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Introduction sur la méthode des éléments finis de frontière

3.3 Modélisation de la fuite à l’échelle du joint – une approche à deux échelles

3.3.2 Introduction sur la méthode des éléments finis de frontière

Avant de présenter la méthode des éléments finis de frontière adaptée à la méthode à deux échelles de la section précédente, il convient de l’introduire appliquée à l’équation de Laplace, qui en constitue une pièce maîtresse. Il s’agit d’une méthode numérique de résolution des problèmes aux limites de la même famille que la méthode des éléments finis dite « classique ». Elle présente un intérêt par rapport à cette dernière lorsqu’il n’est pas particulièrement utile de connaître les inconnues de l’équation à l’intérieur du domaine d’étude. Le problème est alors ramené sur la frontière du domaine, le réduisant ainsi d’une dimension (par exemple, un problème bidimensionnel est ramené à l’étude d’un problème unidimensionnel).

On considère un domaine homogène S de frontière C présenté sur la figure3.15. Dans ce domaine, la pression p satisfait à l’équation de Laplace (3.130a). Des conditions aux limites sont imposées pour définir le problème au limite. Ainsi, sur une portion C(1) de C,

une condition aux limites de Dirichlet s’applique (3.130b), la valeur du potentiel (ici la pression) est connue et prend la valeur f (qui est une fonction scalaire quelconque). Sur une autre portion de la frontière C(2) (avec C = C(1)∪ C(2)), une condition de Neumann

3.3 – Modélisation de la fuite à l’échelle du joint – une approche à deux échelles

Figure 3.15 – Domaine homogène bidimensionnel S de frontière C orientée. Des conditions aux limites de Dirichlet et/ou de Neumann s’appliquent sur la frontière.

valeur g (qui est également une fonction scalaire quelconque). La résolution du problème au limite (3.130) consistera alors à déterminer la pression sur la frontière là où sa dérivée normale est connue et vice versa.

2p ∂x2 + 2p ∂y2 = ∇ 2p= 0 dans S (3.130a) p= f sur C(1) (3.130b) ∂p ∂n = g sur C (2) (3.130c)

Pour aboutir à la formulation intégrale de frontière du problème (3.130), commençons par pondérer l’équation (3.130a) par une fonction quelconque φ suffisamment régulière et demandons à ce que l’intégrale de ce produit sur le domaine soit nulle (méthode des résidus pondérés) :

Z

S

φ∇2pdS = 0 (3.131)

D’autre part, on a l’identité vectorielle suivante :

φ∇2p= ∇ · (φ∇p) − ∇p · ∇φ (3.132)

En utilisant l’identité (3.132) dans (3.131), on obtient la forme ci-dessous : Z S ∇ ·(φ∇p) dS = Z S ∇p · ∇φdS (3.133)

Le processus se poursuit en appliquant le théorème de la divergence sur le membre de gauche de l’équation (3.133) d’une part, puis l’identité (3.132) en intervertissant le rôle de

pet φ sur le membre de droite d’autre part. Cela donne, après réarrangement des termes :

− Z S p∇2φdS = I C (φ∇p − p∇φ) · n dl (3.134)

L’équation (3.134) est la seconde identité de Green pour le laplacien. Dans celle-ci, n est un vecteur normal dirigé vers l’extérieur du domaine comme présenté en figure 3.15. La formulation obtenue ne permet pas encore d’être traitée par la méthode des éléments finis de frontière car elle n’est pas purement frontalière, en raison de l’intégrale de surface du membre de gauche. Pour s’en affranchir, on choisit φ comme solution élémentaire de l’équation de Laplace bidimensionnelle, c’est-à-dire solution de l’équation ci-dessous où

δ(x − ς) représente la distribution de Dirac appliquée à la position ς (voir figure3.15) :

3 – Application au problème de l’étanchéité x −10 −5 0 5 10 y −10 −5 0 5 10 φ −0.4 −0.2 0.0 0.2 0.4

Figure 3.16 – Représentation de la solution élémentaire φ de l’expression (3.136) avec

ς = 0, position de la source ponctuelle.

