• Aucun résultat trouvé

III
–
2
‐
Cré’activité
:
entre
temps
de
l’expérimentation
et
temps
de
la
construction

monde
partagé
qui
dépasse
largement
celle
de
notre
collaboration…
 Ces
deux
«
entrées
»
vont
donc
permettre
que
des
traductions
de
l’objet
se
fabriquent,
plus
 ou
moins
perceptibles
sur
le
moment…
certaines
ne
s’opérant
que
dans
l’écriture
du
présent
 rapport,
d’autres
n’étant
sans
doute
encore
présentes
que
potentiellement
et
à
découvrir,
à
 interpréter,
à
travailler
ensemble.



Notons
 que
 si
 cette
 perspective
 en
 termes
 d’épreuve
 de
 mutualité
 est
 intéressante
 pour
 comprendre
ce
qui
nous
relie
dans
le
cadre
de
cette
recherche
elle
offre
ainsi
sans
doute
des
 clés
 intéressantes
 pour
 comprendre
 ce
 que
 fait
 le
 CCO
 dans
 d’autres
 de
 ses
 activités.
 Les
 fonctions
de
traduction
et
de
médiation
y
sont
de
fait
tout
à
fait
essentielles.



III
–
2
‐
Cré’activité
:
entre
temps
de
l’expérimentation
et
temps
de
la
construction


«
La
 création
 artistique
 interroge
 le
 monde
 ainsi
 que
 le
 processus
 culturel
 pose
 la
 question
 du
 sens,
le
soi
dans
la
relation
à
l’autre.
L’acte
public
résultant
de
ces
processus
instaure
un
espace
 temps
 où
 peuvent
 se
 créer
 des
 nouveaux
 paysages
 collectifs.
 L’acte
 artistique
 ainsi
 construit
 disloque
de
manière
éphémère
les
frontières
symboliques,
ouvre
l’espace
de
nouveaux
possibles,
 des
nouvelles
imageries
de
l’altérité
et
d’un
patrimoine
commun
à
partager.
Il
engage
ainsi,
d’une
 certain
manière,
de
nouvelles
manières
d’expérimenter

la
citoyenneté.



Dans
un
contexte
de
mondialisation,
des
actions
artistiques
peuvent
s’investir
d’un
rôle
politique
 de
 redéfinition
 et
 de
 réappropriation
 de
 l’espace
 commun
 en
 proposant
 une
 organisation
 symbolique
du
monde.
Et
s’il
est
possible
d’imaginer
qu’un
sens
propre
se
construise
à
partir
de
la
 proximité
et
rende
capable
l’individu
devenu
sujet
de
s’approprier
des
pans
de
l’espace
commun,
 l’hypothèse
 suivante
 peut
 être
 formulée
:
 l’intervention
 de
 l’action
 culturelle
 et
 artistique
 dans
 l’espace
 commun
 pourrait,
 dans
 un
 processus
 de
 médiation,
 construire
 un
 dialogue
 qui
 engage
 différents
 sujets
 dans
 un
 jeu
 d’énonciation
 et
 de
 création,
 engendrant
 ainsi
 les
 conditions
 de
 l’appropriation
 collective
 d’un
 espace
 commun
 reconstruit
 à
 partir
 de
 la
 rencontre
 et
 non
 de
 l’évitement.
 En
 ce
 sens
 la
 ville,
 peut
 devenir
 le
 théâtre
 d’une
 possible
 recomposition
 de
 l’espace
 public.
»
129

Revenir
sur
cette
hypothèse,
posée
dès
2003
par
la
directrice
du
CCO,
c’est
réaffirmer
le
parti‐ pris
 pragmatique
 dans
 lequel
 nous
 avons
 engagé
 cette
 collaboration
 en
 faisant
 droit
 à
 la
 démarche
et
aux
questions
qui
importent
pour
les
acteurs
de
ce
lieu.
Nous
l’avons
montré
:
la
 réflexivité
 qui
 est
 à
 l’œuvre
 au
 CCO
 est
 sans
 doute
 une
 de
 ses
 marques
 de
 fabrique
 significative
et
elle
est
à
la
fois
une
condition
et
une
conséquence
de
ce
que
le
CCO
tente
de
 faire
 tenir
 dans
 le
 temps.
 Cette
 hypothèse
 continue
 d’être
 à
 l’œuvre
 et
 en
 réflexion
 aujourd’hui,
selon
les
modalités
«
rhizomatiques
»
déjà
pointées.



