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3.2 La modification des inégalités de revenu et de consomma-

tion d’aide professionnelle

Dans cette section nous analysons théoriquement les évolutions introduites par le nouveau mode de calcul du ticket modérateur. Une sous-section présente la répartition des contributions à la politique de l’APA (sous-section 3.2.1), une autre présente détaille le mode de calcul du ticket modérateur prévue dans la loi ASV (sous-section 3.2.2). Une autre sous-section présente la manière dont l’élasticité-prix interagit avec le ticket modérateur (sous-section 3.2.3) et enfin une dernière sous-section présente la revue de littérature avec les indicateurs empiriques retenues pour évaluer l’équité (sous-section 3.2.4)

3.2.1 L’aide professionnelle et la redistribution

Le financement de l’APA est assuré conjointement par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (à hauteur de 30% environ), et par les Conseils départementaux (à hauteur de 70% environ)3. Le concours APA (financé par la CSG, la fiscalité sur le tabac, la contribution de so-

lidarité envers les personnes âgées etc.) et le budget des Conseils départementaux (alimenté par la dotation globale de fonctionnement, la taxe d’habitation, etc.), collectent les revenus de l’en- semble de la population. Ces deux modes de financement contribuent donc à la redistribution des revenus des personnes non dépendantes vers les personnes âgées dépendantes.

L’APA contribue également à la redistribution à l’intérieur de la population des personnes âgées dépendantes. Il existe des inégalités verticales parmi les bénéficiaires si deux personnes ayant le même niveau de dépendance n’ont pas le même niveau de revenu. A l’inverse les inégalités horizontales désignent deux individus ayant les mêmes revenus, mais qui ont des niveaux de dépendance différents.

Ces deux types d’inégalités conduisent à un inégal accès aux soins. Deux individus ayant le même niveau de dépendance - et donc les mêmes besoins - mais pas les mêmes revenus, auront une capacité différente à recourir à l’aide à domicile. Inversement pour l’équité horizontale, à besoins identiques, si les revenus diffèrent les possibilités de recours seront différentes.

Pour réduire les inégalités d’accès aux soins, l’APA organise une redistribution entre ses bénéficiaires. Dans le cadre de l’APA la redistribution se fait principalement au niveau vertical et horizontal. Les bénéficiaires de l’APA contribuent à son financement et les sources principales de contribution (la CSG, les taxes d’habitation, etc.) sont positivement corrélées au niveau de revenu. Les bénéficiaires de l’APA ayant les revenus les plus élevés contribuent plus que les autres bénéficiaires et - à niveau de besoin égal - reçoivent moins au titre de l’APA. Par ailleurs à niveau de contribution donnée (le niveau de contribution étant fortement corrélé au revenu), les bénéficiaires ayant les besoins les plus importants perçoivent un montant d’APA plus élevé.

3.2.2 La modification de la redistribution par la loi ASV

La loi ASV introduit des changements dans le calcul du ticket modérateur et dans les pla- fonds nationaux. Elle modifie la manière dont l’APA est répartie entre ses bénéficiaires les plus aisés et les plus pauvres, ainsi qu’entre les plus dépendants et les moins dépendants.

Le montant perçu au titre de l’APA par chaque bénéficiaire (MT ) peut s’exprimer ainsi : MT =�1 − c(R)�×T ×H|H≤H(bAF)

Avec c le ticket modérateur qui dépend directement du revenu R, T le montant du tarif de solvabilisation, H le nombre d’heures consommées et H le nombre d’heure d’aide prescrit par le plan d’aide qui dépend des besoins d’aide formelle bAF.

Pour tous les bénéficiaires de l’APA, la loi ASV conduit à une diminution du ticket modéra- teur c. En revanche la manière dont il varie en fonction du revenu R est modifié. En effet dans la version précédente de l’APA, on avait : ∂ capa2001(R)

∂ R = k4, avec k une constante positive (et donc ∂2c(R)

∂ R2 = 0). L’augmentation du ticket modérateur était proportionnelle au revenu.

