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Implémentation du processus d'exploration cognitivo-perceptive

4.4 Implémentation du module de perception

4.4.3 Implémentation du processus d'exploration cognitivo-perceptive

Ce processus de perception top-down permet la recherche active d'informations dans l'envi-ronnement. C'est l'exploration cognitive qui permet au conducteur de rechercher des informa-tions grâce à ses schémas tactiques, et c'est l'exploration perceptive qui va diriger l'÷il dans l'environnement pour extraire l'information. Nous allons ici décrire comment nous avons simulé ce processus d'exploration cognitivo-perceptive dans notre module perception sur la plateforme SiVIC.

4.4.3.1 Les requêtes perceptives descendantes

Le module perception est en mesure de recevoir des messages par le protocoleXMPP prove-nant de n'importe quelle source connectée au même serveur openre que lui. Les requêtes qu'il reçoit sont des messages contenant les informations nécessaires pour qu'il dirige son attention visuelle en direction d'une zone de l'environnement simulé.

Les demandes formulées par les autres modules du modèle (Stratégique, Tactique et Exécution d'Actions) sont envoyées sous la forme d'un message intégrant un Dataform, pour obtenir une structure au sein d'un message XMPP. Une requête perceptive valide doit répondre à certains critères, comme la durée du regard à porter, le temps de vie de la requête, ou l'objet à regarder dans la scène. Le tableau 2récapitule les champs nécessaires. Chaque entrée ou couple d'entrées du tableau précédé par XOR signie qu'il est nécessaire d'avoir un de ceux-ci et un seul.

Trois solutions sont possibles pour diriger le regard dans la scène routière. La première, la plus pratique, est de donner le  nom  de l'objet sur lequel nous souhaitons placer le regard. Dans ce cas, le module perception va calculer automatiquement les rotations à appliquer à l'÷il virtuel pour aller regarder l'objet en question. L'intérêt de l'utilisation de cette technique repose sur les schémas tactiques et leurs zones d'explorations perceptives de l'environnement implémentées

DataForm dénissant une requête perceptive nom du champ type description

Durée int temps de la requête

Priorité int priorité de la requête (de 0 à 10) LifeTime int temps de vie de la requête

XOR PositionEcranX int localisation abscisse écran du regard PositionEcranY int localisation ordonnée écran du regard XOR AngleAlpha int angle zénithal du regard

AngleBeta int

XOR ItemName std : :string nom de l'objet à regarder XOR DTV int (0,1 ou 2) activation double tâche + type

Id int Id de la requête (unique) Tableau 2  Dataform d'une requête perceptive

comme des  objets invisibles . Un objet invisible est un marquage informatique eectif mais inaccessible à un certain processus de traitement. En l'espèce, ce seront des objets que ne percevra pas notre ÷il virtuel tel que nous l'avons implémenté, mais qui pourront être néanmoins uilisés pour diriger le regard dans l'environnement virtuel et observer ainsi tous les objets visibles présents dans cette zone.

La seconde méthode consiste à donner au module les angles α, β à appliquer à l'÷il virtuel. Ceci permet de diriger manuellement l'÷il, grâce à l'interface du module. En eet, notre déve-loppement a débuté avec des mouvements de l'÷il dirigés par des clics de souris pour avoir le contrôle total de la perception et permettre la vérication de certaines fonctions. Cette technique est active principalement pour les tests pendant le développement. Elle n'est pas conçue pour la modélisation cognitive, mais si l'utilité se présente, elle conserve les caractéristiques de vitesse et d'utilisation par XMPP.

La troisième consiste à donner au module les points x, y de l'écran d'achage de l'environ-nement. Une fois les coordonnées de l'écran données au module, l'÷il se dirigera vers la zone de l'environnement correspondant à la zone sur l'écran d'achage. Cette technique permet de diriger le regard en direction de zones présentes sur l'écran, visibles par l'utilisateur du simulateur. Elle est particulièrement intéressante lors de l'utilisation d'un oculomètre permettant l'extraction en direct des coordonnées d'écran que le sujet regarde. En eet, nous avons utilisé un oculomètre au sein du simulateur de conduite que nous décrivons à la section 5.1.1 p.144. Cela nous permet de connaître la position (x,y) de l'écran visualisée dans les 200 ms suivant le déplacement du regard du sujet. Il est donc possible de diriger le module perception en fonction d'une entrée dénie par le regard d'un sujet pendant une expérimentation. Cette technique novatrice nous semble très intéressante pour construire par exemple une représentation mentale perceptive potentiel-lement proche de celle d'un sujet. Cela permettrait aussi d'entamer un apprentissage supervisé de nos stratégies visuelles, et d'obtenir un module perception fonctionnant grâce à des stratégies construites sur le modèle humain.

