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IV. Chapitre IV : Etude des mécanismes de lithiation/délithiation dans des électrodes à base de

2. Matériaux cyclés

2.3. Influence des défauts sur le mécanisme de désintercalation / intercalation

La superposition de particules lors d’analyses effectuées par tout type de technique de microscopie en transmission peut amener à des artéfacts ou des erreurs d’interprétation.221 Nous aimerions dans cette partie déterminer l’origine des rares particules qui apparaissent biphasiques (hétérogénéité intraparticulaire) que nous avons pu observer. Un exemple est traité dans la Figure IV-22 qui correspond à une électrode composite de LiFePO4 arrêtée à demi-charge. Des cartographies ont été obtenues via la PED et l’EFTEM sur la même région d’intérêt. Ces mesures corrélées sont difficiles à obtenir car faites sur deux microscopes différents : JEOL 2010FEF pour la PED et FEI Osiris pour l’EFTEM. Il est alors important de pouvoir localiser la même zone d’intérêt. Les deux cartographies confirment tout d’abord une excellente corrélation des techniques (Figure IV-22a) et b)). En effet, les particules imagées en rouge sur la cartographie PED sont les mêmes que les particules foncées de la cartographie EFTEM et correspondent à la phase LFP et inversement pour les vertes et claires correspondant à la phase FP. La particule encadrée en orange se révèle contenir les phases LiFePO4 et FePO4 par les deux méthodes. Pour comprendre pourquoi cette particule est spécifiquement mixte, trois types d’information complémentaires ont été utilisées (1) la cartographie d’orientations résultant de l’analyse PED, (2) les clichés de diffraction sur la particule et (3) l’imagerie HR. La cartographie d’orientations (Figure IV-22c) montre que les deux phases correspondent bien à une seule particule puisqu’elles présentent la même orientation. Certains clichés de diffraction n’ont pas pu être indexés (pixels noirs dans la particule) en raison de la mauvaise corrélation entre le cliché expérimental et simulé (faible indice de confiance) ; il en résulte une zone noire entre les deux phases. Dans un deuxième temps, les clichés de diffractions expérimentaux et les clichés simulés pour la phase LiFePO4 et FePO4 sont présentés dans les Figure IV-22d) et e) (gauche et droite) respectivement. Les clichés encadrés de couleur rose et vert extraits de la figure a) correspondent aux phases LiFePO4 et FePO4 respectivement. Les clichés de diffraction des électrons en précession expérimentaux et simulés sont analogues pour ces deux cas. Les indices de corrélation et de confiance sont très bons : Q=341, R=56 pour l’encadré 1 (LiFePO4), Q=289 et R=16 pour l’encadré 2 (FePO4). Cependant le cliché de diffraction de l’encadré 3 (Figure IV-22f) n’est pas indexé : Q=289 et R=0. Le

dédoublement de certains spots est donc induit par la superposition des deux phases. L’image TEM présentée sur la Figure IV-22g) montre clairement la présence d’un défaut à l’interface entre les deux phases, que nous interprétons comme un sous-joint de grain dû à une faible désorientation des deux parties le long du joint de grain (<1°). Ce sous-joint de grain certainement créé lors de la synthèse du matériau est devenu un joint de phase. Selon le modèle domino-cascade,63 si l’onde élastique se propageant dans la direction a rencontre un défaut lors de l’intercalation/désintercalation, le front de réaction serait alors interrompu. Ceci permet donc d’expliquer l’origine de la présence des deux phases dans une même particule puisqu’elle possède un défaut planaire. Cette observation tend également à confirmer le moteur du mécanisme ; c’est la différence des paramètres de maille qui génère un champ de contrainte provoquant le déplacement du front de phase d’une extrémité à l’autre de la particule. En relaxant ces contraintes, le défaut plan a pour effet de stopper le front de propagation du Li.