2φ= −δ(x − ς) (3.135)

L’expression de φ est alors la suivante (Huyakorn et Pinder, 1983), illustrée sur la figure 3.16:

φ(r) = − 1

2πln (r) (3.136)

avec r = kx − ςk la distance entre le point d’application de la singularité ς et un point quelconque du domaine x. La fonction φ s’interprète alors comme la réponse au point x à une sollicitation ponctuelle appliquée en ς. De plus, cette fonction est harmonique presque partout sauf lorsque x = ς où elle est singulière.

En insérant l’expression (3.135) dans le terme de gauche de l’équation (3.134) et en utilisant les propriétés de la distribution de Dirac, on aboutit à la formulation intégrale de frontière du problème de Laplace bidimensionnel sur le domaine S :

η(ς)p(ς) = I C  φ(x − ς)∂p(x) ∂n − p(x) ∂φ(x − ς) ∂n  dl (3.137)

Dans l’équation (3.137), on a noté ∂p/∂n = ∇p · n la dérivée dans la direction nor- male du champ de pression (et réciproquement pour φ). D’autre part, η est un coefficient numérique qui dépend de la position d’application de la singularité (Beer et al.,2008) :

η=

(

1 si ς ∈ S

0 si ς /∈ S (3.138)

Il reste alors à résoudre le problème (3.137) pour déterminer le potentiel et sa dérivée normale en chaque point de la frontière du domaine.

3.3 – Modélisation de la fuite à l’échelle du joint – une approche à deux échelles

Élément

constant Élémentlinéaire Élémentquadratique

Figure 3.17 – Discrétisation de la frontière réelle d’un domaine (traits pointillés) par dix éléments de différents types, de gauche à droite : éléments constants ; éléments linéaires ; éléments quadratiques. Les nœuds des éléments sont les points noirs. Les fonctions de base polynomiales Nj associées aux éléments sont également présentées.

3.3.2.1 Discrétisation du problème par la méthode des éléments finis de fron- tière

Il est bien souvent impossible de trouver de manière analytique le champ de potentiel et sa dérivée normale sur la frontière, solution de l’équation (3.137), pour un domaine S quelconque. Il faut alors résoudre le problème de manière approchée en faisant intervenir la méthode des éléments finis de frontière. La frontière est dans un premier temps discrétisée en un total de me éléments finis (voir par exemple la figure 3.17). Sur chaque élément, les fonctions inconnues sont représentées de la façon suivante :

p= mn X j=1 Nj(x)pj , ∂p ∂n = mn X j=1 Nj(x) ∂p ∂n  j (3.139)

avec mn le nombre de nœuds de l’élément considéré, Nj(x) sont les fonctions de base de l’élément et pj (resp. (∂p/∂n)j) sont les valeurs de p (resp. ∂p/∂n) au nœud j.

Ensuite, on suppose que l’équation intégrale (3.137) peut être représentée comme la somme des contributions de chaque élément du maillage. En utilisant les relations (3.139), on obtient : ηp= me X k=1 mn(k) X j=1 Z Ck φNj,k ∂p ∂n  j,k∂φ ∂nNj,kpj,k ! dlk (3.140)

Dans l’équation (3.140), la notation j, k désigne une grandeur à considérer pour le nœud d’indice j de l’élément k. D’autre part, le nombre de nœuds mn(k) peut dépendre de l’élément considéré k. On place ensuite le point de collocation ς de la source sur un nœud particulier d’indice i dans l’équation (3.140). En prenant alors η = 1, on obtient :

pi = me X k=1 mn(k) X j=1 Z Ck φiNj,k ∂p ∂n  j,k − ∂φ ∂n  i Nj,kpj,k ! dlk (3.141)

Pour un problème bien posé, sur un nœud où la pression est connue, sa dérivée normale est inconnue et inversement. L’équation (3.141) représente donc une équation comportant autant d’inconnues qu’il y a de nœuds dans le maillage. Pour obtenir un système d’équation pour p et ∂p/∂n, on place alors successivement le point de collocation sur tous les nœuds du maillage. Dans la suite de notre problème, nous considérons des éléments finis constants (la solution est constante sur chaque élément qui ne comporte alors qu’un unique nœud 113

