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Chapitre II Synthèse d’un matériau composite pour le dentaire

II.2. i Homogénéité des synthèses

Le matériau final doit être idéalement dense mais aussi et surtout présenter une microstructure où la répartition des phases zircone et alumine est aussi homogène que possible. Afin d’adresser

réalisées en première intention sur des pastilles frittées sous air, en four batch traditionnel, avec une rampe de montée en température fixée à 5°C/min et un palier de 1h à 1600°C, pour chaque version des deux voies de synthèse. La température de 1600°C a été retenue car les poudres d'alumine et de zircone conduisent à des échantillons totalement denses lorsqu’elles sont frittées à des températures inférieures à 1600°C. L’équipement utilisé pour ces observations est un MEB Leo 1530 de chez Zeiss, équipé d’un système de spectroscopie à rayons X à dispersion d'énergie (EDS). L’analyse EDS permet de déterminer les éléments chimiques présents dans l’échantillon ainsi que de quantifier la teneur en chaque élément.

II.2.i.a. Préparation des échantillons

Afin de révéler les grains élémentaires constituant le polycristal, les pastilles frittées subissent un polissage miroir, puis une attaque thermique réalisée à une température inférieure à la température de frittage sur un temps court (vitesse de chauffe de 15°C/min jusqu’à 1500°C avec un palier de 30 min, le tout réalisé sous air). Le matériau n’étant pas conducteur, il doit être métallisé avant observations au MEB. La métallisation utilisée est réalisée à partir d’une tresse de carbone et d’un équipement Denton Desk 4 (Denton Vacuum). Le dépôt de carbone est de l’ordre de 40 nm, et est effectué à trois reprises (120 nm) pour ne plus observer de phénomène de charges lors des observations sous faisceau électronique.

II.2.i.b. Influence de la synthèse sur la microstructure du composite

La Figure II.5 présente les microstructures observées en électrons secondaires pour les différentes versions étudiées de la méthode de synthèse Pechini modifiée. Ces microstructures mettent toutes en évidence la présence d’agglomérats de zircone (phase claire), allant de la dizaine à quelques dizaines de microns. Ces agglomérats résiduels peuvent résulter de la synthèse qui fait intervenir une poudre de zircone commerciale (choix stratégique sur lequel se base l’étude) et non un précurseur organique de zircone. De plus, l’absence de possibilité d’épinglage des joints de grains, résultant de l’absence de grains d’alumine aux joints de grains de la zircone dans certaines zones, provoque un grossissement anormal des grains de cette dernière phase dans les zones concernées. D’un point de vue purement qualitatif (verdict de l’œil pour différents grossissements s’étalant de 100 à 10000) la version Pec V4 présente la meilleure homogénéité des phases zircone et alumine. Ceci est possiblement lié à la méthode de séchage qui fait intervenir une agitation continue jusqu’à la formation du gel, ce qui permettrait de mieux répartir la zircone (voir paragraphe II.1.i). C’est donc cette synthèse qui a été retenue pour la suite de l’étude et pour la comparaison avec celle qui sera identifiée dans le cadre de la voie Isopropoxyde.

Pec V1 Pec V2

Pec V3 Pec V4

Figure II.5. Micrographies MEB obtenues pour les différentes versions de synthèse par la voie Pechini modifiée

En ce qui concerne les micrographies MEB obtenues pour les composites synthétisés par la méthode Isopropoxyde (Figure II.6), des agglomérats de zircone (phase claire) et d’alumine sont également observés mais leur taille est considérablement plus faible, inférieur à 10 µm. De plus, comme pour la voie Pechini, la porosité résiduelle semble localisée préférentiellement dans les agglomérats d’alumine. La version Iso V2 présente une répartition plus homogène que les deux autres versions (aspect qualitatif à l’œil quel que soit le grossissement utilisé pour les observations). Dans la version Iso V1, la mauvaise répartition de l’alumine peut s’expliquer par la dissolution incomplète de l’isopropoxyde d’aluminium dans l’acétone. La version Iso V3, quant à elle, présente une porosité plus importante que la version Iso V2, du fait de la non- calcination de la poudre avant la mise en forme des crus. L’isopropoxyde se décompose lors du frittage et celle-ci pourrait induire de la porosité qui ne pourrait pas être éliminée de manière aussi efficace du fait d’une vitesse de chauffe fixée à 5°C/min. Au final, la synthèse Iso V2 est donc retenue pour comparaison avec la synthèse Pec V4.

