2009, un seul opérateur nouveau, le Plie, a été retenu pour une action auparavant menée par le service municipal de l’emploi. Le réseau d’opérateurs financé par le Cucs est ainsi caractérisé par une grande stabilité. Comme le précise le directeur de la politique de la ville, « ce qui a changé avec le

Cucs, c’est qu’on sait quasiment d’une année sur l’autre quel est le montant de notre enveloppe, puisqu’elle est constante sur trois années. Cela donne un horizon de certitude aux opérateurs. Mais ça ne favorise pas l’émergence de nouvelles actions puisque tout se joue la première année ».

L’élaboration du Cucs de Lormont a été participative, comme à Argenteuil. Une première trame du projet a été écrite par la DGPV en 2006, avant d’être soumise aux porteurs de projets dans le cadre d’ateliers thématiques. Là aussi, la visée se voulait stratégique car ces ateliers ont servi à décliner les objectifs généraux du contrat en objectifs opérationnels, puis en moyens d’action. Contrairement aux acteurs d’Argenteuil, ceux de Lormont assument la continuité du travail avec les mêmes opérateurs : « C’est le

fruit de l’histoire de la politique de la ville. Il y a eu, depuis les années 80, un gros travail partenarial dans une ville qui est petite. Il est normal de retrouver les mêmes structures ». Le même interlocuteur ne cache

pas son hostilité au principe concurrentiel qui lui paraît antinomique… d’une maîtrise des opérateurs : « La

concurrence risque d’amener des mercenaires qui viendraient chercher de l’argent et sur lesquels on aurait pas forcément prise ». Des opérateurs extérieurs sont financés, mais ils émargent sur une seconde

programmation dite « d’agglomération » que la municipalité finance très peu, même si cherche aujourd'hui à cadrer les critères servant à leur sélection pour que leurs actions s’insèrent mieux dans le projet de territoire. Ces opérateurs intercommunaux ne s’inscrivent pas davantage dans la logique concurrentielle des appels projets de l’État. Au contraire, reconnaît un acteur local, « ils traitaient directement avec l’État