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PROTOCOLE EXPERIMENTAL

5.4 S IMULATION DE LA MIGRATION DU METHANE DANS DES STRUCTURES MINIERES ENNOYEES

5.4.4 I MPACT D ’ UN PUITS DE DENOYAGE

5.4.5.1 B ILAN SUR LES MODELES DEVELOPPES

 Stock de méthane dans le charbon

La quantité de méthane stocké dans une veine dépend de la quantité de sites d’adsorption initialement saturés en méthane, donc de la quantité de charbon que la veine elle-même représente. Dans nos modèles, cela se traduit par les dimensions attribuées à la veine ainsi qu’à sa concentration massique en charbon. La concentration massique de charbon choisie dans les modèles est de 7 kg.L-1 ; une augmentation de cette valeur a pour conséquence une quantité de méthane stocké plus importante, ce qui est le cas d’un charbon moins poreux (plus de sites par rapport au volume poreux, 5.3). Ramenée à la concentration massique de charbon, la concentration de méthane adsorbé à l’état initial est de 3,33/7 = 0,48 mol par kilogramme de charbon. Cela correspond à un volume adsorbé de 11,6 m3 par tonne de charbon dans les conditions standards (valeur proche de la capacité théorique, 3.3.1) et de 0,33 m3 dans les conditions d’étude (P = 3,3 MPa, T = 22°C). Prenant une fraction libérée moyenne de 4,6% pour la veine la plus proche du puits, cela donne, sur 100 ans, des volumes désorbables respectifs de 0,53 m3 et 1,52.10-2 m3 par tonne de charbon. La quantité désorbable dans les mines de Lorraine avant leur fermeture est de 5 à 9 m3.t-1 de grisou surtout composé de méthane (Pokryszka, 2005). Considérant une capacité d’adsorption de l’ordre de 15 m3

.t-1 (dans les conditions standards pour un charbon à 35% de matières volatiles, Pokryszka et Jodart, 1999), une part importante du méthane contenu dans le charbon peut être libérée avant l’ennoyage (30 à 60%). Au regard de ces ordres de grandeur, les résultats de modélisation mettent en évidence l’effet inhibiteur de l’ennoyage.

Rappelons cependant que la totalité du méthane est désorbable dans nos modèles, sur une période de temps dépendant de l’écoulement. L’arrêt d’un pompage a pour conséquence un rééquilibrage des charges ; après quoi, l’écoulement est tributaire du gradient de charge naturel. Un écoulement plus lent engendre nécessairement une désorption sur une plus longue période.

 Émission et transport de méthane

Des tendances et des facteurs favorisant et limitant la migration du méthane dissous dans des structures (post-) minières se dégagent des calculs. Les modèles réalisés avec différents gradients de perméabilité nous renseignent sur l’importance relative des perméabilités des différentes zones. Ainsi, bien que la zone foudroyée joue son rôle de drain (Figures 55, 56 et 59), son impact sur la migration du méthane reste fonction de la perméabilité de la roche environnante et de celle du charbon. Les propriétés hydrodynamiques du charbon contrôlent la libération du méthane dissous dans l’environnement minier, et leur influence domine de fait celle des autres perméabilités. Un

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charbon peu perméable (10-9 m.s-1) libère difficilement le méthane, ce qui explique les faibles changements, même au bout d’un siècle de pompage. Lorsque le charbon agit comme un obstacle à l’écoulement au sein du domaine (K10, K11), il est lessivé de façon assez superficielle, l’eau circulant préférentiellement autour de la veine. Le panache peut ainsi être très étalé, mais peu concentré (Figures 55b et 56b).

La durée de l’émission de méthane depuis un charbon dépend notamment de :  la quantité de méthane qu’il contient, donc sa concentration massique et les

propriétés de sa surface ;

 les dimensions de la ou des veines en présence ;

 la perméabilité du charbon par rapport au milieu poreux environnant ;

 le gradient de charge, lié aux conditions naturelles ou aux structures de gestion des eaux de mine comme un pompage.

Dans les modèles développés, les charbons, même relativement perméables, l’intégralité du méthane n’a pas été drainée en 100 ans malgré le pompage. Les teneurs à l’équilibre initial dans les charbons, choisies selon les résultats de laboratoire, et les pressions d’eau considérées, ne permettent pas d’atteindre un seuil de saturation de l’eau en méthane. Aucune formation de bulles ou dégazage n’est possible dans les conditions simulées. Toutefois, nous avons évoqué et illustré l’effet cumulé des sources de méthane : dans le cadre d’une application plus concrète de la simulation du transfert de méthane (ou autre gaz), il est impératif de considérer le nombre de sources possibles et leur stock de méthane. Outre la quantité de méthane libéré dans le milieu, cela influe sur la rapidité d’évolution des concentrations dans un puits de pompage. La dissolution est contrôlée par la constante de sorption. Un nombre plus grand de sources maintient donc l’émission, sans que la concentration d’équilibre soit dépassée. Nos expériences ont souligné que même à de fortes pressions, il existe une proportion majeure de méthane qui demeure adsorbée, du moins sur les périodes de suivi. Cependant, nous n’avons pas induit dans nos expériences un renouvellement de l’eau dans laquelle le charbon est noyé. Le méthane adsorbé à la surface des charbons définis dans nos modèles est, à terme, désorbable dans son ensemble, tant que de l’eau pauvre en méthane le traverse.

