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4.3 Céramiques massives issues de la coprécipitation

4.3.4 Influence des paramètres géométriques

Epaisseur de céramique

Dans l’optique d’élaborer des couches de CCTO de faibles épaisseurs nous nous sommes intéressés, dans un premier temps, à l’évolution des propriétés électriques des échantillons massifs (εr, tg δ et Rs) lorsque l’épaisseur de la céramique varie. Les échantillons issus de

la synthèse par coprécipitation suivie d’une calcination (CCTO 02 calciné à 950˚C) et frittés conventionnellement ont été polis plusieurs fois et les propriétés électriques ont été mesurées après chaque polissage. Les échantillons "bruts" de polissage ont une permittivité relative de 150 000 (1 kHz, Tamb) pour une épaisseur de 1,5 mm. Pour des raisons de tenue mécanique

des échantillons, le polissage ne permet pas d’atteindre des épaisseurs inférieures à 0,3 mm. . Permittivité relative

La figure 4.13 montre la variation de la permittivité relative et des pertes d’échantillons massifs (1 kHz, Tamb) pour des épaisseurs comprises entre 0,3 mm et 1,5 mm.

FIG. 4.13 – Variation de la permittivité relative et des pertes de céramiques de CCTO en fonction de l’épaisseur interélectrodes (1 kHz, Tamb)

La permittivité relative du CCTO diminue légèrement lorsque l’épaisseur d’échantillon diminue, de 150 000 pour e = 1,5 mm à 130 000 pour e = 0,3 mm, soit une diminution de 13%. Cette diminution est probablement liée à la diminution du nombre de grains et de joints

de grains présents dans le volume pour les faibles épaisseurs, entraînant une diminution du nombre de barrières internes (effet IBLC), majoritairement responsables des permittivités relatives colossales mesurées pour les céramiques de CCTO. Les pertes sont constantes, voisines de 0,1, quelle que soit l’épaisseur de l’échantillon.

. Résistance série

La figure 4.14 montre la variation de la résistance série d’échantillons massifs (Tamb)

pour des épaisseurs comprises entre 0,3 mm et 1,5 mm.

FIG. 4.14 – Variation de la résistance série de céramiques de CCTO en fonction de l’épaisseur inter- électrodes (1 kHz, Tamb)

On note une diminution quasiment linéaire de la valeur de Rs lorsque l’épaisseur de l’échantillon diminue. En effet, on passe de 21Ω à 3 Ω pour une épaisseur d’échantillon de

1,5 mm à 0,3 mm. Cette variation peut s’expliquer à partir du schéma simple de la figure 4.15 :

FIG. 4.15 – Représentation schématique des grains de CCTO du point de vue électrique

Chaque grain de CCTO peut être modélisé électriquement, en première approche, par une résistance en série avec une capacité. La résistance globale de tous les grains présents dans l’épaisseur constitue une partie de la résistance série du composant, et est égale à la somme

de toutes les résistances élémentaires de chaque grain. Lorsque l’épaisseur de l’échantillon est réduite, le nombre de grains électriquement actifs diminue. Le nombre de résistances élémentaires en série diminue également, ce qui a pour conséquence la diminution de la ré- sistance série équivalente observée pour nos échantillons.

La résistance série des composants n’est donc pas uniquement liée à la résistance des élec- trodes, elle dépend également de paramètres liés au procédé de fabrication du matériau : la composition de la poudre d’oxyde (notamment la quantité de phase TiO2 comme nous

l’avons vu précédemment) ainsi que l’épaisseur de céramique interélectrodes. L’élaboration de couches de CCTO d’épaisseurs comprises entre 7 et 350 µm devrait donc nous permettre de diminuer considérablement la valeur de Rs. Des valeurs inférieures à 1Ω sont attendues

pour l’intégration du matériau CCTO dans les conditions de l’application visée.

Nature et diamètre des électrodes

. Nature

Dans cette partie, nous nous intéressons à l’influence de la nature des électrodes sur les propriétés diélectriques des céramiques de CCTO. Le tableau 4.4 indique les différentes valeurs de travaux d’extraction électronique (eV) pour les métaux utilisés au cours de ces essais. Le travail d’extraction électronique est défini par l’énergie nécessaire à l’extraction d’un électron d’une couche atomique d’un métal. C’est l’une des plus importantes propriétés physico-chimiques de la surface des métaux. Il est lié à la distance inter-atomique et à l’ar- rangement des atomes métalliques dans la structure. On peut noter que Au possède un travail d’extraction nettement supérieur à celui des autres métaux.

Elément Travail d’extraction électronique (eV)

Au 5,1

Cu 4,65

Al 4,28

Ag 4,26

TAB. 4.4 – Travail d’extraction électronique de différents métaux [12]

Les métallisations Au, Cu, Al et Ag ont été déposées par PVD (épaisseur 100 nm). Afin de juger de l’influence de la nature et de l’épaisseur de métallisation, les résultats sont com- parés à ceux obtenus pour la métallisation Ag sérigraphiée (épaisseur 8 µm) (fig.4.16).

