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III. Les interactions entre la photorespiration et le métabolisme primaire dans les

1) Interactions avec la photosynthèse

La photorespiration et la photosynthèse sont liées via le partage de la RuBisCO, mais aussi

via la régénération du RuBP. En effet, le recyclage photorespiratoire des carbones du 2-PG va

produire du 3-PGA qui peut être utilisé par le cycle de Calvin-Benson pour régénérer du RuBP. Les premiers mutants photorespiratoires pour les enzymes PGLP, SHMT, SGAT et GDC chez A. thaliana identifiés par Somerville et Ogren présentaient un retard de croissance, associé à une inhibition de plus de 60% de l’assimilation nette de CO2 dans l’air. De façon

remarquable, chez ces mutants, cette inhibition était fonction de la concentration en oxygène dans l’air (inhibition résiduelle dans 2% O2, plus forte inhibition dans 50% O2) (Somerville et

Ogren, 1979, 1980, 1981, 1982). D’autres mutants pour les enzymes Fd-GOGAT, PGLP, GLYK et le transporteur DiT, présentaient eux-aussi jusqu’à 60% d’inhibition de l’assimilation nette de CO2 après une heure ou un jour de transfert de fort CO2 dans l’air

(Timm et al., 2012 ; Takahashi et al., 2007). L’ensemble de ces données montre que la fixation nette de CO2 est réduite chez les mutants photorespiratoires, et par conséquent

l’activité carboxylase de la RuBisCO. Cette activité peut être réduite in vivo par une diminution de l’état d’activation de la RuBisCO, une diminution de la quantité de RuBisCO, une diminution de la quantité de CO2 (via l’ouverture stomatique) et/ou une diminution de la

quantité de RuBP (défaut de production ou de recyclage). Chez les mutants photorespiratoires d’A. thaliana pour les enzymes SHMT, Fd-GOGAT et le complexe GDC, la quantité de RuBP dans les feuilles est fortement diminuée après 30 min de lumière dans un air à 50% O2

(Chastain et Ogren, 1989). Chez le riz, des lignées antisens pour la GOX qui montrent une croissance et une assimilation nette de CO2 plus faible dans l’air, ont un rendement quantique

du PSII diminué dès 40% d’activité GOX restante dans les feuilles. Ces plantes expriment moins le gène codant la RuBisCO activase, et ont une diminution de l’état d’activation de la RuBisCO (Xu et al., 2009). Ceci suggère que l’inhibition de la photosynthèse par la photorespiration pourrait être multiple et liée au recyclage du carbone pour produire du RuBP par le cycle de Calvin-Benson, mais aussi à l’état d’activation de la RuBisCO. Une hypothèse avancée dans la littérature pour expliquer cette inhibition photosynthétique par la photorespiration serait l’effet toxique de certains intermédiaires du cycle photorespiratoire sur la RuBisCO et/ou d’autres enzymes faisant parties du cycle de Calvin-Benson. En effet, il a déjà été montré in vitro que le 2-PG inhibe la triose phosphate isomérase purifiée à partir de feuilles chez P. sativum (enzyme du cycle de Calvin-Benson essentielle à la régénération du

RuBP) (Anderson, 1971). Aussi, le glyoxylate peut inhiber :

- L’activité in vitro de la RuBisCO purifiée à partir de feuilles d’épinard (Cook et al., 1985), ou dans les chloroplastes d’épinard (Campbell et Ogren, 1990) et des feuilles d’A. thaliana (Chastain et Ogren, 1989).

- L’activation de la RuBisCO à la lumière (Mulligan et al., 1983; Chastain et Ogren, 1989) ou par la RuBisCO activase d’épinard (Campbell et Ogren, 1990) dans les chloroplastes d’épinard.

