• Aucun résultat trouvé

Marie De Hennezel évoquait déjà, dans son rapport « La France Palliative » en 2005, les inégalités croissantes dans l’accès aux soins palliatifs à domicile.

La coordination des professionnels de santé au sein d’un territoire a un impact majeur sur le maintien à domicile des personnes en fin de vie. Sans coordination efficace, il devient quasi impossible de maintenir, dans la durée et dans de bonnes conditions, des personnes en soins palliatifs à domicile. Or le développement très inégal, d’une région à l’autre, des réseaux de santé et des plateformes territoriales de coordination, fait craindre à un accroissement des disparités dans les années à venir.

Il n’est sans doute pas souhaitable que, dans tous les territoires, les Agences Régionales de Santé déploient un seul et même « modèle » de coordination : dans de nombreux départements, il existe déjà des initiatives très intéressantes et il serait absurde de vouloir les supprimer pour les remplacer par un modèle-type qui aurait toutes les chances de ne pas être adapté au contexte local. Peu importe, au fond, que la mission de coordination de proximité (c’est-à-dire la coordination des différents professionnels de santé impliqués dans la prise en charge d’un bassin de population) soit confiée à un réseau de santé, à un GCS, à une HAD ou à une autre structure.

Ce qui est important, c’est que dans chaque territoire il existe une véritable coordination, avec un coordonnateur identifié par tous les professionnels, et auquel tous les patients puissent avoir accès.

Les professionnels se connaissent bien, c’est plus facile, avec tout ce qu’on a vécu ensemble, même des choses pas faciles…

Une infirmière libérale en milieu rural (Bretagne) Les professionnels en Ile de France ne se connaissent pas entre eux, alors que dans les petites ville, tout le monde connaît tout le monde, tout devient simplissime

Un médecin urgentiste du SAMU (Ile-de-France)

PARTIE 3 | SOINS A DOMICILE : LEVER LES OBSTACLES ?

Conclusion

1. Que faut-il retenir ?

> Des situations de plus en plus complexes et des acteurs de plus en plus nombreux

Les situations de fin de vie sont aujourd’hui de plus en plus longues et complexes.

En miroir, l’offre de soins est devenue de moins en moins lisible : les dispositifs de prise en charge se sont considérablement multipliés… au point que plus personne ne s’y retrouve vraiment !

> Coordonner est une nécessité difficile à concrétiser

Tous les professionnels de santé rencontrés par l’Observatoire ont insisté à la fois sur la nécessité de mettre en place une véritable « coordination des soins » dans les situations de fin de vie à domicile, et sur les difficultés qu’ils rencontrent pour y parvenir.

Car si le médecin traitant ne peut souvent plus assumer le rôle de « pivot », qui doit être chargé de la coordination des soins ?

> « Coordonner » , ça veut dire quoi ?

L’une des grandes difficultés autour de la coordination tient à l’absence de définition consensuelle. Chacun l’entend à sa façon, et chacun à sa petite idée sur « le coordonnateur idéal » : pour certains c’est le réseau de santé, pour d’autres l’HAD, et pour d’autres encore ce doit être l’infirmière libérale.

Pour sortir de cette ornière, une seule solution : décrire très précisément ce que l’on attent d’une bonne coordination des soins à domicile, sans se préoccuper du

« qui » ni du « comment ».

> La coordination en trois idées simples

C’est sans doute le guide « Améliorer la coordination des soins : comment faire évoluer les réseaux de santé ? » produit par le Ministère de la santé en 2012 qui apporte l’éclairage le plus pragmatique à cette question de la coordination.

L’objectif de la coordination des soins, à l’échelle d’un territoire de proximité, se décline en trois idées simples :

 Organiser le parcours de santé du patient, en lien avec les professionnels de premier recours

 Apporter un appui aux différents intervenants à domicile (afin de leur permettre de mieux évaluer la situation et de se concentrer sur leur coeur de métier)

 Faciliter les transitions entre les différents lieux de prise en charge (hôpital, domicile, maison de retraite, etc.)

2. Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

Si, dans un service hospitalier, d’un patient à l’autre, les professionnels travaillent toujours ensemble, il n’en va pas du tout de même à domicile.

