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Gélification par application d’un cisaillement continu

II.1 Protocole expérimental

Le protocole utilisé dans les tests de gélification en continu est le même que celui décrit dans le paragraphe I.1 pour les tests en oscillation. Après chaque nouveau chargement du rhéomètre, ou bien après gélification des solutions, nous avons effectué un recuit comme décrit sur la figure 1, qui nous a permis d’avoir des mesures rhéologiques reproductibles.

II.2 Obtention d’un gel sous cisaillement continu

Dans ces expériences nous appliquons une contrainte constante et nous suivons l’évolution du système en mesurant la viscosité au cours du temps. Nous avons observé deux comportements distincts selon que la contrainte appliquée est faible ou élevée. Nous avons reporté ces deux cas sur la figure 10, pour une solution de PLMA-PS-PLMA de concentration 0.19 g/g dans l’huile (à 20 °C).

Dans les deux cas, l’évolution de la viscosité au cours du temps a la même allure : la viscosité augmente fortement jusqu’à atteindre un maximum, puis elle diminue, enfin, elle ré- augmente pour atteindre un plateau. Cependant, même si l’allure des courbes est semblable, l’amplitude de variation de la viscosité est très différente selon que la contrainte est faible ou élevée. En effet, nous pouvons observer sur la figure 10 que lorsque la contrainte est de 80 Pa (à gauche), la viscosité augmente d’un facteur 200 environ avant de diminuer, alors que lorsque la contrainte est de 300 Pa, la viscosité augmente seulement d’un facteur 20. De même, les échelles de temps dépendent de la contrainte ; le temps mis par la viscosité pour atteindre sa valeur maximale est de ≈500 s quand la contrainte vaut 80 Pa, alors qu’il n’est que ≈10 s quand la contrainte est élevée.

Figure 10 : Evolution de la viscosité (en haut) et de la déformation (en bas) au cours du temps quand une contrainte est appliquée en continu sur une solution de concentration 0.19 g/g. A gauche, τ = 80 Pa ; à droite τ = 300 Pa.

Sur la figure 10, nous présentons également les variations de la déformation au cours du temps. Là aussi, les variations de la déformation pour les deux contraintes sont semblables : la déformation augmente très rapidement dans les instants qui suivent l’application de la contrainte, puis elle garde une valeur constante jusqu’au minimum de viscosité. Elle augmente ensuite sans signe apparent de stabilisation.

Cependant, bien que la viscosité et la déformation évoluent parallèlement, que la contrainte soit de 80 Pa ou de 300 Pa, les balayages en fréquence avant et après avoir appliqué la contrainte dans les deux cas montrent que lorsque la contrainte est élevée, la solution

gelifie : G’ est supérieur à G’’ sur toutes les fréquences étudiées (figure 11, droite) alors que, lorsque la contrainte est faible, il faut descendre à basse fréquence pour avoir un comportement de type gel (figure 11 à gauche).

Figure 11 : Balayage en fréquence (γ = 1 %) avant et après avoir appliqué une contrainte de 80 Pa pendant 2000 s à gauche, et 300 Pa pendant 150 s à droite, pour une solution de PLMA- PS-PLMA dans l’huile de concentration C = 0.19 g/g.

Pour la contrainte de 80 Pa, nous avons fait des balayages en fréquence en arrêtant la contrainte à des temps intermédiaires. Nous avons observé que les variations des modules sont les mêmes que dans l’état final mais que la valeur du plateau de G’ à basse fréquence est plus faible. De plus, le système revient en moins de 30 minutes dans l’état viscoélastique initial sans qu’un recuit thermique ne soit nécessaire, ce qui n’est plus le cas dans l’état final.

