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Escherichia coli (%)

III. Fréquences des cocci :

3. Histoire de la résistance bactérienne :

L'histoire des résistances antimicrobiennes commence avec l’utilisation des sulfamides dans les années 30. Les streptocoques résistants émergèrent et compliquèrent le traitement. Plus tard, dans la première année d'utilisation de la pénicilline, les souches bactériennes résistantes apparurent, détruisant la molécule par une pénicillinase. D’abord découvert chez Escherichia coli, un enzyme ayant les mêmes propriétés était retrouvé peu après dans d’autres espèces, notamment chez les Staphylocoques coagulase positifs. Dans un hôpital londonien, l’augmentation des Staphylocoques résistants à la pénicilline s’accrut dramatiquement en quatre ans : 14% en 1994 et 59% en 1948. Au moment où les autres antibiotiques (streptomycine, tétracycline, chloramphénicol) apparurent à la fin des années 40, la fréquence des staphylocoques résistants dans plusieurs endroits approchait 70-80%. Ces souches étaient principalement retrouvées dans les mêmes hôpitaux où ces antibiotiques étaient utilisés. Dans une interview du New York Times, en 1945, Mr Alexander Fleming appelait à la prudence contre l’utilisation outrancière de la pénicilline. Il voyait cela comme une conséquence attendue mais troublante dès que le médicament deviendrait disponible.

A l’arrivée des autres antibiotiques, de nouvelles résistances apparurent, mais apparemment relativement lentement au début et généralement contre un seul antibiotique. Au laboratoire, des mutations survenaient à des taux de 10-6 à 10-8. Par conséquent, des résistances spontanées à 2 ou 3 antibiotiques auraient requis une probabilité trop faible pour être un problème. Cependant, au Japon, un tel évènement (une Shigella dysenteriae résistante de façon multiple fut isolée en 1959) survient au cours d’une épidémie de dysenterie. L’alarme chez les médecins se répercuta dans le monde scientifique, lorsque les quatre résistances furent démontrées transférables sur des éléments extrachromosomaux alors nommés « facteurs de résistance » ou « R factors ». Les microbiologistes japonais découvrirent que E.coli, dans les mêmes échantillons de fèces avec les Shigella étaient résistants aux quatre mêmes antibiotiques et pouvaient d’ailleurs transférer leur résistance entre eux et même à des espèces distantes. « La résistance infectieuse à une drogue » élargit le concept de transfert de gêne dans les bactéries, démontré dans le début des années 50 avec les facteurs F, ou « facteurs de fertilité ». Les facteurs R, alors découverts à cette époque au

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Japon, n’étaient pas uniques à ce pays ; ils existaient aussi au Mexique. Shigella, Salmonella et E.coli multirésistants isolés au Mexique dans les années 50 ont été démontrés plus tard comme hébergeant des facteurs R. Dans les années 60, en Europe, aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde, des facteurs R furent découverts chez d’autres entérobactéries. Alors que la résistance était d’abord identifiée, la mise en évidence de ces fragments d’ADN fut apportée par leur séparation du chromosome en gradient de chlorure de césium. Une floraison de techniques, incluant l’électrophorèse sur gel d’agarose suivi depuis, permettant l’identification des plasmides à la fois transférables et non-transférables dans presque toutes les espèces bactériennes examinées jusqu’à présent. Une importante découverte est ressortie de ces études : les plasmides existaient bien avant l’apparition des antibiotiques. Dans une étude de souches isolées avant l’introduction des antibiotiques, des plasmides similaires sinon identiques à ceux que nous connaissons comme facteurs R étaient présents. Aucun, cependant, ne supportait de gêne transférable de résistance aux antibiotiques.

Les études sur la résistance aux antibiotiques permirent la compréhension d’un autre phénomène génétique seulement décrit auparavant dans les plantes : c’était un fragment d’ADN qui passait d’un brin à l’autre en absence de machinerie normale de recombinaison de la cellule hôte. Dans les bactéries, ces fragments d’ADN sont appelés les « transposons ». La plupart des transposons codent leurs propres mécanismes enzymatiques du mouvement portant les gènes des résistances spécifiques à un ou plusieurs antibiotiques différents. D’abord la résistance à l’ampicilline transposable était découverte et, plus tard, la résistance aux aminoglycosides et à la tétracycline. Finalement la plupart des résistances furent retrouvées sur des éléments transposables présents sur des plasmides transférables et non-transférables, des bactériophages et sur le chromosome. Cette meilleure connaissance des gènes de résistance nous a permis de comprendre comment les plasmides de résistances multiples émergèrent sous la sélection des antibiotiques. Avec ces concepts génétiques de base, nous pouvons maintenant nous pencher sur ce qui est arrivé à la sensibilité aux antibiotiques des bactéries dans le monde entier pendant les quarante dernières années [16].

