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L’impact de l’évolution du contexte socio-économique sur la mobilité des étudiants chinois

2.3 Les conditions politiques, sociétales ou familiales favorables de la mobilité internationale des étudiants chinois

2.3.2 L’impact de l’évolution du contexte socio-économique sur la mobilité des étudiants chinois

L’essor économique de la Chine :

La Chine, disposant de cinq mille ans d’histoire et de civilisation, a connu des évolutions brusques durant le 20e siècle où la réforme économique a changé radicalement la structure sociale. Depuis trente ans, elle est caractérisée par une polarisation sociale importante (Roulleau-Berger, 2008). Avant les réformes, la majorité des citoyens étaient des paysans. À la fin du 20e siècle, 75 % des habitants vivaient en zones rurales et 65 % de la main-d’œuvre travaillait dans l’agriculture (Wen, 1996). La mutation socio-économique du pays a conduit à une forte mobilité sociale. Avec l’urbanisation et l’industrialisation, de nombreuses nouvelles professions sont apparues pour répondre au besoin du marché et la classe moyenne s’est développée. Deng Xiaoping disait à l’époque que : « Peu importe un chat noir ou blanc, pourvu

qu’il attrape les souris ». La priorité a été donnée au développement économique, peu importe

sous quelle orientation politique. La libéralisation du commerce et le soutien au développement des entreprises privées ont été les premières mesures mises en place. En même temps, les industries légères se développent rapidement, et le « made in China » s’est répandu à travers le monde. La Chine a grimpé rapidement dans le classement des puissances mondiales à partir de 1978 (Chassin, 2011, P.23). Le niveau de vie des citoyens a été nettement amélioré. Le PIB7 par habitant est passé de 266 dollars en 1978 à 6 644 dollars en 2013 (Chen, 2014).

La Chine a intégré la catégorie des pays à revenu intermédiaire en 2001 sur la base de son revenu national brut (RNB) en dollars courants (d’après la méthode Atlas de la Banque Mondiale). Concrètement, en 2010, elle disposait d’un RNB de 4 240 dollars. Les faibles coûts de production et de la valeur de monnaie ont permis le développement économique rapide de la Chine et sa présence accrue sur le marché international. Dans le domaine de l’éducation, les progrès ont également été importants, la part de jeunes détenant un diplôme universitaire a augmenté considérablement, et la part de la population ayant fréquenté l’enseignement supérieur est passée de 4,8 % à 16,9 % entre 1998 et 2013 (Guilhot, 2015).

Elle a adhéré à l’OMC en 2001. Sa participation a accéléré le rythme de croissance économique. De nombreuses stratégies ont été mises en place : baisse des frais de douane, protection de la propriété intellectuelle, ouverture du secteur de services, etc. Sachant qu’avant la réforme, elle était l’un des pays dans lequel les droits de douane étaient parmi les plus élevés (Liu, 2012). Jusqu’à la fin des années 1970, l’économie chinoise était contrôlée et planifiée par l’État, et le régime socialiste avait pour objectif de construire une société égalitaire. À l’époque, l’industrie lourde était développée, tandis que l’industrie légère et les services étaient délaissés. Le marché de l’immobilier était également entièrement contrôlé par l’État. Par exemple, jusqu’aux années 1990, les fonctionnaires du secteur public étaient logés gratuitement par leur unité de travail. La plupart des logements étaient gérés par l’État, et le marché privé de l’immobilier était minoritaire (15 %). Cela avait pour objectif de maintenir l’égalité des conditions de vie au sein de la société (Chassin, 2011). Mais ce système économique a montré ses limites. Lorsque l’économie est contrôlée par l’État, cela limite la productivité des entreprises et des travailleurs. La Chine devenait alors de plus en plus pauvre avec le système de « salaires indépendants de

sécheresse ou d’inondation » ou du « bol du riz en fer » (le système où l’État prend en charge

7 PIB : Selon la définition de l’Insee (2017), « Le produit intérieur brut d’un pays est égal à la somme des valeurs ajoutées

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les personnels du berceau jusqu’au cercueil) (Zhang, 2004). La mobilité sociale8 semble presque impossible lorsqu’un enfant de retraités reprend le travail des parents. Par manque de concurrence sur le marché du travail, les personnes qualifiées sont peu valorisées (Lu et Chen, 2000).

