De la grandeur du projet à la raison de l’opérationnel

Le projet de la ZUP Sud s’étend sur 500 hectares et englobe plusieurs typologies urbaines. Ainsi, cette opération présente plusieurs particularités intéressantes pour analyser la prise en compte de la nature. Au-delà de l’époque à laquelle elle se déroule, les années 60, ce projet permet d’observer à la fois la prise en compte dans le cadre formel d’une Zone d’Urbanisation Prioritaire (Z.U.P.) menée par la Ville, mais aussi d’observer un processus connexe d’urbanisation qui vient se greffer au large périmètre. En effet, le projet politique d’aménagement de la zone Sud de Rennes est plus vaste que la part réelle d’espace aménagée directement par l’urbaniste en chef. Avant la Z.U.P., la municipalité Fréville (1953) avait tenté de répondre à la problématique de l’accueil des nouveaux habitants par une série de projets d’équipements et surtout de constructions d’ensembles de logements qui furent un premier pas vers la fermeture des camps et l’amélioration des conditions de vie368. Le reste des espaces est donc soit déjà urbanisé, soit l’objet de petites opérations qui sont en cours avant l’arrêté préfectoral de 1959 qui valide la Z.U.P. En outre, la déclaration d’utilité publique tarde jusqu’en 1964, ce qui contraint les opérateurs à réduire la surface et à orienter le projet vers des terres moins coûteuses pour la collectivité car en 4 ans, la valeur foncière a pris le temps de se développer.

368 Sauvage A., F. Ferchaud, R. Le Bouar, (2013), De la ZUP au quartier du Blosne à rennes, Rapport IAUR. Page 43

Voie ferrée, limite nord/sud

Tableau 42 : Synthèse des surfaces mises finalement au projet de la ZUP Sud (I.A.U.R. 2012)

Ce tableau extrait du rapport de l’IAUR369 propose une synthèse des surfaces mises finalement au projet de la ZUP Sud. Il exclut ainsi les parties Nord et Ouest où la pression foncière est plus importante et où le tissu urbain n’a pas attendu pour se régénérer.

Au-delà de l’urgence de production d’habitat, il s’agira donc de redonner une cohérence à l’ensemble de ce territoire combinant urbanisme précaire, chantiers privés et monde agricole.

Les cartes 3 et 4 suivantes superposent les différents périmètres pris en compte dans l’analyse. Nous l’avons réalisée à partir des descriptions des services de l’inventaire de la Région Bretagne (kartenn.bzh) pour le périmètre et les opérations privées sélectionnées. Les données sur les périmètres d’opération ont été observées aux archives Municipales de Rennes (Fond Marty). L’ortho- photo de la carte 4 date de 2014 et est propriété de Rennes Métropole, les photos aériennes anciennes (1960) de la carte 3 sont propriété de l’IGN et ont été repositionnées, elles peuvent présenter un léger décalage visuel de 5 à 10 mètres terrain.

La partie centre et ouest retiendront l’attention des équipes projets ; ainsi la frange est (moitié est de l’actuel quartier Bréquigny) accueille une opération menée par Louis Arretche, le lotissement du Boberil-Berthelin (17 ha) et une partie située au centre nord, la cité-jardin des Castors rennais. A l’est le territoire sera quelque peu oublié politiquement d’après les témoignages recueillis comme celui de M. Richou, qui s’occupait alors des problèmes quotidiens dans les années 70 :

« C’est un quartier qui a été longtemps délaissé. Alors, les élus de quartier, par exemple de la Ville de Rennes, il y en avait partout sauf dans celui-là (Bréquigny). Quand j’étais directeur du cabinet du maire, il n’y avait pas un élu de la Ville chargé du quartier 12, alors je m’étais attribué ce rôle. » (…) « Moi je faisais fonction d’élu de quartier, c’était assez malsain parce que tout le monde pensait qu’élu de quartier, élu au conseil général, tout ça, ça va ensemble. Et ils continuent à penser que j’étais quelqu’un de la Ville de Rennes. La confusion a toujours été très grande et elle existe encore aujourd’hui. » (Entretien en 2017 avec M. Richou, habitant de la ZUP Sud et directeur de cabinet du maire dans les années 60 – El Moualy)

A l’intérieur de ce périmètre on remarque ainsi des morphologies urbaines différentes avec chacune leur organisation des espaces à caractère naturel. Certains objets urbains, tels que les voiries avec leurs plantations, rappellent cet effort de mise en cohérence effectué dans les années 60. Néanmoins, il existe encore des démarches qui visent à estomper la scission spatiale entre la partie ouest du quartier de Bréquigny et l’est, en particulier à l’extrême sud-est où des ensembles comme les Clôteaux ou Albert-Bayet sont rattachés à la mairie et aux équipements sociaux situé au nord- ouest370.

Photo 3: Lotissement concerté, dit du Boberil Berthelin – quartier Bréquigny à l’ouest du périmètre (– non daté - inventaire général de la région Bretagne – Isabelle Barbedor

Photo 4 : A droite, Vue aérienne du Blosne – depuis l’est vers l’ouest (– 2014 – photo Rennes Métropole – D. Levasseur.)

370 Ces démarches ont été observées en réunion de travail au centre social Aimée Césaire et à la mairie de quartier sud-ouest dans le cadre de la préparation des nouveaux contrats de ville.

Sur la carte 4, on observe que les périmètres ont de nouveau été modifiés (quartiers actuels en noir). En 1983 le découpage des quartiers administratifs de Rennes affirme ainsi cette distinction nette entre l’ouest et l’est, séparé par l’avenue Henri Fréville.

Malgré les différentes morphologies urbaines à l’intérieur du périmètre de la ZUP Sud, les ordres de grandeurs de population et de surface végétalisée restent très proches aujourd’hui :

Tableau 43 : Quelques chiffres sur l'occupation des sols dans la ZUP Sud

Cas Surface Densités

logts/ha

Hauteur moy. Nombre d’habitants (2006 et 2009) Surface végétalisée ha Prix achat logement au m² MOY (2016) Le Blosne Bréquigny 269ha 263ha 30 27 R+10 R+6 19206 13900 18% 16% 1800€ 1800€

Ce tableau a été réalisé à partir des sources du centre de l’urbanisme de Rennes Métropole – le prix d’achat des logements a été vérifié sur les sites de professionnels de l’immobilier (exemple : http://www.lacoteimmo.com) et peut varier d’une centaine d’euros selon les estimations avec une tendance à la hausse compte tenu des requalifications en cours et de la livraison en 2017 de la ligne à Grande Vitesse qui relie Rennes à Paris en 1h30.

Le quartier du Blosne (périmètre administratif actuel) fait aujourd’hui l’objet d’une requalification et celui de Bréquigny voit sa morphologie évoluer avec la multiplication des opérations privées de densification, en particulier le long des grands axes. Nous nous intéressons ici au projet originel et à la façon dont il a pris en considération les espaces à caractère naturel, ainsi qu’à leur évolution.

3.1.1.2. Au bord du ruisseau on enfouit les souvenirs d’un paysage