La loi ASV instaure une progressivité dans le calcul du ticket modérateur, ainsi ∂ cASV(R)

∂ R = x,

avec x une variable positive et croissante en fonction de R (∂∂ R2c(R)2 >0).

3.2. INÉGALITÉS DE REVENU ET DE CONSOMMATION 101 On a donc : ∀R, capa2001(R) > cASV(R) et ∂ � capa2001(R)−cASV(R) � ∂ R >0

Le ticket modérateur influence directement le montant total versé aux bénéficiaires de l’APA et plus il est élevé, plus le montant versé est faible. Ainsi, cette modification du calcul du ticket modérateur, conduit à une distribution plus accentuée sur les bénéficiaires de l’APA ayant les revenus les plus faibles. Les contributions de chacun n’étant pas modifiées, la loi ASV intensifie la redistribution verticale parmi les bénéficiaires de l’APA.

La modification des plafonds nationaux H conduit quant à elle à une plus grande redistribu- tion horizontale parmi les bénéficiaires de l’APA. En effet, tous les plafonds ont été revalorisés (∀d, HAPA2001(d) < HASV(d)), mais le coefficient de majoration est plus important pour les per-

sonnes ayant un d élevé.

l’objectif des modifications apportées par la loi ASV était de contribuer à améliorer l’équité de la redistribution verticale et horizontale.

3.2.3 L’influence de l’élasticité-prix

La loi ASV modifie ainsi le c(R) et le H(d). Ces deux variables ont une influence sur le prix effectivement payé par les bénéficiaires de l’APA. Ce dernier s’écrit :

P= c(R) × T × H|H≤H(d,Pn)+ PF × H|H>H(d,Pn)

Le ticket modérateur c(R) et le nombre d’heures d’aide prescrit ont une influence sur le prix. Le prix peut avoir une influence sur le nombre d’heures d’aide consommées H, et ainsi modifier le montant versé au titre de l’APA. L’influence du prix sur H s’écrit ainsi :

∆H = ∆PP × εp× H

La relation présentée plus haut indique que si ∆H > 0, alors le montant perçu au titre de l’APA augmente. Si l’élasticité prix est nulle, alors le H ne varie pas avec la réforme, les seuls effets sont ceux présentés dans la section précédente. Si l’élasticité est une constante négative, alors cela conduit à renforcer les effets redistributifs présentés en section 3.2.2.

En revanche si l’élasticité augmente avec le revenu - comme le suggèrent les résultats du chapitre 2 - les effets vont dans un sens opposé à ceux présentés précédemment. En effet, cela signifie que ∆H est d’autant plus grand que R est élevé et donc que le montant MT reçu par chaque bénéficiaire augmente plus fortement quand le revenu est élevé.

L’un des objectifs de ce chapitre est d’étudier la sensibilité des effets du ticket modérateur aux valeurs de l’élasticité-prix.

3.2.4 Revue de littérature

Récemment, un certain nombre d’articles ont eu pour objet l’évaluation de politiques pu- bliques de santé du point de vue de la justice sociale (Wagstaff et van Doorslaer 2000[46], Ro- chaix et Tubeuf 2009[39], Fleurbay et Schokkaert 2011[21]). D’une part le fait qu’il n’y ait pas d’inégalité de consommation de soins, à besoin donné. Il s’agit de l’équité horizontale. D’autre part, que les contributions aux politiques de santé soient croissantes de la capacité contributive. Il s’agit de l’équité verticale. Concernant ce dernier aspect il est établi que les politiques de santé contribuent aux politiques redistributives, au même titre que la taxation du revenu[37].

Les premiers travaux dont l’objectif était de décrire la progressivité du financement des systèmes de santé comparaient les contributions par groupe de revenu (Hurst en 1985[30]). Cette approche, en utilisant principalement des montants absolus, ne permettait pas véritablement de déterminer la progressivité des contributions.

Plusieurs indicateurs ont donc été préférés à cette approche. Cantor (1988)[13] compare par exemple la proportion du revenu consacré au financement du système de santé. Un indicateur a été utilisé a de nombreuses reprises (Wagstaff et al. 1992[47], 1999[48]), il s’agit de l’indicateur

3.3. DONNÉES 103