À partir des années 1990, les entreprises d’État ont subi de profondes réformes. En 1998, le Groupe leader du Conseil des Affaires de l’État pour la technologie et l’éducation a vu le jour. La fonction de cet organisme est de faciliter la coordination des politiques en matière de technologie. À la fin des années 1980, la concurrence a commencé à apparaître dans les industries légères, le bâtiment, l’automobile et le textile, etc. En 1994, la majorité du secteur industriel a renoncé à une gestion de type socialiste, à l’exception de la production d’électricité et du secteur pétrolier. Les entreprises ont gagné en autonomie sur le plan financier et ont obtenu le droit de décider leur production, de signer des contrats avec des entreprises étrangères et de gérer leurs ressources humaines. La loi de 1983 a instauré un impôt de 55 % sur les bénéfices des entreprises d’État (contre 100 % auparavant) et a favorisé le développement des petites entreprises (Xu, 1991).

Dans les zones rurales, l’État décide de reconstruire « un système institutionnel rural au niveau

économique le plus petit pour mieux stimuler les agents économiques et relâchement progressif du contrôle gouvernemental au niveau macro-économique quant à la consommation et la fixation des prix pour remettre l’économie rurale sur la voie du marché » (Wen, 1996, P.112).

Il a établi des contrats avec les agriculteurs et ces derniers ont obtenu plus de liberté pour pouvoir organiser leur travail et choisir leurs produits. Le changement structurel au sein du secteur d’agriculture a accéléré le développement économique (Wen, 1996).

Après les réformes, de nouveaux systèmes d’embauche ont été mis en place : les employeurs ont pu introduire une période d’essai pour les nouveaux embauchés, et les employés ne donnant pas satisfaction pouvaient désormais être licenciés. Les contrats de travail peuvent désormais être courts ou longs, renouvelables ou non, et les niveaux de salaire sont souvent liés aux bénéfices de l’entreprise (Xu, 1991). Grenier et Belotel-Grenier (2006) confirment que « La

restructuration des entreprises d’État, initiée au milieu des années 1990, a liquidé la classe ouvrière en introduisant une gestion fluide et flexible de la main-d’œuvre et l’abandon du fardeau de la protection sociale » (Grenier et Belotel-Grenier, 2006, P.1). Les conditions de

travail des ouvriers non qualifiés sont devenues de plus en plus précaires. Le Conseil des affaires d’État (1986) déclare ainsi : « L’entreprise embauche les ouvriers sous le contrat;

l’embauche doit être prioritairement réservée aux jeunes et basée sur leur compétence ; l’entreprise emploie les ouvriers recrutés dans toute la société mais choisit les meilleurs ; assurer les chômeurs pendant qu'ils attendent du travail ; l’entreprise a le droit de licencier

8 Pitirim Sorokin (1959) définit ainsi la mobilité sociale : « le phénomène du déplacement des individus dans l’espace social ».

Nous pouvons ainsi distinguer la mobilité horizontale et la mobilité verticale. « La mobilité horizontale concerne les changements de métier (mobilité professionnelle au sens strict) ou de localisation (mobilité géographique) sans changement de statut dans la hiérarchie sociale. Ainsi, une ouvrière qui devient caissière change de métier mais pas de position dans la hiérarchie sociale. Il en est de même d’un fils de comptable qui devient technicien informatique. » « La mobilité verticale concerne qui concerne le passage, ascendant ou descendant, d’un statut social à un autre à l’intérieur d’une hiérarchie sociale pour un individu ou un groupe social. Il s’agit de la « mobilité sociale » au sens étroit. » « La mobilité est ascendante lorsque l’individu grimpe dans la hiérarchie sociale. La mobilité est descendante lorsque l’individu connaît un déclassement social. Elle comprend : La mobilité intra générationnelle, la mobilité au cours d’une vie pour un individu (la promotion d’un employé qui devient cadre, par exemple). Il s’agit de la mobilité professionnelle au sens large. Un employé de banque qui devient directeur d’une agence bancaire connaît une mobilité intra-générationnelle ascendante ; La mobilité intergénérationnelle, qui désigne le changement d’une position sociale d’une génération à l’autre (du père au fils, par exemple). La fille d’un instituteur qui devient médecin est un exemple de mobilité intergénérationnelle ascendante. Le fils d’un cadre qui devient infirmier connaît une mobilité intergénérationnelle descendante » (Cité par Merllié, 2019, pp. 5-39).

