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JM 83 K-12 Utilisable pour la sécrétion de protéines recombinantes dans le périplasme

2. Régulation par voie métabolique ou antibiotique de l’expression en « Cell-free »

2.3 Régulation de l’expression par un antibiotique

2.3.1 Inhibition de l’expression protéique

Cette inhibition de l’expression s’appuie sur une molécule bien décrite et connue depuis le siècle précédent, le chloramphénicol [Figure 2.13]. Cette molécule isolée pour la première fois à partir de Streptomyces venezuelae, par David Gottlieb (Gottlieb et al., 1948), fut le prototype de l’antibiotique à large spectre. Aussi connu sous son nom commercial Chlornitromycin®, il s’agit d’un antibiotique bactériostatique de la famille des phénicolés, qui est efficace contre un large ensemble de bactéries Gram-positives et Gram-négatives, et entre autre contre E. Coli.

Figure 2.13 : Le chloramphénicol sous sa forme active, extrait de Streptomyces venezuelae en 1948 par David Gottlieb

L’utilisation du Chloramphénicol comme inhibiteur de la synthèse de protéines est rendu possible du fait de l’utilisation d’un système CFRPS issu d’E. Coli sur lequel l’antibiotique bloque cette production (Wolfe and Hahn, 1965).

Le Chloramphénicol agit sur la formation de la liaison peptidique lors de la traduction de l’ARNm. Il se lie spécifiquement aux résidus Alanine 2451 et 2452 (Schifano et al., 2013) du centre peptidyltransférase de l’ARNr 23S de la sous-unité 50S du ribosome [Figure 2.14] (Gale et al., 1981).

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Figure 2.14 : Fixation du chloramphénicol sur la sous-unité 50S du ribosome. Le Chloramphénicol empêche la formation de la liaison peptidique, ce qui engendre un blocage du système de traduction : (1) Le ribosome ne se déplace plus sur l’ARNm, (2) Le site A étant occupé, l’ARNt-aminoacylé ne peut se lier à l’ARNm, (3) L’ARNt « porteur » du peptide ne peut pas le transférer car la peptidyl transférase est inhibé, il se retrouve donc bloqué et enfin (4) l’élongation du peptide est bloquée.

Dans un premier temps, nous avons cherché à caractériser l’efficacité de la molécule antibiotique sur la production d’une protéine fluorescente (YFP, Yellow Fluorescent Protein) à partir d’un plasmide ADN contenant le gène codant pour la YFP. L’expression génétique est assurée par des kits de PURExpress® (In vitro Protein Synthesis Kit, NEB) utilisés en tandem avec le plasmide ADN adapté. La caractérisation de la production protéique nécessite de faire appel à un outil classique de biochimie, le lecteur de microplaque (Biotek). Le signal de fluorescence de la YFP et de ses variantes donne en effet accès à la concentration de la protéine dans le milieu pour suivre son niveau d’expression.

Nous avons vérifié sur quelle gamme de concentration d’antibiotique nous pouvions observer un effet sur la production de protéines. Pour réaliser cela, nous sommes partis d’une solution 1X (2040 ng.µL-1) d’antibiotique et nous avons étudié l’effet de l’ajout de celui-ci à différentes dilutions. Nous avons fait varier cette concentration de 1X à 1/500X.

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On peut observer sur la Figure 2.15 l’évolution de l’intensité de la fluorescence au cours du temps en fonction de la quantité initiale de chloramphénicol. Tout d’abord, on peut constater qu’il y a une grande variabilité sur le triplicat de cette expérience, notamment pour l’expérience contrôle et pour l’expérience avec une dilution au centième. Les autres résultats présentent une variabilité beaucoup plus réduite. Dans le cas des courbes d’expression avec 1X et 1/5 d’antibiotique, il n’y pas de variation de cette intensité. Pour les dilutions suivantes, les intensités de fluorescences augmentent avec le temps, celles-ci augmentent d’autant plus que la concentration d’antibiotique de départ est faible. Les courbes tendent donc à se rapprocher de la courbe de l’expérience contrôle.

Nous pouvons ainsi constater que pour 1X et 1/5 d’antibiotiques, l’expression est complètement bloquée alors que l’expression n’est que partiellement bloquée pour les dilutions [Figure 2.15]. Néanmoins, nous avons pu constater que les niveaux finaux de fluorescence n’atteignaient jamais celui de l’échantillon contrôle, même après un temps d’incubation très long. Il semblerait donc que le système arrive à un état final différent lorsqu’il est en présence d’antibiotique. Ce constat et les résultats d’autres expériences seront discutés dans la partie suivante qui porte notamment sur l’inhibition réversible de l’expression.

D’après les résultats, nous utiliserons donc par la suite une concentration d’antibiotique égale au 1/5, soit 0,4µg.µL-1.

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Figure 2.15 : Effet de la concentration en antibiotique présent au lancement de l’expression sur la production de protéines fluorescentes (YFP). Les tracés du graphique représentent les moyennes de triplicats avec une enveloppe ayant pour largeur la déviation standard. [ADNfinale]= 8 ng.µL-1,[Chloinitiale]= 2040 ng.µL-1, incubation à 37 °C.

Protocole 1

Des échantillons de 25 µL sont préparés en assemblant 7 µL d'une eau sans ARNase (Sigma), 10 µL d'une solution A, 1 µL d'ADN à 100 ng.µL-1 et finalement 7 µL d'une solution B. Les solutions A et B proviennent du kit commercial PURExpress®. Les échantillons sont placés dans des puits de microplaque 384 puits et recouvert par 25 µL d’huile minérale (Sigma) afin d’éviter l’évaporation des échantillons pendant l’incubation à 37°C. Afin d’arrêter la traduction, 2 µL à 408 ng.µL-1 de Chloramphénicol sont ajoutés au cours de l’incubation.

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Figure 2.16 : Effet du chloramphénicol sur l’expression en fonction du temps d’injection. (A) Variation de l’intensité de fluorescence en fonction du temps pour des échantillons dans lesquels sont ajoutés du chloramphénicole à des temps d’injection (tinjection ) allant de 5 minutes (courbe rouge) à 45 minutes (courbe marron). + ADN correspond à l’échantillon référence. (B) Intensité de fluorescence à 150 minutes d’incubation pour des temps d’injection d’antibiotique allant de 5 à 45 minutes. L’intervalle entre chaque injection est de 5 minutes. [ADNfinale]= 8 ng.µL-1,[Chlofinale]= 33 ng.µL-1, incubation à 37 °C.

Les courbes d’évolution de l’intensité de la fluorescence de la Figure 2.16 A présentent bien le tracé caractéristique des courbes vues précédemment : les courbes suivent le même tracé, superposées les unes sur les autres, et se séparent suite à l’ajout de l’antibiotique pour évoluer vers un plateau d’intensité de fluorescence différent en fonction du temps d’ajout de la molécule inhibitrice. Lors de l’ajout du chloramphénicol, nous pouvons

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constater que l’augmentation de la fluorescence s’arrête après un certain délai. Plus l’antibiotique est ajouté tardivement, plus le plateau de fluorescence se rapproche de celui obtenu avec l’expérience contrôle ne contenant pas de chloramphénicol [Figure 2.16 A courbe +ADN]. Cette caractéristique concorde avec le phénomène de plateau que l’on peut observer sur la Figure 2.16 B. Le niveau de fluorescence étant lié à la quantité de protéines présentes. Nous pouvons donc contrôler la quantité de protéines produites en fonction du temps d’introduction de la molécule inhibitrice.