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Au moment d’aborder l’analyse du corpus d’entretiens et de faire un choix

méthodologique à cette fin nous avons gardé deux principes à l’esprit : d’une part, le choix

du type d’analyse —au même titre que celui du type de collecte auparavant— devait être

subordonné aux objectifs de notre recherche ; d’autre part, le fait que toute analyse de

contenu doit respecter trois caractéristiques, à savoir, « pouvoir rendre compte de la

quasi-totalité du corpus (principe d’extension), être fidèle […] et auto-suffisante (sans retour

nécessaire au corpus) » (Blanchet & Gotman, 2007 : 93). Dans le respect de ces principes,

l’analyse d’un corpus d’entretiens peut être abordée selon trois méthodes différentes :

- L’analyse par entretien, qui repose sur l’hypothèse que chaque singularité est

révélatrice soit du processus psychologique, soit de la réalité sociologique que l’on

veut analyser. Elle convient surtout à l’étude des processus ou des modes

d’organisation individuelle (étude de cas cliniques, récit de vie, ergonomie cognitive

d’un mode de réalisation d’une tâche professionnelle, etc.) ;

- L’analyse thématique, qui consiste à découper transversalement tout le corpus. Dans

ce cas, « l’unité de découpage est le thème qui représente un fragment de discours.

Chaque thème est défini par une grille d’analyse élaborée empiriquement. Le mode

de découpage est stable d’un entretien à l’autre » (Blanchet & Gotman, 2007 : 93).

Contrairement à l’analyse par entretien, l’analyse thématique ignore la cohérence

singulière de l’entretien, et cherche une cohérence thématique dans l’ensemble.

- L’analyse lexicométrique, qui « repose sur la prise en compte de la fréquence des

mots et de la structure formelle, de leurs co-occurrences dans les énoncés d’un

corpus donné » (Reinert, 1993 ; cité par Blanchet & Gotman, 2007 : 100).

Parmi ces trois possibilités, il nous a semblé que l’analyse thématique était la plus

appropriée à notre recherche, même si l’éclairage du profil de l’interviewé pourra en

rapprocher certains segments d’une « analyse par entretien ». Une fois ce choix

méthodologique arrêté, l’analyse se déroulera en deux temps : avec une première étape de

questionnement —organisée de manière thématique— et une deuxième étape

d’interprétation. Dans cette deuxième étape, à la découpe transversale d’entretiens par

thème, s’ajouteront logiquement une analyse des variations et des recoupements

significatifs ainsi qu’une formulation d’hypothèses explicatives.

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Quant aux principaux thèmes qui se dégagent des données recueillies, ils renvoient

aux trois grandes catégories de questions posées dans l’entretien. Cette intuition qui avait

orienté l’élaboration de notre guide d’entretien a par conséquent été formulée, dans l’étape

préparatoire de l’analyse, comme l’hypothèse de départ que voici : la construction et le

développement de la compétence de communication interculturelle des apprenants de FLE

en milieu homoglotte sont influencés par les facteurs suivants :

1. la motivation pour apprendre la langue et pour faire un séjour

d’apprentissage/études en France ;

2. le niveau de compétence langagière acquis par l’apprenant au moment de son

insertion dans la société et la culture françaises (d’autres compétences générales

sont exclues de notre champ d’étude par manque de données) ;

3. les interactions sociales de l’apprenant avec des Français, des allophones français

ou d’autres interactants d’appartenances linguistico-culturelles différentes ;

4. les représentations de la France et des Français, ainsi que d’autres appartenances

nationales ou ethniques (les représentations de l’Autre en général) ;

5. les expériences d’apprentissage ;

6. la distance culturelle variable entre la culture française et la culture d’origine, et

l’éventuel désir d’intégration dans la société d’accueil.