Ainsi,
avons
nous
repris
le
fil
de
cette
réflexion
ensemble
(mais
en
partie
aussi
parallèlement
 puisque

tous
les
temps
de
préparation
n’ont
pas
eu
lieu
au
CCO
et
avec
ses
membres)
à
la
fois
 lors
des
journées
d’étude
de
janvier,
mais
aussi
lors
du
séminaire
du
26
septembre
2013
où,
à
 







129Fernanda Leite, Quelle place pour la diversité dans l’espace commun ? L’exemple de deux actions

artistiques et culturelles, Mémoire de DESS « développement culturel et direction de projet », Université Lyon 2,

l’occasion
 de
 l’atelier
 de
 l’après‐midi,
 les
 échanges
 ont
 porté
 sur
 ce
 qui
 fait
 la
valeur
 des
 créations
 et
 leur
 portée
 émancipatrice130.
 Alors
 qu’à
 l’occasion
 des
 journées
 d’étude
 c’est
 Paroles
sur
Place
qui
a
été
présenté
et
mis
en
regard
de
3
autres
expériementations131,
dans
 l’écrit
 cité
 ci‐dessus
 et
 lors
 de
 ce
 séminaire
 c’est
 plutôt
 du
 côté
 de
 Théat’Réalités
 que
 des
 prises
ont
été
trouvées
pour
documenter
le
questionnement
dont
il
s’agit
ici132.
Le
propos
ne
 sera
 ici
 ni
 de
 reprendre
 l’ensemble
 des
 échanges133,
 ni
 de
 retracer
 cette
 occurrence
 de
 l’événement,
ni
 non
 plus
 d’analyser
 de
 façon
 détaillée
 ce
 qui
 se
 joue
 dans
 les
 échanges
 des
 journées
 d’étude
 ou
 lors
 du
 séminaire
 en
 termes
 de
 collaboration.
 Nous
 nous
 attacherons
 plutôt
 à
 saisir
 en
 quoi
 les
 créations
 artistiques
 font
 activation
 citoyenne
 en
 situation
 interculturelle.
 Et
 à
 la
 lumière
 de
 cela,
 ce
 que
 ces
 pratiques
 instituent
 ou
 peuvent
 donner
 à
 penser
à
ceux
qui
ont
en
charge,
par
ailleurs,
d’instituer
du
patrimoine.



III
–
2‐1
‐
Des
expérimentations
(inter)culturelles
comme
mode
d’activation
citoyenne


La
 proposition
 qui
 était
 faite,
 au
 travers
 du
 cinquantenaire
 de
 façon
 plus
 générale,
 et
 en
 particulier
 dans
 le
 cadre
 des
 journée
 d’étude
 était
 d’éprouver,
 c’est‐à‐dire
 de
 questionner
 mais
 aussi
 dans
 le
 même
 temps
 paradoxalement
 de
 se
 rendre
 sensible,
 à
 la
 façon
 dont
 émerge
 ce
 que
 nous
 avons
 alors
 appellé
 de
 la
 «
cré’activité»
:
 c’est
 à
 dire
 des
 créations
 artistiques
qui
ont
pour
effet
ou
pour
visée
d’activer
quelque
chose
de
l’ordre
du
politique.
En
 mettant
 en
 regard
 l’expérience
 du
 CCO
 avec
 d’autres
 expériences
 ou
 expérimentations
 interculturelles,
 l’objectif
 est
 de
 mieux
 comprendre
 ce
 qui
 se
 joue
 dans
 les
 articulations
 à
 l’œuvre
 entre
 participation
 des
 personnes,
 capacitation,
 émancipation,
 hybridation
 des
 pratiques
artistiques
et
de
la
dimension
politique.
Il
s’agit
de
voir
ce
que
ces
projets,
ce
que
 cette
 intention
 qui
 consiste
 à
 convoquer
 de
 l’artistique
 dans
 les
 projets
 de
 montée
 en
 politique
 fait
 faire
 aux
 acteurs
 qui
 s’y
 engagent.
 Qu’est‐ce
 que
 c’est
 que
 de
 prétendre
 expérimenter
la
participation
dans
quelque
chose
qui
serait
plutôt
un
régime
esthétique
?