Pour la contrainte de 300 Pa, nous ne savons pas exactement à quel moment la solution gélifie car les modules ne sont pas connus dans une expérience de rotation sauf si un balayage en fréquence est réalisé. Lorsque la contrainte est élevée, les expériences sont courtes et il est difficile d’effectuer des balayages en fréquence pour déterminer le point de gel. Cependant, nous pouvons observer sur la figure 10 qu’à partir de 100 s environ, l’évolution de la courbe de viscosité devient plus irrégulière. Ceci est assez caractéristique des instabilités élastiques qui se forment en bordure de géométrie comme dans le cas de la sollicitation périodique (figure 5). Il est donc raisonnable de penser que la gélification se produit pendant la remontée de la viscosité à temps long.

Ainsi, il peut y avoir gélification par application d’une contrainte en continu. Le résultat important est que cette contrainte doit être supérieure à une contrainte critique pour que la solution puisse gélifier.

II.3 Cinétiques de gélification

De la même manière que nous avons étudié l’influence de différents paramètres sur le temps de gel dans les expériences en oscillation, nous allons maintenant caractériser les variations de la viscosité au premier maximum et le temps auquel cette valeur est atteinte (tmax) en fonction de la contrainte appliquée et de la température dans les expériences en

rotation. Les résultats des essais effectués en appliquant différentes contraintes en continu sont présentés dans la figure 12. Ces expériences ont été réalisées sur une solution de PLMA- PS-PLMA de concentration 0.19 g/g dans l’huile à température ambiante.

Figure 12 : Effet de la contrainte. Evolution de tmax et de la viscosité maximale lorsque la

contrainte varie pour une solution de PLMA-PS-PLMA dans l’huile de concentration 0.19 g/g (T = 20 °C).

Nous avons remarqué, au cours des différentes observations résumées sur la figure 12, que lorsque la contrainte appliquée diminue, la valeur maximale de la viscosité et le temps mis pour l’atteindre augmentent. De plus, là encore ces grandeurs sont décrites par des lois de puissance avec la contrainte. Nous avons trouvé que :

7 . 2 1 max − ⎟⎟ ⎠ ⎞ ⎜⎜ ⎝ ⎛ = C t τ τ et 9 . 1 2 max − ⎟⎟ ⎠ ⎞ ⎜⎜ ⎝ ⎛ = C τ τ η , avec τC1 ≅ 790 Pa et τC2 ≅ 14.103 Pa.

Il faut souligner que toutes les valeurs de tmax et ηmax suivent des lois de puissance, qu’il y ait

ou non gélification. Ce résultat est en faveur d’un mécanisme commun quelle que soit la contrainte (qu’il y ait ou non gélification).

Nous avons ensuite fait varier la température pour une contrainte continue de 80 Pa, sur une solution de PLMA-PS-PLMA dans l’huile de concentration C = 0.19 g/g. Les résultats sont présentés sur la figure 13.

Figure 13 : effet de la température. Evolution de tmax et de la viscosité maximale lorsque la

température varie pour une solution de PLMA-PS-PLMA dans l’huile de concentration 0.19 g/g (pour une contrainte τ = 80 Pa).

Ces graphiques montrent que lorsque la température augmente, le temps mis pour atteindre le maximum de la viscosité et la valeur de la viscosité maximum diminuent. De nouveau, les données expérimentales suivent des lois de puissance. Nous avons trouvé :

7 . 3 1 max − ⎟⎟ ⎠ ⎞ ⎜⎜ ⎝ ⎛ = C T T t et 5 . 4 2 max − ⎟⎟ ⎠ ⎞ ⎜⎜ ⎝ ⎛ = C T T η avec TC1 ≅ 100 °C et TC2 ≅ 180 °C.

En fait, au-delà de 80 °C, il n’y a plus d’augmentation de la viscosité. La température joue donc un rôle très important sur la gélification des solutions, ce que nous savions déjà puisque cet effet est utilisé dans le recuit (figure 1) pour toujours revenir dans un état comparable à l’état initial après gélification.

Nous avons ainsi obtenu au cours de ces expériences de nombreuses informations sur les paramètres qui influencent la gélification, que ce soit sous écoulement continu ou en oscillation. Mais le mécanisme à l’origine de la gélification reste encore peu clair. Pour essayer de mieux comprendre ce qui se passe, nous allons suivre la gélification sous cisaillement par rhéo-SAXS.