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Développement d’un système versatile pour la production de liposomes

unilamellaires géantes

1. Les protéines produites en « Cell-free »

1.2 Développement d’un système versatile pour la production de liposomes

Les liposomes géants sont de larges compartiments sphériques (5-200 µm) délimités par une bicouche lipidique qui forme leur membrane. Comme nous avons pu le voir précédemment, ils se révèlent être un modèle cellulaire et membranaire très utile (Fenz and Sengupta, 2012)(Rigaud et al., 1995).

Au cours des années, différentes méthodes pour la préparation de liposomes géants ont été développées afin d’acquérir des propriétés membranaires bien définies (Morales-Penningston et al., 2010) et la possibilité de fonctionnaliser le cœur des vésicules grâce à

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l’encapsulation de systèmes d’expression (Noireaux and Libchaber, 2004)(Walde et al., 2010).

A notre connaissance, l’utilisation de synthèse in vitro et l’insertion de protéines membranaires dans des liposomes géants n’ont été, jusqu’à aujourd’hui, accomplies que dans très peu de cas. Même si les rendements globaux sont modestes, l’utilisation de ces outils de production de protéoliposomes présente des avantages indéniables en termes de temps, si l’on compare ces nouveaux outils aux méthodes habituelles in vivo [Figure 5.1]

Figure 5.1 : Schéma comparatif du travail à fournir typiquement pour l'expression de protéines in vivo ou in vitro dans le cadre de la production de protéoliposomes

Des extraits cellulaires (E. Coli, WGE ou lysat de réticulocyte de lapins) ont été utilisés pour produire les canaux mécano-sensibles de petite (MscS) et grande (MscL) conductance présents chez Escherichia Coli (Battle et al., 2009), l’apo cytochrome B5

(Nomura et al., 2008) et les connexines Cx32 et Cx43 (Kaneda et al., 2009) dans leurs formes fonctionnelles enchâssées dans la membrane des liposomes géants.

Dans les exemples cités précédemment, les liposomes géants utilisés étaient obtenus par gonflement spontané. Même si cette technique reste robuste et simple à mettre en place,

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elle présente aussi des limitations, comme le rendement de production et la polydispersité. De plus les liposomes obtenus sont généralement multilamellaires. Or, l’étude des protéines membranaires requiert des liposomes unilamellaires.

Nous avons voulu développer un système plus versatile encore, permettant de générer, des GUVs dont la fonctionnalisation pourrait être suivie par microscopie confocale, le tout en une seule étape et dans un délai de quelques heures.

Dans un premier temps, nous avons commencé par produire les liposomes en utilisant l’électroformation. Cette technique permet en effet comme nous l’avons vu au chapitre précédent (chapitre 4 section 2.2) de produire des GUVs dont la forme sphérique est parfaitement définie et dont l’unilamellarité est certaine. L’inconvénient majeur de l’électroformation est qu’elle est très difficilement utilisable avec des systèmes comportant une force ionique élevée, bien qu’il existe des ajustements de champs électriques permettant la production de liposomes dans ces conditions (Pott et al., 2008)(Méléard et al., 2009). Compte tenu des volumes de réaction nécessaires à l’électroformation, nous avons préféré produire les liposomes dans une solution de sucrose. En post-production, nous nous retrouvions donc avec les liposomes baignant dans la solution de sucrose (chapitre 4 section 2.2 Figure 4.10). Le transfert des liposomes dans une solution assemblée de PURExpress®, engendrait également un transfert d’un volume non négligeable de la solution de sucrose, dans laquelle baignaient les liposomes. Bien qu’elle soit diluée dans la solution d’expression, nous avons remarqué que la présence de sucrose inhibait fortement l’expression des protéines.

