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Chapitre I État de l’art concernant les phénomènes non-linéaires et

I. 1.3.2.  Front d’onde thermique

Un exemple de front d’onde thermique dans le cas d’un réacteur adiabatique est proposé sur la Figure I.8.a. Les profils de température et de concentration simulés le long de ce réacteur adiabatique sont représentés en régime stationnaire (trait épais) et en régime dynamique (trait fin) suite à un échelon négatif de la température d’en-trée. Identiquement aux réponses inverses, en diminuant brusquement la température d’entrée adimensionnelle de 0,1, une onde thermique froide est localement générée à l’entrée du réacteur, conduisant à une diminution des vitesses de réaction à l’entrée du réacteur. Sur le profil dynamique de concentration Figure I.8.a, la concentration en réactif est plus élevée suite à la variation de la température d’entrée (trait fin) et une onde de concentration est créée. Lorsque l’onde de concentration atteint le point chaud du réacteur, à la cote 0,5 sur la Figure I.8.b, la température en chaque point du réacteur passe par un maximum au cours du temps. De proche en proche, un « front d’onde thermique » est créé et peut éventuellement se propager jusqu’à la sortie du réacteur. Le nouvel état stationnaire correspond à un état éteint à la tem-pérature adimensionnelle égale à 0,9.

Le mécanisme des « fronts d’onde thermique », ou « trains d’onde ther-mique » ou « travelling hot spots » est décrit par Rovinsky et Menzinger (1992 ; 1993). Ils ont introduit la notion de « Differential Flow Instability » (DIFI), illustré Figure I.9. Le principe de ce mécanisme réside dans l’existence d’un couple « activa-teur-inhibiteur » s’équilibrant en régime stationnaire et pouvant être déstabilisé dy-namiquement. L’activateur est une variable qui présente une rétroaction positive avec une tendance à être amplifiée, l’activateur est ici le champ de température dans le milieu réactionnel. En effet, la température joue sur la cinétique chimique, qui ensuite dégage la chaleur de la réaction et donc augmente la température du milieu,

etcetera. L’activateur est donc instable naturellement et un inhibiteur permet de

stabiliser le système. Dans le cas d’un réacteur catalytique hétérogène, l’appauvris-sement en réactif joue le rôle d’inhibiteur.

Figure I.8 – Comportement stationnaire (trait épais) et réponse dynamique (trait fin) suite à un échelon négatif de la température d’entrée du réacteur : a) Comparaison des profils axiaux de température et de concentration ; b) Profil axial de température (Menzinger et al., 2004).

En l’absence d’un flux différentiel (Figure I.9.a), l’inhibiteur compense l’effet de l’activateur et le régime stationnaire est stable. Dans le cas contraire, les flux différentiels de l’activateur et de l’inhibiteur sont en déphasage. Celui-ci est causé par la différence de vitesse de propagation entre l’onde de concentration, qui s’effec-tue à la vitesse du gaz, et l’onde de température, qui est fortement ralentie par l’inertie thermique du lit. Le système est alors localement déstabilisé. Les perturba-tions qui lui sont appliquées sont amplifiées et sont transportées vers l’aval du réac-teur. Cette amplification dynamique et le retour éventuel à un état stable non per-turbé sont les principales caractéristiques du mécanisme DIFI.

Yakhnin et Menzinger (2004) soulignent l’importance de la dispersion ther-mique axiale dans le mécanisme DIFI. Ils précisent que le système est sujet à des amplifications dynamiques seulement si la diffusivité thermique axiale de l’activateur est faible. Cette condition est généralement vérifiée dans les lits fixes car ces derniers présentent une forte inertie thermique. De plus, ces auteurs montrent par simulation qu’il est nécessaire d’avoir un rapport diamètre de réacteur sur diamètre des parti-cules catalytiques supérieur à 10 pour observer des fronts d’onde. En effet, la disper-sion thermique dépend de la taille des particules (voir paragraphe I.2.2.2.2). En di-minuant celles-ci, c’est-à-dire en augmentant le rapport diamètre de réacteur sur

diamètre des particules, la dispersion thermique diminue, ce qui favorise l’apparition des fronts d’onde. Dans le cas contraire, la dispersion thermique axiale joue le rôle de stabilisateur et immunise le réacteur contre la formation des fronts d’onde.

Figure I.9 – Illustration du rôle des flux différentiels dans la déstabilisation du sys-tème stationnaire (ligne horizontale) (Yakhnin et Menzinger, 2004).

L’étude des fronts d’onde thermique a principalement été effectuée numéri-quement. Les auteurs ont montré que ces fronts peuvent apparaître en fonction de la température (Eigenberger, 1972b ; Rhee et al., 1974 ; Mehta et al., 1981 ; Chen et Luss, 1989), du débit (Yakhnin et Menzinger, 2002) ou de la concentration en réactif (Van Doesburg et De Jong, 1976a, 1976b ; Jaree et Hudgins, et al., 2003). Parmi ces études numériques, Yakhnin et Menzinger (1999) se sont intéressés à l’influence de l’activité catalytique sur les réponses dynamiques. Ils démontrent que la variation de l’activité catalytique peut aussi déclencher des réponses inverses (aussi observées dans les travaux de Quina et Ferreira, 2000) et des fronts d’onde thermique.

Il y a très peu d’études expérimentales concernant les fronts d’onde thermique. Seuls les travaux de Puszynski et Hlaváček (1980 ; 1984) relatent l’existence de ce phénomène dans le cas de la réaction d’oxydation du monoxyde de carbone dans un réacteur refroidi aux parois. Le Figure I.10 présente les principaux résultats de leur étude. Le premier cas, représenté Figure I.10.a, traite de l’ignition du réacteur. En augmentant la température d’entrée de 110°C à 120°C, le point chaud apparaît à l’intérieur du réacteur, où la vitesse de la réaction est maximale. Puis la zone de réaction s’étend et le point chaud se positionne plus en amont du réacteur et gagne en amplitude. Le second cas (Figure I.10.b), présente l’extinction du réacteur. L’état

stationnaire initial correspond à la courbe 3. En diminuant la température d’entrée de 40°C à 30°C, des fronts d’onde thermique apparaissent dans le réacteur et se déplacent vers l’aval (courbes 4 à 8). Dans ce cas, les fronts s’atténuent dans le réacteur à la cote 0,3 et l’état stationnaire 9 est obtenu. Puszynski et Hlaváček (1984) expliquent que la différence de chemin emprunté lors de l’ignition et l’extinction du réacteur est causée par l’existence d’états stationnaires multiples dans le réacteur. L’onde thermique d’extinction correspond à un processus de transition entre les deux états stables.

Figure I.10 – Réponse thermique dynamique : a) Augmentation de la température d’entrée du réacteur de 110°C à 120°C ; b) Diminution de la température d’entrée du réacteur de 40°C à 30°C, issu de Puszynski et Hlaváček (1984).

En conclusion, les fronts d’onde thermique peuvent apparaître dans les réac-teurs à lit fixe lors de variation des conditions d’entrée. En particulier, les variations qui génèrent localement des excès de concentration en réactif, comme une diminution

de la température d’entrée ou une augmentation du débit, sont favorables à l’appa-rition des fronts d’onde.