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et en cas d’incendie

4 Comportement du réservoir en cas d’incendie

4.6 Fusion du liner et éclatement du réservoir

Comme le modèle utilisé est couplé, il existe une compétition entre la baisse de rigidité de la structure due à la température et aux endommagements en résultant, et la baisse de rigidité par endommagement mécanique dû à la pression interne.

C’est pourquoi on constate expérimentalement deux phénomènes distincts : lorsque la pression interne est élevée, les couches externes, soumises au flux de chaleur, perdent rapidement leur résistance et reportent leur charge sur les couches les plus internes, qui atteignent leur seuil de rupture et provoquent l’éclatement. Pour des pressions internes plus faibles, le phénomène de décomposition a toujours lieu mais les contraintes mécaniques ne sont pas assez élevées pour provoquer la rupture des plis avant que le liner ne s’échauffe suffisamment pour atteindre sa température de fusion et entrainer la fuite du réservoir par son corps, le composite étant trop poreux pour assurer une quelconque fonction d’étanchéité. Il existe donc une durée pour laquelle il y n’aura plus éclatement du réservoir mais fusion du liner. Il est intéressant de savoir pour quelle pression interne le flux de 100kW/m², mesuré lors d’un feu très sévère, fera fondre le cœur du réservoir en liner PEHD avant que celui-ci n’ait éclaté. Pour connaître pour quel temps d’exposition le réservoir fuit, la température du liner est tracée sur la Figure 175. La température du liner tracée Figure 175 est celle de l’élément du liner en contact avec le matériau composite.

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Figure 175 : à gauche : endroit où la température du liner est mesurée pour évaluer son temps de fusion ; à droite : température du liner (modèle) d’un réservoir recevant un flux de 100kW/m2

Les temps d’éclatement simulés sont notés pour différentes pressions internes (cf. Figure 174 et Tableau 43). S’il n’y a jamais éclatement ou que l’éclatement arrive après que la température de fusion du PEHD a été dépassée à l’interface entre la coque composite et le liner, il est considéré que le réservoir fuit. Comme le liner en polyéthylène haute densité fond à 135°C [146], il est considéré que lorsqu’il atteint cette température, le réservoir commence à fuir immédiatement. Ainsi, à une pression interne donnée, si la fusion du liner a lieu plus tôt que l’éclatement du réservoir, alors le réservoir fuit. Or, d’après la Figure 175, le liner atteint cette température à 620s. La pression interne, conduisant à ce temps à éclatement, est située entre 335 et 340Bar d’après la Figure 173 et le Tableau 43. Cela signifie que si la pression interne est inférieure à 335-340 Bar, le réservoir ne subira pas d’éclatement, mais une fuite d’hydrogène à travers la coque composite. Ces résultats sont comparés aux essais réalisés lors du projet FireComp [16] sur la Figure 176 :

Figure 176 : Temps de fuite en fonction de la pression interne : essais [16] et modèle

Sur la Figure 176, il est mis en évidence que :

- La pression limite d’éclatement déduite du calcul est d’environ 335 Bar. Ainsi, pour une pression inférieure, le réservoir fuit mais n’éclate pas.

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Les résultats des calculs sont donc en accord avec ceux des essais et permettent d’identifier une pression de transition entre un mode de danger (éclatement, à éviter) et un mode de fuite par le corps du réservoir prévenant le risque d’explosion.

