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4. HISTOIRES RÉCAPITULATIVES

4.2 Histoire de Lory

« À l'âge de 12 ans, j'avais de nouveau été sélectionnée dans le niveau « A » et je m'étais retrouvée par hasard dans la même équipe que plusieurs de mes bonnes amies, ce que j'avais particulièrement apprécié. De plus, nous avions participé à plusieurs tournois lors de cette saison et j'avais vécu de très belles expériences sur le plan social avec mes coéquipières et mes entraîneurs. Toutefois, sur le plan du soccer, notre équipe n'avait pas très bien performé, mais nos mauvaises performances collectives ne m'affectaient pas trop étant donné que mon but premier n'était pas de remporter des matchs, mais plutôt d'avoir du plaisir avec mes amies.

Lors des saisons suivantes, soit de U13 à U18, j'avais rejoué sensiblement avec la même équipe et j'avais vécu des expériences tout aussi positives sur le plan social. Les performances de mon équipe ne s'étaient pas améliorées au cours de cette période, mais considérant le fait que je n'étais pas très compétitive, cela ne faisait pas en sorte que je voulais mettre un terme à mon parcours dans le soccer organisé.

Par la suite, alors que j'étais âgée de 19 ans, j'avais dû déménager dans une autre ville afin de poursuivre mes études universitaires dans un programme contingenté. En dépit du fait (a) que je ne pouvais plus jouer avec mes bonnes amies et (b) que je ne connaissais personne dans ma nouvelle ville, j'avais tout de même pris la décision de poursuivre mon parcours dans le soccer organisé. Je n'étais pas prête à abandonner complètement la pratique de ce sport à ce moment, car il s'agissait d'une partie importante de ma vie. J'avais donc entrepris des démarches et j'avais été en mesure de me trouver une nouvelle équipe. Toutefois, mon intégration dans cette équipe avait été plus difficile que prévu, car les autres joueuses se connaissaient déjà depuis plusieurs années. J'avais également subi une commotion cérébrale lors du premier entraînement et cela avait fait en sorte que je n'avais pas pu jouer avant la mi- saison. Au fil du temps, j'avais appris à connaître mes nouvelles coéquipières et je m'étais rendu compte que je n'avais aucune affinité avec elles. De plus, la cohésion sociale n'était pas très bonne en raison de nos mauvaises performances collectives. Bref, j'avais détesté ma saison et je ne voulais plus rejouer avec cette équipe.

L'année suivante, j'avais pris la décision d'abandonner complètement la pratique du soccer organisé à l'âge de 20 ans parce que je n'avais pas voulu risquer de vivre une expérience similaire à celle de l'année précédente avec une nouvelle équipe. Or, j'avais tout de même poursuivi mon parcours dans le sport organisé par le biais d'une activité alternative, soit le volleyball, car je m'étais fait de nouvelles amies à l'université et elles avaient besoin d'une joueuse pour compléter leur équipe ».

Comme mentionné précédemment, l'histoire de Lory représente une suite potentielle à l'histoire de Sabrina et se termine par l'abandon du soccer organisé. Tel qu'illustré, cet abandon est principalement, mais pas exclusivement, relié à des facteurs en lien avec le besoin d'affiliation. Ces facteurs qui ont fait en sorte que Lory a pris la décision d'abandonner sont présentés dans les paragraphes suivants.

La poursuite d'études universitaires (contraintes d'organisation personnelle) est en quelque sorte l'élément déclencheur dans cette histoire. En effet, cela a fait en sorte que Lory a dû déménager dans une nouvelle ville (changement d'environnement) et qu'elle s'est retrouvée dans un milieu où elle ne connaissait personne (isolement). Toutefois, en raison de son vécu sportif considérable dans le soccer (identité), elle a été en mesure de surmonter ces barrières personnelles et contextuelles afin de poursuivre son parcours dans le soccer organisé. Par la suite, Lory a dû faire face à une autre barrière, soit sa commotion cérébrale (blessure), qui a nui considérablement à son intégration dans sa nouvelle équipe en la tenant à l'écart du jeu pendant une longue période. À son retour au jeu, elle a constaté qu'elle n'avait aucune affinité avec ses coéquipières (divergence sociale). De plus, les mauvais résultats de son équipe (contre-performances collectives) faisaient en sorte qu'il y avait un état de tension au sein du groupe (divergence sociale), ce que Lory n'appréciait pas du tout. Elle a finalement pris la décision d'abandonner la pratique du soccer organisé en raison de l'accumulation et de l'enchaînement de tous ces facteurs.

En ce qui concerne le type d'abandon vécu par Lory, selon les définitions proposées par Sarrazin et Guillet (2001), il s'agit principalement d'un abandon « mécontent » étant donné que son besoin d'affiliation n'était plus satisfait au moment de prendre la décision d'abandonner. Toutefois, dans le cas où Lory n'aurait pas eu à déménager pour satisfaire des obligations scolaires, elle aurait pu continuer de jouer avec ses amies. Elle n'aurait probablement pas vécu la même expérience et elle n'aurait peut-être pas abandonné la pratique du soccer organisé à ce moment. En ce sens, l'élément déclencheur de cette histoire est relié à un autre type d'abandon, soit l'abandon « à contrecoeur » (Sarrazin et Guillet, 2001). Il s'agit donc d'un autre exemple qui montre la complexité d'identifier un type d'abandon en particulier.

Bref, il est possible de constater que Lory a pris la décision d'abandonner en raison d'une accumulation de facteurs personnels et contextuels, ce qui confirme les résultats obtenus dans plusieurs études voulant que l'abandon sportif est souvent le

résultat d'une combinaison de plusieurs facteurs (Armentrout et Kamphoff, 2011; Brown, 1985; Dionne et Parent, 2015; Gould, 1987; Gould et Petlichkoff, 1988; Guillet, Sarrazin et Cury, 2000; Roy, Trudel et Lemyre, 2002; Salguero, Gonzalez- Boto, Tuero et Márquez, 2003; Sarrazin et Guillet, 2001; Weiss et Petlichkoff, 1989). Ce constat soutient également le modèle proposé par Kremer et Busby (1998). Dans le même ordre d'idées, l'enchaînement des différents facteurs ayant contribué à l'abandon de Lory illustre bien le fait que l'abandon sportif n'est pas seulement le résultat d'un événement unique (Brown, 1985; Swain, 1991).