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2-1 L'hôpital public au cœur des enjeux du secteur de la santé

La France se situe dans le peloton de tête des pays européens concernant la couverture de sa population par l'offre de soins, en particulier du point de vue de la densité du nombre de lits d'hospitalisation. Les indicateurs de santé publique alimentent régulièrement l'idée d' "un des - sinon "le" - meilleurs système de soins au monde".

L'hôpital public représente une part considérable - de l'ordre du tiers - et assez stable en moyenne durée, de l'ensemble des "dépenses courantes de santé", dont on sait qu'elles ont tendance à croître ces dernières années plus rapidement que le Produit Intérieur Brut. Cette croissance est l'objet d'un vif débat public, opposant les analyses néo-libérales qui parlent de "dérives" et qui visent, sinon à en infléchir la courbe, à limiter voire à réduire leur prise en charge publique, et d'autres points de vue, selon lesquels, d'une part elle est pour une part inévitable et positive (car résultant à la fois du coût nécessairement accru des nouvelles technologies médicales et du vieillissement de la population), d'autre part elle appelle à de nouvelles sources de financement ne pesant pas, ou pas principalement, sur les ménages.

Les dépenses de "soins hospitaliers et en section spécialisée" - hors médecine préventive, soins ambulatoires, transports médicaux, bien médicaux - forment un peu plus de 40% de l'ensemble des "dépenses courantes de santé", et, en leur sein, le secteur public hospitalier, au sens large - comprenant les établissements privés non lucratifs, la plupart d'entre eux "participants au service public hospitalier" (PSPH), et gérés selon la "dotation globale" - se taille la part du lion, avec prés de 80% du total. Les établissements publics sont de taille moyenne nettement plus grande que les établissements privés. Et ils emploient proportionnellement moins de médecins que les petites établissements du secteur privé lucratif (Encadré, p. 34).

On distingue habituellement deux modes de prise en charge : l'hospitalisation complète (avec au moins une nuit d'hébergement) et l'hospitalisation à temps partiel, de moins de 24 heures, qu'elle soit de nuit (essentiellement en psychiatrie) ou de jour (en médecine, en soins de suite et de réadaptation, en chirurgie et anesthésie ambulatoire). Prés de la moitié des séjours se font en hospitalisation partielle (47% des 22,6 millions de séjour en 1999)24.

Au 31.12.1999, 486 000 lits et 46 000 places installées sont recensées : 245 000 lits de court séjour (50% des lits), 90 500 lits de soins de suite et de réadaptation (19%), 65 000 de psychiatrie (13.5%), et 83 500 lits de longue durée (17%). Quant aux 46 000 places installées elles sont consacrées principalement à la psychiatrie (27 000 places, soit 57%). Au cours de l'année 1999 ces quelques 550 000 places ont permis près de 23 millions de journées d'hospitalisation. La tendance en moyenne durée est à la baisse du nombre de lits en hospitalisation complète, en particulier en psychiatrie et en soins de courte durée-MCO (Médecine-Chirurgie-Obstétrique). 70 000 lits en hospitalisation ont été supprimés en 10 ans, cette évolution s'accompagnant d'une diminution sensible de la durée moyenne de séjour : en court séjour la moyenne est de 6,2 jours en 1999 ; en soins de suite et en psychiatrie la durée moyenne est de 32 jours.

24 Ces données et celles qui suivent sont issues de : Les établissements de santé en 1999,

LE PAYSAGE HOSPITALIER FRANÇAIS

Le secteur hospitalier français fait cohabiter des établissements de trois types juridiques : "Public", "Privé non lucratif" (mutuelles, associations…) et "Privé lucratif" (sociétés anonymes, sociétés civiles). Ces trois types combinant des modes d'organisation et de gestion, de financement et de régulation, de participation aux missions de service public très différentes. Les statuts des personnels y travaillant sont également très variés. Cette diversité est très structurante de l'organisation de l'offre de soins hospitalière, en particulier de la répartition des lits et de l'activité.

Depuis 1996, il existe principalement deux modes de financement des structures hospitalières:

- Le budget global, s'appliquant à l'ensemble des établissements publics et à une majeure partie des établissements privés non lucratifs, que ceux-ci participent ou non du service public hospitalier : l'évolution annuelle des dotations globales est encadrée par un taux directeur, déterminant un budget prévisionnel ;

- Un système de paiement mixte au séjour, combinant des rémunérations par des prix de journée et du paiement à l'acte, qui concerne les cliniques privées et une petite partie du secteur privé non lucratif. Les dépenses d'assurance maladie de ces établissements sont encadrées par l'Observatoire Quantifié National (OQN), visant à contrôler l'évolution annuelle des tarifs des journées et des actes.

