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2. Cadre historique de la protection de la biodiversité : de l’échelle locale à l'échelle

2.3. Gestion internationale de la biodiversité

Le concept de conservation fait référence à un bien commun et public, d’échelle locale ou internationale, qui doit être protégé. Si le premier parc national fut créé en 1872 aux Etats Unis, en Afrique, la première réserve naturelle fut créée en 1925 à l'Est de la République Démocratique du Congo actuelle sous le nom parc national Albert, rebaptisé parc national des Virunga (800 000 hectares) lors de son inscription sur la liste du Patrimoine mondial en 1979 (UNESCO5). La politique de conservation de la nature a longtemps procédé d’une certaine imposition d’un statut de protection sur un territoire particulier dont les populations humaines sont généralement exclues. Pour Boissière et Doumenge (2008), « la conservation de la biodiversité, même si elle est un problème global de la planète, reste d’abord une multitude de situations à gérer au cas par cas ». Plusieurs rapports publiés au cours des années 2000 par la FAO constatent une augmentation des conflits à l’échelle mondiale, faisant état de la diversité des cas de figure rencontrés d’une région du globe à l’autre.

Créée en 1948, l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) est aujourd'hui le plus vaste réseau mondial de protection de l'environnement qui rassemble « plus de 1 200 organisations membres dans 140 pays dont 200 gouvernements ou organisations gouvernementales, et 800 organisations non gouvernementales » (UICN6). Mais l'UICN c'est aussi « près de 11 000 scientifiques et

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URL : http://whc.unesco.org/en/list/63, consulté le 15/09/2014.

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URL:http://www.iucn.org/about/work/programmes/gpap_home/gpap_quality/gpap_pacategories/gpap_pa category2/, consulté le 15/09/2014.

spécialistes volontaires au sein de six Commissions » (UICN6). En 1980, l'UICN expose sa vision de la conservation de la biodiversité en publiant une « Stratégie mondiale de la conservation ». Pour faire face aux dangers de la surexploitation des ressources naturelles ou de la destruction des habitats végétaux ou animaux, il faut protéger la nature. C'est d'ailleurs dans cette dynamique que de grandes conventions internationales ont marqué les années 1970-1980 (RAMSAR, CITES, PNUE etc.). Parallèlement, ce mouvement conversationniste issu des pays du Nord s'accorde difficilement avec la logique de développement des pays du Sud car il représente un frein à leur développement économique (Rossi, 2000).

Dans les années 1980-1990, le dépôt croissant de brevets scientifiques témoigne d’une nouvelle conception, plus économique que conversationniste, de la biodiversité. Il y a ceux qui possèdent une large part de la biodiversité mondiale (Pays du Sud) et ceux qui l'utilisent parfois dans un but industriel ou de recherche (Pays du Nord), mettant en avant des pratiques de bio-piraterie de grandes sociétés qui exploitent des ressources et des connaissances sans reconnaître ceux qui les ont partagées avec eux (Merson, 2000). Finalement, en 1992, la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) est signée par 157 pays (179 membres reconnus par l'ONU à l'époque de la signature; 193 pays reconnus par l'ONU en 2011) et considère la biodiversité comme « une préoccupation commune de l'humanité » et reconnaît la souveraineté des états sur leurs ressources. Elle fixe donc des règles sur l'utilisation de la biodiversité mais ne lui confère pas le statut d’un patrimoine mondial.

Du fait de sa position d’acteur majeur dans la protection des espaces naturels, il convient de discuter de la définition d’une aire protégée telle que l’UICN la conçoit. En effet, les aires protégées sont des instruments qui permettent de soutenir les objectifs de la Convention sur la diversité biologique et les objectifs du Millénaire pour le développement. D’après le site internet de l’UICN (UICN6), une aire protégée est « un espace géographique clairement défini, reconnu, dédié et géré, par des moyens légaux ou autres, afin de favoriser la conservation à long-terme de la nature et des services écosystémiques et des valeurs culturelles qui y sont liés » (UICN6). Cette définition fait donc apparaître plusieurs aspects des aires protégées : leur délimitation, leur

reconnaissance, leurs règles, leur gestion, leur objectif de conservation de la nature, leur valorisation des services écosystémiques et leurs valeurs culturelles. Dans les textes, la protection de la nature passe par la conservation de la biodiversité associée à des moyens d’existence pour les populations locales. On protège pour conserver des espèces qui disparaissent mais aussi par rapport à une vision plus utilitariste (services écosystémiques) de la nature. En terme de traduction catégorielle, il en découle une multitude de statuts de protection : les zones de conservation communautaire, les réserves naturelles, les parcs nationaux, etc.

Parmi ces statuts, celui de parc national se rattache à la catégorie II des aires protégées de l'UICN qui permet la « protection de procédés écologiques à grande échelle associés à des espèces et écosystèmes constituant la base d’activités environnementales et culturelles compatibles avec des objectifs spirituels, scientifiques, éducatifs, de loisir et de tourisme » (UICN6). Parmi les nouveaux enjeux à considérer, l’UICN reconnait, entre autres, une redéfinition de la catégorie II et V, le cloisonnement de ressources commercialisables dans les parcs nationaux (terre, eau) et les questions de déplacement de population ou de compensation. Dans ce contexte, au début des années 2000, les institutions et organisations nationales et internationales qui gèrent la biodiversité mettent l’accent sur la coordination entre la gestion des aires protégées et les communautés humaines avoisinantes (Congrès mondial sur les parcs de Durban en 2003, Conférence internationale sur la Biodiversité en 2005). Barbault et Le Duc (2005) ont d’ailleurs mis l’accent sur le lien entre conservation et développement durable. En effet, il ne s'agit pas d'isoler des sociétés de leur environnement pour le protéger selon le mythe du wilderness comme le soulignent Arnould et Simon (2007) : « Chercher à préserver la nature en l'isolant des sociétés relève ainsi du mythe, le même qui faisait croire au conquistador au XVIe siècle qu'il découvrait en Amazonie une terre vierge ». Dans ce contexte, Simon (2006) souligne que seule une approche territoriale qui intègre des réalités historiques et sociales permet de nuancer les discours catastrophistes en matière de gestion des ressources.

2.4.

Décentralisation de la gestion de la biodiversité en