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4.2 Loi d’usure

4.2.3 Formulation générale

Formulation de la loi d’oxydo-abrasion

À partir des observations faites, une approche combinant la loi de Archard locale [131] et les cinétiques d’oxydation à l’interface est proposée.

Figure 4.8 – Illustration des grandeurs macroscopiques impliquées dans l’usure du HS25 On considère le cas simple d’une pièce A (HS25) de surface plane plaquée contre une pièce B (alumine) également plane et parallèle à la surface de la pièce A (figure 4.8). L’alumine est en mouvement par rapport à la pièce de HS25. L’expression de Archard est généralisée en considérant un incrément de temps dt, pendant lequel la distance glissée est égale à dL = ∆vdt (où ∆v est la vitesse de glissement) et l’incrément d’usure à dV . Si l’on divise chaque membre de la formulation de Archard par l’aire apparente de contact, Anom, alors il apparaît l’incrément de profondeur d’usure d∆h = dV /Anomet la pression apparente de contact pnom= P/Anom. On a alors :

d∆h = dV Anom = k HHS25pnomdL (4.15) Et donc, ∆h = Z M k HHS25pnom∆vdt (4.16)

Avec HHS25 la dureté de l’alliage. La relation (4.16) est une formulation locale de Archard, valable en tout point M de l’interface, à l’échelle d’un élément de contact (c’est-à-dire grand devant la taille des micro-contacts réels). Dans ces travaux, la profondeur d’usure ∆h, qui dépend dans la formulation (4.16) de l’incrément de temps, est liée à ξ. Un moyen de d’unifier ces deux grandeurs est de considérer que le coefficient d’usure k est en réalité dépendant de l’état d’oxydation de la surface : plus l’oxydation est importante et plus le rendement d’usure augmente par unité de longueur. On pose alors :

Où β est un coefficient de proportionnalité (mm−1). On a donc : ∆h = Z M βξ HHS25pnom∆vdt (4.18)

Si l’on remonte de nouveau à une équation globale de la formulation de Archard on obtient :

d∆h = βξ HHS25

P

AnomdL (4.19)

Et en sachant que dV = Anomd∆h, on en déduit :

V = βξ

HHS25P L (4.20)

En combinant l’équation (4.20) avec les équations (4.1) et (4.14) on obtient :

Vss= Kox0f exp −Ea 2RT  δ0N P (4.21)

Avec Kox0 un coefficient de proportionnalité (mm2/N/s0,5) tel que :

Kox0 = βp kp0

HHS25 (4.22)

L’équation (4.21) vérifie toutes les tendances observées de la figure 4.6, excepté pour la varia-tion en foncvaria-tion de l’amplitude qui, dans cette formulavaria-tion, est uniquement liée au processus d’abrasion. Il est pourtant supposé qu’une partie de l’effet de l’amplitude est liée à l’aspect abrasif du mécanisme d’endommagement et que l’autre est liée à des considérations d’oxy-dation. Pour le moment, l’équation (4.21) ne fait pas intervenir l’amplitude de glissement au carré. Plusieurs hypothèses sont donc envisagées.

Hypothèses sur l’effet de l’amplitude de glissement Hypothèse 1

Supposons, comme Uhlig [125], que le processus de croissance de la couche d’oxyde est dépen-dant non pas de la fréquence de sollicitation comme cela est supposé plus haut mais plutôt de la vitesse moyenne de sollicitation. On aurait ainsi une dépendance de la fréquence et de l’amplitude de glissement avec le temps tel que décrit dans l’équation suivante :

t = 1

0f (4.23)

En déroulant les calculs, c’est la racine de l’amplitude de glissement qui est impliquée et non pas le carré de cette dernière. De plus, la figure 4.1 montre bien une absence de corrélation entre l’action de la fréquence et celle de l’amplitude (variation inverse du volume d’usure alors que la vitesse augmente dans les deux cas). Ainsi, l’effet vitesse tel que considéré par le modèle de Uhlig est ici contredit par nos expérimentations.

Hypothèse 2

l’amplitude augmente à fréquence fixée. Or, la figure 4.9 montre deux comportements dif-férents selon que la fréquence ou l’amplitude varie, ce qui rend caduque, du moins pour les faibles vitesses de sollicitation, l’hypothèse des températures flashs accélérant l’usure.