On le voit, en dehors du secteur public les deux types de statut juridique et les deux modes de financement ne coïncident pas complètement. Les statistiques tendent à privilégier le mode de financement en distinguant les

établissements privés sous dotation globale et les établissements privés sous OQN.

En 1999 on comptait 3 171 établissements sanitaires avec capacités d'hospitalisation (à temps complet, à temps partiel, ou en chirurgie ambulatoire), et environ un millier d'autres structures sanitaires sans capacités d'hospitalisation, soit environ 4200 établissements25. Minoritaires en nombre (un quart environ) les établissements publics forment de loin le premier employeur : ils sont de taille moyenne nettement plus importante, avec un effectif moyen de prés de 700 personnes, contre 130 pour ceux du secteur privé sous dotation globale, et 65 pour les établissements privés sous OQN. Les deux tiers du "personnel médical" (médecins et assimilés), et les trois quarts du personnel non médical (en particulier personnel soignant) y travaillent.

Répartition des établissements de la santé selon le statut, les effectifs et les dépenses (1998) Nombre d’établis- sements En % Personnel médical en ETP % Personnel non médical en ETP % Dépenses hospitalières Etablissements publics de santé 1058 25,1 70 091 63,5 646 121 74,6 287 109 Dont CHR (centre hospitaliers régionaux 29 0,7 Dont CH (centres hospitaliers 562 13,4 Dont Hôpital local 349 8,3 Etablissements privés

sous dotation globale

792 18,8 12 231 11,1 92 984 10,7

Etablissements privés sous OQN

2 353 56,1 28 034 25,4 126 545 14,7 72 503

TOTAL 4203 100 110 356 100 865 650 100 359 612

*Dont 1 609 971 places en « traitements et soins à domicile, dialyse ambulatoire »

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Le recours à l'hospitalisation s'est développé de manière régulière et modérée (selon un taux annuel moyen de plus 1,9 % de 1995 à 1999), mais avec des changements profonds dans les modalités de recours aux hôpitaux, publics comme privés : ce sont les activités de moyen séjour (soins de suite et réadaptation notamment), les hospitalisation de moins de 24 heures qui se développent le plus rapidement. Le recours aux urgences et aux séances régulières de soins (chimiothérapie, radiothérapie, dialyses) se développent également témoignant de "l'évolution des formes de consommation de soins et de la place des établissements sanitaires dans l'offre de soins : la frontière entre la médecine ambulatoire et l'hôpital devient moins claire et la notion de lit moins pertinente pour mesurer, à elle seule, le niveau de l'offre hospitalière".26 Le cas des urgences a souvent été sous les projecteurs médiatiques. Il est vrai que la progression des passages dans ces services est spectaculaire (10 millions en 1995, 12 millions en 1999), suscitant deux grandes interprétations : émergence de besoins mal pris en compte par la médecine de ville, affirmation d'une demande accrue en sécurité et en accessibilité des soins.

Entre le secteur public et le secteur privé lucratif, la répartition des activité de soins est très typée. Le premier se consacre principalement à la médecine (80% de l'ensemble des séjours médicaux, soit 51% de ses prises en charge), à la psychiatrie (70% des séjours dans cette pathologie, 11% de son activité en hospitalisation complète), aux urgences (91,5% de l'ensemble des passages aux urgences). Le second s'est historiquement spécialisé la chirurgie (66 % de leurs hospitalisations complètes), et, plus largement, dans les activités programmées et standardisées. Des spécialisations plus fines se développent par type d'activité et par mode de prise en charge (hospitalisation complète ou partielle). Les cliniques concentrent également 86% des venues en chirurgie ambulatoire

Le débat évoqué ci-dessus concerne au premier chef l'Hôpital public, objet de multiples réformes ces deux dernières décennies, sous le thème général des "restructurations". Ces dernières visant à limiter son coûts et à améliorer son efficacité. Or force est de constater qu'elles parviennent à enrayer ni la dégradation progressive des conditions d'accueil et de soins des malades qui y transitent, ni celles des conditions de travail des personnels. Le diagnostic d'une "crise" de l'Hôpital est donc assez partagé, et il est régulièrement réactualisé et porté sur le devant de la scène.

26 DREES, op.cit., page 20. Depuis 1996-1997 l'identification des motifs de séjour permet de

décrire finement l'activité hospitalière et ses évolutions, grâce au PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d'Information), permettant de classer chaque séjour dans un des 579 GHM (Groupe Homogène de Malade), lesquels sont regroupés en 27 CMD (Catégories Majeures de Diagnostic). Il faut rappeler que les accouchements demeurent la première cause d'hospitalisation (prés de 750 000 en 1999), avec 5% de l'activité hospitalière de court séjour MCO (Médecine-Chirurgie-Obstétrique).