130Une
vidéo
de
l’édition
2010
du
festival
théat’Réalité
a
été
projetée
au
début
de
cet
atelier.
La
proposition


de
mise
en
discussion
elle‐même
qui
s’appuyait
sur
une
schématisation
trop
binaire
n’a
pas
fonctionné,
ce
 qui
est
en
soi
une
indication
de
l’acceptabilité
ou
non
des
cadres
de
jugement.
Mais
en
revanche
le
débat
sur
 ce
 que
 la
 vidéo
 donne
 à
 voir,
 et
 les
 témoignages
 sur
 ce
 que
 l’expérience
 a
 été
 elle
 même,
 fournissent
 de
 nombreuses
prises
pour
documenter
les
questions
qui
nous
intéressent
ici.



131Voir
en
annexe
le
programme
de
la
journée
dans
le
programme
du
cinquantenaire.


132Contrairement
à
Paroles
sur
Place
qui
est
plutôt
tournée
à
l’interne
du
CCO,
Théat’réalités
vise
à
tisser


des
 complicités
 entre
 une
 équipe
 artistique
 et
 les
 territoires
 d'intervention
 du
 CCO.
 Le
 CCO
 facilite
 la
 rencontre
des
artistes
avec
les
réseaux
et
les
associations
qui
ne
sont
pas
exclusivement
domiciliées
au
sein
 du
CCO.
«
Initié
en
2001
en
collaboration
avec
une
équipe
artistique
en
résidence,
Théât’Réalités
investit
la
 ville
et
la
vie
pour
partager
l’émotion
de
projets
artistiques
qui
nous
parlent
du
monde.
Sur
une
journée,
un
 samedi
de
fin
mars,
le
festival
expérimente
autour
d’un
thème
central
une
démarche
artistique
innovante
 associant
des
compagnies
en
résidence,
des
artistes,
des
habitants,
des
associations
et
groupes
fréquentant
 le
 CCO.
 Privilégiant
 des
 rapports
 actifs
 entre
 le
 public
 et
 les
 artistes,
 Théât’Réalités
 propose
 des
 instants
 partagés
mettant
le
spectateur
en
mouvement.
Des
propositions
artistiques
à
vivre,
en
toute
intimité
avec
 les
 acteurs.
 A
 l’intérieur,
 dehors,
 dans
 chaque
 recoin,
 le
 public
 est
 invité
 à
 construire
 son
 parcours
 pour
 naviguer
à
travers
des
spectacles
et
inventer
des
nouveaux
usages
des
lieux
citadins.
»
site
du
CCO


133Le
cinquantenaire
a
toutefois
fait
l’objet
d’une
retranscription
en
intégralité
par
Anne
Aubry
en
plus
de


sa
captation
vidéo.
Des
actes
pourront
donc
être
produits,
ce
qu’on
envisage
de
faire
dans
le
cadre
d’une
 reprise
des
éditions
précédentes
des
journées
d’étude
du
Master
InPACT.


L’activité
artistique
serait
pour
Dewey
l’un
des
moyens
par
lesquels
nous
entrons,
par
l’imagination
et
 les
émotions
(…),
dans
d’autres
formes
de
relations
et
de
participations
que
les
nôtres»
(L’art
comme


expérience
:
382).
Que
ce
soit
la
capacité
de
se
mettre
à
la
place
de
l’autre,
d’envisager
des
modes
de
 vie
 alternative,
 ou
 d’entrer
 en
 relation
 originale
 avec
 certaines
 parties
 de
 la
 nature
 ou
 de
 notre
 environnement
 matériel,
 les
 œuvres
 d’art
 peuvent
 être
 des
 points
 de
 convergence
 entre
 nous
 et
 le
 monde.
En
ce
sens
«
l’imagination
est
le
principal
instrument
du
bien
»
(L’art
comme
expérience
:
397).
 L’expérience
esthétique
permettrait
ainsi
d’entrer
en
politique
en
ouvrant
des
perspectives
communes
 de
formes
de
vie
meilleures.
Faire
de
l’art,
en
faire
faire
et
en
faire
l’expérience,
mais
aussi
en
faire
le
 récit,
 activerait
 des
 modes
 de
 participation
 et
 de
 construction
 du
 monde
 commun
 dépassant
 les
 partages
 entre
 créateur
 et
 public,
 expert
 et
 profane,
 nous
 et
 les
 autres.
 (texte
 de
 présentation
 des
 journées
d’étude)