D’un patient à l’autre le groupe de professionnels qui assure la prise en charge doit se reconstituer et tenter de former une véritable « équipe de soins ». A la différence de l’hôpital où les équipes travaillent dans un lieu commun, avec des heures de présence similaires et des habitudes de travail relativement proches, la situation est très différente pour les professionnels du domicile.

Le manque d’outils simples pour communiquer entre professionnels du domicile est criante : à titre d’exemple, l’inexistence, sur le terrain, d’un «dossier patient» commun est un frein considérable.

Observatoire National de la Fin de Vie | Rapport 2012 94

En outre, si de fait les aidants ont souvent un rôle de chef d’orchestre et de coordination des différents intervenants, il est important de veiller à les préserver et à ne pas leur confier les missions qui doivent être assurées par des professionnels.

D’autant que les proches n’ont pas accès à une information claire et fiable pour se repérer dans le système de santé .

3. Quelles pistes pour l’avenir ?

> Professionnaliser la mission de coordination Il est temps de professionnaliser la mission de coordination, afin de décloisonner notre système de santé.

La question du « qui coordonne » n’a finalement que peu d’importance : l’essentiel c’est que dans chaque territoire il existe un acteur chargé de coordonner les situations complexes à domicile.

Or « coordonner » suppose des compétences précises, qui ne sont pas innées :

 Pour mobiliser de façon optimale l’ensemble des offres existantes sur le territoire de vie et coordonner les nombreux acteurs

 Pour faciliter les transferts (hospitalisations et retours à domicile) et anticiper les situations/complications.

 Pour améliorer la communication entre ville et hôpital pour éviter les passages inutiles par les services des urgences

 Pour structurer les relations entre acteurs du domicile et pour favoriser la

«collégialité » des prises de décision :

 Pour répondre, au fil de la prise en charge, aux besoins de la personne malade et de ses proches

> Indemniser les temps de coordination Pour de nombreux professionnels libéraux (médecins généralistes, infirmières libérales, kinésithérapeutes, etc.), les temps de coordination sont des temps

« bénévoles », pendant lesquels ils ne peuvent pas être rémunérés.

Il s’agit d’un frein majeur pour organiser des temps de travail en commun autour d’une situation complexe.

Il faut donc indemniser le temps passé par les professionnels du domicile à travailler ensemble (visites conjointes à domicile, consultations en binôme…) et à discuter à plusieurs des situations complexes : staff hebdomadaires, participation aux réunions de concertation pluridisciplinaire, etc.

> Aider les aidants à se repérer dans le système de santé

Créer, dans chaque bassin de population de 200 000 habitants, un « guichet unique d’information » sur les ressources existantes. Cette mission devrait être confiée, selon les réalités locales, aux CLIC, aux CCAS, aux MDPH, aux MAIA, ou encore aux CPAM.

4. Quels travaux de recherche ?

L’observatoire national de la fin de vie publiera prochainement les résultats d’une enquête nationale sur les réseaux de santé en soins palliatifs.

Cette enquête mériterait d’être complétée par une étude de grande ampleur portant sur l’impact des dispositif de coordination sur l’évitement des hospitalisations en urgence et sur la réduction du risque d’acharnement thérapeutique.

1 PARTIE 3 | SOINS A DOMICILE : LEVER LES OBSTACLES ?

Introduction

La promotion du maintien à domicile est un axe important des politiques de santé mises en place depuis la fin des années 1990. Cette volonté politique se heurte cependant à une problématique récurrente : comment assurer une réelle continuité des soins à domicile ?

Le nombre et la diversité des dispositifs de prise en charge déployés ces vingt dernières années témoignent de l’intérêt accordé par les pouvoirs publics à cette problématique d’organisation des soins.

Car contrairement à l’univers hospitalier où la continuité des soins est, de fait,

garantie par la présence continue de professionnels de santé (jours et nuit, la semaine comme le WE), la permanence des soins à domicile est organisée très différemment : elle repose sur la notion de

« recours » à des professionnels qui doivent intervenir sur l’ensemble d’un territoire. Si cela nécessite, au quotidien, une très bonne coordination des différents professionnels qui interviennent, c’est surtout dans les situations imprévues que cela s’avère le plus délicat.

Comment éviter, dans ces situations, que le maintien à domicile souhaité par le malade ne soit remis en cause ?

QUESTION 7

GARANTIR LA CONTINUITE DES SOINS A DOMICILE :