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la distribution de probabilit´e conjointe des valeurs de marqueur et du statut des patients.

Les courbes de pr´ediction constituent un outil utile pour analyser les risques pr´edits par un marqueur et la capacit´e de celui-ci `a discriminer les patients. Toutefois Margaret Pepe souligne que leur construction est plus complexe que celle de courbes ROC, les premi`eres n´ecessitant d’estimer des densit´es de probabilit´e, les secondes ne n´ecessitant l’estimation que de fonctions de r´epartition (Pepe et al., 2008).

3.4 Introduction de l’utilit´e

L’utilit´e esp´er´ee d’un marqueur dans une population est donn´ee par la formule (2.4). Elle est calculable `a partir des factorisations orient´ees marqueur et patient. N´eanmoins, les mesures de performance associ´ees `a ces deux types de factorisation n’int`egrent pas directement la notion d’utilit´e, ce qui limite leur capacit´e `a faire le choix entre plusieurs marqueurs.

Une difficult´e li´ee `a la notion d’utilit´e est qu’elle est relative `a la personne concern´ee ; ainsi, il n’y a pas une seule utilit´e esp´er´ee pour un marqueur, mais un ensemble d’utilit´es d´ependant des pr´ef´erences des patients et des cliniciens. Des outils sont donc n´ecessaires pour s´electionner un marqueur non pas sur une seule mesure d’utilit´e, mais pour un ensemble de mesures d’utilit´e repr´esentant les variations de pr´ef´erences existant au sein de la population cible.

3.4.1 Courbes ROC et courbes de risque

Les courbes ROC n’incluent pas directement la notion d’utilit´e. N´eanmoins, elles repr´e-sentent les sensibilit´es et sp´ecificit´es qui interviennent dans le calcul de l’utilit´e esp´er´ee, si la factorisation orient´ee marqueur est retenue (´equation 2.5). Si les courbes ROC associ´ees `a deux marqueurs ne se croisent pas, alors :

– quel que soit le ratio b´en´efice net sur coˆut net choisi, – quelle que soit la pr´evalence,

– et quel que soit le seuil de positivit´e choisi,

l’utilit´e esp´er´ee `a partir du marqueur ayant l’AROC la plus ´elev´ee est toujours sup´erieure `a celle du second marqueur. Dans ce cas, il n’est pas n´ecessaire de d´eterminer le ratio b´en´efice net sur coˆut net pour le choix du marqueur ; ce choix reste valable pour des populations aux pr´evalences diff´erentes. Ce n’est plus le cas lorsque les courbes ROC se croisent ; selon les valeurs de sp´ecificit´e, l’un des marqueurs est plus utile que l’autre et vice versa. Ainsi, l’utilit´e d’un des

3.4. Introduction de l’utilit´e 56 marqueurs n’est pas toujours sup´erieure `a celle des autres ind´ependamment de la pr´evalence et du ratio b´en´efice net sur coˆut net. La sp´ecification de ces deux derniers param`etres est n´ecessaire pour le choix du marqueur. Des AROC partielles ont ´et´e propos´ees (Pepe, 2003), consistant `a ne comparer l’AROC que pour une zone de valeurs de sp´ecificit´e qui pr´esentent un int´erˆet pour le probl`eme consid´er´e. Parfois, ceci permet de restreindre les courbes ROC `a des portions o`u elles sont emboˆıt´ees, mais d´efinir une zone de valeurs de sp´ecificit´e d’int´erˆet revient indirectement `a fixer la pr´evalence et le ratio b´en´efice net sur coˆut net.

Les mesures de performance li´ees `a l’´etude de la calibration n’ont pas quant `a elles pour objectif de classer les patients ; elles sont donc totalement ind´ependantes de l’action r´ealis´ee en fonction de la valeur du marqueur. Ainsi, l’int´egration de la notion d’utilit´e dans ces mesures est difficile. L’utilit´e intervient indirectement dans les courbes de pr´ediction, dans le choix des limites de risque basses et ´elev´ees, mais ces limites peuvent varier d’une ´equipe de soin `a l’autre, en fonction du ratio b´en´efice net sur coˆut net. Un outil est donc n´ecessaire pour d´eterminer les gammes de valeurs de ratio b´en´efice net sur coˆut net dans lesquelles le marqueur est utile. Ce sont les courbes de d´ecision.