3 – Application au problème de l’étanchéité

en son centre, ce qui mène à une unique fonction de base N1= 1). Le système d’équation

alors obtenu peut s’écrire sous forme matricielle de la manière suivante (en utilisant la convention de sommation d’Einstein) :

pi = Gij ∂p ∂n  j − Hijpj (3.142)

ou encore, en utilisant le symbole de Kronecker : (Hij + δij) pj = Gij∂p

∂n



j

(3.143) avec i ∈ [1; · · · ; me] et j ∈ [1; · · · ; me]. De plus, les éléments de matrices Gij et Hij, qui relatent l’effet sur l’élément j d’une source placée sur le nœud i, sont donnés par :

Gij = Z Cj φidlj , Hij = Z Cj ∂φ ∂n  i dlj (3.144)

Il est à noter que les matrices [G] et [H] (d’éléments Gij et Hij respectivement) sont gé- néralement denses. Avec le choix des éléments constants, l’évaluation des intégrales (3.144) peut se faire analytiquement (Huyakorn et Pinder,1983;Beer et al.,2008), ce qui est un avantage en terme de mise en œuvre numérique (voir en annexeEpour leurs expressions). Dans les cas contraires, pour des éléments finis de plus haut degré, il est nécessaire de procéder à une intégration numérique à l’aide d’une méthode de quadrature par exemple. Cette dernière méthode peut poser des difficultés supplémentaires pour le calcul des termes diagonaux qui nécessitent une intégration singulière.

Dans l’équation (3.142), les vecteurs des valeurs nodales pj et (∂p/∂n)j représentent à eux deux 2me coordonnées, parmi lesquelles un nombre me sont inconnues. Il est alors nécessaire de réarranger le système d’équations (3.142) de façon à avoir toutes les inconnues du problème d’un même côté de l’égalité, pour ensuite pouvoir le résoudre.

3.3.2.2 Détermination des champs internes

Après résolution du problème (3.137) (ou de sa version discrète (3.143)), la valeur du potentiel et de sa dérivée normale est connue en tout point de la frontière C. Il est alors possible dans ce cas de déterminer les valeurs du potentiel à l’intérieur du domaine S directement à partir de l’équation (3.137) en plaçant ς dans le domaine S. Sous forme discrète utilisant des éléments constants, c’est l’équation (3.142) qui est utilisée. l’indice i fait cette fois-ci référence à un point placé dans le domaine tandis que l’indice j désigne ici encore une valeur nodale.

De même, la dérivée du potentiel au point ς dans une direction quelconque χ est donnée par Brebbia et Chang(1979);Beer et al. (2008) :

∂p(ς) ∂χ = I C ∂φ(x − ς) ∂χ ∂p(x) ∂n − p(x) 2φ(x − ς) ∂χ∂n ! dl (3.145)

L’équation (3.145) permet par exemple de remonter au débit linéique dans la direction

χ, cette grandeur étant reliée linéairement à ∂p/∂χ (par exemple, qχ = −k∂p/∂χ, avec

k une coefficient de conductance). De manière analogue au traitement réalisé pour la

discrétisation de l’équation (3.137) aboutissant à l’équation (3.142), la discrétisation de (3.145) donne : ∂p ∂χ  i = Eij∂p ∂n  j − Fijpj (3.146)

Les éléments de matrices Eij et Fij, qui relatent l’effet de l’élément j au point d’indice

3.3 – Modélisation de la fuite à l’échelle du joint – une approche à deux échelles Eij = Z Cj ∂φ ∂χ  i dlj , Fij = Z Cj 2φ ∂χ∂n ! i dlj (3.147)

De nouvelles intégrales sont donc à calculer et pour des éléments constants, cela peut être fait analytiquement. Ainsi, le détail des calculs est donné en annexeE.