Figure IV-22 : Cartographies de phases d’une lame extraite d’une électrode stoppée à mi-charge. a) Cartographie de phases en PED. b) Cartographie de phases en EFTEM obtenue par le ratio de deux images filtrées centrées à 5 eV et à 25 eV (fente de 3 eV) sur la même région d’intérêt. c) Cartographie d’orientations correspondant à celle en a). Le code couleur des pôles inverses est donné à côté. d), e), f) (gauche) Clichés de diffraction extraits des zones carrées rose, verte, rouge sur la cartographie en a) et (droite) les clichés simulés des phases LiFePO4, FePO4 et la superposition des deux respectivement. Les cercles rouges et verts correspondent aux taches de diffraction simulées. g) Image TEM d’une particule (carré orange) présentant un défaut, probablement un sous- joint de grain stoppant le front de délithiation. La barre dans les figures a), b), c) est de 100 nm.

PARTIE B : Etude des mécanismes de lithiation et

délithiation à l’échelle de l’électrode

L’objet de la partie précédente du manuscrit nous a permis de confirmer le modèle d’intercalation/désintercalation du lithium par voie électrochimique à l’échelle de la particule de LiFePO4. La combinaison de ces différentes techniques de microscopie électronique a rendu ces analyses robustes, éliminant les éventuelles mauvaises interprétations. Le but de cette partie est maintenant d’étudier les mécanismes de lithiation/délithiation non plus à l’échelle de la particule mais de façon plus globale. Plus exactement, il s’agit d’étudier la répartition des phases LiFePO4 et FePO4 lors de la lithiation et délithiation en fonction de l’épaisseur de l’électrode.

Le début de l’étude a commencé en utilisant les techniques précédentes comme l’EFTEM et le PED qui ont fait leur preuve sur l’analyse des particules individuelles. Mais le problème du « champ de vue » limité de ces techniques s’est avéré un paramètre très important à résoudre. En effet, plus d’une quinzaine d’acquisitions sont nécessaires pour étudier une bande de 1 µ m sur toute la longueur d’une électrode fine (1 x 15 µ m²). De plus, les problèmes de variations de contraste entre deux acquisitions dues à l’évolution du polymère (résine entourant les particules) sous le faisceau sont aussi gênants.

Le développement d’une toute nouvelle technique a vu le jour en 2011 : l’EFSD, Electrons Forward Scattering Diffraction.175,174,184 Cette technique de diffraction analogue à l’EBSD (Electron Back Scatter Diffraction) est mise en œuvre dans un microscope électronique à balayage et permet de faire des cartographies de phases par indexation des clichés de diffractions des bandes de Kikuchi à des échelles allant du nanomètre jusqu’à la centaine de micromètres avec une résolution nanométrique. Comme nous avons pu le voir dans la partie bibliographie, aucune technique ne permettait d’avoir une cartographie de phase à l’échelle mésoscopique tout en conservant une résolution nanométrique – c’est-à-dire à l’échelle de l’épaisseur de l’électrode – sur des matériaux pour batterie. Comme nous allons le voir dans la suite, cette technique ouvre une nouvelle voix d’analyse pour des matériaux cristallins en permettant de traiter des grands champs de vue avec une bonne résolution spatiale et une robuste détermination de phase. Les analyses ont été faites en collaboration avec Thierry Douillard de l’INSA de Lyon au laboratoire MATEIS : Matériaux Ingénierie et Sciences regroupant plusieurs laboratoires.

Nous avons choisi d’étudier les électrodes après quelques cycles afin de stabiliser la capacité de charge/décharge et de palier à une possible mauvaise imprégnation de l’électrolyte et constituer ainsi un système significatif des mécanismes de lithiation/délithiation. Les accumulateurs ont été stoppés et démontés à mi-décharge et à mi-charge.

Nous commencerons l’étude par les électrodes dites « fines » : d’une épaisseur de ~15 µm préparées classiquement par doctor blade et les électrodes « épaisses » (60-130 µm) enduites sur une machine semi- industrielle Coatema®. Nous distinguerons deux types d’électrodes épaisses : celles utilisées en batterie face à du Li métal (130 µ m) et celles destinées à une application commerciale (60 µ m) sur des accumulateurs Li-ion de type 50125.