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Importance des adduits d’ADN dans les études épidémiologiques

Marqueurs d’exposition Marqueurs d’effets

II.4.3. Les anticorps anti-métabolites du benzène

II.5.1.1. Importance des adduits d’ADN dans les études épidémiologiques

Les dommages dans l’ADN sont utilisés dans de nombreuses études épidémiologiques pour évaluer les effets de la pollution de l’air sur la santé, en particulier les adduits à l'ADN, qui sont largement associés à l'exposition aux HAPs. (Castano-Vinyals et al., 2004). En effet, dans différents pays, il a été rapporté que les niveaux d’adduits à l'ADN sont plus élevés chez les populations les plus exposées aux polluants atmosphériques par rapport aux populations les moins exposées: c’est le cas des études effectuées chez les fonctionnaires de police Italiens et Thaïlandais (Peluso et al., 1998 ; Ruchirawatt et al., 2002), de résidents Polonais de zones urbaines fortement industrialisées (Perera et al., 1992) et des conducteurs de bus Danois (Nielsen et al., 1996). Dans toutes ces études, il a été rapporté des différences significatives de niveaux d’adduits entre les sujets qui sont fortement exposés par rapport à ceux qui le sont moins. En revanche, Palli et ses collaborateurs, (2001) ont rapporté récemment que les niveaux d’adduits étaient significativement plus élevés chez des sujets non fumeurs exposés à l’air pollué que chez les fumeurs actifs.

De plus, une étude utilisant la technique de radiomarquage au 32P pour quantifier les niveaux d'adduits à l'ADN des lymphocytes circulants chez 194 non-fumeurs étudiants vivant dans la ville d'Athènes et dans la région de Halkida (Georgiadis et al., 2004), a rapporté que l’exposition personnelle aux HAPs était significativement plus élevée chez les sujets d'Athènes et que, les niveaux d'adduits plus élevés étaient observés dans le sous-groupe de sujets vivant à Halkida, une région a faible trafic de la Grèce. Les auteurs ont également rapporté chez ces derniers une corrélation positive entre les adduits à l'ADN et le niveau personnel d’exposition au chrysène ou Benzo(a)Pyrène.

Au Danemark, Sorensen et ses collaborateurs, (2003) ont mesuré l’exposition individuelle aux PM 2,5 et aux COVs chez 50 sujets et analysé les dommages dans l'ADN en terme de 8-oxodG. Cette étude a démontré que le niveau individuel de PM 2,5 constitue un indicateur prédictif de niveau de la 8-oxo-dG dans les lymphocytes. On observe une augmentation de 11% du niveau de la 8-oxo-dG pour un accroissement de l'exposition aux particules de 10 mg/m3. Une étude cas-témoins auprès de patients ex-fumeurs et non fumeurs

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suivis en Europe incluant entre autres pathologies des cas de cancer de poumon (n=115), a montré une forte association entre le niveau d’adduits chez les non-fumeurs en bonne santé et le risque de développer le cancer du poumon (Peluso et al., 2005).

La figure 6 ci-dessous montre quelques adduits majeurs formés identifiés dans l’ADN.

Figure 6: Structure de quelques adduits majeurs formés par les polluants dans l’ADN

(A )N2-{1O-[r-7, t-8, t-9-trihydroxy-7,8,9,1 benzo[a]pyrène]yI}-déoxyguanosine; (B) N-déoxyguanosine-(8-yI)-2-acétylaminofluorene; (C) N-déoxyguanosine2-aminofluorene; (D) N2-(2'-dG-8-yI)-2-amino-1 -méthyl-6-phénylimidazo[4,5-b]pyridine; (E) aflatoxine B1-N7-déoxyguanosine; (F) O6-méthyldeoxyguanosine; (G) N7-méthyldéoxyguanosine; (H) 8hydroxy-2’déoxyguanosine (8-oxodG).

La pollution atmosphérique à Cotonou : Impacts sur des populations cibles

25 II.5.1.2. Méthodes de quantification des adduits d’ADN

II.5.1.2.1. Les méthodes radio-immunologiques (RIA) et l’ELISA

L’ELISA et la RIA étaient largement utilisés dès 1980 pour détecter et quantifier les adduits d’ADN avec des limites de détection de l’ordre d’un adduit pour 108

nucléotides non modifiés (Muller et al., 1978 ; Poirier et al., 1981, 1984). Ces techniques sont fiables, peu coûteuses, mais requièrent des quantités relativement importantes d’ADN (200 µg) et un manque de spécificité à cause de la réactivité croisée des anticorps. Des techniques immunohistochimiques sont également utilisées (Poirier et al., 1991) bien qu’elles soient moins sensibles que le test ELISA, elles présentent néanmoins l’avantage d’aider à l'identification des cellules les plus sensibles aux polluants cancérigènes dans un mélange complexe de tissus.

II.5.1.2.2. La technique de radiomarquage au 32P

La technique de radio-marquage est largement utilisée actuellement pour la détection et la quantification des adduits d'ADN (Autrup et al., 1999 ; Binkova et al., 1999 ; 2007), principalement en raison de sa sensibilité plus élevée (habituellement un adduit pour 109 nucléotides non modifiés) et des faibles quantités d’ADN utilisées (2-10 µg). Brièvement, l’ADN est isolé du tissu d'intérêt et digéré en desoxynucléoside 3’ monophosphate par deux enzymes, une endonucléase (nucléase de Staphyloccoque) et une exonucléase (phosphodiestérase de rate). A ce stade, l’hydrolisant contient un mélange de nucléotides normaux et modifiés (adduits).

