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6.2 Transformation structurale de l’interface

6.2.3 Analyse chimique d’extrême surface

Les profils EDX présentés précédemment rendent compte d’une hétérogénéité chimique de l’interface. Ces données sont couplées avec des analyses XPS, permettant de connaître la composition chimique de l’extrême surface. Ces analyses sont réalisées sur plusieurs zones, explicitées dans la suite. Premièrement, des spectres de survol sont réalisés afin de connaître toutes les espèces chimiques en présence. Puis, des spectres haute résolution sont réalisés pour les éléments les plus significatifs permettant ainsi de connaître l’environnement chimique des espèces identifiées.

Spectres XPS de survol

Des spectres de survol sont réalisés sur quatre zones distinctes (figure 6.17). La zone 1 corres-pond à une zone hors trace d’usure, où l’échantillon a uniquement subi un cyclage thermique (figure 6.16.a). Une seconde zone se situant dans la trace d’usure générée après 5 000 cycles de fretting a été analysée. À 5 000 cycles, la glaze layer n’est pas encore formée (image 6.15.a.1), puisque N < NGL. Les deux dernières zones d’analyse correspondent à une trace d’usure générée après 200 000 cycles de fretting, lorsque N ≥ NGL. La zone 3 correspond à la couche de glaze layer efficace (CoRL) alors que la zone 4 correspond à une zone où la glaze layer n’est pas présente, révélant ainsi la sous-structure (MOL). Les deux zones sont notées sur la figure 6.15.b.1.

Figure 6.17 – Spectres XPS de survol réalisés dans les traces d’usure pour différents nombres de cycles (5 000 et 200 000) et sans sollicitation de fretting. Les pics non-indexés (croix grises) correspondent à des impuretés et représentent, des énergies faibles aux

éner-gies élevées : Ar 2p, Ca 2p et Ca 2s

Les spectres XPS de survol révèlent que quasiment tous les éléments principaux de l’alliage de cobalt sont détectés (Co, Cr, W, Mn) avec cependant des intensités différentes. À l’inverse, le nickel n’est détecté que très faiblement (Ni 2p3/2) puisqu’il possède de très mauvaises propriétés à l’oxydation [67]. Les pics de l’oxygène O 1s et O 2s sont aussi présents sur tous les spectres, ainsi que celui de l’azote N 1s, qui représente en réalité 2% de la semi-quantification globale. Certains auteurs [35,53] ont montré le rôle important de l’azote dans la formation de structures transformées tribologiquement sur des alliages de titanes. Ici, cet élément chimique ne semble pas présenter de rôle particulier puisque le processus de formation de la glaze layer est principalement contrôlé par l’oxydation de l’interface. Cet aspect est mis en évidence dans le chapitre précédent (chapitre 5). Par ailleurs, il est intéressant de noter que même en extrême surface, aucun pic d’aluminium n’est détecté, montrant encore une fois l’inertie chimique de l’alumine dans les processus d’usure impliqués.

Spectres XPS de haute résolution

Les éléments les plus pertinents ont été analysés de manière plus approfondie en réalisant des spectres haute résolution. La figure 6.18 présente alors les spectres des orbitales 2p3/2du cobalt, du chrome, du manganèse et du nickel. Les lignes en pointillées représentent l’énergie de liaison correspondant à la présence de l’élément sous sa forme métallique. Lorsque les pics se décalent vers des valeurs plus élevées d’énergie de liaison, cela signifie que cet élément est présent à des degrès d’oxydation supérieurs.

Premièrement, la figure 6.18.d met en évidence l’absence de nickel dans les quatre zones ana-lysées, confirmant la faible interaction de cet élément dans le processus d’usure. Concernant le cobalt, le chrome et le manganèse, deux environnements chimiques sont mis en évidence. Le premier correspond à l’état d’oxydation zéro de l’espèce chimique et le second correspond à la

Figure 6.18 – Spectres haute résolution du : a) cobalt, b) chrome, c) manganèse et d) nickel pour les quatre zones d’intérêt

forme oxydée de l’espèce. De plus, l’intensité des pics est différente suivant la zone analysée, permettant d’observer des concentrations plus ou moins grandes des espèces. Par exemple, les graphiques 6.18.b et 6.18.c montrent qu’il n’y a presque pas de chrome et de manganèse dans la trace d’usure générée après 200 000 cycles de fretting comparé au cobalt. En revanche, on retrouve une quantité importante de ces espèces hors trace et à N = 5000 (N < NGL). Le cobalt, dont les spectres sont présentés dans le graphique 6.18.a, semble être présent dans les quatre zones.

En déconvoluant les spectres, il est également possible de différencier le pourcentage d’élé-ments métalliques oxydés par rapport à l’état non oxydé. Les résultats de cette déconvolution sont présentés dans la figure 6.19, uniquement pour le cobalt et le chrome, les deux éléments principaux de l’alliage. Il est à noter que cette semi-quantification est normalisée telle que la somme des éléments chrome et cobalt, oxydés ou non, fasse cent.

D’après les quantifications réalisées, tout le chrome présent sur les premiers nanomètres de l’interface après 5 000 cycles de fretting est oxydé (57% de chrome oxydé). Hors trace, lorsque l’interface subit uniquement de l’oxydation, une grande proportion du chrome est oxydé (66%), bien que l’on retrouve aussi quelques traces de chrome sous forme métallique (4%). Hors de la trace, tout le cobalt présent est également oxydé alors que ce dernier est toujours un peu présent sous forme métallique après 5 000 cycles de fretting (3%).

Figure 6.19 – Semi-quantification (% atomique) du cobalt et du chrome en fonction de leur état d’oxydation dans les quatre zones analysées

Après 200 000 cycles de fretting, l’interface présente plus de cobalt. Dans la glaze layer efficace (CoRL) et dans la sous-couche (MOL), tout le cobalt présent est oxydé (79 et 58% atomique respectivement). Ceci est alors cohérent avec les résultats MET présentés dans les figures 6.3.a et 6.10, montrant une oxydation progressive de cet élément. De même, l’absence de cobalt non oxydé dans la couche frittée CoRL confirme que l’action mécanique de broyage des particules entraîne également une oxydation complète de l’interface avant que celle ci ne soit frittée.

Figure 6.20 – Évolution du ratio Co/Cr calculé d’après les spectres de haute résolution réalisés dans les quatre zones d’intérêt (ratios issus de % atomique)

L’analyse semi-quantitative, présentée dans la figure 6.20, est extraite des spectres de haute résolution. Le ratio Co/Cr confirme qu’il existe un déficit en chrome dans la glaze layer efficace (CoRL) alors qu’un déficit en cobalt est observé en extrême surface de la sous-couche (MOL), à 5 000 cycles, à 200 000 cycles, et hors de la trace. À 5 000 cycles, le ratio Co/Cr est égal à 0,77, ce qui est légèrement plus élevé que le ratio obtenu hors trace (0,43). Le déficit

en cobalt est toujours présent à 200 000 cycles dans la MOL, mais est moins prononcé que pour un nombre de cycles inférieur.

6.2.4 Mécanisme de formation de la glaze layer