Récemment, une corrélation a été observée entre l’inhibition de la photosynthèse et l’accumulation du glyoxylate dans les feuilles de lignées transgéniques pouvant éteindre l’expression du gène OsGLO4 (codant une GOX) chez le riz (Lu et al., 2013). Donc l’accumulation de 2-PG et/ou de glyoxylate suite à l’interruption du cycle photorespiratoire pourrait conduire à l’inhibition de l’activité carboxylase de la RuBisCO (Figure 8). Chez

A. thaliana, des plantes surexprimant les protéines H ou L du complexe GDC montraient une

plus grande assimilation nette de CO2, avec une activité photorespiratoire plus intense et une

diminution de la quantité de glycolate, de glycérate et du ratio glycine/sérine (Timm et al., 2013b ; Timm et al., 2015). L’état d’activation de la RuBisCO chez les lignées surexprimant la protéine L était plus élevée que le contrôle. Ici, c’est la diminution du glycolate et le changement du ratio glycine/sérine qui pourrait promouvoir l’état d’activation de la RuBisCO. Cependant, des lignées antisens pour la GOX chez le riz qui montrent une inhibition de l’activité RuBisCO accumulent beaucoup de glycolate, mais pas de glyoxylate (Xu et al., 2009).

Par ailleurs, le phénomène d’inhibition photosynthétique par la photorespiration pourrait perdurer à cause de l’accumulation de produits de la chaîne de transfert d’électrons photosynthétique. Suite à une diminution de la photorespiration, le ralentissement du recyclage du carbone pour le RuBP ainsi que la diminution de l’état d’activation de la RuBisCO devraient impacter sur l’activité du cycle de Calvin-Benson, et conduire à l’accumulation transitoire de NADPH et d’ATP dans les chloroplastes. Cela provoquerait alors le ralentissement du transfert d’électrons photosynthétique qui pourrait s’accompagner de la production de ROS, composés pouvant endommager le PSII (Nath et al., 2013). Suite à un transfert de fort CO2 dans l’air, des mutants pour les protéines Fd-GOGAT , DiT, SHMT et

Figure 8. Schéma simplifié des interactions possibles entre la photosynthèse et la photorespiration chez un mutant photorespiratoire. L’interruption du recyclage photorespiratoire du carbone inhibe le recyclage du RuBP par le cycle de Calvin-Benson, conduisant à la photoinhibition. L’accumulation du glyoxylate pourrait aussi inhiber l’activité et/ou l’état d’activation de la RuBisCO. L’accumulation d’ATP et de pouvoir réducteur inhiberait le transfert d’électrons photosynthétique, conduisant à une dissipation de l’excès d’énergie absorbée par les photosystèmes sous forme de chaleur, ainsi que des fuites d’électrons au niveau de la chaîne. La production de ROS engendrée par ces fuites dégraderait la protéine D1. Or la synthèse de novo de cette protéine est inhibée chez les mutants photorespiratoires, conduisant alors à la dégradation irréversible des PSII, et l’apparition de la photoinhibition (adapté de Takahashi et al., 2007).

(NPQ), en plus d’une inhibition de la fixation de CO2 (Takahashi et al., 2007). Le NPQ

correspond à la réduction de la fluorescence chlorophyllienne émise par le LHCII/PSII qui n’est pas due à la photochimie. Cette réduction est associée à trois processus : la dissipation par chaleur, le changement d’état de transition des photosystèmes (State1-State2), et la photoinhibition (dégradation de protéines associées aux photosystèmes) (Horton et al., 1996 ; Maxwell et Johnson, 2000). Le rapport Fv/Fm (efficacité maximale photochimique du PSII)

était fortement diminué dans l’air chez ces mutants, et dépendant du transfert d’électrons photosynthétique, qui diminuait lui aussi. Il a été démontré que la protéine D1 du centre réactionnel des PSII était dégradée chez les mutants et les plantes sauvages, mais que la synthèse de novo de cette protéine était uniquement inhibée chez ces mutants dans l’air. Ceci implique que l’augmentation du NPQ est la conséquence d’une photoinhibition (Takahashi et

al., 2007). Les auteurs ont proposé que la production de ROS chloroplastique par le

ralentissement du transfert d’électrons (via inhibition photorespiratoire de l’activité du cycle de Calvin-Benson) était la cause de cette dégradation (Figure 8; Takahashi et al., 2007).