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Implication de la Whirline dans d’autres types cellulaires

La présence et la fonction de la Whirline en dehors des cellules ciliées et cellules photoréceptrices ont été peu étudiées. La Whirline est cependant décrite dans d’autres systèmes sensoriels, ainsi que dans le maintien structurel des neurones.

Comme décrit dans le chapitre précédent, la Whirline est reliée à un système protéique impliqué dans la fonction des cellules nociréceptrices 244, et plus particulièrement dans la sensation de douleur liée aux hautes températures. Dans ces cellules, la Whirline n’est pas directement impliquée dans la transmission de la cascade de signalisation mais intervient dans l’organisation du complexe sous membranaire du canal thermosensible Trpv1. Les autres

composantes de ce complexe de signalisation restent inconnues, il est possible que les interactions de la Whirline avec les protéines MAGUK telles que CASK ou MPP1 entrent en jeu dans ce système.

L’autre système sensitif impliquant la Whirline est la proprioception, c’est à dire la perception de la position d’un membre ou d’une partie du corps, dans l’espace 246. Cette sensation émane des muscles squelettiques et est modulée par leurs contractions. Les mécanismes moléculaires sont encore mal compris, ils impliquent cependant des protéines membranaires mécano-sensibles. Dans les neurones propriocepteurs, la Whirline est exprimée pendant le développement et durant le stade mature. Elle est nécessaire à la transduction du

signal mécanique en un potentiel d’action neuronal 246. Ses partenaires dans ce type cellulaire

sont actuellement inconnus.

Enfin la Whirline a aussi été décrite dans l’organisation axonale de neurones

non-sensoriels 247. Les auteurs suspectent une fonction similaire à celle connue dans les neurones

sensitifs, c’est à dire la connexion des protéines membranaires au cytosquelette, de microtubules dans ce cas.

Bien que la Whirline soit principalement étudiée dans les cellules régulant vision et audition, de plus en plus d’évidences montrent son implication dans d’autres types cellulaires, majoritairement reliés au système nerveux. Il semble notamment que des variations autour du complexe Usher2 soient utilisées dans les cellules du système nerveux pour contrôler le développement et la morphologie des neurones.

6 Problématique

L’objectif de cette thèse est d’élucider les mécanismes moléculaires associés aux fonctions de la Whirline dans la rétine et la cochlée. Pour se faire, nous nous sommes intéressés d’une part aux interactions de la Whirline avec les autres protéines Usher et les protéines de l’audition. D’autre part, nous avons caractérisé sa structure, en portant un intérêt particulier à son organisation modulaire.

Dans la rétine et la cochlée, les photorécepteurs et les cellules ciliées sont des neurones sensoriels dont la fonction unique est de traduire un stimulus physique, l’arrivée d’une onde électromagnétique ou sonore, en un message électrochimique transmissible au cerveau. Cette fonction unique nécessite de pouvoir être stimulée de façon constante, de capter l’information dans une large gamme d’amplitude et de fréquence et de la transmettre en une fraction de seconde. Ces contraintes nécessitent une morphologie cellulaire et des voies de signalisation exceptionnelles.

Les protéines Usher, dont la mutation des gènes associés provoque un syndrome de surdité/cécité, forment un ensemble constitué de protéines membranaires et de protéines d’échafaudage ne possédant aucun domaine catalytique. Associées à des protéines spécifiques du type cellulaire, elles assurent la mise en place et le maintien des morphologies et de la fonction des neurones sensitifs. Ces complexes se forment via les nombreux modules d’interaction et motifs contenus dans les protéines Usher. La grande majorité des protéines Usher et protéines associées possède des motifs d’interaction aux domaines PDZ, alors que seulement trois protéines du système possèdent de tels domaines, les orthologues Harmonine, PDZD7 et Whirline. La fonction de l’Harmonine et de ses partenaires moléculaires a été

beaucoup étudiée au début des années 2010 165. PDZD7 n’a été caractérisée que récemment et

son rôle semble limité au complexe des liens basaux. La Whirline est exprimée en plusieurs positions des stéréocils, pendant le développement et au stade mature, mais ses fonctions sont restées longtemps ignorées.

