• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE III Evaluation des types de poussée durant le 2 ème stade du travail :

13. Résultats préliminaires de l’étude EOLE

14.6. Issues néonatales à l’accouchement

Nous n’avons pas retrouvé de différence significative entre les deux groupes concernant la morbidité néonatale à l’accouchement puisqu’aucun nouveau-né de l’étude n’a eu un Apgar<7 à 5 min ; nous avons retrouvé un OR = 1,15 [0,35-3,86] concernant la survenue d’un pH artériel<7,10 et seulement 10 nouveau-nés ont nécessité une réanimation à la naissance (4 du GI et 6 du GC) et 6 nouveau-nés ont nécessité une mutation (4 du GI et 2 du GC). Lemos et al. (2017) retrouvaient les mêmes conclusions que nous ; ils ne

180 retrouvaient pas de différence significative concernant l’admission en unité de néonatologie (RR= 1,08 [0,30-3,79]) ni concernant la survenue d’un Apgar <7 à 5 min (RR = 0,35 [0,01-8,43]). Barnett et Humenick (1982) avaient développé la théorie que la poussée type ‘Valsalva’ entraînerait une baisse du pH fœtale et donc du pH mesuré au sang de cordon à la naissance. Nous n’avons pas retrouvé de différence significative du pH ombilical artériel ou veineux à la naissance.

Dans la littérature, différents éléments semblent avoir un impact sur les issues néonatales comme, entre autres, le soutien continu qui diminuerait le risque de score d’Apgar bas à 5 minutes (Bohren, 2017) ou la durée des efforts expulsifs maternels puisqu’une DEE plus longue augmenterait le risque de complications néonatales (Grobman et al., 2016). Dans notre étude, on retrouve une durée des efforts expulsifs significativement plus longue dans le groupe « expiration » que dans le groupe « poussée bloquée ». L’hypothèse soutenue par Barnett et Humenick (1982) est alors peut être plausible mais gommée par la durée que nécessite des efforts expulsifs en expiration. Par ailleurs, même si nous n’avons pas retrouvé de différence significative sur la survenue d’anomalie du RCF pendant les EE (p=0,10) ou la répartition globale des RCF d’expulsion en fonction de la classification Melchior (p=0,27), nous remarquons tout de même plus de Melchior de type 1, les moins péjoratifs, dans le GI (60,6% vs 49,5%) et plus de Melchior type 3, plus péjoratifs, dans le GC (29,5% vs 18,1%). Une seconde analyse des différents rythmes d’expulsion en utilisant une autre classification comme celle de la FIGO (Fédération Internationale de Gynécologie et d’Obstétrique) (Ayres-de-Campos et al., 2015) pourrait être intéressante. Cependant, l'interprétation des RCF lors de cette phase est délicate puisque tous les éléments diagnostiques du 1er stade du travail ne peuvent être directement appliqués à la deuxième et même, lorsqu'ils le sont, ils peuvent avoir des significations différentes (Tranquilli, 2012). En effet, les recommandations de la FIGO ne déclinent pas d’analyse spécifique pour cette phase et interpellent seulement sur la nécessité d’une action plus rapide dont l’interruption des EE maternels (Ayres-de-Campos et al., 2015). Cette pratique n’est pas courante en France et l’option la plus fréquemment adoptée en cas d’anomalie du RCF est d’envisager rapidement un accouchement opératoire (Dupuis et Simon, 2008). On voit donc que, durant la phase d’expulsion, certaines pratiques restent liées aux habitudes culturelles de chaque pays.

181 14.7. Vécu de l’accouchement

L’évaluation du vécu de l’accouchement, réalisée un mois après l’accouchement, n’a pas retrouvé de différence significative entre les 2 groupes lors de la comparaison du score moyen calculé pour chacune des 4 dimensions de la satisfaction (p>0,1), de la moyenne du score de vécu global (p=0,45) et du pourcentage de femmes ayant eu un mauvais vécu (score de vécu global ≤ 7) (p=0,28). Si l’on compare nos résultats aux publications ayant permis la validation de ce score, globalement le vécu des femmes de chaque groupe semble bon puisque les scores retrouvés sont comparables à ceux de leur groupe contrôle « ayant un bon vécu ». En effet, pour ce groupe, les auteurs retrouvaient un score de 1,26±0,44 pour la dimension « relation avec les soignants » (GI : 1,3 ± 0,4 et GC : 1,3 ± 0,5), un score de 1,78 ± 0,58 pour la dimension « émotions » (GI : 1,8 ± 0,6 et GC : 1,7 ± 0,5), un score de 1,52 ± 0,82 pour la dimension « premiers instants avec le nouveau-né » (GI : 1,4 ± 0,7 et GC :1,3 ± 0,6) et un score de 1,34 ± 0,50 pour « le ressenti à 1 mois » (GI : 1,3±0,6 et GC :1,3±0,5) (Carquillat et al., 2017). Nous retrouvons également une note moyenne de vécu plutôt bonne en comparaison avec leurs résultats puisque celle-ci est aux alentours de 8 (GI : 7,9 ± 2,3, GC : 8,1 ± 2,0). Cette même équipe avait retrouvé un moins bon vécu des femmes lors d’un accouchement opératoire, d’une césarienne programmée ou d’une césarienne en urgence en comparaison à un accouchement par voie basse spontanée puisqu’elle retrouvait des notes significativement plus basses dans chacun de ces 3 groupes aux alentours de 7, voire 5 en cas de césarienne en urgence (Carquillat et al., 2016).

Dans les publications portant sur la comparaison des 2 modes de poussée, Chang et al. (2011) et Yildirim et Beji (2008) retrouvaient un meilleur vécu des femmes dans le groupe poussée en expiration. Cependant, les 2 équipes ont utilisé des questionnaires de vécu non validés (‘Labour Pushing Experience Questionnaire’ pour Chang et al. et le ‘Postpartum Interview Form’ pour Yildirim et Beji). Ces évaluations ont été faites dans les 1 à 4 heures ayant suivi la naissance alors que l’on sait qu’une évaluation à distance est préférable afin d’éviter la période initiale d'euphorie ou de déni qui peut caractériser le début de la période du post-partum et de minimiser les réponses socialement souhaitables en remplissant le questionnaire sans la proximité des soignants (Carquillat et al., 2016).

Mesurer le vécu de l’accouchement et adapter nos pratiques en fonction du ressenti des femmes devraient occuper une place plus importante dans les recherches en périnatalité (Walker et al., 2015). En effet, les femmes ayant une peur de l'accouchement secondaire à

182 une expérience traumatique vécue lors d’une naissance espaceraient plus leur grossesse suivante et accoucheraient plus souvent par césarienne (Sydsjö et al., 2013).