Figure 4.9 – Variation de l’usure lorsque la vitesse moyenne de sollicitation v = 4f δ0

varie (P = 50N , N = 200000, T = 100˚C) Hypothèse 3

La puissance au carré de l’amplitude de glissement vis-à-vis de la cinétique d’usure peut être associée au comportement rhéologique du lit de débris. Ces derniers seraient mieux éjectés de l’interface lorsque l’amplitude augmente (chapitre 3, paragraphe 3.2.3). Certains auteurs [28] affirment que la dépendance au carré de l’ouverture de cycle est liée à une meilleure éjection des débris d’usure qui induit une production accrue de ces derniers. Pourtant, d’autres auteurs trouvent une simple dépendance linéaire avec l’ouverture de cycle, telle que décrite par Archard. Par exemple, Merhej [113] montre pour un contact acier/acier en configuration sphère/plan que la variation de l’amplitude de glissement suit la loi de Archard. Il est donc difficile de différencier le débit d’éjection dans notre cas et dans le cas de Merhej. De plus, la formation pour des grandes amplitudes d’un début de troisième corps lubrifiant contredit cette hypothèse d’une meilleure éjection (figure 3.11.a). Pour finir, Marc [132] a également trouvé une dépendance au carré entre le volume d’usure et l’amplitude de glissement. Or, ces travaux portent sur un contact acier/acier en solution, c’est-à-dire dans un environnement avec très peu d’effet du troisième corps et un effet marqué de la corrosion. Le même contact frotté à sec présente une évolution linéaire de l’usure avec l’amplitude de glissement. Ainsi, il semble que l’amplitude ne joue pas sur une rapidité d’éjection du troisième corps mais plutôt sur des effets d’oxydation.

Hypothèse 4

Finalement, plutôt que jouer sur l’éjection des débris, l’amplitude de glissement pourrait favoriser l’apport d’oxygène dans l’interface, et donc permettre une croissance accrue de la couche d’oxyde. Cette hypothèse a été émise dans l’article associé à ces travaux de thèse [133]. On peut par exemple imaginer que l’augmentation de l’amplitude de va-et-vient de l’alumine favorise l’apport d’oxygène, notamment au travers des processus de fissuration de l’interface ou d’adsorption de l’oxygène dans l’alumine. Or, puisque kp0 dépend de la pression partielle en oxygène de manière empirique, on peut relier kp0 à δ0 :

kp0= β0δ0n (4.24)

Où β0 (s−1) et n sont des constantes. L’équation (4.14) devient alors :

ξ = s β0δn 0 2f exp −Ea 2RT  (4.25)

En posant n = 2 on retrouve bien une dépendance finale de l’amplitude de glissement au carré dans l’expression du volume d’usure.

Formulation

Bien qu’il soit plus difficile de démontrer physiquement la dépendance au carré de l’usure avec l’amplitude, nous nous devons d’ajouter à l’équation (4.21) un facteur δ0 en plus de sorte que : Vss= β00Kox0f exp −Ea 2RT  δ02N P (4.26)

Afin d’assurer l’homogénéité des unités, il nous faut poser β00 en mm−1 :

Kox= β00Kox0 (4.27)

Avec Kox en mm/s0,5/N. On obtient donc :

Vss= Koxf exp −Ea 2RT  δ02N P (4.28)

On obtient en utilisant l’équation (4.8) la forme finale de l’équation d’usure par oxydo-abrasion : V = Kox f exp −Ea 2RT  δ02N P + VΦ (4.29)

Où Kox est un paramètre ajustable dépendant du tribosystème (mm/s0,5/N), f est la fré-quence de sollicitation (Hz), Ea est l’énergie d’activation (J/mol), R est la constante des gaz parfaits (J/mol/K), T est la température imposée au système (K), δ0 est l’amplitude de glissement (mm), N est le nombre de cycles et finalement P est la force normale appliquée (N).

Paramétrage des inconnues

Deux inconnues sont à paramétrer dans la loi présentée dans l’équation (4.29) : Ea et Kox. À ce stade, VΦ est déjà connu et le volume d’usure Vss est considéré. La calibration de ces deux paramètres se fait grâce à la courbe "Vss− T ", présentant le volume d’usure en fonction de la température (pour 25˚C ≤ T ≤ 150˚C dans les conditions tribologiques de référence). La figure 4.10 présente les résultats, et il suffit de trois points expérimentaux pour trouver une solution unique à l’équation de la courbe y = a exp(−b/x). Les variables a et b sont ainsi ajustées de sorte que l’on trouve que a = 9, 813 et b = 2211. Par identification, on a :

a = Kox fδ20N P b = −Ea 2R (4.30) Soit, Kox= af δ2 0N P Ea= −2bR (4.31)

Ainsi, le coefficient d’usure Kox est estimé à 1,73.10−2 mm/s0,5/N et l’énergie d’activation Eaà 3,68.104 J/mol. Comme cela a été évoqué dans le chapitre 1, pour certains auteurs [77,

78], l’énergie d’activation en tribo-oxydation est très inférieure à celle obtenue en oxydation statique à cause d’une plus grande réactivité de l’interface frottée. Cela est confirmé ici où l’énergie est très inférieure (37 kJ/mol) à ce qui est observé en statique (aux alentours des 200 kJ/mol [67]).

Figure 4.10 – Calibration des inconnues de l’équation (4.29), Ea et Kox, sur la courbe représentant l’usure en fonction de la température dans le domaine I (δ0 = ±20µm, P =

50N , N = 200000, f = 50Hz)

4.2.4 Application au domaine I