Nous avons donc envisagé une autre approche. Pour réaliser cela, nous nous sommes basés sur le principe de la méthode de transfert décrite précédemment (chapitre 4 section 2.3.1) afin de produire les liposomes. L’avantage de cette technique par rapport à l’électroformation réside dans le fait que les liposomes sont introduits directement dans la solution d’expression dans laquelle nous produisons une protéine membranaire par l’intermédiaire du PURExpress® dans lequel des liposomes géants ont été transférés.

198 Protocole 3

Des échantillons de 20 µL sont préparés en assemblant 4 µL d'une eau sans ARNase (Sigma), 10 µL d'une solution A (5X), 2 µL d'ADN à 100 ng.µL-1 et 4 µL d'une solution B. Les solutions A et B proviennent du kit commercial PURExpress®. Les échantillons sont placés au fond des puits formés (5 mm de diamètre) à l’aide d’une lame de verre et d’un bloc de polydiméthylsiloxane (PDMS) poinçonné collé sur celle-ci. Le PDMS et le verre sont nettoyés à l’eau et à l’isopropanol, puis subissent un traitement au plasma d’oxygène pour finir de les nettoyer et d’activer leur surface afin de les coller. Le milieu d’expression est recouvert par 20 µL du mélange d’huile minérale (Sigma) et de phospholipide (0,5 mM EPC (L-α-phosphatidylcholine)) afin de former l’interface de phospholipides entre le milieu d’expression et l’huile minérale. L’assemblage est suivi d’un temps d’incubation de 15 minutes permettant la formation de l’interface de phospholipides entre le milieu d’expression et la phase hydrophobe. Ces deux étapes sont réalisées à 4 °C. La génération des GUVs se fait grâce à l’ajout de gouttelettes de sucrose préparées dans le même mélange d’huile minérale et de phospholipides (0,5 mM EPC) [Figure 5.2]. La solution de sucrose est constituée de sucrose (≈ 0,69 M dans un tampon phosphate salin (PBS) 1X pH = 7,4) et d’Azoture de sodium (NaN3 = 4,6 mM). La concentration de sucrose exacte est ajustée pour obtenir une solution isotonique au milieu d’expression cellulaire (≈990 mOsm) mesurée à l’aide d’un osmomètre cryoscopique (Löser). 20 µL de cette solution sont ajoutés et par différence de densité : les gouttelettes sont amenées à traverser l’interface et ainsi à former les GUVs.

Le montage est ensuite transféré dans une chambre d’incubation à 37 °C permettant ainsi l’expression de la protéine par le système CFRPS.

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Figure 5.2 : Schéma de préparation des protéoliposomes géants. Les gouttelettes de sucrose présentes dans l’huile contenant les phospholipides (0,5 mM EPC dans l’huile minérale) sont transférées par gravité pour générer des liposomes géants dans le milieu d’expression « cell-free » (PURExpress®) contenant l’ADN codant pour la Cx43-eGFP, une protéine membranaire connexin-43 fusionnée à une protéine eGFP permettant le suivi de l’expression et de l’insertion dans la membrane des liposomes géants par microscopie confocale.

La méthode de transfert a été adaptée de manière empirique par rapport à la méthode originalement décrite (cf chapitre 1 section 2.3.1). Nous avons utilisé le sucrose dans le but de faciliter le transfert à travers l’interface pour la formation des GUVs, mais aussi pour leur stabilité. En effet, le PURExpress® est un milieu présentant une forte osmolarité (≈ 990 mOsm dans nos conditions expérimentales), qui induit une rupture des liposomes si elle n’est pas contrebalancée, le sucrose nous permet de mettre en place un équilibre isotonique entre le contenu des GUVs et le milieu extérieur.

Le suivi par microscopie optique [Figure 5. 3] du transfert de liposome nous montre que la technique développée nous permet d’obtenir une population de liposomes géants dont le diamètre varie entre 20 et 120 µm, le tout dans un milieu d’expression « cell-free » (PURExpress®) présentant une haute osmolarité (≈ 990 mOsm).