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TRI/IRT : résistant aux inhibiteurs/inhibitor TEM resistant ; BLSE : bêalactamases à spectre élargi ; OXA :oxacillinases ; Case : carbapénémase ; Pase : pénicillinase ;

Méti-R : méticillinorésistant

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III. Epidémiologie de la résistance bactérienne : 1. A l’échelle nationale:

Globalement, la perte d’activité touche des classes d’antibiotiques très variées et très différentes, mais on peut néanmoins faire état d’une famille particulièrement touchée, les bêtalactamines. Ce problème est d’autant plus inquiétant qu’au Maroc, l’amoxicilline est parmi les antibiotiques les plus prescrits, tant en ville qu’à l’hôpital malgré le développement de nombreuses résistances.

En milieu hospitalier :

Au Maroc, il existe une multitude de données relatant l’état des résistances bactériennes. Elles sont éparses et concernent essentiellement la pratique hospitalière.

Les études réalisées dans différents hôpitaux du royaume, sur le traitement des infections urinaires à E.coli par l’amoxicilline soit seule soit en association avec l’acide clavulanique, ont montré que le taux de résistance de ce germe est entre 50 et 70%. Ainsi, en 2005, à l’hôpital militaire d’instruction Mohamed V de Rabat, le pourcentage de résistance d’E.coli à l’amoxicilline + acide clavulanique était de 50% par contre il était de 60% à l’hôpital universitaire Cheikh Zayd de Rabat entre 2005 - 2007. Une autre étude réalisée à l’hôpital militaire de Marrakech [43] entre 2009 et 2010 a révélé que, chez les nourrissons, le taux de résistance de ce germe était de 69% à l’amoxicilline seule et de 55% pour cet antibiotique en association avec l’acide clavulanique. Ce pourcentage était de 67% au CHU de Fès pour l’association amoxicilline / acide clavulanique [17].

Des enquêtes réalisées entre 2005 et 2010 concernant l’infection nosocomiale (IN) dans différents CHU montraient à côté d’une prévalence élevée de l’IN (en 2005 17,8% à l’hôpital Ibn Sina de Rabat, 8,2% au CHU Fès, et en 2010 10,3% à Rabat et 13,3% à Fès), un usage très large d’antibiotique : 20% à Rabat et 56,4% à Fès en 2005, 32,8% et 42,9% respectivement à Rabat et à Fès en 2010.

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Dans les différentes enquêtes, des taux de résistances bactériennes très élevés ont été notés : 50% de Staphylococcus spméthicillino-résistant, 45,5% de Klebsiella sp Bêtalactamase à spectre étendu (BLSE), 66,7% d’Acinobacter sp imipénem résistant.

Des taux plus élevés sont relevés dans une enquête d’incidence de l’IN sur 3 ans réalisée dans un service de réanimation médicale du CHU Ibn Sina de Rabat : 75% de Klebsiella sp, 31% d’E.coliet 68,4% d’Entérobacter sp résistants aux céphalosporines 3éme génération C3G ; 35% de Pseudomonas sp résistants à la céftazidine[18].

En milieu extra-hospitalier :

La croissance de l’antibiorésistance d’E.coli lors des infections communautaires est un phénomène inquiétant. Les résultats de l’étude faite à El Jadida [17] par Nadmi et al montre que le pourcentage de résistance de ce germe à l’amoxicilline est de 61%.

S’agissant de la pratique communautaire, les données quoique rares sont toutes aussi inquiétantes. Une étude récente montrait notamment un taux de pneumocoque résistant ou à sensibilité diminuée aux pénicillines (PDSP) de 40% et une résistance de 20% d’E.coli aux fluoroquinolones. Les données disponibles sur l’état des résistances bactériennes situent le Maroc parmi les pays aux plus hauts taux de résistances. La corrélation avec la consommation des antibiotiques est vraisemblable même si elle n’est pas établie. Une vraie stratégie de maîtrise des résistances et donc de la consommation d’antibiotique s’impose par conséquent à tous les protagonistes [18].

Afin de pouvoir émettre des conclusions sur l’état actuel de la résistance bactérienne aux antibiotiques dans notre pays, il faudrait avoir un échantillon statistiquement valable. Malgré le nombre faible des échantillons des études citées précédemment, le taux de résistance trouvés reste élevé. En effet, si on compare la situation de la sensibilité d’E.coli dans notre pays et celle des pays développés, le constat est contrasté. Les résultats publiés par les réseaux de surveillance de la sensibilité aux antibiotiques en Europe (ECO*SENS, SENTRY-Europe, ESGAR) ou en Amérique du Nord (The Surveillance Network) sont superposables : Pour Escherichia coli le taux de résistance à l’ampicilline varie de 25 à 35%, de 2 à 10% pour l’association aminopénicilline-inhibiteur de bétalactamase [17].

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