La
 proposition
 était
 de
 s’attacher
 à
 saisir
 les
 moments
 et
 situations
 où
 s’inventent
 des
 possibles,
où
se
produit
une
montée
en
politique.
La
particularité
de
ce
que
l’on
observe
au
 CCO
du
point
de
vue
des
questions
posées
ici
consiste
dans
le
fait
que
le
développement
des
 capacités
 d’expression
 des
 personnes
 ne
 se
 fait
 pas
 au
 prix
 d’un
 détachement
 vis‐à‐vis
 de
 leurs
 origines,
 de
 leurs
 valeurs,
 de
 leurs
 cultures,
 mais
 au
 contraire
 en
 valorisant
 leurs
 particularités
et
leurs
diversités
linguistiques,
politiques,
religieuses
etc.
Tout
l’enjeu
de
cette
 recherche,
et
de
cette
dernière
phase
de
réflexion,
est
bien
de
saisir
comment
les
pratiques
 culturelles
 sont
 à
 la
 fois
 opératrices
 de
 rencontres
 qui
 permettent
 la
 construction
 d’un
 «
inter»
 et
 en
 même
 temps
 comment
 les
 pratiques
 culturelles
 sont
 générées
 par
 les
 rencontres
 qui
 se
 produisent
 ici
 et
 ouvrent
 ainsi
 des
 espaces
 d’invention,
 de
 liberté,
 des
 expériences
qui
permettent
d’inventer
un
commun
qui
fait
place
à
la
pluralité.



Extrait
d’entretien,
Marie­Claire
Corbier,
réalisé
par
Fabienne
Tanon
:


FT
:
Et
 est‐ce
 que
 vous
 auriez
 l’exemple
 d’un
 moment
 fort,
 d’un
 moment
 particulier
 que
 vous
 auriez
vécu
au
CCO
?


MC
:
 Ah
 bien
 sûr,
 c’est
 Antigone
 avec
 Bénichou.
 C’était
 d’une
 beauté
!
 C’est
 avec
 Théat’réalité
 je


crois.
 (…)
 Donc
 Bénichou
 est
 une
 jeune
 metteuse
 en
 scène,
 qui
 a
 organisé
 une
 espèce
 de…
 Geneviève
Gibert
elle
pourrait
vous
en
parler
elle
a
participé
à
ça.
C’était
pour
Théat’réalité,
parce
 qu’il
 y
 a
 eu
 cette
 performance
 de
 Bénichou,
 et
 puis
 pendant
 qu’on
 était
 dans
 la
 grande
 salle
 il
 y
 avait
des
spectacles
qui
se
jouaient
dans
le
hall
et
tout.

Donc
Théat’réalité
c’est
toujours
en
mars
 donc
 c’était,
 c’est
 toujours
 assez
 bien
 Théat’réalité,
 on
 découvre
 beaucoup,
 beaucoup,
 il
 y
 a
 des
 gens,
 des
 lectures,
 enfin
 bon
 des
 lectures
 du
 TNP,
 des
 spectacles,
 pas
 trop
 de
 spectacles
 rigolos
 enfin
des
fois
mais
c’est
toujours
des
spectacles
qui
font
réfléchir,
alors
des
fois
c’est
réussi
et
des
 fois
 c’est
 un
 peu
 raide.
 Il
 y
 a
 des
 spectacles
 avec
 des
 handicapés.
 Et
 donc
 il
 y
 a
 trois
 ans,
 ça
 commence
 à
 faire,
 il
 y
 a
 eu
 Antigone,
 une
 sorte
 de
 lecture
 d’Antigone
 avec
 un
 chœur,
 et
 donc
 le
 chœur
était
des
groupes
de
femmes
de
toute
l’agglomération,
dont
un
qui
s’était
réuni
longuement
 au
CCO
et
qui
a
fait
une
sorte
de
contre
point,
un
passage
d’Antigone.
Et
donc
y
a
eu
aussi
de
la
 musique.
 Et
 le
 jour
 où
 ça
 a
 été
 réalisé,
 il
 y
 avait
 des
 gens
 tout
 à
 fait
 ordinaires
 qui
 ont
 voulu
 participer
à
ça,
donc
elle
a
fait
écrire
et
le
chœur
a
été
des
femmes
qui
ont
fait
un
retour
sur
leur
 vie
 et
 qui
 ont
 vécu
 comment
 elles
 étaient
 libres
 ou
 pas
 libres
 dans
 leur
 vie,
 en
 même
 temps
 qu’Antigone
 essayait
 de
 trouver
 de
 l’argent
 auprès
 de
 l’assemblée
 pour
 donner
 à
 manger
 aux
 pauvres,
 aux
 malades,
 c’est‐dire
 la
 lutte
 d’Antigone
 pour
 aider
 les
 autres
 dans
 l’Antigone.
 Et
 donc…
je
ne
sais
pas
si
vous
connaissez
Henry
Bauchau?