La  durée de consultation  dénie dans la requête perceptive permet de déterminer le temps de xation du regard nécessaire pour exécuter la requête. C'est un moyen simple que nous avons décidé d'utiliser dans notre modèle pour émuler de façon rudimentaire le temps

nécessaire pour réaliser le traitement perceptif d'une information par le conducteur (à terme, si des algorithmes de reconnaissance d'objets étaient implémentés dans le module et calibrés sur les temps de traitement de la perception humaine, ce paramètre ne serait plus utile). En tant qu'exécuteur de requêtes, le module perception va donc prendre cette durée pour déterminer le temps de xation que l'÷il virtuel va devoir consacrer à l'observation d'une zone et/ou d'un objet. Ce temps ne peut pas être modié par le module perception. En revanche, le gestionnaire de stratégies visuelles peut décider d'interrompre une xation en cours, bien que non achevée, pour engager une nouvelle requête urgente (suite à la perception d'un événement critique dans la vision périphérique, par exemple). Le  temps de vie  d'une requête permet de dénir un temps maximal pour eectuer la requête, car dans un environnement dynamique, quelques secondes susent à rendre une demande inutile ou inexécutable. Lorsque ce temps de vie est dépassé, la requête est automatiquement détruite par le gestionnaire de stratégies visuelles.

Enn, pour simuler des situations de distraction visuelle induites par un écran d'achage embarqué, le module tactique peut envoyer une séquence de requêtes perceptives permettant d'alterner la consultation de l'écran et celle de la route selon diérentes stratégies visuelles. Cette fonctionnalité nous a permis, par exemple, d'étudier les risques liés à la distraction visuelle en conduite auprès de conducteurs humains et d'en simuler les eets potentiels au niveau de la représentation mentale du conducteur. Cette problématique a fait l'objet d'une expérimentation spécique qui sera présentée et discutée dans le chapitre suivant (cf.5.3).

4.4.3.2 La génération du cycle d'exploration cognitivo-perceptive

L'exploration cognitivo-perceptive de l'environnement est un processus top down engendré dans notre module de perception par la réception de requêtes perceptives émises par les autres modules deCOSMODRIVE. Le module stratégique peut orienter la perception vers l'observation de panneaux de direction, par exemple, ou de points de repère géographiques dans l'environne-ment pour vérier sa position sur le plan stratégique. Le module d'exécution d'actions va pour sa part générer de façon récurrente et systématique des requêtes permettant de piloter le véhi-cule et de le maintenir sur sa trajectoire, ou pour observer droit devant et détecter la présence d'obstacles. Enn, le module tactique va générer des requêtes à court terme visant à répondre aux besoins du schéma tactique activé (correspondant à la représentation tactique courante du conducteur), et des requêtes à plus long terme visant à catégoriser l'environnement lointain et sélectionner ainsi un futur schéma de conduite.

Le processus d'exploration cognitivo-perceptive tel que nous l'avons modélisé puis implémenté au moyen de notre gestionnaire de requêtes perceptives permet ainsi de reproduire dans notre modèle du conducteur l'ensemble des principes de fonctionnement du cycle perceptif de Neisser (Neisser, 1976 ; cf.3.3.2.2), ceci pour tous les niveaux cognitifs de la conduite automobile : la réponse à une requête perceptive simule la modication des représentations mentales par les informations remontées depuis l'environnement via notre ÷il virtuel, et modie par là-même le schéma perceptif actif. Ce processus de recherche active de l'information permet ainsi au modèle du conducteur de s'informer en permanence sur son environnement, en fonction des informations qu'il possède déjà dans ses représentations internes, perceptives et cognitives, et de celles qui lui manquent pour prendre ses décisions, ce qui nécessite de générer une nouvelle requête.

Ce cycle d'exploration perceptive permet ainsi de générer  par émergence  les stratégies vi-suelles d'un conducteur automobile (voir un exemple en situation de tourne-à-gauche : codeQR8

section 4.6.2), mais aussi d'analyser et d'expliquer les données oculométriques collectées auprès de conducteurs humains. Nous reviendrons en détail sur ces questions dans le chapitre suivant (cf. section 5.2, p.150), en présentant et en discutant les résultats d'une expérimentation que nous avons mise en place pour étudier les stratégies visuelles des conducteurs en situation de tourne-à-gauche dans un carrefour à feux.

Ainsi, grâce au module de perception tel que nous l'avons conçu et développé, il est possible de simuler les processus de recherche active de l'information dans l'environnement routier et de visualiser les représentations mentales du conducteur en observant dynamiquement leurs mises à jour, en fonction de ce que le modèle a perçu (représentation perceptive) puis intégré cogni-tivement (représentation cognitive tactique) de la situation de conduite dans laquelle il évolue. Mais il est également possible de simuler des erreurs en cas de non perception ou de mauvaise intégration cognitive d'une information. Dans la dernière partie de ce chapitre (sections .5.1 et 4.6.2), nous présenterons quelques exemples de visualisation de ces résultats de simulation des représentations perceptives et cognitives du conducteur automobile.