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ses employés qui enfreignent les règlements » (Cité par Xu, 1991, P.23). Nous constatons

désormais la disparition du concept du « bol du riz en fer ». Le niveau de qualification et la compétence professionnelle deviennent un des critères les plus importants sur le marché du travail à partir de la fin des années 1980. Beaucoup de chercheurs considèrent que les réformes économiques ont été le moteur d’un changement structurel de la société. Or ces transformations sociales elles-mêmes ont stimulé le développement économique (Li et al, 2008).

Dans les années 1980, les opportunités d’ascension sociale se sont développées pour les ouvriers et les paysans (Li, 2008). Par exemple, le taux de passage du statut d’ouvrier à celui de col blanc (y compris les cadres de la haute fonction publique et du Parti, dirigeants d’entreprises publiques ou privées, personnels administratifs, techniciens spécialisés et ingénieurs) a atteint à 16,1 %. Confrontés à une transformation sociale et à une croissance économique importante, les dirigeants du Parti Communiste ont compris la nécessité du renouvellement des élites sans pour autant abandonner le mécanisme de sélection antérieur (Tanner et Feder, 1993). Pour recruter des fonctionnaires qualifiés, un concours d’entrée dans la fonction publique a été mis en place à partir de 1993, même si à l’époque la plupart des fonctionnaires continuaient à être recrutés hors-concours (grâce à la cooptation au sein du Parti Communiste). L’État a affiché sa volonté de recruter les personnels les plus compétents et a ouvert la porte à des personnes issues de catégories peu favorisées et les promotions professionnelles ont commencé à tenir compte de la qualification académique (Lefébure, 2014). Ainsi, la fluidité sociale après les réformes a été importante. « Émancipation », « libération », « renversement des statuts sociaux », sont des termes qui ont qualifié la transformation rapide de la Chine (Guo, 2008).

L’urbanisation depuis les réformes :

Dans les années 1950, l’État chinois a instauré une hiérarchie complexe entre ses citoyens par le système d’enregistrement de la résidence (hukou9) (Froissart, 2008). Le hukou distingue deux

catégories de citoyens : rural et urbain. Ce livret de résidence comporte des informations essentielles sur la personne concernée : nom, date de naissance et de lieu, sexe, niveau d’études, lieu de travail, etc. Il est indispensable pour obtenir un logement, trouver un emploi et s’inscrire au système de santé et d’éducation. Les conditions de vie se différencient nettement selon le type de hukou. Hou explique dans sa recherche que « les paysans doivent compter sur leurs

propres forces pour se nourrir, se loger, se soigner et recevoir une éducation » (Froissart,

2008, P.5). Tandis que l’État prend en charge les citadins « du berceau à la tombe », les détenteurs de hukou urbains bénéficiant des emplois proposés par l’État à l’issue de leurs études, d’un logement et d’une protection sociale. Mais ces avantages ne sont pas attribués aux citoyens ayant un hukou rural. Par exemple, les enfants de détenteurs de hukou urbains sont souvent employés dans la même unité de travail que leurs parents. De plus, dans les années 1980, 60 % de médecins soignent 15 % de la population urbaine. 40 % de médecins soignent 85 % de la

9 « Le système actuel d’enregistrement du hukou a été mis en place en 1958 et délimite une frontière d’appartenance entre le

milieu rural et le milieu urbain. Le système du hukou divise la population entre ménages ruraux et ménages non ruraux, les intérêts et les droits individuels comme l’éducation, la santé, le logement et l’emploi étant liés à l’enregistrement du ménage. Dans ce système, les citoyens ruraux n’ont pas accès aux prestations sociales s’ils s’installent dans les villes, même s’ils y vivent et y travaillent. Le système du hukou a eu pour effet de restreindre sévèrement la migration des campagnes vers les villes. » (Zhang, 2013, P.32). « Un hukou ou un huji renvoie à un système de permis de résidence qui date de la Chine ancienne, quand l’enregistrement des ménages était exigé par la loi dans tout le pays et à Taiwan. Un hukou peut aussi se référer à un registre familial dans de nombreux contextes puisque le système d’enregistrement des ménages porte sur la famille et inclut habituellement une information personnelle sur tous ses membres. En Chine, les registres familiaux existaient déjà sous la dynastie Xia (2100-1600 av. j.-c.). Au cours des siècles qui ont suivi, l’enregistrement des ménages s’est développé en une organisation des familles et des clans à des fins d’imposition, de conscription et de contrôle social. » (Zhang, 2013, P.33).

