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FRANCE-ALLEMAGNE : DE L’INTÉRÊT DE CONFRONTER LES PRATIQUES PROFESSIONNELLES

Dans le document Mener un projet international #24 (Page 47-50)

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Cela peut sembler une évidence, mais il faut redire que la confrontation des expériences, des points de vue, des choix dans la mise en œuvre de ces services dans les bibliothèques participantes a été extrêmement riche et a pu infléchir des pratiques. Les préoccupations d’inscrire la biblio- thèque dans un projet citoyen étaient partagées, mais les contextes cultu- rels connaissaient bien sûr des différences, et la conception du rôle des bibliothèques différait bien : les bibliothèques allemandes visitées met- taient davantage l’accent sur l’adaptation du service aux usagers, sur des groupes ciblés, au centre de leurs projets, avec une conception élargie du rôle de la bibliothèque, par exemple pour aider à l’intégration des « primo- arrivants », en proposant des ateliers de conversations, des rencontres « multiculturelles » autour de la lecture des journaux, etc. Yoann Bou- rion, de la bibliothèque municipale de Bordeaux a participé à l’échange franco-allemand et rend compte ainsi de la comparaison des pratiques 22 :

« Une conception plus large des missions des bibliothécaires… Les acti- vités sociales peuvent paraître surprenantes, à nous bibliothécaires fran- çais… Les modes de recrutement sont différents et certaines bibliothèques peuvent engager des personnes au profil “alphabétisation”. De plus,

21. <  http://www.bpi.fr/fr/professionnels/cooperation/cooperation_internationale/seminaires_ internationaux.html >.

22. Yoann Bourion, « La bibliothèque comme lieu de cohésion sociale : compte rendu du voyage d’étude en Allemagne ». [En ligne] < http://www.bpi.fr/fr/professionnels/cooperation/cohesion_ sociale/le_role_des_bibliotheques.html >.

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les bibliothèques allemandes, même de grandes villes, ont une culture “bénévoles” que nous n’avons pas en milieu urbain… Les bibliothèques cherchent des financements nouveaux. Les sociétés privées ne financent pas l’activité principale mais plutôt des opérations particulières, voire des réhabilitations de bâtiment. Notons que ce type de mécénat est courant en Allemagne, notamment depuis la réunification : des sociétés privées aident des services publics à rattraper le retard en ex-Allemagne de l’Est… et de nombreuses activités liées à l’intégration des populations immigrées sont “sponsorisées” ».

À ce stade, il est important de souligner l’intérêt, dans cet échange, de la comparaison / confrontation de pratiques dans des bibliothèques qui, tout en ayant des contextes, et des approches différents, n’étaient cependant pas très éloignées les unes des autres en terme de moyens. Yoann Bourion dit à ce sujet :« Les bibliothèques publiques allemandes ne diffèrent pas tant que ça des nôtres ; nous n’avons pas ressenti un “fossé” (cf. biblio- thèques scandinaves) ; la plupart d’entre elles connaissent des difficultés financières ou de rénovation de locaux. Bien que de manière générale l’approche gestionnaire de la bibliothèque soit plus libérale que chez nous (tarifs, mécénats, best-seller, etc.), nous pouvons dire que la satisfaction de l’usager, “du client” n’est jamais perdue de vue… »

LES RÉSULTATS DU PROJET

À la Bpi, ce projet franco-allemand a relancé la réflexion sur les services ciblés à mettre en place, et a sans nul doute joué un rôle dans la mise en place d’ateliers de conversation à l’espace autoformation, en français, puis en anglais et en espagnol. Le rôle des bibliothèques dans la cohésion sociale étant un axe prioritaire, un groupe de travail s’est mis en place, associant tous les services concernés – qui avaient participé au projet franco-allemand – et abouti à des propositions de nouveaux services à proposer ou à développer : on peut citer par exemple le partenariat avec France Terre d’asile, qui assure désormais une permanence à la Bpi pour aller au-devant des publics migrants. Ce groupe de travail Bpi est aussi allé, pour alimenter sa réflexion, visiter la bibliothèque de Rennes-métro- pole « Les Champs libres », qui participait au projet franco-allemand, et tout particulièrement l’espace « Vie du citoyen ». Et, lorsque les collègues

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allemands sont venus au printemps 2011, la Bpi a organisé un temps d’ate- lier pour partager avec eux les évolutions qu’avait favorisées la réflexion commune.