 Possibilité de dégazage

Dans le puits lui-même, il est important de connaître la charge et son évolution en cas de modification du pompage et notamment d’intensification, car le changement de pression occasionné modifiera les conditions de saturation. Près de la surface, lorsque l’eau pompée atteindra le centre de traitement, des teneurs de l’ordre de 2 mmol.L-1 comme celles obtenues au sommet du puits (25 ans pour deux veines, Figure 63) aboutiront à un dégazage. À la pression atmosphérique, pour une eau à 0°C, la concentration de saturation en méthane est de 2,47 mmol.L-1 ; pour une eau à 20°C, elle est de 1,53 mmol.L-1. Supposons une température de 20°C pour l’eau pompée. En arrivant à la surface avec une

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concentration de 1,87 mmol.L-1 (Figure 63, au bout de 25 ans), elle dégaze 20% du méthane dissous qu’elle contient pour revenir à l’équilibre. Pour un débit de pompage de 2.10-3 m3.s-1, cela correspond à un flux de méthane gazeux de 0,68 mmol.s-1 ; traduit en flux volumique et par jour, cela correspond à un dégazage de 1,44 m3.j-1 de méthane. En reprenant la concentration atteinte au bout de 100 ans de pompage, le flux est de 5,03 3 -1

m .j .

Ces volumes et ces durées peuvent paraître sans danger, néanmoins sur des sites miniers, il faut envisager que la concentration d’équilibre soit atteinte plus rapidement, du fait d’un plus grand nombre de sources sollicitées, ou encore des concentrations plu s élevées en raison d’une constante de désorption moins importante. Le débit de pompage est également déterminant sur la sollicitation du méthane dans le charbon compris dans sa zone d’influence. Un débit plus important aura de fait pour effet d’accentuer les émissions de gaz en surface. Enfin, la profondeur des formations houillères et la proximité des voies de circulation préférentielle ont également un impact déterminant sur la remontée du méthane.

 Chimie de l’eau

Lors des différentes simulations, nous basant sur les travaux de laboratoire, nous avons considéré que l’eau traversant le domaine des modèles était de l’eau distillée. Or les eaux des mines sont enrichies en divers éléments, selon la nature des roches environnantes et des minerais exploités, ce qui peut avoir pour conséquence des interactions chimiques avec les roches au sein desquelles elles s’écoulent. Par ailleurs, la charge ionique de l’eau a un impact significatif sur la solubilité du méthane (ou d’autres gaz) : cette dernière diminue d’autant plus que l’eau est chargée (Duan et Mao, 2006). Ce qui s’avère par conséquent un facteur supplémentaire à prendre en compte pour estimer la probabilité de dégazage.

Dans les systèmes simulés, nous avons vu l’impossibilité d’aboutir à la formation de bulles dans les vides miniers du fait de trop faibles concentrations. Cependant, la quantité de sources de méthane dans le sous-sol pourrait être plus importante que pour nos simulations. Introduire dans le code une équation décrivant la formation et migration de bulles ne serait nécessaire que pour des études de contexte susceptibles de mener à la sursaturation de l’eau en méthane.

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 Géométrie

La géométrie choisie pour les simulations de pompage est une coupe d’un cylindre dont l’axe central est le milieu du puits. Ce qui revient à considérer la veine comme étant un disque autour du puits et la zone foudroyée comme un anneau. Les panneaux exploités sont plutôt des polygones. Cette configuration radiale est adaptée à la modélisation du transport de CH4 au voisinage d’un puits de pompage. Par contre, pour la simulation du

transport dans des zones plus éloignées, il est plus indiqué d’imposer l’écoulement par gradient de charge sans définir d’axe de symétrie radiale. Cet autre cas de figure ne permet pas de représenter des coupes longitudinales de galerie, toutes les zones rectangulaires apparaissant, en projection 3D, comme des horizons infinis. Des simulations 3D deviennent alors nécessaires.

 Autres gaz

Les modèles développés pour simuler la migration du méthane dissous peuvent être appliqués à d’autres gaz en tenant compte des réactions propres à ces espèces. Par exemple, après détermination des constantes de désorption propres au système CO2/CH4/charbon, il est tout à fait envisageable d’étudier la libération et la migration

conjointes de ces deux gaz et la répartition de leur phases. Ce qui assurerait une simulation plus précise des processus au sein d’une ancienne exploitation houillère et une meilleure caractérisation des émissions de surface. Les modèles sont applicables à d’autres contextes chimiques, comme celui des mines de fer où l’oxydation de la pyrite et la dissolution des carbonates aboutissent à la production de dioxyde de carbone (Grabowski, 2003). Concernant les espèces en traces dans le sous-sol, comme le radon, leur migration en phase gazeuse est tributaire de gaz vecteurs (Etiope et Martinelli, 2002). En phase aqueuse, ils sont transportés par l’eau, par conséquent répondent aux phénomènes décrits par nos simulations. La simulation de la migration d’espèces radioactives comme le radon nécessite toutefois la prise en compte de leur décroissance.

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