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population rurale (ORS, 2016). De ce fait, ce livret de résidence constitue une véritable source de discrimination dont les ruraux sont les victimes. Il constitue non seulement un enregistrement administratif mais aussi instaure une hiérarchie socio-spatiale qui a des impacts encore aujourd’hui. Dans cette hiérarchie, les détenteurs de hukou urbains disposent de nombreux droits auxquels les non-résidents n’ont pas accès, notamment en matière d’éducation et de santé. Depuis 1978, ce système d’enregistrement de la résidence a été progressivement assoupli. Les personnes d’origine rurale peuvent désormais s’installer plus facilement dans les villes sans pour autant devoir y transférer leur statut de résidence, cette stratégie ayant pour objectif de mobiliser la main-d’œuvre rurale pour travailler dans les usines et sur les chantiers du bâtiment dans les villes (Liu, 2016). Les migrants d’origine rurale vivant dans les grandes villes chinoises ne sont cependant pas traités sur un pied d’égalité avec les résidents urbains, et ils sont privés de nombreux droits fondamentaux. Ils ont souvent des conditions de vie très défavorisées par rapport aux titulaires d’un hukou urbain. Loin de leur région d’origine, ils rencontrent souvent des discriminations de la part des résidents locaux. Leurs enfants n’ont pas le droit de s’inscrire dans les écoles publiques en ville parce que leur hukou n’y est pas enregistré (Ekman, 2016). La croissance urbaine s’est accélérée à partir des années 1980 et les contrôles dans l’accès aux villes se sont relâchés (Hou et Jie, 2010 ; Shen, 2008). En 1994, 126 millions de personnes étaient embauchées dans les entreprises privées et s’étaient installées dans de petites villes ou dans de nouvelles zones industrielles (Wen, 1996). Avec ce mouvement d’industrialisation et d’urbanisation, le niveau de revenu annuel chez les habitants de zones rurales est passé de 216 yuans (27 euros) par tête en 1980 à plus de 1400 (175 euros) en 1984. En 2011, le taux d’urbanisation a atteint 51 % (Chen, 2014). En 2015, la population flottante (celle des migrants d’origine rurale en mobilité interne dans les villes) s’élevait à 247 millions, soit 18 % de la population totale. Par ailleurs, les jeunes d’origine rurale sont obligés de migrer dans une grande ville dès lors qu’ils entrent dans l’enseignement supérieur (Roulleau-Berger et Jun, 2017). Entre 1978 et 2010, la part de population urbaine dans la population totale est passée de 15 % à 50 %. En 2011, pour la première fois, la part de population urbaine a dépassé celle des ruraux. Ce processus d’urbanisation n’a toutefois pas été un mouvement spontané, mais le résultat de politiques autoritaires (Han et Wang, 2013). Malgré une population urbaine en forte croissance, le taux d’urbanisation en Chine reste plus faible que dans les pays occidentaux (graphique 3).

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Graphique 3 : Population urbaine et taux d'urbanisation en Chine et dans d'autres pays, 1950-2020

Source : Han et Wang, 2013, P.18.

Malgré les assouplissements récents, le transfert d’un hukou d’une localité rurale vers une localité urbaine reste non systématique et soumis à des procédures administratives strictes : être embauché par une entreprise d’État, engagé dans l’armée, inscrit à l’université, etc. Cependant, des quotas étant fixés, même si une personne remplit l’un de ces critères, elle n’est pas certaine d’obtenir son hukou urbain. Par conséquent, les paysans ont acquis le droit de travailler et de vivre dans les villes sans pour autant pouvoir devenir des résidents urbains et ainsi pouvoir bénéficier des droits en matière de santé ou l’éducation, etc (Froissart, 2010). Toutefois, la Chine a annoncé récemment qu’elle allait assouplir les restrictions sur l’enregistrement des ménages afin que les résidents ruraux puissent demander un transfert de leur hukou dans la ville dans laquelle ils résident et avoir accès aux mêmes services publics que les résidents urbains permanents10.