F
:
Non



MC
:
 C’est
 un
 écrivain
 qui
 a
 écrit
 «
Antigone
»
 et
 «
Œdipe
 sur
 la
 route
»
 et
 donc
 elle
 s’était
 basée


sur
le
texte
d’Henry
Bauchau
pour
le
lire.
Et
donc
il
y
avait
cette
partie
qui
était
lue
et
il
y
avait
de
 la
musique
avec
des
musiciens
ça
c’était
extraordinaire
et
il
y
avait
le
chœur
de
femmes,
avec
des
 femmes
 qui
 venaient
 et
 qui
 disaient
 «
moi
 j’ai
 été
 marié
 à
 13
 ans,
 mon
 mari…
»
 elles
 se
 sont
 libérées.
 C’était
 pas
 du
 féminisme
 ce
 n’était
 pas
 ça,
 c’était
 pour
 mettre
 en
 relation
 la
 lutte


d’Antigone
avec
ces
femmes
qui
ont
quitté
leur
pays.
Donc
il
y
avait
un
groupe
qui
avait
monté
ça
à
 Villeurbanne
avec
le
travail
de
cette
Bénichou
qui
est
partie
à
Paris
maintenant.
Et
elle
faisait
en
 même
 temps
 un
 groupe,
 le
 groupe
 de
 Vaulx‐en‐Velin
 et
 le
 groupe
 de
 Vénissieux
 et
 elles
 préparaient
 chacune
 de
 leur
 côté
 et
 il
 y
 a
 eu
 un
 jour
 où
 elles
 ont
 fait
 le
 spectacle
 complet
 à
 Villeurbanne
 avec
 Théat’réalité,
 et
 là
 c’était
 énorme
 parce
 qu’il
 y
 avait
 ce
 chœur
 de
 90
 femmes.
 Elles
 n’intervenaient
 pas
 toutes
 mais
 à
 un
 moment
 elle
 a
 fait
 intervenir
 celles
 qui
 avaient
 participé,
 mais
 elles
 étaient
 toutes
 là
 parce
 qu’elles
 avaient
 des
 lectures
 aussi
 à
 faire
 toutes
 ensemble.
 C’était
 une
 espèce
 de
 réalisation
 qui
 était
 magistrale,
 sur
 le
 thème
 de
 la
 lutte,
 de
 la
 résistance
finalement
aux
institutions
et
à
l’institution
de
la
famille.
Et
Geneviève
elle
a
participé,
 moi
 je
 travaillais
 encore
 beaucoup,
 donc
 ça
 devait
 être
 il
 y
 a
 au
 moins
 5
 ans,
 je
 n’avais
 pas
 pu
 participer,
parce
que
ça
demandait
beaucoup,
ça
demandait
d’écrire
un
texte
de
le
lire
et
ensuite
 de
participer
à
toutes
les
répétitions.
Et
ça,
ça
a
été
vraiment
de
toute
beauté.
Donc
ça
a
été
joué
 une
fois
pour
Villeurbanne
et
le
CCO.
C’était
un
travail
avec
des
gens
tout
à
fait
modestes,
des
gens
 qui
parlaient
à
peine
la
langue
française
donc
ça
c’était
magnifique
et
puis
ça
a
été
tellement
bien
 que
ces
femmes
là,
la
Région
a
payé
leur
déplacement
à
Strasbourg
au
conseil
de
l’Europe.
 F
:
Merveilleux
!
 MC
:
C’était
énorme
le
nombre
de
femmes
qui
étaient
présentes.
Il
faudra
demander
à
Geneviève
 puisqu’elle
elle
a
vécu
tout
ça.
Ça
c’était
très
beau
et
très
bien
compris.
Parce
que
Bénichou
elle
a
 fait
 la
 même
 chose
 avec
 des
 universitaires,
 bein
 elle
 a
 fait
 lire
 les
 gens
 sur
 ce
 que
 c’est
 l’exil
 et
 après
 elle
 a
 lu
 le
 texte
 de
 l’exil
 et
 elle
 a
 fait
 parler
 des
 personnes
 et
 les
 universitaires
 ont
 lu
 ces
 textes,
ça
faisait
un
espèce
de
mélange
qui
était
vraiment
très
très
bien.