En 2010, il a été décidé de poursuivre la réflexion en centrant le voyage d’étude 2011 sur le même thème, avec la participation à un pré-séminaire du congrès de l’IFLA à Malmö “Building strong communities: unleashing the potential of public libraries to build community capacity, engagement and identity”, Bâtir des communautés citoyennes fortes : développer le potentiel des bibliothèques publiques à renforcer les capacités, l’enga- gement et l’identité citoyenne des communautés » 23. La Bpi a d’ailleurs

présenté lors de ce séminaire le workshop franco-allemand ; au-delà de la thématique présentée, c’est la volonté de travailler ces questions en confrontant les approches dans plusieurs pays qui a éveillé un intérêt particulier chez les participants. Le séminaire comprenait des visites de bibliothèques en Suède, qui ont été complétées pour le groupe français par une journée à Copenhague, centrée sur la visite de deux bibliothèques de quartiers, tout à la fois « centres d’apprentissage », « centres commu- nautaires », « espaces de temps et de dialogue »… Tout un programme ! 24

Les bibliothèques participant à ce deuxième voyage d’étude étaient les bibliothèques municipales de Brest et de Grenoble, et pour le départe- ment du Val d’Oise, la bibliothèque départementale et une bibliothèque représentant l’association « Cibles 95 », qui regroupe les bibliothèques municipales de ce département. L’objectif pour la Bpi, en associant sur un département à la fois l’échelon départemental et l’échelon municipal (ou intercommunal) était de permettre d’alimenter une réflexion collabo- rative sur un territoire… et l’objectif est atteint puisque la bibliothèque départementale du Val d’Oise (BDVO) a largement répercuté le contenu du séminaire dans des journées d’étude ou de formation 25 départementales.

23. La difficulté de traduction en français vient des approches différentes des termes « commu- nauté », dont découle aussi une perception différente du positionnement des bibliothèques. 24. <  http://www.bpi.fr/fr/professionnels/cooperation/cooperation_internationale/seminaires_

internationaux.html >.

25. Voir la présentation réalisée par la Bibliothèque départementale du Val d’Oise :

<  http://www.bpi.fr/fr/professionnels/cooperation/cooperation_internationale/seminaires_ internationaux.html >.

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D’autres suites ont été données à ce projet franco-allemand : la biblio- thèque de Hambourg avait en projet la création d’un espace d’autoforma- tion, et les deux collègues en charge de ce projet sont venus visiter les es- paces autoformation de la Bpi et de la Bibliothèque de la Cité des sciences et de l’industrie, et échanger avec leurs homologues parisiens pour ali- menter leurs réflexions. L’espace est désormais ouvert à Hambourg, et, en janvier 2012, ce sont les bibliothécaires de la Bpi qui, prévoyant désor- mais de restructurer l’espace dans le cadre de son projet d’établissement, seront allés voir la réalisation de leurs collègues de Hambourg.

Les deux groupes de réflexion se sont rejoints lors du voyage retour des collègues allemands, sur le territoire du Val d’Oise. La Bibliothèque d’étude et d’information (BEI), bibliothèque intercommunale, avait participé au premier échange et la Bpi souhaitait donc la faire visiter à nos collègues allemands. Mais au-delà de cette visite, il a semblé pertinent d’organiser une séance de travail regroupant, autour de nos collègues allemands, la BEI mais aussi des participants au deuxième échange en Scandinavie, la BDVO et les bibliothèques municipales du Val d’Oise : le projet d’annexe de la bibliothèque municipale de Cergy-Pontoise, intégrée dans un équi- pement polyvalent à dimension sociale, a été présenté et un atelier a été organisé pour échanger des points de vue. De cet atelier, on retiendra par exemple une discussion sur les tarifs et la gratuité. Celle-ci était forte- ment défendue par les collègues français, alors que ce n’était pas un axe de réflexion pour les collègues allemands ; les bibliothèques allemandes pratiquent toutes les inscriptions payantes, voire la tarification de certains services… Comparaison intéressante, qui nous a même amenés à poser la question du faible taux d’inscription dans les bibliothèques allemandes visitées, alors même qu’elles connaissent visiblement une bonne fréquen- tation en termes de visites. La question de la tarification parfois élevée des services n’est-elle pas en cause ?

CONSTRUIRE DES OBJECTIFS POUR MAINTENIR

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