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3. Un modèle global des différentes phases d’émission des sursauts gamma 57

4.2. Contrainte de compacité – un facteur de Lorentz minimum revu à la baisse

4.2.1. Formulation générale de τ γγ

4.2.3. Une nouvelle approche plus réaliste. . . 89 4.2.4. Des contraintes sur Γmin revues à la baisse . . . 90

4.3. Signatures observationnelles de l’annihilation γγ. . . . 91

4.3.1. Rayonnement des paires produites et éventuelles cascades . . . 91 4.3.2. Forme spectrale de la coupure γγ . . . 93 4.3.3. Une composante de haute énergie retardée à l’allumage . . . 94 4.3.4. Suppression des courtes échelles de temps à haute énergie . . . 95

4.4. Conclusions et perspectives . . . . 97

4.4.1. Synthèse des principaux résultats . . . 97 4.4.2. Perspectives. . . 97

4.5. Pub. I : Do Fermi LAT obs. imply very large Lorentz factors in GRB outflows ? . . . . 98

4.1. Contexte

On connait peu de choses, de manière certaine, sur l’éjecta des sursauts gamma. Une contrainte qui semble cependant inévitable, imposée par les observations, est que l’écoulement à l’origine des sursauts gamma soit en mouvement ultra-relativiste (voir §1.5.3). Dans le cas contraire, les densités de photons – contraintes par la variabilité de la courbe de lumière gamma qui limite la taille de la source et par les luminosités observées qui sont colossales – seraient tellement élevées que la source deviendrait opaque à son propre rayonnement gamma. Il est ainsi possible d’estimer un facteur de Lorentz minimum Γmin pour chaque sursaut, tel que le rayonnement observé ait effectivement pu être produit dans un régime de transparence.

Avant le lancement du satellite Fermi, les observations dans le domaine gamma s’étendaient typique-ment jusqu’à 1−10 MeV. L’absence de coupure spectrale ou d’atténuation qui auraient pu s’interpréter comme la signature de l’annihilation γγ imposait alors un facteur de Lorentz minimum de l’ordre de la centaine, Γmin&100 (Lithwick & Sari 2001). Le lancement de Fermi en 2008, avec son instrument LAT, a permis d’ouvrir une nouvelle fenêtre spectrale à haute énergie avec un record actuel d’énergie de photon détecté (pendant la phase prompte) à environ 30.5 GeV pour GRB 090510 – soit 57 GeV dans le référentiel de la source, après correction du redshift (Ackermann et al. 2010). Malgré cette extension des observations à haute énergie, aucune coupure spectrale franche n’a pu être mis en évi-dence dans les sursauts détectés par le LAT, sauf pour GRB 090926A (Ackermann et al. 2011). Ceci renforce nettement la contrainte sur Γmin. Pour les sursauts les plus brillants, les limites annoncées par la collaboration Fermi atteignent Γmin&1000 – e.g. Γmin≃ 887 pour GRB 080916C (Abdo et al. 2009c), Γmin ≃ 1200 pour GRB 090510 (Ackermann et al. 2010). Ces valeurs induisent des contraintes extrêmes sur la physique du moteur central, qui doit être capable d’injecter l’écoulement initial en limitant fortement le degré de pollution baryonique : Γmin ≃ 100 représentait déjà un défi difficile à relever (voir la section 2.3). Ces facteurs de Lorentz très élevés ont également un impact sur d’autres aspects de la physique des sursauts qui dépendent fortement du facteur de Lorentz (e.g. le rayon des différentes phases d’émission : photosphère, chocs internes, rayon de décélération, voir chapitre2).

Ces limites extrêmes sur le facteur de Lorentz des sursauts sont cependant obtenues avec un modèle très simplifié, à une zone, où les grandeurs physiques sont moyennées temporellement et spatialement et où le rayonnement est supposé isotrope dans le référentiel comobile. Nous avons donc reconsidéré la contrainte de compacité sur Γmin dans le cadre d’un modèle détaillé où les dépendances spatio-temporelles sont prises en comptes, ainsi qu’une géométrie réaliste du champ de photons. On verra dans ce chapitre comment cette modélisation plus réaliste permet de diviser les limites sur Γmin par au moins un facteur 3, ce qui a pour conséquence directe d’alléger les contraintes sur la physique du moteur central et de rester cohérent avec le scénario global proposé pour les différentes phases d’émission. Nous verrons également que le modèle détaillé que nous avons développé permet d’étudier d’autres signatures de l’annihilation γγ, potentiellement observées/observables dans les sursauts Fermi.