Iso V1 Iso V2

Iso V3

Figure II.6. Micrographies MEB obtenues pour les différentes versions de synthèse par la voie Isopropoxyde

II.2.i.c. Homogénéité des deux compositions retenues au final

Les synthèses sélectionnées, Iso V2 et Pec V4, ont été caractérisées par EDS afin de s’assurer de l’homogénéité de répartition des phases zircone et alumine au moyen de quantifications chimiques (tension d’accélération fixée à 15 kV, distance de travail fixée à 10 mm, diaphragme condenseur fixé à 60 µm, méthode PhiRhoZ avec témoins internes du logiciel de microanalyse Esprit de chez Brüker, déconvolution gaussienne des pics). Ces analyses ont été réalisées à des grossissements fixés à 500, 1000, 2000, 5000 et 10000. Dans ces conditions d’analyse, les résultats des quantifications ne doivent pas dépendre du grossissement si le matériau est homogène.

La Figure II.7 présente les rapports pondéraux des éléments chimiques principaux du composite qui sont l’oxygène (O), l’aluminium (Al) et le zirconium (Zr). Ces rapports sont calculés en prenant en compte les pourcentages massiques de chaque élément aux différents grossissements. La valeur théorique pour chaque rapport pondéral du composite idéal contenant 30 % vol d’alumine et 70 % vol de Ce-TZP a été calculée à titre comparatif.

Cette figure met en évidence un rapport Zr/O élevé pour la voie Pechini modifiée par rapport à la valeur théorique, qui résulte des agglomérats de zircone présents dans l’échantillon (paragraphe II.2.i.b). À l’inverse, pour la voie Isopropoxyde, c’est le rapport Al/O qui est le plus élevé par rapport à la valeur théorique. Ce résultat s’explique par la présence des agglomérats d’alumine dans le composite (paragraphe II.2.i.b).

Figure II.7. Évolution des rapports Al/Zr (◼), Al/O (⚫) et Zr/O () pour la synthèse Pec V4 (rouge), la synthèse Iso V2 (vert) et la composition théorique (noir)

II.2.i.d. Influence de l’alumine sur la taille des grains de zircone

Les micrographies des composites frittés Iso V2 et Pec V4 ont été utilisées pour mesurer les tailles de grains de la phase zircone à l’aide du logiciel Image J (logiciel libre, développé par le National Institute of Health, Bethesda, MD, nombre de grains considérés de l’ordre de 150). À titre comparatif, une pastille pressée à partir de la poudre Ce-TZP (150 MPa, densité en cru de l’ordre de 45%) a également été observée après un frittage équivalent à celui appliqué aux versions Iso V2 et Pec V4 (5°C/min, 1600°C, 1h, sous air) pour évaluer l’influence de la présence d’alumine sur la taille des grains de zircone dans le composite. La Figure II.8 présente les micrographies utilisées pour ces mesures. Visuellement, elles mettent en évidence une diminution de la taille des grains de zircone (phase claire) dans le composite.

Iso V2 Pec V4

Ce-TZP

Figure II.8. Micrographies des composites (Iso V2 et Pec V4) et de Ce-TZP utilisées pour la mesure des tailles de grains

Du point de vue quantitatif, les distributions des tailles de grains de zircone dans les trois matériaux considérés sont présentées sur la Figure II.9. Ce graphique confirme les observations effectuées sur les micrographies (Figure II.8) avec une distribution de taille de grains plus large de la zircone dans Ce-TZP par rapport aux composites (Iso V2 et Pec V4). Les grains ont une taille maximale de l’ordre de 9 µm dans Ce-TZP, alors que ce maximum est inférieur ou égal à 6 µm pour les deux composites. La taille moyenne étant de l’ordre de 2 µm pour les composites et de l’ordre de 4 µm pour Ce-TZP seul. La présence de la phase alumineuse dans le composite permet donc de réduire de manière significative la taille des grains de la zircone, tout en permettant une bonne densification du matériau. Ce comportement est conforme à la littérature [29].

Figure II.9. Distribution des tailles de grains de zircone dans la poudre Ce-TZP et dans les deux voies de synthèse composite Iso V2 et Pec V4

II.2.ii. Essais dilatométriques sur les composites issus des synthèses Pec V4 et Iso V2