F
:
Ça
a
été
filmé
cette
Antigone
?


MC
:
Non,
non,
non,
c’est
malheureux
pour
tous
ces
gens
qui
l’ont
raté,
ça
n’a
eu
lieu
qu’une
fois.


L’expérience
 artistique
 doit
 donc
 être
 vécue,
 elle
 est
 unique.
 Pourtant
 au
 CCO
 elle
 se
 répète,
elle
se
décline,
se
réitère.
Mais
le
mythe
s’entretient
ainsi
de
l’idée
qu’il
n’y
a
pas
 de
trace,
qu’il
fallait
y
être,
qu’il
fallait
en
être
et
le
vivre.

Geneviève,
elle,
l’a
vécu
!

 Alors
qu’il
existe
bien
un
document
vidéo,
qu’un
montage
en
a
été
fait
où
sont
donnés
à
 voir
des
aperçus
de
l’événement
dans
sa
globalité
et
des
témoignages
des
participantes
de
 «
ce
que
ça
leur
a
fait
»
de
vivre
cette
expérience
qui
était
pour
certaines
une
«
première
 fois
».
Mais
il
sera
fait
reproche
à
celui‐ci
de
ne
pas
raconter
le
bon
mythe…

 


Nous
 allons
 dans
 les
 points
 qui
 suivent
 tenter
 d’examiner
 un
 certain
 nombre
 de
 caractéristiques
 des
 expérimentations
 mises
 en
 discussion
 qui
 nous
 permettrons
 de
 revenir
 aux
 hypothèses
 formulées
 à
 la
 fois
 en
 2003
 par
 Fernanda
 Leite
 et
 dans
 le
 texte
 d’intention
des
journées
d’étude.

 
 III.2.2
‐L’intentionnalité
politique
du
projet
artistique
III.2.2.1
–
Partage
du
sensible
 
 Le
collectif
De
L’aire,
lorsqu’il
décide
d’investir
le
quartier
de
la
Prairie
à
Crest,
comme
celui
de
 L’âge
 de
 La
 Tortue
 à
 Rennes
 pour
 le
 quartier
 de
 Blosne,
 ou
 encore
 le
 CCO,
 partent
 d’un
 constat
politique
sur
le
monde
qui
les
entoure.
Celui‐ci
porte
sur
l’inégal
accès
à
la
parole
dans
 l’espace
 public,
 sur
 les
 inégalités
 sociales
 et
 politiques
 dont
 sont
 victimes
 certains,
 sur
 les


discriminations
de
genre
et
de
race,
etc…
La
volonté
d’aller
à
la
rencontre
de
ceux
qui
n’ont
 pas
 voix
 au
 chapitre,
 de
 redonner
 la
 parole
 à
 ceux
 qui
 sont
 souvent
 exclus
 des
 arènes
 publiques
est
donc
au
cœur
du
propos
général
qui
sous‐tend
ces
projets.
Et
«
faire
de
l’art
»
 va
constituer
à
la
fois
un
moyen
et
mode
d’engagement
spécifique
dans
ce
contexte.


 


Cette
démarche
volontariste
est,
dans
le
cas
de
De
L’aire,
posée
dans
un
contexte
«
hostile
»
 où
 il
 s’agit
 de
 lutter
 face
 à
 l’ignorance
 volontaire
 dans
 laquelle
 une
 collectivité
 tient
 un
 quartier
 périphérique
 de
 la
 ville.
 Le
 projet
 de
 Correspondances
 
 fait
 écho
 aux
 mêmes
 références
que
le
CCO
:


