d’ordre pose des probl`emes de fiabilit´e des faibles covariances, et donc en particulier,
des covariances `a tr`es grande distance. En effet, tel que nous l’avons introduit ci-dessus,
le filtre SEEK utilise des modes d’erreurs que l’on qualifiera de “globaux”, issus d’une
d´ecomposition EOFs classique d’une s´erie temporelle d’´etats du mod`ele. On parle de modes
d’erreurs globaux parce qu’ils sont d´efinis sur l’ensemble du domaine d’´etude. On voit
alors que l’utilisation de tels modes multivari´es globaux va se traduire par la propagation
de l’information d’une seule observation `a tout le domaine ´etudi´e. Ce comportement se
d´eduit facilement des ´equations du SEEK. L’utilisation de modes d’erreurs globaux n’est
pas `a remettre en cause fondamentalement, dans la mesure o`u dans le cas d’un espace
d’erreur en rang complet et parfaitement sp´ecifi´e, la combinaison de tous les modes dans
l’espace d’´etape conduirait `a annuler les covariances `a grande distance quand ces derni`eres
sont nulles dans la r´ealit´e. En revanche, la troncature du sous-espace d’erreurs en un
nombre limit´e de modes empˆeche l’annulation de ces covariances et introduit donc des
effets ind´esirables `a grande distance.
Afin de corriger ce probl`eme, Testut (2000) a d´evelopp´e une variante, dite locale, du
SEEK. Cette approche consiste `a annuler explicitement les corr´elations `a grande distance
par le biais d’une param´etrisation locale de l’erreur d’´ebauche. Cette param´etrisation
consiste `a introduire a priori l’´echelle maximale de corr´elation horizontale des erreurs lors
de l’analyse. On d´efinit donc des bulles d’influence au-del`a desquelles toutes les corr´elations
sont impos´ees `a z´ero. Au final, on utilise donc toujours des modes multi-vari´es globaux
mais avec une influence locale afin de s’affranchir des probl`emes `a grande distance r´esultant
de la r´eduction d’ordre.
Dans notre r´egion d’int´erˆet qu’est le Pacifique Tropical, la dynamique est
essentiel-lement zonale et s’exerce `a tr`es grande ´echelle. La correction globale peut donc a priori
paraˆıtre bien adapt´ee pour des exp´eriences d’assimilation r´ealistes dans cette r´egion. Le
SEEK global a d’ailleurs ´et´e utilis´e pour de pr´ec´edentes ´etudes dans cette r´egion par
Pa-rent (2000) etDurand (2003). Cependant, pour les raisons invoqu´ees ci-dessus, j’ai pr´ef´er´e
utiliser l’approche locale que je viens d’introduire. Les zones d’influences utilis´ees sont, en
revanche, anisotrope et de grande taille, afin de respecter les sp´ecificit´es de la dynamique
locale.
4.5 Impl´ementation du SEEK avec OPA surface libre
4.5.1 Le logiciel SESAM
Malgr´e l’apparente simplicit´e de l’algorithme SEEK (cf tableau 4.1), dans les faits, les
difficult´es pratiques inh´erentes `a la mise en place d’un syst`eme d’assimilation s´equentielle
bas´e sur le SEEK sont importantes. Le programme SESAM
7(System of Sequential
Assi-milation Modules) a ´et´e d´evelopp´e au sein de l’´equipe MEOM par J-M. Brankart, C-E.
Testut et L. Parent (Testut, 2000) afin de fournir `a l’assimilateur un code permettant
la mise en œuvre du SEEK dans diff´erentes configurations. Le fait d’avoir SESAM `a ma
disposition, a grandement facilit´e la phase impl´ementation du SEEK avec le mod`ele OPA
dans sa version utilisant une surface libre.