L’hydrolysat est ensuite traité par la nucléase P1 qui déphosphoryle sélectivement les nucléotides normaux et laisse les nucléotides adduités phosphorylés (enrichissement en adduits).

Les adduits d’ADN sont marqués sélectivement au 32P provenant de la position γ32 P-ATP par la T4 polynucléotide kinase qui a pour propriété de transférer un phosphate radioactif sur la position 5’ du nucléotide déjà phosphorylé en 3’. Les adduits marqués dans le mélange de digestion sont séparés par chromatographie sur couche mince et la quantification est faite à l’aide de compteur de radioactivité. Il convient de noter toutefois, que les récents progrès dans le développement des compteurs de radioactivité permettent une numérisation des données qui facilite ainsi leur quantification et la protection du personnel de laboratoire.

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26 II.5.2. Développement et modifications du test des comètes dans l’analyse des dommages dans l’ADN

Initialement développé par Ostling et Johanson (1984), le test des comètes était utilisé pour quantifier les dommages dans l'ADN au niveau cellulaire. Leur technique consistait à lyser les cellules avec des détergents riches en sels, et à soumettre l'ADN libéré à une électrophorèse dans des conditions neutres. L'ADN est ensuite coloré avec l’acridine qui fluoresce en donnant une émission verte quantifiable avec un photomètre. La quantité d’ADN dans la queue de la comète dépend de l'effet de l'agent mutagène qui est utilisé. Cette première version de la technique ne permettait d’évaluer que les cassures double-brin (CDB).

Singh et collaborateurs, (1988) ont modifié par la suite le protocole, notamment l’étape d’électrophorèse de l’ADN qui est réalisée en conditions alcalines (pH> 13). Les cellules étaient lysées à pH 10 avec 2,5 M de NaCl, Triton X-100 et du Sarkosyle pendant 1 h, suivie d'un traitement alcalin (0,3 M NaOH) et d’une électrophorèse à pH élevé (> 13). A ce pH, l'augmentation de la migration de l'ADN est associée à l’augmentation des niveaux de cassures simple brin (CSB). Mais puisque presque tous les agents génotoxiques induisent plus de CSB que des CDB, cette version du test proposé permettait d’augmenter la sensibilité pour l’identification des agents génotoxiques.

Deux ans après les modifications de Singh, Olive et collaborateurs, ont présenté une autre version alcaline de cet essai dans lequel l’électrophorèse est réalisée à un pH 12,3, où les cellules sont lysées dans une solution alcaline faible (0,03 M NaOH) pendant 1 h avant l'électrophorèse (Olive et al., 1990). Cette variante du test a été développée pour une détection optimale des sous-populations de cellules qui montrent des différences de sensibilité aux médicaments ou aux rayonnements.

La modification la plus largement adoptée de cette technique est celle incluant une digestion enzymatique de l'ADN avec une glycosylase et/ou endonucléase spécifique permettant ainsi l'identification des grandes classes de lésions de l'ADN (Collins et al., 1993). Cette version modifiée par Collins et collaborateurs, permet de détecter les pyrimidines oxydées par digestion avec l'endonucléase III (ENDOIII) et formamidopyrimidine DNA glycosylase (FPG) d'identifier les principaux produits d'oxydation des purines incluant la 8-oxoguanine ainsi que d'autres purines modifiées. La lésion prémutagène

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deoxyguanosine (8-OxodG) est l'une des lésions les plus importantes qui peut être examinée avec l'utilisation de la protéine FPG.

Il existe aussi d'autres enzymes qui sont utilisées moins souvent, par exemple la 3-méthyladénine ADN glycosylase II (enzyme qui peut être utilisé pour détecter l’alkylation) des dommages dans l’ADN. Les nouvelles applications du test des comètes utilisant la méthode d'hybridation fluorescente in situ permettent l'identification des crosslinks ADN-ADN et les dommages des gènes spécifiques (Anderson et al., 1997 ; Santos et al., 1997). Le test des comètes sous la forme adoptée par Collins et ses collaborateurs, permet de mesurer l'activité de réparation de l'ADN. Ces auteurs l’ont utilisé pour mesurer la capacité d’incision de sites spécifiques dans les lymphocytes humains, ce qui est une étape initiale de la réparation des bases oxydées de l'ADN (Collins et al., 2001). Le test des comètes est aussi utilisé dans de nombreux domaines, y compris la toxicologie génétique, l'écotoxicologie et les recherches sur la réparation de l'ADN.

Les bases modifiées reconnues par ENDOIII sont : 5,6-dihydroxy- 2’-déoxyuridine (uridine glycol), 5-hydroxy-2’-déoxycytidine OHdC), and 5-hydroxy-2’-déoxyuridine (5-OHdU).

Les bases modifiées reconnues par FPG : 7-hydro-8-oxo-2’-déoxyguanosine (8-oxodG), 2,6-diamino-4-hydroxy-5-formamidopyrimidine guanine (FapyGua), et

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