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I - 6.1 Traitement en urgence

Dans le contexte de l’urgence, après une crise unique, aucun traitement n’est indiqué (hormis pour la correction éventuelle de facteurs favorisants, notamment biologiques). L’intérêt de la prescription de benzodiazépines par voie orale n’est pas démontrée chez l’adulte (3). Dans la pratique, ces molécules sont toutefois fréquemment utilisées sur une courte durée de prescription en cas de facteur augmentant le risque de récidive précoce, notamment lorsque l’accès à un avis spécialisé n’est pas immédiatement possible, comme le préconisent d’ailleurs

I - 6.2 Indications au traitement de fond

Concernant le traitement antiépileptique au long cours, il ne semble pas pertinent aux vues des données actuelles de la littérature de des traiter de façon systématique tous les patients ayant présenté une première crise épileptique.

Dans le cas des crises provoquées ou symptomatiques aiguës, l’unique traitement doit consister en la correction des facteurs ayant provoqués la crise, qui sort d’emblée du cadre des maladies épileptiques et n’est que le reflet d’une agression cérébrale transitoire.

Pour les crises non provoquées, le risque de récidive après un premier épisode non traité était estimé entre 40 et 50% dans les deux ans par Berg et al. en 2008 (37), mais le chiffre semble finalement être inférieur, de l’ordre de 21 à 45% selon la revue de littérature de Krumholz de 2015. Dans l’étude MESS (Multicentre Study of Early Epilepsy and Single Seizure, 2005), qui compare l’évolution de patients recrutés après une première crise, on retrouve un risque de récidive à deux ans de 32% dans le groupe de patients ayant été traités au long cours par antiépileptique, et de 39% dans le groupe non traité (38). Cependant, cette différence s’estompe lorsque l’on analyse les données de suivi à plus long terme, et les études de qualité de vie ne retrouvent pas de différence entre les patients traités et non traités, excepté en ce qui concerne la conduite automobile (39). En revanche, il existe bien un sous-groupe de patient dont le risque de récidive précoce est plus élevé, et pour lequel un traitement semble indiqué : il s’agit de ceux ayant finalement présenté plusieurs crises, et/ou ayant des anomalies à l’examen neurologique ou électrophysiologique (40).

La décision doit quoiqu’il en soit relever d’une discussion entre le médecin spécialiste neurologue et le patient, et être idéalement prise lors de la phase différée de prise en charge, en fonction des données des différents examens complémentaires et après information complète du patient sur la situation. L’engagement dans la prise d’un traitement antiépileptique, au long cours, nécessite en effet une bonne compréhension par le patient (voire sa famille ou ses aidants le cas échéant) du rapport bénéfice/risque du traitement afin d’obtenir une adhésion thérapeutique et une bonne observance, qui sont les points clés du bon déroulé de la suite de la prise en charge.

La décision de mettre en place un traitement antiépileptique après une première crise épileptique non provoquée est recommandée par la SFN/HAS dans les situations suivantes (9) : • Le diagnostic d’épilepsie-maladie est affirmé, par la mise en évidence d’une

prédisposition durable à la récidive des crises

• Il existe un déficit neurologique et/ou neuropsychologique

• On retrouve la présence d’anomalies EEG de nature épileptique ou d’une anomalie structurale épileptogène à l’imagerie cérébrale compatibles avec le type de crise En l’absence de ces critères, un traitement peut tout de même être prescrit, si le patient juge inacceptable le risque de récidive (en fonction du type de crise et du mode de vie du patient), ou si le spécialiste estime que le statut médico socio professionnel du patient le justifie. La décision de prescription devra donc également prendre en compte la situation particulière du patient et son mode de vie.

I - 6.3 Choix du traitement de fond

Le choix de la molécule utilisée pour le traitement antiépileptique de fond fait également l’objet de recommandations de la part de la SFN et de la HAS dans leur publication (9), sur la base des préconisations des diverses sociétés savantes américaines, anglo-saxonnes et internationales (34,41–44) et des études portant sur le sujet, notamment les études SANAD (Standard And New Antiepileptic Drugs, essais contrôlés randomisés comparant les différents traitements antiépileptiques) (45,46).

Celui-ci dépendra en premier lieu du syndrome épileptique, ou bien s’il n’est pas précisément déterminé du type principal de crise présenté, et en deuxième lieu des caractéristiques du patient (comprenant son sexe, son âge, ses comorbidités et antécédents, son mode de vie, ses préférences). Un des points importants est le rapport efficacité/tolérance du traitement, dans le cadre d’une prescription au long cours nécessitant une observance thérapeutique rigoureuse.

Sont recommandées en première intention les molécules suivantes : à Pour les épilepsies focales

o Carbamazépine, lamotrigine, lévétiracetam, oxcarbazépine à Pour les épilepsies généralisées

• Suspicion d’épilepsie généralisée idiopathique avec crises tonico-cloniques généralisées seules

o Lamotrigine, valproate de sodium (Lamotrigine à privilégier chez la femme en âge de procréer)

• Suspicion d’épilepsie myoclonique juvénile

o Lamotrigine, valproate de sodium (Lamotrigine à privilégier chez la femme en âge de procréer, mais molécule pouvant majorer les myoclonies)

• Suspicion d’épilepsie-absence

o Lamotrigine, valproate de sodium (Lamotrigine à privilégier chez la femme en âge de procréer)

o L’éthosuximide, médicament de référence dans les absences de l’enfant n’est pas à privilégier dans le cadre des épilepsies de l’adulte jeune car des crises généralisées associées sont possibles dans ce syndrome et peuvent être majorées par l’éthosuximide.

On retiendra comme situations particulières : • La femme en âge de procréer :

Nécessité d’informer la patiente (sur les risques tératogènes, les répercussions neuropsychologiques de l’épilepsie, des crises et des antiépileptiques) ; de préconiser la planification des grossesses pour pouvoir anticiper les modifications thérapeutiques éventuelles ; d’éviter la prescription de valproate de sodium ; de réaliser un dosage médicamenteux de référence avant la grossesse en cas de traitement par lamotrigine ; de débuter une supplémentation en acide folique d’au moins 0,4mg/j (en général 5mg/j) deux mois avant la conception et jusqu’à la fin du premier trimestre.

• La contraception :

La contraception progestative pure et les implants progestatifs ne sont pas recommandés en cas de prise d’antiépileptiques inducteurs enzymatiques (de ce fait augmentant l’élimination des contraceptifs) tels que le phénobarbital, la phénytoïne, la carbamazépine, et dans une moindre mesure le topiramate et l’oxcarpazépine. Les contraceptions œstroprogestatives quant à elles tendent à augmenter la clairance de la lamotrigine et donc en réduire l’efficacité.

• Le sujet âgé :

En cas de crises partielles, il est recommandé en première intention d’utiliser la lamotrigine (en raison du caractère inducteur enzymatique de la carbamazépine et de l’absence de données spécifiques dans cette population pour cette molécule).

En cas de crises généralisées, il est recommandé en première intention d’utiliser la lamotrigine (du fait de la tolérance un peu moins favorable du valproate).

Depuis ces dernières recommandations, d’autres molécules antiépileptiques ont obtenu une autorisation de mise sur le marché en monothérapie, par exemple le lacosamide, le perampanel, ou l’eslicarbazépine, élargissant les possibilités thérapeutiques pour s’adapter au mieux au syndrome épileptique et au profil de tolérance.