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méthodes pour mesurer les investissements en faveur du capital humain et les rentes des ressources naturelles aux fins du calcul de la richesse totale et de l’épargne nette ajustée. Par exemple, le capital humain correspond, dans le calcul de la richesse totale, à la valeur actuelle des revenus de la population active et, dans celui de l’épargne nette ajustée, à l’investissement public dans l’éducation.

Là encore, s’ils peuvent influer sur le rendement de divers actifs, y compris le capital humain, et donc sur leur valeur dans le système de comptabilisation de la richesse, les changements de politique tels que les réformes de l’environnement des entreprises n’ont pas pour autant de répercussion sur le calcul de l’épargne nette ajustée. Enfin, le calcul de l’épargne nette ajustée tient rarement compte de plusieurs déterminants de la richesse nationale, parmi lesquels  : i) l’évolution de l’utilisation des terres  ; ii) les découvertes de gisements  ; iii) les incidences du progrès technologique sur la productivité d’un actif ; iv) le volume des ressources économiquement exploitables (Lange et al., 2018).

La figure 2.23 donne une vue d’ensemble de l’évolution de l’épargne nette ajustée du groupe des PMA. Chaque composante représente une certaine part du revenu national brut (RNB), dont la moyenne est calculée sur plusieurs décennies jusqu’à 2019 (les effets éventuels de la crise de la COVID-19 ne sont donc pas pris en considération)30. Dans un certain nombre de PMA, l’amélioration progressive des fondamentaux macroéconomiques a entraîné un accroissement notable de l’épargne nationale brute, dont le poids dans le RNB a doublé. Cette expansion remarquable s’est toutefois accompagnée d’un

30 Les données disponibles concernant l’épargne nette ajustée sont plutôt fragmentaires pour le groupe des PMA, qui ne fait l’objet d’estimations globales que depuis 1980.

Elles le sont encore plus pour ces pays pris isolément.

Les diagrammes ci-dessous présentent donc uniquement des données groupées et se limitent aux périodes où ces chiffres portaient sur au moins la moitié des PMA.

épuisement graduel des ressources naturelles, notamment énergétiques et forestières. Dans le même temps, les dépenses d’éducation en pourcentage du RNB n’ont que très peu progressé, passant de 2,4 % en moyenne dans les années 1980 à 2,7  % dans les années 2010. Par conséquent, cette embellie macroéconomique ne s’est que partiellement traduite par une augmentation du montant total de l’épargne nette ajustée du groupe des PMA.

Ces données agrégées masquent néanmoins de fortes disparités entre les différents PMA, comme le montre le diagramme en boîte de l’épuisement des ressources naturelles en pourcentage de RNB (fig. 2.24). Elles révèlent une augmentation généralisée des coûts associés à l’épuisement des ressources naturelles, exprimés en part de RNB, et des écarts croissants entre les différents pays. Pendant la période 2016-2018, l’épuisement des ressources naturelles a dépassé 10 % du RNB dans 13 des 42 PMA pour lesquels des données sont disponibles. À l’opposé, cette même variable représentait moins de 1  % du RNB dans 12 autres PMA. Il est intéressant de noter que l’épuisement des ressources naturelles semble commencer à s’accélérer avant le « super-cycle des produits de base » du milieu des années 2000 et qu’il ne fléchit pas après la crise économique et financière mondiale de 2008/09, confortant ainsi l’idée que la dépendance à l’égard des ressources naturelles, en particulier des produits de base, demeure une caractéristique structurelle de nombreux PMA (UNCTAD, 2010, 2016a, 2019d).

L’évolution de l’épargne nette ajustée dans les différents PMA s’inscrit dans une tendance analogue et renforce les inquiétudes sur la durabilité évoquées plus haut. Malgré l’augmentation globale de l’épargne nette ajustée du groupe des PMA (fig.  2.23), des disparités de plus en plus grandes semblent se dessiner entre ces pays. En effet, l’écart interquartile augmente tandis que la valeur médiane oscille entre 3 et 5  % du RNB depuis trente ans (fig. 2.25). En outre, pas moins de 15 des 37 PMA pour lesquels des données sont disponibles, dont de nombreux pays tributaires des produits de base (africains pour la plupart), ont affiché une épargne nette ajustée négative sur la période 2016-2018.

Ainsi, en l’absence de toute transformation structurelle, il reste difficile d’envisager, au moins en termes relatifs, de faire en sorte que les résultats économiques des PMA ne dépendent plus uniquement de leurs ressources naturelles, situation qui fait peser de nombreux risques sur leurs perspectives de durabilité.

Faute de créer de la valeur ajoutée

Figure 2.23

Épargne nette ajustée du groupe des PMA

0 5 10 15 20 25 30

Épargne

brute Consommation

de capital fixe Dépenses

d’éducation Épuisement

de l’énergie Épuisement

des minéraux Épuisement net des ressources

forestières

Préjudices liés au dioxyde de carbone

Préjudices liés aux émissions de particules

Épargne nette ajustée

Années 1980 (valeurs moyennes)

Pourcentage du RNB

Augmentation Diminution Total 0

5 10 15 20 25 30

Épargne

brute Consommation

de capital fixe Dépenses

d’éducation Épuisement

de l’énergie Épuisement

des minéraux Épuisement net des ressources

forestières

Préjudices liés au dioxyde de carbone

Préjudices liés aux émissions de particules

Épargne nette ajustée

Années 1990 (valeurs moyennes)