L’évolution et la cartographie de l’endommagement autour de cette pression (330 bar) sont données sur la Figure 177, peu avant l’éclatement du réservoir :

Echelle de rupture des fibres

620 secondes 780 secondes 803 secondes

Figure 177 : Rupture des fibres observée dans le réservoir avec une pression interne de 330Bar - calculs

D’après la Figure 177, la progression de l’endommagement des fibres est très rapide dans la virole après 620 secondes d’exposition. Parallèlement à cet endommagement des fibres, la perte de tenue du matériau due à la décomposition thermique explique également l’éclatement du réservoir Figure 178 :

Echelle 𝑓𝑑é𝑐 620 secondes, virole 780 secondes, virole 803 secondes, virole

Figure 178 : Evolution de 𝑓𝑑é𝑐= 1 −𝑑𝑑é𝑐 dans la virole de 620 à 803 secondes d’exposition à un flux de 100kW/m²

Sur la Figure 178 est renseigné pour différents temps d’exposition, le facteur de décroissance des contraintes 𝑓𝑑é𝑐 qui correspond à l’influence de la décomposition thermique sur la rigidité, avec 𝑓𝑑é𝑐= 1 − 𝑑𝑑é𝑐 , donc

∀𝑖, 𝑗 𝐶

𝑖𝑗 𝑑é𝑐𝑜𝑚𝑝𝑜𝑠é

= 𝐶

𝑖𝑗𝑓𝑑é𝑐 . Ce facteur 𝑓𝑑é𝑐 décroît donc de 1 à 0 au cours de la décomposition : 1 quand le matériau est considéré comme sain et 0 quand le matériau n’a plus aucune tenue mécanique, car décomposé thermiquement. Un léger accroissement de l’épaisseur décomposée est visible sur le bord de la virole (à droite sur les images de la Figure 178), ce qui est dû aux conditions aux limites de symétrie du flux.

La Figure 178 permet de constater que la variable de décroissance de la rigidité 𝑓𝑑é𝑐, a atteint une épaisseur importante du réservoir – presque la moitié après 803 secondes d’exposition. Un autre constat

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est frappant : de 620 à 803 secondes d’exposition au flux de chaleur, l’épaisseur atteinte par la décomposition thermique (et donc par 𝑓𝑑é𝑐) ne croît presque plus. Cela est dû au rôle d’écran thermique joué par le matériau décomposé, dont la diffusivité est très inférieure à celle du matériau sain et qui limite la croissance de la température derrière l’épaisseur décomposée, en profondeur (zone rouge sur la Figure 178). Par ailleurs, le lien entre l’épaisseur de matériau décomposé et l’endommagement des fibres est visible : l’épaisseur décomposée, Figure 178, correspond approximativement à l’épaisseur de matériau non atteinte par l’endommagement des fibres Figure 177. Cela est mis en évidence Figure 179 :

Echelle de rupture des fibres

620 secondes, virole Echelle 𝑓𝑑é𝑐 620 secondes, virole

Figure 179 : Comparaison de l'épaisseur endommagée mécaniquement par la rupture des fibres et de l'épaisseur atteinte par la décomposition à 330Bar et 100kW/m², après 620 secondes d’exposition

La compétition entre transferts de chaleur et endommagement causé par la pression interne est donc mise en évidence par la Figure 179 : à basse pression, les transferts de chaleur ont le temps de s’effectuer avant que la charge ne soit assez élevée pour entraîner la ruine de la structure.

L’explication est la suivante : quelle que soit la pression, les transferts de chaleur s’effectuent de la même façon puisque le flux de chaleur reçu par le réservoir est le même pour tous les calculs, i.e. 100kW/m² et que les propriétés thermiques ne sont pas affectées par la pression interne. Ainsi, pour un même temps d’exposition, l’épaisseur décomposée sera similaire.

La transition vitreuse subie par la matrice et la décomposition thermique du matériau sont à l’origine de sa perte de tenue mécanique dans toutes les directions. Cette perte de tenue, qui arrive sur l’extérieur de la coque composite où la température est plus élevée, entraîne donc un report de la charge vers l’intérieur. C’est pourquoi l’endommagement des fibres a alors lieu du côté du liner et non du côté d’exposition au flux de chaleur, Figure 179.

Or, lorsque la pression du réservoir augmente, les contraintes internes sont plus élevées. Ainsi, le report de charge cause un éclatement plus rapide à pression interne plus élevée.

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