Aussi l’objectif de notre analyse sera-t-il de répondre à cette double problématique :

déterminer, d’abord, l’importance de chacun de ces éléments et interpréter, ensuite, les

dynamiques d’interaction et d’impact entre eux et l’enjeu central de la construction de la

compétence de communication interculturelle des apprenants. Le graphique ci-dessous

reprend ces facteurs/axes thématiques et traduit visuellement comme suit notre

problématique initiale :

Méthodologie de recherche et présentation du corpus

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Figure 16 – Thèmes d’analyse et problématique

Dans sa première étape, notre grille d’analyse thématique sur les facteurs influant

la communication interculturelle et le déploiement de la CCI se déclinera donc en suivant

ce schéma détaillé

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:

1- Analyse de la motivation de la mobilité vers la France : quel impact ?

2- Analyse des représentations de la France et des Français

2.a. Les représentations avant et après l’insertion sociale en France (par groupes

nationaux et autres variables)

2.b. L’évolution des représentations de l’Autre (quelle dynamique ?) et

l’auto-observation suite à l’expérience de l’altérité

3- Analyse des interactions sociales et des expériences de communication des apprenants

hors classe et en classe de FLE

3.a. Hors classe de FLE :

- La communication avec les autochtones : récits d’expériences

- Discours sur les difficultés de communication et stratégies de remédiation

identifiées par les apprenants

118 Cette grille d’analyse par thèmes a été élaborée selon les orientations méthodologiques de Blanchet et Gotman (2007 : 96-97) : « Pour établir les thèmes et construire la grille d’analyse, il est nécessaire de procéder à la lecture des entretiens, un par un. Il s’agit bien ici d’une lecture, et non d’une analyse de contenu au sens où on l’a défini ; cette lecture a pour but la prise de connaissance du corpus. […] L’identification des thèmes, ainsi que la construction de la grille d’analyse s’effectuent à partir des hypothèses descriptives de la recherche, éventuellement reformulées après lecture des entretiens. […]. Comme le guide de l’entretien, la grille d’analyse doit autant que possible être hiérarchisée en thèmes principaux et thèmes secondaires. »

Le répertoire/apprentissage (inter)culturel La motivation de l’apprenant Le répertoire/apprentissage linguistique Les relations interpersonnelles L’adaptation et l’intégration dans la société

d’accueil Les représentations et le profil de l’apprenant La communication interculturelle

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- Interactions sociales et communication avec les autochtones : analyse du

discours sur l’insertion sociale

3.b. En classe de FLE :

- La communication avec l’enseignant et les objectifs du cours vus par les

apprenants (quelle part pour la langue et quelle part pour la culture ?)

- Expériences de communication entre allophones primoarrivants : atouts et

enjeux

-Interculturalité et motivation (le savoir-apprendre)

Au terme de cette analyse thématique, nous espérons que le travail d’interprétation

de l’expérience de communication interculturelle en milieu homoglotte nous permettra de

mieux comprendre, par le biais du récit et des perceptions des apprenants de langue

étrangère, comment identifier les dynamiques de blocage et/ou de construction de la CCI.

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PARTIE III

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CHAPITRE 5.

ANALYSE DU CORPUS

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u moment d’entamer l’analyse de notre corpus, il faut rappeler que

l’objectif de cette recherche est de comprendre comment les étudiants

étrangers-apprenants de FLE en milieu multilingue homoglotte vivent

et mettent en mots la rencontre interculturelle. Pour ce faire, nous nous sommes

essentiellement appuyés sur leur récit d’expériences ainsi que sur leur discours,

c’est-à-dire sur les représentations/perceptions que celui-ci véhicule, d’une part, et sur les

dynamiques motivationnelles, communicationnelles et d’apprentissage qu’il permet

d’établir dans les situations de contact entre langues et cultures, de l’autre.

Les questions que nous nous poserons, au fil des rubriques thématiques proposées

dans la grille d’analyse, seront donc principalement : comment des facteurs comme la

motivation/raisons au départ, les représentations et les expériences de communications

identifiées comme significatives ou marquantes par les interviewés influencent le

déploiement de la CCI en situation d’insertion linguistique et sociale ? quel est leur impact

variable ou leur influence réciproque ? et quelles stratégies spécifiques faudrait-il mettre

concrètement en œuvre dans ce type de classes de FLE pour favoriser la co-construction

de compétence ?