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Gestion des déchets dans les villes africaines : Fatalité ou négligence ?

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 59-64)

Chapitre 1 : Les déchets dans les prismes scientifiques et sociaux

1.3.1. Gestion des déchets dans les villes africaines : Fatalité ou négligence ?

Le fait urbain, bien qu’il ne se développe pas de la même manière et à la même vitesse dans tous les pays, reste un problème délicat pour les pays africains. L’urbanisation accélérée et la démographie galopante qu’ont connues les villes africaines et Yaoundé en particulier ont participé à la mise en péril des ouvrages d’assainissement construits par les pouvoirs publics.

Qu’on soit à Cotonou, Douala, Yaoundé, Accra ou Conakry, le rapport entre la quantité des ordures ménagères produites et la quantité ramassée ne dépasse pas 60%. Le taux moyen de collecte est situé entre 25 et 45% (Ta Thu Thuy, 1998). La production des déchets est devenue élevée et les pouvoirs publics sont dépassés et ne parviennent plus à assurer une collecte efficace des déchets. Dans la majorité des villes africaines, la gestion des déchets se heurte à plusieurs obstacles. Il y a entre autres la suppression des subventions par l’Etat, l’insuffisance des moyens matériels et financiers mis à la disposition des municipalités, la précarité de la voirie, le faible taux de recouvrement des taxes par les communes, l’absence de normes locales ou une réglementation inadaptée à la gestion des ordures ménagères, etc. Les flux des populations venues des milieux ruraux et motivées par l’envie d’améliorer leurs conditions socio-économiques ont amplifié le phénomène d’urbanisation dans les villes africaines. La plupart des villes, sous équipées, n’ont pas bénéficié des infrastructures adéquates malgré le boom démographique. Les villes se sont dès lors confrontées aux problèmes d’assainissement, d’hygiène et de salubrité. La non maîtrise des déchets en particulier a été accentuée par les défaillances des services publics, le manque de planification urbaine, des difficultés économiques49 après les indépendances, etc. Les déchets urbains au XXIe en Afrique subsaharienne et particulièrement au Cameroun deviennent un mal auquel il faut remédier car ils échappent au contrôle des institutions compétentes et constituent une réelle entrave au développement. Par contre, dans les pays dits « développés », la gestion des déchets, surtout ménagers, est bien intégrée dans la logique de développement50

49 Dans la Communauté Française d’Afrique (CFA), le franc CFA subit dans les années 1990 deux dévaluations.

Les répercussions ont été ressenties dans tous les secteurs économiques dans les pays concernés.

. La gestion des déchets en ville connaît une crise généralisée dans le continent africain. Tini A. (2003) dans ses travaux dégage trois problèmes majeurs. Le premier est la difficulté d’intégrer les différentes attentes au sein d’un système global et abouti. Les exigences des différents acteurs (ménages, Etats,

50 Barbier G. (1996). Conception et gestion des déchets ménagers à Libreville (Gabon).

59 société civile, etc.) ne cadrent pas souvent avec les réalités du terrain. Les attentes ne sont que partiellement satisfaites jusqu’à ce jour à cause des insuffisances technologiques, organisationnelles et surtout financières. Le second problème concerne l’extension et l’universalité du service de déchet. Au départ, les objectifs affichés pour l’assainissement, l’hygiène et la salubrité publique inclus tous les quartiers de la ville. Mais les moyens financiers et techniques disponibles font qu’on n’a pas plus de 50% de la ville intégrée dans le système de gestion des déchets. Le troisième problème concerne l’optimisation du système de gestion des déchets. Plus de quarante ans après les indépendances, les villes, les institutions et les Etats n’ont pas trouvé les solutions appropriées pour collecter, traiter ou éliminer les déchets solides ménagers en milieu urbain en Afrique. Différentes approches ont été préconisées et expérimentées sans qu’elles aient produit les effets escomptés51. L’analyse de la situation actuelle en Afrique laisserait croire à une sorte de fatalité à laquelle aucune solution n’est possible pour bien gérer les déchets dans les villes. De ce fait, il faudrait continuer à subir et se résigner face aux affres des déchets. En réalité, en observant de près le fonctionnement de plusieurs gouvernements africains, on se rend compte que la gestion des déchets ne représente pas une priorité pour la plupart des administrations. Ces dernières se concentrent sur l’éducation, la collecte des taxes et des impôts, l’approvisionnement en eau et les services de santé52

- L’adoption et le renforcement des réglementations pour la gestion des déchets ;

. Pourtant, les insuffisances actuelles peuvent servir de piste de réflexion ou de stratégie pour optimiser la gestion des déchets. Les pistes exploratoires communes mais non exhaustives ci-contre sont préconisées.

- La conception et l’application des plans nationaux, régionaux et locaux de la gestion écologiquement rationnelle des déchets ;

- L’extension sans discrimination du service public des déchets dans tout l’espace urbain ;

- La formation, la sensibilisation, l’éducation environnementale des personnels des collectivités locales et des populations ;

- L’assistance technique, matérielle et financière des acteurs privés dans le domaine de la valorisation des déchets, etc.

51 Tanawa E. et al. (2006). Les villes d’Afrique face à leurs déchets.

52 Onibokun Adepoju. G. (2001). La gestion des déchets urbains. Des solutions pour l’Afrique.

60 1.3.2. Production urbaine grandissante de déchets et collecte mitigée

L’accroissement de la population urbaine est l’une des principales causes de l’augmentation de la production des déchets. Par ailleurs, le phénomène de mondialisation ne limitant plus les échanges entre sociétés a permis aux populations de s’arrimer aux modes de consommations des sociétés modernes. Ceci a non seulement diversifié la qualité des déchets mais est à la source de l’augmentation de la production des ordures ménagères dans les villes africaines.