Le code est constitu´e de diff´erents modules, ´ecrits en Fortran 90. A titre d’exemple,
SESAM repr´esente un code d’environ 80000 lignes, ce qui est ´equivalent au volume du code
7
de circulation g´en´erale de l’oc´ean OPA. SESAM g`ere la phase d’analyse du SEEK, mais
´egalement un grand nombre d’autres tˆaches relatives `a l’assimilation de donn´ees comme
la gestion des donn´ees d’observation du syst`eme, le calcul d’´ecart RMS par rapport aux
observations, ou encore l’estimation de param`etres statistiques et le calcul de bases EOFs.
Un des gros avantages de SESAM est qu’il n’est pas li´e `a une configuration ou `a un mod`ele
particulier. Ainsi, pr´ealablement `a ce travail de th`ese, il a ´et´e utilis´e dans des contextes
aussi vari´es que l’assimilation de SSH et de SST dans un mod`ele de l’Atlantique Nord `a
haute r´esolution (Testut et al., 2003), l’assimilation de SSH dans un mod`ele du Pacifique
Tropical (Parent et al., 2003), l’assimilation de SSH et de SST dans un mod`ele `a couche
isopycnes de l’Atlantique Nord (Brankart et al., 2003) ou hybride (Birol et al., 2004),
et plus r´ecemment, pour l’assimilation de SSH et SST dans un mod`ele coupl´e
physique-biog´eochimie de l’Atlantique Nord (Berline, 2005). Cette liste est loin d’ˆetre exhaustive.
Pour permettre une telle diversit´e d’applications, le module d’assimilation et le mod`ele
sont compl`etement ind´ependants. Le mod`ele s’arrˆete `a l’instant d’analyse t
i. Le vecteur
d’´etat x
iest alors transmis `a la chaˆıne d’assimilation. Le module SESAM se charge de
calculer l’´etat analys´e `a l’instant t
i, ce dernier est `a son tour transmis au mod`ele sous
forme d’une condition initiale que l’on fait ´evoluer par la dynamique du mod`ele jusqu’`a
l’instant d’analyse suivantt
i+1. Le vecteur d’´etatx
iest transmis sous la forme d’un fichier
Netcdf et l’ensemble de l’exp´erience d’assimilation est g´er´e par un m´eta-script sp´ecifique
`
a chaque exp´erience d’assimilation et qui est donc en grande partie cod´e par l’utilisateur.
4.5.2 La r´einitialisation du mod`ele : le sch´ema IAU
Le red´emarrage du mod`ele est toujours une ´etape probl´ematique lorsque l’on fait de
l’assimilation s´equentielle. Dans un cadre de mod´elisation, le mod`ele num´erique d’oc´ean
red´emarre en utilisant un fichier “restart”. Ce fichier contient l’ensemble des informations
n´ecessaires afin de permettre au mod`ele de red´emarrer comme s’il ne s’´etait pas arrˆet´e.
Le mod`ele OPA utilise un sch´ema Leap-frog (cf ´equation 3.8) pour l’int´egration
tempo-relle. Ceci n´ecessite donc la connaissance de l’´etat mod`ele `a deux pas de temps successifs,
les champs “before” (`a l’instantt−∆t) et “now” (`a l’instantt). Or, compte tenu des
ap-proximations faites lors de l’analyse statistique, il n’est pas raisonnable de penser estimer
la tendance `a l’instanttavec suffisamment de pr´ecision pour pouvoir l’utiliser dans le cadre
du red´emarrage du mod`ele. Ce que l’on fait classiquement pour contourner ce probl`eme
et de forcer le mod`ele `a red´emarrer selon un sch´ema temporel d’Euler (cf ´equation 4.49).
Ce dernier ne n´ecessite que la connaissance de l’´etat “now” :
u
t+∆t=u
t+ ∆t RHS
t(4.49)
Au red´emarrage du mod`ele, apr`es une analyse, on remplace donc les champs “before” et
“now” par le champs analys´ex
aet on impose un pas de temps en Euler pour l’int´egration
temporelle. Cette m´ethode bien qu’efficace, n’est pas sans poser un certain nombre de
probl`emes (on pourra consulterParent et al.(2003) pour plus de d´etail), et, notamment,
il n’est plus ´equivalent de faire 10 simulations de 5 jours et une simulation de 50 jours
avec un tel mode de red´emarrage.