(a)

(b)

FIG. 4.16 – Variation de la permittivité relative (a) et des pertes (b) en fonction de la fréquence et à température ambiante pour différentes métallisations

Aucune variation significative de la permittivité relative et des pertes n’est observée lorsque la nature de la métallisation varie. En effet, les faibles différences de permittivité constatées aux basses fréquences sont de l’ordre de l’incertitude sur la mesure (∆εr = 5% : dispersion des valeurs de permittivité d’un échantillon à l’autre) et ne peuvent

donc pas être prises en compte. Contrairement à ce que l’on pouvait attendre du fait du meilleur recouvrement de la céramique dans le cas d’un dépôt d’argent par PVD, la permitti- vité relative mesurée est égale à celle mesurée pour un dépôt classique par laque d’argent. Ce résultat nous renseigne sur l’origine des permittivités colossales du CCTO. Si l’on suppose, comme le suggèrent certains auteurs [13–15], que l’origine des fortes permittivités relatives réside dans la formation d’une fine couche isolante de type Schottky à l’interface matériau- métallisation, alors des métallisations présentant des travaux d’extraction électronique dif- férents devraient mener à des couches isolantes de différentes épaisseurs. La permittivité

relative devrait alors varier avec l’épaisseur de la couche isolante. Or nous n’observons pas de variations significatives de la permittivité, ce qui nous conforte dans l’idée que la forma- tion de cette fine couche isolante n’est pas le mécanisme prépondérant pour expliquer les fortes valeurs de permittivité relative.

. Diamètre

Des pastilles de différents diamètres (5,9 mm à 23,2 mm) et de même épaisseur (1,5 mm) ont été préparées. La densité et les propriétés diélectriques (1 kHz, Tamb) des échantillons

sont présentées dans le tableau 4.5. De manière surprenante, la permittivité relative dépend fortement du diamètre des électrodes. Elle diminue lorsque le diamètre augmente et passe de 147 000 pour 5,9 mm à 108 000 pour 23,2 mm. Or la permittivité est une grandeur intrinsèque au matériau et ne devrait pas dépendre de la mise en forme. Nous avons donc tenté d’expliquer cette contradiction par des caractérisations complémentaires.

Diamètre pastille (mm) Diamètre métallisation (mm) Densité (g.cm−3) εr tg δ

5,9 5,9 4,61 147 000 0,2 8,9 8,9 4,67 123 000 0,2 12,4 12,4 4,61 116 000 0,2 23,2 23,2 4,69 108 000 0,2 23,2 8,9 4,69 122 000 0,2 23,2 5,9 4,69 144 000 0,2

TAB. 4.5 – Propriétés diélectriques des céramiques de CCTO pour différents diamètres d’électrodes (1 kHz, Tamb)

Les densités déterminées pour tous les échantillons sont équivalentes. Ceci indique que la densification n’est pas responsable des différences de propriétés observées. Des échantillons différents ayant été utilisés pour étudier l’impact du diamètre d’électrode, nous avons voulu vérifier que le procédé de fabrication n’est pas responsable des différences observées (en particulier pour les échantillons de plus grande taille). Par conséquent, le dernier échantillon présentant le plus grand diamètre a d’abord été caractérisé avec des électrodes de 23 mm (4eme ligne du tableau 4.5), puis le diamètre des électrodes a été réduit à environ 6 mm par polissage. Pour cet exemple la permittivité relative mesurée (144 000) est très proche de celle déterminée pour la plus petite pastille (147 000), et montre que le procédé de fabrication ne peut pas être mis en question. La taille des grains est un autre facteur pouvant expliquer les différences observées. Les microstructures des céramiques ont été visualisées par MEB et ne montrent pas de différences significatives entre les tailles des grains des échantillons de

différents diamètres. Faute d’expliquer la surprenante diminution de la permittivité relative observée, ces observations permettent néanmoins une réflexion concernant une des origines possibles des permittivités colossales du CCTO : l’effet des électrodes, et plus précisément de la nature des contacts entre les électrodes et l’échantillon.

Si l’on suppose que l’origine des fortes permittivités relatives réside dans la formation d’une fine couche isolante de type Schottky à l’interface matériau-métallisation, une aug- mentation du diamètre de l’électrode devrait être accompagnée d’une augmentation de la permittivité relative, suite à la formation d’une couche isolante de plus grande dimension. Or le phénomène contraire est observé : la permittivité diminue avec l’augmentation du diamètre d’électrode. Par conséquent, la permittivité est principalement liée à la nature du matériau diélectrique entre les électrodes. Ainsi, le phénomène de barrière interne (grains semi-conducteurs et joints de grains isolants) est le mécanisme prépondérant pour décrire le comportement diélectrique du matériau CCTO.