L’augmentation des revenus mais aussi des inégalités :

La Chine a acquis une puissance économique, diplomatique et militaire importantes grâce à un décollage économique exceptionnel. Elle s’est modernisée et s’enrichit à un rythme sans précédent, notamment grâce au dynamisme de ses exportations et aux investissements étrangers sur son territoire (Cabestan, 2010).

10 Cao Siqi (2020) « China to ease urban hukou restrictions for migrant workers », Global Times, 10 avril 2020, (disponible à

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La stratégie d’ouverture politique et économique adoptée à la fin des année 1970 était fondée sur l’idée de laisser d’abord une partie de la population s’enrichir, et que le reste de la population suive progressivement. Cette stratégie sous-tend l’acceptation d’une montée des inégalités de revenu au sein de la population. La réhabilitation de la propriété privée et l’encouragement à la création d’entreprises privées ont permis à une partie de population de s’enrichir rapidement (Li, 2008). Le gouvernement autorise ainsi certaines régions, certaines entreprises, certains ouvriers et paysans, à toucher un revenu plus important, alors que d’autres sont laissés en marge de cette évolution (Paulès, 2013).

La Chine est ainsi rapidement devenue « l’usine du monde » (Fourmeau, 2010), et le processus de « moyennisation11 » socioéconomique s’est diffusé dans une partie de la société (Chassin,

2011).

La politique de réforme et d’ouverture a offert plus d’opportunités de mobilité sociale ascendante et a permis l’apparition de nouvelles catégories professionnelles, avec toutefois de fortes disparités (Li, 2008).

La réforme des entreprises d’État a conduit à une libéralisation du marché du travail. Le gouvernement a provoqué des faillites, des mises en vente et des fusions des entreprises collectives qui ont conduit à une suppression importante d’effectif des ouvriers dans le secteur. Le nombre d’employés est passé de 112,610 millions en 1995 à 76,4 millions en 2001 (Bureau national des statistiques, 2002). Tong a ainsi analysé que ce sont surtout les ouvriers qui ont essentiellement assumé le coût de la réforme (le licenciement massif et la dégradation du statut social) (Chan, 2008). De nombreux travailleurs ont ainsi perdu la protection d’État et sont devenus à la merci d’un marché du travail concurrentiel (Chan, 2008).

En 2016, les travailleurs migrants occupaient 48 % des emplois urbains, et ils jouent un rôle essentiel dans la structuration du marché du travail depuis les réformes. Ce sont surtout des entreprises privées qui ont contribué fortement à la croissance économique. Les entreprises d’État n’offrent que 23 % de l’emploi urbain. Mais la précarité professionnelle s’est développée. Aujourd’hui sur le marché du travail urbain, la moitié des travailleurs détiennent des contrats de travail temporaires, saisonniers, journaliers ou même parfois n’ont pas contrat du tout. Même dans la fonction publique, de plus en plus d’emplois précaires ont été créés pour réduire les coûts, sachant que la transition d’un emploi précaire à un emploi stable se fait très difficilement (Roulleau-Berger et Jun, 2017). Les jeunes diplômés qui travaillent dans le secteur privé sont souvent sans contrat de travail et avec un faible revenu. Ils subissent également le mépris de la part autres employés (Cabestan, 2010).

En France, la redistribution verticale par le jeu des impôts et des prestations sociales est très importante pour réduire les inégalités du revenu. L’indice de Gini peut être diminué de dix points entre la distribution primaire et la distribution des revenus après être corrigé par les impôts et par d’autres prestations (Insee, 2011). En Chine, le nombre de personnes rurales est d’environ 800 millions et jusqu’en 2005, deux personnes actives sur cinq étaient dans

11 Dans le mémoire de Chassin (2011, P.13), est défini ainsi le terme de « classe moyenne », « la nouvelle strate sociale qui

fait jour entre d’un côté, les paysans ruraux et les ouvriers de l’industrie, et d’un autre côté, les riches capitalistes. Cette classe moyenne est majoritairement composée, entre autres, d’officiels du gouvernement, d’auto entrepreneurs, de commerciaux, de managers, de cadres et de techniciens. Elle est caractérisée par une moyenne d’âge relativement jeune par rapport aux autres pays occidentaux –entre 25 et 44 ans et vit en grande partie dans les grandes métropoles côtières du pays. Elle a par ailleurs,