CHAPITRE 1 - INTRODUCTION GENERALE
2. Contraintes Externes
2.1 Influence de la pression temporelle sur la capture attentionnelle
Généralement, cette dégradation sensorielle a été opérée par la réduction du temps
d'affichage des stimuli à l'écran, parfois appelée "pression temporelle" (Dalvit & Eimer, 2011 ;
Ester & Awh, 2008 ; Kiss et al., 2012 ; Lavie & de Fockert, 2003 ; Santee & Egeth, 1982 ;
Yeshurun & Marciano, 2013).
a) Quand la pression temporelle permet d'ignorer des distracteurs
D'une part, certaines études ont mis en évidence que l'augmentation de la pression
temporelle pouvait réduire l'impact de distracteurs (Ester & Awh, 2008 ; Kiss et al., 2012 ;
Santee & Egeth, 1982 ; et dans une certaine mesure : Dalvit & Eimer, 2011). Par exemple, Ester
et Awh (2008) ont utilisé une tâche de singleton additionnel (Theeuwes, 1991, 1992) dans
laquelle les participants devaient rechercher un singleton de forme (i.e., cible) et ignorer la
présence éventuelle d'un singleton de couleur (i.e., distracteur saillant). Lorsque les stimuli
étaient affichés jusqu'à la réponse du sujet, la présence d'un distracteur de couleur entraînait une
augmentation significative des temps de réaction (i.e., effet de distraction). En réduisant le
temps d'affichage des stimuli à l'écran, les auteurs ont observé que la performance des sujets
(en termes de réponses correctes), n'était pas significativement différente entre les essais où le
distracteur de couleur était présent ou absent. Néanmoins, comme les consignes entre ces deux
conditions étaient différentes (i.e., être le plus rapide possible avec des affichages longs, ou être
le plus précis possible avec des affichages courts), et donc que les interprétations reposaient sur
des mesures différentes (i.e., sur les temps de réaction vs. sur les taux de bonnes réponses), les
résultats de cette étude sont difficiles à généraliser (pour une justification voir également :
Santee & Egeth, 1982).
Une étude de Kiss et al. (2012) a fourni des résultats plus convaincants à propos d'un
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elles les conditions de pression temporelle faible et forte. Une nouvelle fois, la pression
temporelle était manipulée lors d'une tâche de singleton additionnel. Les auteurs ont montré une
diminution significative de l'effet de distraction par des distracteurs saillants en condition de
pression temporelle forte. Kiss et collaborateurs (2010) ont donc conclu qu'une pression
temporelle plus élevée contraignait les participants à adopter un contrôle attentionnel plus
efficace, qui renforce une sélection guidée par le modèle attentionnel top-down. En effet,
lorsque le temps d'affichage est court, une orientation initiale de l'attention vers le distracteur
ne permettrait pas de traiter la cible dans le temps imparti. Lorsque le temps d'affichage est plus
long, les contraintes sur le contrôle attentionnel sont moins importantes et les participants
peuvent traiter la cible avant la fin de l'essai malgré une orientation initiale vers le distracteur.
Par ailleurs, la mise en place de ce contrôle attentionnel ne dépendrait pas de la durée
d'affichage per se mais bien d'une stratégie top-down en lien avec cette pression temporelle : dans l’étude de Dalvit et Eimer (2011), les effets de distraction étaient diminués en condition de pression temporelle forte (i.e., affichages courts) uniquement lorsque celle-ci était manipulée
en bloc. Lorsque que les essais avec un affichage court ou long étaient présentés de façon
aléatoire, les auteurs n'observaient plus cette interaction entre l'effet de distraction et le temps
d'affichage. Au contraire, les participants semblaient plutôt adopter un contrôle attentionnel
plus efficace (i.e., du type "affichages courts") quelle que soit la durée d'affichage (Dalvit &
Eimer, 2011). Pris dans leur ensemble, ces différents résultats concordent pour indiquer qu’une
dégradation sensorielle via la manipulation de la pression temporelle imposerait la mise en
place d'un contrôle attentionnel plus efficace pour éviter la capture attentionnelle par des
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b) Quand la pression temporelle aggrave l'effet des distracteurs
A l’inverse, pourtant, d’autres études ont montré que l'augmentation de la pression temporelle pouvait aggraver les effets délétères des distracteurs saillants (Exp. 2 dans Lavie &
de Fockert, 2003; Exp. 2 dans Yeshurun & Marciano, 2013), le coût associé à la présence d'un
distracteur étant plus grand en condition de pression temporelle forte plutôt que faible. Selon
ces auteurs, la dégradation sensorielle imposerait une limitation des données qui ne pourrait pas
être compensée par le fait d’allouer davantage de ressources aux stimuli pertinents. Ainsi, l’observateur dispose de ressources perceptives libres qui permettent le traitement des distracteurs. Selon les auteurs, la dégradation sensorielle augmenterait la difficulté générale de
tâche et donc le temps nécessaire pour traiter la cible. Cette accumulation de temps en condition
de dégradation sensorielle favorisait alors l'intrusion des distracteurs lors du traitement des
stimuli (Eriksen & Schultz, 1979 ; Navon, 1989 ; cités par Lavie & de Fockert, 2003).
Néanmoins, certaines différences permettent d'expliquer l'inconsistance entre les
résultats de ces études, et les résultats montrant une diminution de l'effet des distracteurs en
pression temporelle forte (e.g., Kiss et al., 2012). Dans l’expérience 2 de Yeshurun et Marciano
(2013), les temps d'affichage des stimuli étaient respectivement de 150 millisecondes en
pression temporelle faible, et de 100 millisecondes en pression temporelle forte. De plus, dans
l’expérience 2 de Lavie et de Fockert (2003), la pression temporelle réduisait l'affichage des stimuli à 50 millisecondes en condition de dégradation sensorielle. Or, dans les études de Kiss
et al. (2012) ou Dalvit et Eimer (2011), les stimuli étaient affichés jusqu'à la réponse du sujet
en pression temporelle faible, et pendant 200 millisecondes en pression temporelle forte. Ainsi,
nous pouvons imaginer que la qualité du contrôle attentionnel suit une courbe en U inversé en
fonction de la durée d'affichage. Si la réduction du temps d'affichage est trop importante (i.e.,
50-100 ms) alors la tâche devient trop compliquée et il est plus difficile d'exclure efficacement
Influence de la réduction des contrastes sur la capture attentionnelle
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150-200 ms) impose de mettre en place un contrôle attentionnel de plus en plus efficace pour
réussir la tâche. Enfin, lorsque le temps d'affichage est "illimité", alors le contrôle attentionnel
n'est pas nécessaire et des distracteurs peuvent interférer avec la tâche.