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2. É VALUATION DE LA PHYTOMASSE EPIGEE ET DE LA PRODUCTIVITE DU THURIFERE A

2.4. Intérêts, limites et avantages de la méthode

La principale limite de la méthode est la nécessité de pouvoir discerner sur la photo, le contour de l'arbre. Les houppiers de deux arbres voisins ne doivent donc pas ou peu se chevaucher. Il en découle que cette méthode est avant tout adaptée aux milieux ouverts comme les formations pré-steppiques, les matorrals et certaines forêts méditerranéennes, mais aussi aux savanes et toundra piquetées de ligneux. Sa précision étant en grande partie conditionnée par la densité des différents pixels, leur échantillonnage doit être représentatif du compartiment pour lequel ils codent. Un soin particulier doit donc être apporté à cette étape méthodologique.

Un des principaux avantages de cette méthode est sa facilité d'utilisation sur le terrain et son faible coût de mise en œuvre, puisqu'une personne seule peut réaliser le travail. Le matériel est en effet très léger, et aucun abattage d'arbre n'étant requis, une équipe de forestiers n'est pas nécessaire.

Cette méthode se montre en outre relativement fiable pour l'étude de la biomasse d'arbres isolés, aussi bien que pour l'estimation de la biomasse des peuplements. Prenant en compte l'architecture de l'arbre, elle permet également l'estimation de la biomasse et de la productivité d'espèces aux formes tourmentées telles que Juniperus indica (Esper et al., 1995) ou Pinus aristata (Brunstein & Yamaguchi, 1992), qui ne peuvent être étudiées de ce point de vue, en utilisant des équations de régression basées sur de simples paramètres dendrométriques. Cette méthode étant de plus non destructive, elle peut permettre de suivre l'évolution de la biomasse individuelle d'un arbre et de ses différents compartiments, en prenant des photos à plusieurs années d'intervalle. On peut donc envisager un suivi de l'accroissement en biomasse d'un individu, ou au contraire étudier sur une parcelle témoin, les effets du pâturage et des prélèvements de bois de feu.

Ne perturbant pas l'environnement, elle peut par ailleurs fournir des données précises de biomasse sur des écosystèmes fragilisés par une intense dégradation anthropique ou des changements climatiques (par exemple les peuplements à Juniperus excelsa dans les montagnes d'Oman (Fisher & Gardner, 1995)), ou encore sur des espèces protégées ou menacées comme l'arganier (Argania spinosa) au Maroc (El Yousfi & Benchekroun, 1992) ou le Pin aristé (Pinus aristata) dans les White Mountains an Californie (Fergusson, 1968).

3. CARACTERISTIQUES MORPHOLOGIQUES DES GENEVRIERS THURIFERES : "ETUDE DES FORMES"

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Que ce soit à l'échelle stationnelle, régionale, nationale ou sur l'ensemble de son aire de répartition, le Genévrier thurifère présente une diversité architecturale importante, résultat de l'interaction entre des facteurs endogènes et exogènes dont il est parfois difficile de préciser le rôle. Certains types morphologiques sont communs à plusieurs pays, mais il existe également de nombreuses formes propres à chacun d'eux car liées à des pratiques culturales locales ou régionales, à un usage social ou économique, ainsi qu'à des conditions écologiques particulières.

En France, on dénombre environ huit grands groupes architecturaux (Lathuillière, 1994a; Franc, 1994; Polidori, 1986):

- La forme ovoïde: elle regroupe des arbres dont le houppier est bien développé (non dégradé), de forme globuleuse, et dont le tronc (généralement unique) est massif mais relativement court.

- La forme cupressoïde: comme son nom l'indique, elle correspond au type architectural du Cyprès. Le houppier est généralement peu étendu mais relativement développé en hauteur, partant dès la base de l'arbre. Ce type morphologique correspond généralement à celui de jeunes individus.

- La forme en "Quenouille": elle correspond à la forme cupressoïde mais dont le houppier ne débute pas dès la base du tronc.

- La forme conique: elle correspond à une forme cupressoïde dont le houppier est beaucoup plus élargi à la base.

- La forme arborescente: elle caractérise les arbres dont le houppier est généralement bien développé, de forme variable, et dont le tronc est souvent unique et bien dégagé du houppier. - La forme en cépée: elle regroupe les arbres ayant développé des troncs multiples, conséquence des contraintes environnementales ou de facteurs endogènes.

- La forme en drapeau: elle est caractérisée par un houppier se développant sur un côté de l'arbre uniquement, et se manifeste généralement dans des situations exposées au vent, notamment sur les crêtes.

- La forme tourmentée: elle réunit des arbres souvent âgés, dont la variété de formes est généralement issue de nombreuses mutilations.

- La forme étalée: la largeur du houppier est très importante par rapport à la hauteur totale de l'arbre et la couronne descends souvent jusqu'au sol.

C'est dans les Alpes que l'on rencontre la plus grande diversité morphologique, dû à la grande variété de conditions stationnelles dans lesquelles se développe cette essence. Les facteurs à l'origine de la forme de l'arbre sont variés. On y trouve l'influence du climat (vent, neige, ...), de la pente, de l'exposition, du substrat rocheux et des phénomènes de compétition intra- et inter-spécifique dans les secteurs les plus denses. Les dégradations d'origine anthropique y sont actuellement négligeables, mais celles pratiquées par le passé sont encore visibles sur les plus vieux individus. L'âge est également un facteur intervenant dans la forme de l'arbre mais son effet est souvent masqué par les facteurs précédemment décris.

Dans les peuplements pyrénéens, la superficie occupée par ce taxon est très réduite et les conditions écologiques relativement homogènes. On rencontre cependant plusieurs types morphologiques différents, mais concernant souvent un petit nombre d'individus. La forme conique y est très majoritaire, mais on y trouve aussi quelques individus au port tourmenté, cupressoïde, sphérique, étalé ou en cépée (Franc, 1994; Bertaudière et al., 1999).

En Espagne, la superficie occupée par le Genévrier thurifère est telle que l'on y trouve toutes les formes décrites pour les populations françaises, mais également des formes particulières liées à diverses pratiques sylvicoles ou au pâturage (cf. Figure 22).

(d'après Blanco Castro et al., 1997)

Figure 22: Différentes silhouettes de genévriers thurifères en Espagne

On y rencontre notamment des thurifères dont la base du tronc a été élaguée afin de permettre le développement d'une strate herbacée sous le houppier de l'arbre, pour favoriser le pâturage

(cf. Planche 2 p. 81, Photo n° 7). Cette pratique sylvicole permet en outre de récupérer les branches issues de l'élagage comme bois de chauffage.

Un autre type morphologique très particulier est celui présenté sur la Photo n° 8 (cf. Planche 2, p. 81), fréquent dans la région d'Arcones, mais nous ne possédons pas suffisamment d'éléments pour tenter d'expliquer le déterminisme de cette forme.

Au Maroc, dans les limites géographiques de la vallée de l'Azzaden, nous avons tenté de décrire les grands types architecturaux et de déterminer les facteurs qui en sont à l'origine. Dans ce but, au codage numérique des arbres, issu de la méthode de mesure de la phytomasse, a été substitué un codage par couleurs, afin d'obtenir une représentation schématique de la forme des 102 individus échantillonnés. Ce type de représentation présente deux avantages pour une visualisation rapide de la forme générale de l'arbre:

¾ suppression de l'arrière plan et des ombres qui sur la photo constituent une gêne visuelle

¾ passage en mode bicolore permettant de distinguer plus facilement les différents compartiments de l'arbre (feuillage, tronc et branches).