Pourcentage du RNB

0 5 10 15 20 25 30

Épargne

brute Consommation

de capital fixe Dépenses

d’éducation Épuisement

de l’énergie Épuisement

des minéraux Épuisement net des ressources

forestières

Préjudices liés au dioxyde de carbone

Préjudices liés aux émissions de particules

Épargne nette ajustée

Années 2000 (valeurs moyennes)

Pourcentage du RNB

0 5 10 15 20 25 30

Épargne

brute Consommation

de capital fixe Dépenses

d’éducation Épuisement

de l’énergie Épuisement

des minéraux Épuisement net des ressources

forestières

Préjudices liés au dioxyde de carbone

Préjudices liés aux émissions de particules

Épargne nette ajustée

Années 2010 (valeurs moyennes)

Pourcentage du RNB

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données Indicateurs du développement dans le monde (date de consultation : février 2021).

Figure 2.25

Épargne nette ajustée dans les PMA, hors préjudices liés aux émissions de particules (1990-2018 ; en pourcentage du RNB)

-15 -10 -5 0 5 10 15 20

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Écart interquartile Médiane

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données Indicateurs du développement dans le monde (date de consultation : février 2021).

Figure 2.24

Diagramme en boîte de l’épuisement des ressources naturelles dans les PMA

(En pourcentage du RNB)

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45

1986-1988 1996-1998 2006-2008 2016-2018 Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de

données Indicateurs du développement dans le monde (date de consultation : février 2021).

Note : Les diagrammes en boîte offrent une représentation visuelle de la répartition par quartiles des données relatives aux PMA, en indiquant la moyenne (croix), la médiane (ligne horizontale), les premier et troisième quartiles (rectangle) ainsi que les valeurs minimum et maximum (moustaches) et les valeurs aberrantes.

E. Conclusions

Dans l’ensemble, l’analyse a mis en évidence des progrès encourageants dans les PMA depuis le milieu des années 1990. Au cours de cette période, ces pays ont connu un regain de dynamisme économique, un ralentissement moins fréquent de leur croissance et, dans certains cas, les prémices d’une transformation structurelle. Malgré ces améliorations, la plupart d’entre eux sont restés à la traîne en matière de revenu par habitant, avec une hausse timide de la productivité du travail et un risque persistant de désindustrialisation prématurée. Ces tendances, elles-mêmes imputables au faible développement des capacités productives des PMA, étaient également associées à un manque d’inclusivité et à une pression grandissante sur les ressources naturelles, autant d’éléments grevant les perspectives de durabilité.

Si l’on ne peut pas encore en mesurer précisément les conséquences, il est d’ores et déjà clair que le choc provoqué par la COVID-19 pourrait faire dérailler les progrès des PMA même les plus performants, ce qui aggraverait les inégalités au niveau mondial et risquerait d’anéantir les avancées obtenues dans le cadre du Programme de développement durable

la dépendance à l’égard des produits primaires, améliorer l’efficacité de l’utilisation des ressources naturelles et resserrer les liens entre secteurs d’activité pourrait ouvrir la voie à une industrialisation fondée sur les produits de base. Il importe à cette fin d’appréhender l’impératif de durabilité selon une approche prospective, tout en mettant en place des politiques industrielles audacieuses et un écosystème efficace en matière de science, de technologie et d’innovation (STI). Quatrièmement, bien qu’elle marque le pas depuis le début du nouveau Millénaire, la tendance à l’alternance de phases d’expansion et de récession reste plus prononcée dans les PMA qu’ailleurs dans le monde, et le fait que ces pays disposaient de bien moins de ressources au moment où la COVID-19 les faisait basculer dans la récession qu’au plus fort de la crise financière internationale en 2008/09 n’augure rien de bon pour la reprise à venir.

Il est par conséquent primordial que la communauté internationale mette davantage de ressources financières à la disposition des PMA pour faire face au ralentissement de l’activité, tout en contribuant à renforcer leurs capacités institutionnelles afin de i) leur permettre de s’approprier leurs stratégies de relance respectives  ; ii) garantir l’efficacité des dépenses publiques ; iii) renforcer la cohérence des politiques.

à l’horizon 2030. Aussi les PMA et la communauté internationale doivent-ils impérativement poursuivre leurs efforts pour éviter ce scénario périlleux.

Quatre enseignements tirés de l’expérience des PMA ces cinquante dernières années devraient guider les mesures actuelles visant à poser les fondements d’une reprise inclusive et durable. Premièrement, il demeure capital, aujourd’hui plus que jamais, de maintenir un niveau d’investissement suffisant, y compris l’investissement public dans les infrastructures et le capital humain, non seulement pour soutenir la demande globale, mais aussi pour jeter les bases de la croissance à venir. Il est donc essentiel d’intégrer le développement des capacités productives dans les politiques de riposte et les plans de relance des PMA.

Deuxièmement, on ne peut assurer la prospérité à long terme sans améliorer la productivité, non seulement au sein des différents secteurs grâce à l’intensification du capital et à l’innovation, mais également − et c’est peut-être plus important encore − en réaffectant les ressources à des activités plus productives et novatrices. Troisièmement, on ne saurait trop insister sur l’importance de la création de valeur ajoutée au niveau national, qui n’est pas sans rapport avec ce qui précède  : ce levier essentiel pour sortir de

La complexification