Nicolas
 Combe
 (L’age
 de
 la
 Tortue)
«
Face
 à
 l’émergence
 des
 discours
 et
 des
 politiques
 qui
 stigmatisent
les
personnes
d’origine
étrangère,
on
a
pensé
que
la
société
civile
et
une
association,
 par
exemple
comme
la
nôtre,
pouvaient
aussi
mener
des
actions,
mêmes
modestes,
pour
contrer
 ces
 discours
 et
 ces
 politiques
 réactionnaires
 et
 stigmatisantes.
 Notre
 point
 de
 départ,
 c’était
 notamment,
un
des
textes
références
sur
lesquels
s’appuie
l’association
depuis
longtemps,
comme
 le
CCO
il
me
semble,
c’est
la
déclaration
de
l’UNESCO
sur
la
diversité
culturelle,
qui
nous
rappelle
 que
la
vie
collective
se
construit
de
manière
plus
durable
et
plus
sereine
une
fois
que
chacun
se
 sent
reconnu
dans
la
pluralité
et
la
singularité
de
son
identité.

Et
du
coup
pour
avancer
dans
cette
 voie
 là,
 on
 a
 proposé
 d’expérimenter
 de
 nouvelles
 façons
 de
 provoquer
 des
 rencontres
 et
 des
 échanges
avec
des
personnes
issues
d’horizons
sociaux,
culturels,
professionnels
très
différents.
»

 


Ainsi,
 on
 retrouve
 également
 d’autres
 références
 théoriques
 communes
 travaillées
 par
 ces


collectifs
 en
 recherche/comprenant
 des
 chercheurs
tel
 Jacques
 Rancière
:
«Le
 partage
 du


sensible
fait
voir
qui
peut
avoir
part
au
commun
en
fonction
de
ce
qu’il
fait
et
du
lieu
où
il
est.
Avoir
 telle
occupation
en
tel
type
de
lieu
définit
des
compétences
ou
des
incompétences
au
commun.
Cela
 définit
le
fait
d’être
ou
non
visible
dans
un
espace
commun,
doué
d’une
parole
commune,
etc.
Il
y
a
 donc,
 à
 la
 base
 de
 la
 politique
 une
 «
esthétique
»,
 à
 entendre
 en
 un
 sens
 kantien,
 éventuellement
 revisité
par
Foucault
:
un
découpage
des
temps
et
des
espaces,
du
visible
et
de
l’invisible,
de
la
parole
 et
du
bruit
qui
définit
à
la
fois
le
lieu
et
l’enjeu
de
la
politique
comme
forme
d’expérience.
La
politique
 porte
sur
ce
qu’on
voit
et
ce
qu’on
peut
en
dire,
sur
qui
a
la
compétence
pour
voir
et
la
qualité
pour
 dire,
sur
les
propriétés
des
espaces
et
les
possibles
du
temps.


C’est
 à
 partir
 de
 cette
 esthétique
 première
 que
 l’on
 peut
 poser
 la
 question
 des
 «
pratiques
 esthétiques
»,
au
sens
où
nous
l’entendons,
c’est‐à‐dire
des
formes
de
visibilité
des
pratiques
de
l’art,


du
lieu
qu’elles
occupent,
de
ce
qu’elles
«
font
»
au
regard
du
commun
».134



Le
 projet
 «
Océancité
»,
 s’inscrit
 dans
 cette
 perspective,
 mais
 dans
 une
 visée
 qui
 n’est
 pas
 directement
 politique.
 Il
 entend
 intervenir
 directement
 sur
 le
 sensible
 de
 l’expérience
 de
 l’espace
 publique.
 Notons
 que
 dans
 le
 cadre
 de
 Théat’Réalités
 2007
 une
 préfiguration
 de
 Océan’cité
de
Pierre
Deloche
avait
eu
lieu
à
Villeurbanne
avec
le
CCO135.


Spyros
Franguiadakis
(Océnancité)
:
«
La
 création
 civile,
 le
 projet
 que
 nous
 avons
 mené
 avec










134
J.
Rancière,
27
juin
2007,
http://multitudes.samizdat.net/Le
partage
du
sensible


135Océan’cité
s’était
tenu
sur
la
place
des
Terreaux
en
Juin,
comme
pour
l’édition
dont
il
question
ici
qui
est
une


reprise
en
hommage
à
Pierre
Deloche
décédé
depuis.
La
manifestation
qui
s’était
tenue
avec
le
CCO
avait
eu
lieu
 à
 Villeurbanne
 le
 24
 Mars
 2007
 dans
 le
 cadre
 du
 festival
 Théat’réalités.
 «
UNE
 IMMOBILITÉ
 VIBRANTE
 POUR