3.4.2 Courbes de d´ecision

Les courbes de d´ecision, pr´esent´ees entre autres dans les articles de Vikers et Elkin (Vickers et Elkin, 2006) et de Vickers et al. (Vickers et al., 2008), repr´esentent l’utilit´e des diff´erents marqueurs en fonction du ratio b´en´efice net sur coˆut net choisi, pour une valeur de pr´evalence fix´ee. Ainsi, il est facile de d´eterminer dans quelle gamme de ratio b´en´efice net sur coˆut net un marqueur est utile. En r´ealit´e, la repr´esentation n’est pas effectu´ee en fonction du ratio b´en´efice net sur coˆut net, mais en fonction de la probabilit´e de survenue de la maladie `a partir de laquelle un patient accepterait d’ˆetre trait´e, ou `a partir de laquelle un clinicien conseillerait le traitement. Cette probabilit´e et le ratio b´en´efice net sur coˆut net sont deux fa¸cons ´equivalentes de quantifier les pr´ef´erences des patients ou des cliniciens.

Supposons qu’il existe un mod`ele permettant de pr´edire le risque de maladie d’un patient en fonction de sa valeur de marqueur : si le risque pr´edit est proche de 1, le patient va pro-bablement accepter le traitement ; `a l’inverse, si le risque pr´edit est proche de 0, le patient va probablement le refuser ; entre les deux, il existe une valeur de risque pour laquelle le patient est ind´ecis. Cette probabilit´e, not´ee par la suite r, est la probabilit´e de maladie pour laquelle l’utilit´e esp´er´ee en traitant un patient est ´egale `a l’utilit´e esp´er´ee en ne traitant pas un patient.

3.4. Introduction de l’utilit´e 57 Ainsi :

r× u(zT M) + (1 − r) × u(zT ¯M) = r × u(zT M¯ ) + (1 − r) × u(zT ¯¯M) Apr`es quelques transformations, il peut ˆetre montr´e que :

BN

CN = 1 − r

r ⇔ r = 1

1 + BN/CN

Ainsi, les pr´ef´erences des cliniciens et des patients sont quantifiables `a la fois en termes de ratio b´en´efice net sur coˆut net et en termes de probabilit´e ou risque `a partir duquel le traitement est propos´e ou accept´e. Par la suite, l’une ou l’autre des notions sera utilis´ee pour quantifier les pr´ef´erences. N´eanmoins, il est `a noter que le ratio b´en´efice net sur coˆut net s’interpr`ete essentiellement pour un ensemble d’individus, alors que la probabilit´e de maladie `a partir de laquelle le traitement est accept´e peut plus facilement s’interpr´eter `a l’´echelle d’un individu.

Vickers et Elkin ne calculent pas l’utilit´e `a partir des formules 2.4 ou 2.5, mais `a partir d’une fonction qui est maximis´ee pour les mˆemes valeurs de sensibilit´e et de sp´ecificit´e :

B´en´efice esp´er´e de l’action = Sen × π − (1 − Spe) × (1 − π) ×1 − rr (3.3) Si le b´en´efice associ´e `a l’action de traiter un patient malade par rapport `a ne pas le traiter est fix´e arbitrairement `a 1, alors le coˆut net associ´e au fait de traiter `a tort un patient non malade est donn´e par r/(1 − r) ; ainsi, le b´en´efice esp´er´e en traitant un patient est donn´e par la relation (3.3). Un marqueur qui ne classerait aucun patient comme malade (et avec lequel aucun patient ne serait trait´e) aurait un b´en´efice esp´er´e du traitement nul.

En repr´esentant le b´en´efice esp´er´e du traitement associ´e `a l’utilisation de chaque marqueur en fonction du risque `a partir duquel un patient accepte d’ˆetre trait´e (r), il est possible de d´eterminer dans quelles zones chacun des marqueurs est plus utile que les autres.

Lorsque qu’un marqueur prend des valeurs continues, le b´en´efice esp´er´e du traitement pour la valeur r est calcul´e `a partir des estimations de sensibilit´e et de sp´ecificit´e associ´ees au seuil du marqueur qui maximise l’utilit´e pour la valeur r en question.

Ces courbes de d´ecisions permettent d’introduire dans le choix du marqueur l’utilit´e as-soci´ee `a chacune des situations possibles suite `a la mesure du marqueur, ainsi que la variabilit´e de ces utilit´es d’un patient ou d’un clinicien `a l’autre.