Dans le cadre de cette th`ese, j’ai donc pr´ef´er´e opter pour une m´ethode incr´ementale,
l’IAU (pour Incremental Analysis Updating) pour la r´einitialisation du mod`ele apr`es
l’ana-lyse SEEK. Cette m´ethode, comme la plupart des d´eveloppements m´ethodologiques en
assimilation de donn´ees provient de la m´et´eorologie. Elle a ´et´e introduite parBloom et al.
4.5. Impl´ementation du SEEK avec OPA surface libre 79
Fig.4.4 –Sch´ema de l’assimilation s´equentielle classique.
(1996). Le principe de base de l’IAU est d’incorporer directement l’incr´ement d’analyse
δ=x
a−x
fdans les ´equations pronostiques du mod`ele sous la forme d’un terme de for¸cage.
En plus de r´esoudre le probl`eme du red´emarrage du mod`ele apr`es l’analyse, cette m´ethode
agit comme une m´ethode d’assimilation s´equentielle continue, ce qui conduit `a obtenir
une trajectoire assimil´ee continue. La discontinuit´e entre la pr´evision x
fet l’analyse x
aest un des inconv´enients majeurs des m´ethodes s´equentielles : `a cause de la suboptimalit´e
de l’analyse statistique (en raison des approximations consenties et pas toujours v´erifi´ees),
cette discontinuit´e peut engendrer des chocs dans le mod`ele au moment du red´emarrage,
entraˆınant des oscillations erron´ees `a haute fr´equence, et un ph´enom`ene de rejet de
l’in-formation assimil´ee. Ces ondes transitoires introduites par l’´etape d’analyse peuvent ˆetre
consid´er´ees comme le r´esultat d’une correction imparfaite du vecteur d’´etat de l’oc´ean,
due `a des covariances d’erreur mal ´evalu´ees. L’IAU est reconnu pour efficacement limiter
ces probl`emes.
Dans cette section, nous pr´esenterons bri`evement la m´ethode IAU mise en place au
cours de cette th`ese. Pour plus d’information sur le sujet et pour une ´etude d’impact
d´etaill´ee, le lecteur pourra se r´ef´erer `a Ourmi`eres et al. (2006). Dans une s´equence
d’as-similation classique, telle que celle du SEEK (voir figure 4.4), l’incr´ement d’analyse est
appliqu´e en une seule fois, au moment de l’analyse afin de corriger la pr´evision mod`ele
en tenant compte de l’information fournie par les observations disponibles. Il en r´esulte
une trajectoire discontinue avec des sauts `a chaque ´etape d’analyse. Comme nous l’avons
d´ej`a dit, ces discontinuit´es dans la trajectoire assimil´ee peuvent introduire des
oscilla-tions `a hautes fr´equences qui peuvent conduire `a un ph´enom`ene de rejet de l’information
assimil´ee.
Dans le cadre de l’algorithme IAU, en revanche, l’incr´ement d’analyse δ = x
a−x
fest appliqu´e en continu directement dans les ´equations pronostiques du mod`ele sous la
forme d’un terme de for¸cage. En plus des avantages pr´ec´edemment ´evoqu´es, cette
tech-nique pr´esente donc ´egalement l’int´erˆet d’ˆetre simple `a impl´ementer. Pour une variable
pronostiqueV donn´ee, l’´equation d’´evolution devient :
∂V
∂t =M +γ(t)(V
a
−V
f) (4.50)
avecMles membres de l’´equation d’´evolution de la variableV etγla fonction de r´epartition
temporelle de l’incr´ement telle que
Z
∆t0
γ(t)dt= 1 (4.51)
∆t´etant la dur´ee de la fenˆetre temporelle d’assimilation.
Le lecteur notera les diff´erences entre l’´equation 4.50 et le nudging (´equation 4.52) qui
sera ´evoqu´e dans la section traitant de l’initialisation du filtre SEEK.
∂V
∂t =M+γ(t)(V
obs