4.2. Contrainte de compacité – un facteur de Lorentz minimum revu à la

baisse

Trois types d’opacité. Pour évaluer le facteur de Lorentz minimum, imposé par la contrainte de transparence, il faut prendre en compte trois sources d’opacité :

– τe : l’épaisseur optique du milieu émetteur vis à vis de l’opacité Thomson des électrons ambiants associés aux protons de l’écoulement. C’est cette opacité qui est prise en compte dans le calcul du rayon photosphérique (voir §2.4.1).

– τγγ : l’épaisseur optique due à l’opacité γγ vue par un photon de haute énergie lors de sa propa-gation dans le bain de photons ambiants.

4.2 Contrainte de compacité – un facteur de Lorentz minimum revu à la baisse 87

Le rayonnement d’un sursaut doit être transparent (i.e. τ . 1) vis à vis de ces trois sources d’opacité. Il est donc nécessaire d’estimer un facteur de Lorentz minimum de transparence pour chacune d’entre elles. Notons que τeet τ±affectent de la même façon tous les photons, tandis que τγγdépend fortement de l’énergie du photon considéré et n’affecte en pratique que la partie haute énergie du spectre. Vis à vis de l’annihilation γγ le facteur de Lorentz minimum de transparence est donc obtenu en imposant que l’opacité γγ vue par le photon d’énergie maximale Emax détecté dans un sursaut soit inférieur à l’unité, τγγ(Emax) < 1.

En pratique pour les sursauts détectés par Fermi à haute énergie (typiquement au-dessus de 100 MeV), c’est la contrainte issue de τγγ qui est la plus stricte – il s’agit également des sursauts pour lesquels les valeurs de Γmin sont les plus élevées. Dans ce manuscrit, je me concentrerai donc sur cette contrainte pour laquelle j’ai développé une méthode originale de calcul réaliste (le lecteur pourra se reporter à l’article en fin de chapitre pour une dérivation des contraintes issues des deux autres types d’opacité).

4.2.1. Formulation générale de τγγ

L’épaisseur optique τγγ vue par un photon de haute énergie EHE se propageant dans un bain de photon est donnée par :

τγγ(EHE) =Zdℓ

Z

dΩ

Z

Ec(EHE,ψ)dE n(E)σγγ(EHE, E, ψ) (1 − cos ψ) . (4.1)

Toutes les quantités physiques sont mesurées dans un même référentiel : E est l’énergie du photon ambiant qui interagit avec le photon de haute énergie, ψ est l’angle d’interaction entre les deux photons,

n(E) est la distribution du bain de photons ambiants [ph · cm−3· keV−1· sr−1] qui dépend a priori du temps, et de la position, et de la direction, Ecest l’énergie de seuil au-dessus de laquelle l’annihilation

γγ peut avoir lieu1

Ec(EHE, ψ) = 2(mec2)2

EHE(1 − cos ψ). (4.2)

La section efficace d’annihilation σγγ est donnée par

σγγ(y) = σTg(y) , (4.3) où g(y) = 3 16(1 − y2)(3 − y4) ln1 + y 1 − y − 2y(2 − y 2), (4.4)

et où y est défini par

y = r 1 − 2(mec2)2 EHEE(1−cos ψ) =q1 −Ec(EHE,ψ) E pour E ≥ Ec(EHE, ψ) 0 sinon . (4.5)

Notons que la section efficace d’annihilation σγγ est très piquée au voisinage du seuil en énergie

E ≃ 2Ec. De plus, dans le référentiel source, l’angle typique d’interaction vaut ψ ≃ 1/Γ. Les photons

de haute énergie s’annihilent donc préférentiellement avec des photons d’énergie

E ≃ 2 2Γmec

22

EHE

. (4.6)

Pour un facteur de Lorentz Γ = 100 et un photon à haute énergie EHE = 1 GeV, on obtient E ≃ 20 MeV.

1. Pour que deux photons puissent s’annihiler, il faut que leur énergie dans le référentiel du centre de masse de la paire créée soit supérieure à l’énergie de masse mec2 des deux leptons.

L’expression4.1se compose d’une intégrale triple : l’intégation dℓ est faite selon le chemin du photon de haute énergie depuis son émission jusqu’à la réception par l’observateur, l’intégration dΩ est faite sur la distribution angulaire du champ de photons ambiants, tandis que l’intégration dE est faite sur sa distribution en énergie. La formule4.1est générale et peut être appliquée à une situation quelconque.