Au début de ce projet en 2013, la caractérisation de l’organisation modulaire de la Whirline était très parcellaire (Figure 40). Tout d’abord, les domaines HHD n’étaient pas identifiés, seul un article de bioinformatique de décembre 2014 repère les domaines HHD

qu’Uniprot et Interpro, la présence des domaines HHD dans la Whirline n’est toujours pas reconnue. Ce manque d’identification a eu pour conséquence l’utilisation de constructions supposées ne contenir qu’un domaine PDZ mais incluant partiellement ou entièrement les

HHD, dans de nombreuses publications 178,214,238. Ces constructions ont été utilisées en

pull-down en systèmes hétérologues, où la construction est surexprimée sans contrôle de son agrégation. Ainsi dans le grand nombre d’interactants décrits au début du projet, il était particulièrement délicat de séparer partenaires et artefacts.

Enfin, au lancement du projet, la localisation proposée pour la Whirline le long des stéréocils était différente. Il était considéré que la Whirline localisait au complexe des liens basaux pendant le développement, au sommet des stéréocils de la grande rangée, mais aussi au sommet des plus petites rangées, au niveau du complexe de la mécano-transduction. Cette localisation au niveau du point inférieur d’ancrage du lien apical a été montrée dans un seul

article 234 mais n’a jamais été reproduite ultérieurement. Elle a cependant était largement

adoptée par la communauté et perdure encore aujourd’hui en dépit de l’absence de

confirmation 200. Cette localisation sous-entend un rôle direct de la Whirline dans la

mécano-transduction, qui ne semble pas être avérée avec des résultats plus récents (Figure 40).

Figure 40 : Information sur la Whirline au début de la thèse. (A) Organisation en domaine de la Whirline connue en 2013. (B et C) Localisations des isoformes de la Whirline, identifiées en 2013, dans les stéréocils et les photorécepteurs.

L’objectif principal de cette thèse a été l’étude structurale des domaines de la Whirline, et plus particulièrement les structures supramodulaires que ceux-ci forment. Au début de cette thèse, aucune information sur des superstructures potentiellement formées par les domaines de la Whirline n’était disponible. En se basant sur les travaux effectués précédemment sur l’Harmonine, nous suspections cependant que celles-ci pouvaient exister et pouvaient moduler significativement la fonction des domaines isolés de la Whirline. J’ai donc

cloné, produit et purifié les constructions des domaines isolés, de toutes les combinaisons possibles de domaines deux à deux et plusieurs constructions contenant trois à quatre domaines. J’ai ensuite caractérisé ces constructions de la Whirline avec une approche systématique couplant cristallographie, SAXS et RMN ainsi que d’autres méthodes biophysiques, telle que l’émission de fluorescence. Nous avons ainsi pu identifier un supramodule transitoire formé entre les deux domaines PDZ N-terminaux de la Whirline pour lequel nous avons déterminé la structure, caractérisé son échange avec des formes non-compactes et déterminé l’impact de ces conformations sur l’affinité pour l’un des partenaires. Nous avons aussi résolu la structure atomique du second domaine HHD, nouvellement identifié et montré que celui-ci n’interagit pas avec le supramodule de domaine PDZ le précédant.

Le second objectif de cette thèse était de clarifier le réseau d’interaction de la Whirline au sein du système de l’audition en se concentrant particulièrement sur les interactions impliquant les domaines PDZ. Dans le système de l’audition, la Whirline, possédant à la fois PBM et domaines PDZ, est un candidat idéal pour être au cœur de complexes variés. Nous avons donc criblé par Résonance Plasmonique de Surface (SPR) les C-terminaux de toutes les protéines Usher et certaines autres protéines de l’audition avec les domaines PDZ de la Whirline, isolés ou avec leurs domaines adjacents. Nous avons ensuite confirmé les interactions nous paraissant les plus intéressantes par d’autres méthodes de titrage en solution, suivie par l’émission de fluorescence des tryptophanes ou par RMN. Nous avons ainsi obtenu une vue plus clair du réseau d’interaction formé par la Whirline.

7 Résultat 1 : Délimitation et production des