Kapepula K. D. (1996) montre que la quantité des déchets produits par les grandes villes africaines, en l’occurrence les capitales, n’a cessé d’augmenté de 1960 à nos jours et risque d’atteindre pour l’an 2015, 100% à plus de 300% de la production initiale. Le rapport entre la production et le collecte des DMS dans les villes d’Afrique reste encore faible et ceci constitue un épineux problème pour la qualité de l’environnement et la sécurité sanitaire des habitants. Le tableau 4 présente quelques chiffres de production et de collecte des DSM dans certaines capitales d’Afrique.

Tableau 4 : Rapport production et collecte des déchets solides ménagers dans quelques capitales africaines

Pays Population Production par habitant kg/jour

Estimation de la production/jour en kg

Taux de collecte

Dakar 2 267 356 0,88 1995273,28 47%

Bujumbura 500571 0,31 155177,01 25%,

Yaoundé 2 000 000 0,8 1600000 35-40%

Cotonou 757 356 0,5 378678 50%

Nairobi 3 300 000 0,6 1980000 21-24,4%

Diawara A. (2010) pour Dakar ; Source : Citeretse (2008) pour Bujumbura ; Lawson et al. (2008) ; Ngambi (2011) et Sotemenou (2007) pour Yaoundé ; Karanja (2005) ; Mérino Mathieu (2010) pour Nairobi.

Il ressort que le taux de collecte des déchets dans l’ensemble des villes pris comme exemple ne dépasse pas 50% et la moyenne se situe à 36,7% dans l’ensemble des villes. Les déchets solides ménagers produits dans les villes africaines sont regroupés en trois principaux groupes (tableau 5).

61 Tableau 5 : Composition des déchets solides ménagers dans quelques villes africaines Villes Fraction

fermentescibles Fraction inerte Fraction

combustible Autres (matières fines)

Douala / Cameroun

78,7 % 9 % 11 % 1,3 %

Antananarivo/

Madagascar 15 % 5,9 % 11,4 % 67, %

Dakar/ Sénégal 41 % 5 % 19 % 26 %

Moyennes 14 villes

algériennes

77,3 % 5,4 % 15,7 % 1,6 %

Source : Ngnikam E. et al. (1998); Tha Thu Thuy (1998); Rajaomanana (1996); Gillet (1985) Le tableau ci-dessus montre que la composition des déchets varie considérablement d’une ville à une autre. Néanmoins, la moyenne permet de constater que la fraction fermentescible est plus élevée dans les déchets. Ceci peut justifier l’expansion des filières de compostage dans la plupart des pays africains.

1.3. 3. Traitement et valorisation conventionnels des déchets : les techniques à adapter selon les moyens des Etats

Les filières de traitements des déchets en milieu urbain sont nombreuses. Celles retrouvées dans le tableau 6 semblent les plus appliquées dans les villes africaines. Ces filières de traitement sont classées en deux principaux groupes, à savoir les filières de valorisation (1-7) et les filières d’élimination ou de dépollution (8-10). Dans les pays d’Afrique, le choix d’un procédé de traitement dépend parfois des moyens financiers, des politiques de développement, de l’expertise disponible, etc. Les techniques de traitement généralement utilisées sont le compostage, le stockage ou la mise en enfouissement technique, la récupération et le recyclage. On peut y ajouter la méthanisation qui s’implante progressivement et dont le fonctionnement demande une bonne expertise et des coûts d’investissement élevés.

62 Tableau 6: Les filières de traitement des déchets

Intérêts du traitement Filière de traitement

Valorisation énergétique

1 Combustion (avec valorisation de la chaleur produite) 2 Elaboration de combustibles dérivés par des procédés

mécaniques (broyage, tri, séchage, etc.)

3 Elaboration de combustibles dérivés par des procédés biologiques (méthanisation, fermentation alcoolique)

d’Environnement 7 Epuration des effluents liquides et gazeux Traitement de la

pollution et enfouissement

8 Incinération et autres procédés thermiques 9 Traitement biologique (dépollution)

10 Stockage (sur site d’enfouissement technique)

Source : Navarro (1992). Gestion et traitement des déchets in Collection les Techniques de l’ingénieur Dans le tableau précédent, les filières de traitement de la pollution et d’enfouissement relèvent de la gestion linéaire car elles n’intègrent pas la valorisation de la ressource. Par ailleurs, la mise en décharge des déchets ou sur site d’enfouissement technique, malgré les limites53

- La collecte : ensemble des opérations au cours desquelles le contenu des poubelles est déversé dans les bennes de ramassage pour l’évacuation vers un lieu d’élimination ou de traitement. La collecte va du ramassage, c’est-à-dire le regroupement des récipients et leur déversement dans les bennes, au « haut de pied » qui désigne le déplacement des véhicules et du personnel entre le premier et le dernier récipient ramassé (Ngnikam E. et al. 2006).

qu’elle présente, demeure le mode de gestion le plus répandu. Elle suit un schéma classique, à savoir :

53La plupart des sites d’enfouissements techniques dans les pays d’Afrique en particulier au Cameroun sont semi contrôlés. Les lixiviats rarement traités et on y relève régulièrement diverses pollutions environnementales.

63 - Le transport : acheminement par un matériel roulant motorisé des déchets vers la

décharge, l’usine de traitement, etc. Il est souvent recommandé de couvrir les bacs servant à transporter les déchets.

- Le traitement, pendant longtemps limité à la mise en décharge. La décharge, selon Maes (1988), est un réacteur complexe à multiple compartiments (hydraulique, biologique, physico-chimique) qui sont en permanence en contact les uns avec les autres et qui réagissent de façon interactive simultanément ou non.

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